Implications des caractères phénologiques et biologiques des fleurs sur la taxonomie des baobabs malgaches

Description générale des baobabs

Caractères phénologiques des principaux groupes : La période de feuillaison pour toutes les espèce commence dès les premières pluies et se termine pendant la saison sèche. Selon Razanameharizaka (2009), les espèces peuvent être groupées en trois catégories suivant les périodes de la floraison, la fructification et la maturité de fruits : le premier groupe comprend A. rubrostipa et A. madagascariensis : leur floraison commence entre le début du mois de février et la fin du mois d’avril et la maturité des fruits se situe à partir du mois de juillet ; le deuxième groupe inclut A. perrieri, A. digitata et A. za : leur floraison commence avant la première pluie (mois de novembre) et la maturité des fruits s’effectue pendant la période sèche (mois d’aout au mois de septembre);
le troisième groupe est constitué par A. suarezensis et A. grandidieri : leur floraison commence au début de la saison sèche, à la fin du mois d’avril, et la maturité de fruits se déroule au début de la saison des pluies (novembre – décembre).

Caractères morphologiques de la fleur

Les caractères floraux constituent une des principales différences entre les trois sections . Les deux espèces de Brevitubae ont des fleurs blanches à pièces florales courtes (moins de 70 mm) et présentent de nombreuses étamines d’au moins 700 par fleur, soudées à la base en un tube staminal court (12 à 13 mm).
La section Adansonia a des fleurs pendantes, de couleur blanche avec au moins 720 étamines soudées en un tube staminal de 30 à 50 mm de long. En revanche, les espèces de la section des Longitubae ont des fleurs tubulaires dont les pièces florales sont longues d’environ 110 mm. Le nombre des étamines est en moyenne de 300 par fleur avec une longueur moyenne de 100 mm. Ces étamines sont soudées sur un tube staminal d’environ 70 mm. Au sein de cette section, une grande diversité de couleurs de pétale est observée: jaune chez A. za ; jaune orangé pour A. rubrostipa ; rouge, rouge orangé et jaune pour A. madagascariensis et jaune chez A. gibosa .

Mode de reproduction des baobabs

Les agents pollinisateurs de baobabs : Depuis 1977, la pollinisation des baobabs était définie par rapport à la forme florale des espèces. Armstrong a suggéré que les baobabs malgaches étaient ornithophiles du fait des couleurs rouge et orange de la fleur (Armstrong, 1977). A partir de 1995, l’observation nocturne effectuée par Baum a permis d’identifier que les Brevitubae étaient visités la nuit par des chauves-souris, comme celles du baobab africain (Start, 1972), ou bien par de petits lémuriens nocturnes. Les Longitubae étaient visités par des sphinx, lépidoptères nocturnes appartenant à la famille des Sphingidae (Baum, 1995 et Ryckewaert et al., 2011). Rasoamanana (2015) a pu démontrer pour la première fois que les chauves-souris, Pteropus rufus sont des pollinisateurs efficaces pour les Brevitubae et les sphinx (Agrius convolvuli, Coelonia solanii, Panojena jasmini) pour les Longitubae.
Mécanismes de la pollinisation et phénomène d’introgression génétique : Les études effectuées par Rasoamanana (2015) montrent que les baobabs sont allogames facultatives c’est-à-dire qu’ils peuvent réaliser à la fois l’allopollinisation et l’autopollinisation. L’allopollinisation est fonction du comportement des pollinisateurs qui butinent les fleurs d’un même individu et celles de deux individus différents.
Un phénomène d’introgression génétique a été également identifié chez les baobabs notamment chez les Longitubae. C’est un phénomène dû à une hybridation interspécifique suivie de croisements en retour successifs avec les parents. L’introgression génétique a été identifiée chez les espèces sympatriques comme A.za et A. rubrostipa à Tsimanapetsotsa ainsi que A. perrieri et A. za dans le Nord de Madagascar. Sept pour cent (7%) des individus ont des caractères génétiques mélangés et présentent des caractères morphologiques intermédiaires c’est-à-dire la couleur de leurs pétales et la forme de leurs fruits sont intermédiaires de ceux de leurs parents .

