Analyse et perspectives
Ce chapitre expose l’ensemble des résultats que j’ai obtenu pendant l’étude de la compression d’impulsions avec la technique de la fibre creuse. La problématique principale de mon travail fut l’optimisation de la compression d’impulsions multi-mJ. Durant ma première année de thèse, le laser de la Salle Noire fournissait des impulsions de 25 f s et 2.1 mJ , son énergie fut ensuite augmentée à 3 mJ durant ma deuxième année de thèse. J’ai ainsi participé à l’optimisation de la compression dans ces deux conditions expérimentales différentes. Face à la multitude de paramètres expérimentaux disponibles, l’étude théorique de la propagation fut nécessaire pour améliorer notre compréhension et expliquer les résultats expérimentaux. Cela a motivé le développement du code de simulation présenté précédemment (section 2.4). Le schéma de l’expérience est dessiné sur la Fig. 3.1. Les impulsions de 25 f s sont focalisées à l’entrée d’une fibre creuse située à l’intérieur d’un tube rempli d’un gaz rare (Néon ou Hélium), dont la pression peut être finement ajustée. La fibre fait de 1m de long et a un diamètre de 250µm. En sortie, le faisceau est collimaté et réfléchi sur des miroirs chirpés large bande (voir paragraphe 2.5) qui remettent en phase les nouvelles fréquences, la translation de deux wedges (coins de verre) permet d’ajuster finement la remise en phase pour obtenir une impulsion opti- malement comprimée. Les impulsions sont caractérisées dans un FROG (décrit précédemment au paragraphe 2.6) et leur CEP est mesurée dans un montage f-2f [22]. La polarisation du laser peut être modifiée (de linéaire à circulaire) en utilisant une lame quart d’onde (λ/4) avant la fibre. Dans ce cas, une lame quart d’onde large bande est utilisée après la fibre retourner en polarisation linéaire. Malgré l’utilisation de deux lames quart d’onde, l’état de polarisation du laser est suffisamment bon (dépolarisation de quelques pourcents) pour ensuite effectuer des expériences de génération d’harmoniques d’ordre élevé (HHG).Nous avons tout d’abord constaté expérimentalement une nette amélioration de la com- pression en propageant les impulsions en polarisation circulaire (CP) plutôt qu’en polarisation linéaire (LP) [32] – la polarisation naturelle d’un laser. La comparaison théorique et expéri- mentale des résultats en CP et en LP constitue la première section de ce chapitre (3.1). Dans la seconde partie (3.2), j’explique la dynamique de propagation dans la fibre creuse à partir de résultats de simulation puis je fournis les conditions optimales de compression pour différentes énergies multi-mJ.
Influence de l’état de polarisation du laser
Pour comprimer efficacement une impulsion multi-mJ, on cherche à éviter une ionisationtrop forte du gaz tout en conservant un élargissement spectral suffisant. La pression de gaz est le premier paramètre expérimental qu’on modifie pour obtenir un spectre assez large, l’indice non linéaire du gaz n2 augmentant linéairement avec la pression. En présence d’ionisation, une pression plus forte augmente aussi la densité électronique du plasma. A faible intensité, l’am- plitude des effets non-linéaires varie linéairement avec la pression. A haute intensité, les effets spatiaux doivent être pris en compte et le comportement n’est plus linéaire avec la pression. On peut alors retourner dans un régime linéaire en pression en changeant un autre paramètre. Nous étudions ici l’impact de la polarisation du laser sur la compression. Nous allons ainsi effectuer une comparaison expérimentale et théorique de la propagation d’impulsions de 2.1 mJ polari-Le passage en polarisation circulaire diminue l’indice n2 de 33% et réduit le taux d’ionisation. La Fig. 3.2 montre le taux d’ionisation du néon en LP et CP sur la gamme d’intensité 1014 − 1016 W.cm−2. En particulier, le taux d’ionisation est réduit de deux ordres de grandeur pour une intensité de 5 × 1014 W.cm−2, ce qui correspond à l’intensité en entrée de la fibre.La Fig. 3.3 montre les spectres expérimentaux et théoriques obtenus après propagation dans la fibre creuse à différentes pression de gaz en LP et CP. Premièrement, on observe que l’élargissement spectral augmente avec la pression de manière linéaire : en CP on a 220 nm à mi-hauteur avec une pression de 1 bar et 300 nm à 1.4 bar. La pression étant un paramètre facilement ajustable, cela montre la souplesse expérimentale de la compression dans une fibre creuse. Deuxièmement, on obtient le même élargissement spectral pour les deux polarisations en utilisant une pression supérieure en polarisation circulaire (de 200 mbar en expérience et de 400 mbar en théorie). Ainsi il suffit d’augmenter légèrement la pression de gaz pour compenser la diminution de l’effet Kerr et obtenir des élargissement spectraux comparables.