Importance de la prise en compte du risque dans différents secteurs
L’usage du calcul économique devrait se développer et se renforcer, notamment dans des domaines où il est encore peu utilisé. Il peut en effet apporter des éclairages pertinents sur des questions aussi délicates que l’effet de serre, les déchets nucléaires, la santé et les politiques hospitalières, les applications de la biotechnologie, l’exploration spatiale, la défense nationale1, la recherche2, etc. Autant de sujets qui constituent de nouveaux défis lancés à l’analyse coûts-bénéfices. On développera ici les enjeux de ces calculs dans différents secteurs : le transport, où ces approches sont aujourd’hui largement mises en œuvre ; la santé et l’agriculture, où elles commencent à se mettre en place ; enfin, les secteurs de l’énergie et du développement durable, dans lesquels les questions d’investissement à long terme ont pris une acuité nouvelle avec la lutte contre le réchauffement climatique et le développement des énergies alternatives. La décision publique reste prépondérante dans le choix de réaliser les infrastructures de transport puis dans le rythme de leur réalisation, même si la part prise par le secteur privé dans les diverses phases des projets augmente et se diversifie, en particulier avec le développement des partenariats public- privé (PPP).L’importance de la décision publique s’explique largement : les projets de transport se caractérisent par la forte proportion des coûts d’investissement dans le bilan total, par des montants élevés (de la centaine de millions d’euros à quelques milliards d’euros) et par la diversité des enjeux. Leur conduite suppose de larges modalités de concertation et de discussion de la décision publique. De nombreux effets sont à prendre en compte dans la décision.
Les projets de la défense sont marqués par plusieurs spécificités : la R & D est à fort risque et la fabrication d’unité s’apparente plus au prototypage qu’à une production industrielle ; le matériel doit être maintenu en condition opérationnelle avec des aléas importants sur les coûts ; enfin l’horizon temporel des investissements à considérer dans les calculs est assez éloigné : il peut aller de 40 à 100 ans suivant les projets. Des arbitrages particuliers peuvent par ailleurs intervenir dans ce secteur entre la poursuite de la maintenance ou l’achat de nouveau matériel, ou encore entre différentes solutions parmi lesquelles le partenariat avec le secteur privé peut être envisagé.(2) La recherche, qui produit l’un des rares biens publics purs que décrit la théorie économique, mobilise des sommes importantes dans une grande majorité des secteurs de l’économie et de la société : médecine, agriculture, énergie, etc. Les sources de croissance les plus prometteuses ne se situent plus tant dans le domaine des investissements strictement matériels que dans la production de services ou de biens à forte valeur ajoutée pour laquelle le capital intangible, au premier rang duquel figure la recherche, est primordial. L’évaluation socioéconomique des programmes de recherche se heurte à des problèmes redoutables notamment en raison des incertitudes liées à la recherche elle-même et à la valorisation des découvertes. L’action publique est toutefois puissamment structurante dans ce secteur et le calcul économique doit y être appliqué.
La construction des infrastructures et le fonctionnement des services de transport génèrent par ailleurs pour la collectivité des externalités, négatives et positives, dont certaines peuvent se manifester à très long terme. Par exemple, les grands réseaux de transport contribuent à structurer le territoire et de ce fait influent sur la répartition spatiale des activités, l’aménagement du territoire, la planification urbaine, la configuration des systèmes productifs. Les effets induits par ces infrastructures sont également caractérisés par des cycles longs, qui peuvent ne commencer à se manifester que vers la fin de la période couverte par l’évaluation, leurs effets contracycliques sur l’économie peuvent être recherchés par les pouvoirs publics, etc. Il faut enfin considérer parmi ces différents impacts les effets externes négatifs environnementaux qui ont pris une importance grandissante ces dernières années.Le calcul économique est appliqué avec succès depuis longtemps dans l’évaluation des projets de transport qui lui ont fourni dès les origines un terrain d’application particulièrement fécond.Les objectifs suivis par les évaluations sont multiples : ils dépendent en partie de la nature des évaluations et de ceux à qui elles sont destinées. L’État, les collectivités territoriales, les gestionnaires de réseau de transport, les autorités organisatrices de transport, les opérateurs privés et publics prennent des décisions assez variées : classer plusieurs projets ou variantes, autoriser ou refuser la réalisation d’un projet, établir la part à prendre à sa charge dans le financement d’un projet, répartir les risques entre les acteurs concernés, caler les conditions contractuelles de fourniture d’un service de transport, proposer ou réguler les tarifs, etc.