Phénologie florale et efficacité de la pollinisation

Depuis plusieurs décennies, des auteurs ont considéré que la période de floraison est en partie un résultat de la coévolution entre les plantes et les pollinisateurs. Ces derniers doivent augmenter leur efficacité au butinage en fonction du nombre et de la distribution des fleurs au fil du temps . De plus, Janzen 1967, Gentry 1976 ont constaté que le pic de floraison, correspondant au nombre élevé d’individus en fleur, a lieu au moment où il y a le maximum des pollinisateurs. Par conséquent, ce pic est potentiellement associé avec un accroissement du succès de la reproduction.
Chez les espèces en sympatrie et en particulier pour les espèces congénères, le chevauchement partiel de la période de floraison favorise le croisement interspécifique. Cependant, selon Anderson et Schelfhout (1980) et Schmeske (1981), le synchronisme de la période de floraison entre les espèces congénères peut provoquer des compétitions sur l’attraction des pollinisateurs. Par conséquent, la ségrégation de la période de floraison entre les espèces congénères permet d’éviter cette compétition .

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Sécrétions florales et efficacité de la pollinisation

Odeur florale

Une odeur florale est un mélange de molécules organiques légères, dites composées volatils, parce qu’elles s’évaporent facilement de la surface de la fleur à température ambiante. Diverses odeurs sont émises et constituent des repères pour les pollinisateurs afin de les guider vers les ressources florales .
Le mélange d’odeur florale peut être plus ou moins complexe en fonction du nombre de composés qui le constituent et de la quantité émise dans le temps. En général, les fleurs d’une espèce végétale émettent entre 20 à 60 composés volatils qui appartiennent souvent à cinq classes : les dérivés d’acides gras, les terpénoïdes, les aromatiques, les composés azotés et soufrés. Leurs critères de différenciation sont basés sur leur structure et leur origine ou voie de biosynthèse.

Caractères et rôles du nectar floral

Le nectar est constitué principalement de sucres en solution aqueuse mais contient également des lipides, des acides aminés, des protéines, des minéraux, des acides organiques et des vitamines. La concentration du nectar peut varier de 4 à 60% selon les espèces. Les plantes peuvent être classées en trois catégories selon la dominance des sucres principaux présents dans leurs nectars: espèces à saccharose dominant, espèces à fructose et glucose dominants, espèces à taux voisins de saccharose, de fructose et de glucose .
Le nectar constitue la principale source de nourriture, plus particulièrement de glucide, pour les visiteurs. Les études approfondies de Baker et Baker révèlent la présence d’une coévolution adaptative entre la fleur et les pollinisateurs. La proportion spécifique du saccharose, en plus du glucose et du fructose, détermine la préférence et l’adaptation diététique des pollinisateurs. En effet, les Hyménoptères, préfèrent le nectar riche en glucides, les colibris ou les Lépidoptères préfèrent les nectars moins visqueux. Divers paramètres peuvent influencer la sécrétion de nectar, notamment l’âge et la position de la fleur sur l’inflorescence.

Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
PARTIE I: -GENERALITES
I. 1. LE GENRE Adansonia
I.1.1. Historique et évolution de la systématique des baobabs
I.1.2. Description générale des baobabs
I.1.3. Mode de reproduction des baobabs
I.1.4. Aires de distribution
I. 2. CADRE DE L’ETUDE
I.2.1. Phénologie florale et efficacité de la pollinisation
I.2.2. Caractères morphologiques des fleurs et succès de la pollinisation
I.2.3. Sécrétions florales et efficacité de la pollinisation
I.2.4. Synergie entre les divers caractères floraux et succès de la reproduction
I.2.5. Comportement des pollinisateurs et efficacité de la pollinisation
I.2.6. Mode de reproduction des plantes
PARTIE II – MATERIELS ET METHODES
II.1. MATERIELS VEGETAUX
I.2.1. Description botanique des espèces étudiées
I.2.1. Collectes des échantillons
II.3. ETUDES PHENOLOGIQUES
II.3.1.Principe de suivi des stades phénologiques des baobabs
II.3.2. Etude de la phénologie florale
II.3.3. Suivi de l’anthèse
II.4. MORPHOLOGIE ET MORPHOMETRIE DE LA FLEUR
II.4.1. Morphométrie florale
II.4.2. Etude de la structure morphologique et anatomique des tissus sécréteurs
II.5. ETUDES BIOCHIMIQUES DES SECRETIONS FLORALES
II.5.1.Caractérisations des odeurs florales chez les baobabs
II.5.2. Détermination de la composition du nectar
II.5.3. Analyses statistiques des données
II.6. IDENTIFICATIONS DES POLLINISATEURS POTENTIELS
II.6.1. Diversité et fréquence de visites des pollinisateurs
II.6.2. Morphométrie des sphinx
II.7. MISE EN EVIDENCE DES RELATIONS FLEUR-POLLINISATEUR ET EFFICACITE DE LA POLLINISATION
PARTIE III – RESULTATS
III.1. PHENOLOGIE DES SIX ESPECES DE BAOBABS MALGACHES
III.1.1. Calendrier de floraison des espèces
III.1.2. Phénologie d’A. grandidieri (Brevitubae) et d’A. rubrostipa (Longitubae)
III.1.3. Développement des boutons floraux
III.1.4. Morphoséquence d’ouverture de la fleur
III.2. MORPHOLOGIE ET MORPHOMETRIE DES FLEURS DE BAOBABS
III.2.1. Caractères morphométriques des fleurs
III.2.2. Morphologie et structure anatomique des tissus sécréteurs
III.3. CARACTERISTIQUES BIOCHIMIQUES DES SECRETIONS FLORALES
III.3.1. Composition biochimique des odeurs florales chez les baobabs
III.3.2. Cinétique de l’émission de l’odeur florale
III.3.3. Caractéristiques du nectar chez les baobabs
III. 4. DIVERSITE ET COMPORTEMENT DES POLLINISATEURS 
III.4.1.Diversité des pollinisateurs potentiels
III.4.2. Fréquence des visites
III.4.3. Relation morphométrique entre la longueur de la trompe et la taille des sphinx
III.5. INTERACTION FLEURS-POLLINISATEURS ET EFFICACITE DE LA POLLINISATION 
III.5.1 Rôles interactifs entre le nectar et les odeurs florales
III.5.2. Coévolution morphologique entre les fleurs et les pollinisateurs
PARTIE IV –DISCUSSION GENERALE
IV.1. PARTICULARITES PHENOLOGIQUES ET BIOCHIMIQUES DES FLEURS
CHEZ LES BAOBABS MALGACHES 
IV.1.1. Caractéristiques phénologiques
IV.1.2. Caractères biochimiques des fleurs de baobabs
IV.2. IMPLICATIONS DES CARACTERES PHENOLOGIQUES ET
BIOLOGIQUES DES FLEURS SUR LA TAXONOMIE DES BAOBABS MALGACHES 
IV.3. INTERACTIONS FLEURS-POLLINISATEURS et EFFICIENCE DE LA POLLINISATION 
IV.3.1. Pollinisation sphingophile chez les Longitubae
IV.3.2. Pollinisation généraliste chez les Brevitubae
IV.3.3. Mécanisme de la pollinisation chez les baobabs
IV.4. MODES DE REPRODUCTION CHEZ LES BAOBABS MALGACHES 
IV.4.1. Phénologie florale et mode de reproduction
IV.4.2 Herchogamie et mode de reproduction
IV.5. CARACTERES PHENOLOGIQUES ET BIOLOGIQUES DES FLEURS ET PHENOMENES D’INTROGRESSION GENETIQUE
IV.5.1. Synchronisme floral et phénomène d’introgression génétique
IV.5.2. Caractères des fleurs et phénomènes d’introgression génétique
CONCLUSION GENERALE ET PERSPECTIVES 
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES 
ANNEXES

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