IMPACTS PSYCHOSOCIAUX DE L’EMIGRATION CLANDESTINE
Définition selon l’OIM
Emigration Action de quitter son Etat de résidence pour s’installer dans un Etat étranger. Le droit international reconnaît à chacun le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et n’admet sa restriction que dans des circonstances exceptionnelles. Ce droit au départ ne s’accompagne d’aucun droit d’entrer sur le territoire d’un Etat autre que l’Etat d’origine [18]. Migration irrégulière Migration internationale contrevenant au cadre légal du pays d’origine, de transit ou de destination. Il n’y a pas de définition universellement acceptée de la migration irrégulière. Dans la perspective du pays de destination, il s’agit de l’entrée, du séjour et du travail illégal dans le pays, impliquant que le migrant n’a pas les autorisations nécessaires ou les documents requis selon la loi d’immigration pour entrer, résider et travailler dans le pays en question. Dans la perspective du pays d’origine, l’irrégularité s’avère par exemple lorsqu’une personne franchit une frontière internationale sans un passeport ou document de voyage valide, ou ne remplit pas les exigences administratives pour quitter le pays. Il y a cependant une tendance à restreindre l’usage de terme « migration illégale » aux cas de traite des personnes et au trafic illicite de migrants [18]. Migrant Au niveau international, il n’existe pas de définition universellement acceptée du terme « migrant ». Ce terme s’applique habituellement lorsque la décision d’émigrer est prise librement par l’individu concerné, pour des raisons « de convenance personnelle » et sans intervention d’un facteur contraignant externe. 5 Ce terme s’applique donc aux personnes se déplaçant vers un autre pays ou une autre région aux fins d’améliorer leurs conditions matérielles et sociales, leurs perspectives d’avenir ou celles de leur famille
Historique
Dans l’histoire des peuples, la migration vers de nouvelles localités présentant plus d’opportunités et/ou de sécurité, a toujours été perçue comme une des stratégies naturelles de survie ou d’épanouissement des populations. Ainsi disait Alfred Sauvy repris dans un éditorial [9] : « Ou bien les richesses iront là où sont les hommes ou bien ce seront les hommes qui iront là où sont les richesses ». Selon le sociologue français, « la migration est un phénomène dont les mobiles sont complexes, multifactoriels et ne peut être définitivement stoppée, car elle est à l’origine d’un important flux d’informations, de ressources humaines, de ressources financières et constitue par conséquent un facteur éminemment stratégique ». C’est tout le sens qu’il donne à l’émigration. Un déplacement d’une localité à une autre s’effectuait d’une manière clandestine, car le potentiel candidat est tenu de remplir un certain nombre de critères nécessitant quelques fois un parcours du combattant. Ce qui pousse le candidat à choisir un raccourci comme prendre les petites pirogues pour franchir l’océan Atlantique, quels que soient les risques encourus. Le phénomène migratoire au départ du Sénégal vers l’Europe est ancien et ses causes sont bien connues et documentées. Ainsi des vagues de migrations des « gens de la vallée » du fleuve Sénégal, suite aux sécheresses ont été notées à travers des réseaux de passeurs [3]. Cependant, depuis ces trois dernières années, il a pris des formes nouvelles revêtant deux caractéristiques essentielles : il est massif (tous les jeunes veulent partir) et clandestin (les jeunes utilisent des voies et moyens illégaux pour rentrer en Europe). Ce qui fait l’enjeu de cette 6 migration irrégulière c’est qu’elle ne date pas d’aujourd’hui. Ainsi ce qui lui procure ce cachet particulier c’est sa massification et sa nouvelle forme inconnue jusque-là sur nos côtes [12]. Au Sénégal, la densification de la migration clandestine a pris des proportions impressionnantes. D’abord, le désir des jeunes sénégalais de migrer vers l’Europe découle de la situation objective de leur pays d’origine (chômage et sous-emploi des jeunes) et des opportunités que semblent offrir les pays d’accueil (fort besoin en main-d’œuvre pour accompagner leur croissance économique et vieillissement de la population européenne). Le Sénégal est l’un des pionniers en Afrique subsaharienne à avoir adopté en avril 1988 une Déclaration de Politique de Population (DPP), actualisée en 2002 en raison des mutations socioéconomiques intervenues au plan national et des nouveaux paradigmes apparus au plan international. Toutefois, il faut rappeler que la mobilité des populations a toujours été une constante de l’histoire du Sénégal. Toutes les formes de mobilité, volontaire ou forcée, se superposent dans le passé comme dans le présent. Aujourd’hui, face à l’approfondissement des difficultés socioéconomiques, la recherche de meilleures conditions de vie n’épargne aucune catégorie sociale et le Sénégal est ainsi devenu un pays d’émigration massive. Ainsi, ces dernières années, on a assisté à l’intensification des migrations qui constituent pour les catégories sociales défavorisées un moyen de combattre le chômage et la pauvreté. Néanmoins, beaucoup de migrants subsahariens en général et sénégalais en particulier tentent l’aventure en empruntant les voies maritimes, avec l’utilisation de pirogues de fortune au niveau des côtes du Sénégal, de la Mauritanie et du Cap-Vert, au risque de leur vie. Cet usage de plus en plus accru de la mer s’explique en partie par l’épuisement des ressources halieutiques sur 7 ces côtes maritimes où certains pêcheurs se sont convertis en véritables passeurs et d’autres sont devenus des candidats à la migration irrégulière. Chaque jour, le message fort envoyé aux gouvernements des pays d’origine, de transit et de destination, est que de nombreux jeunes se lanceront toujours de manière désespérée et suicidaire à la quête de nouvelles stratégies de contournement des politiques migratoires et de franchissement des frontières. Au Sénégal, comme dans la plupart des pays africains, les politiques et stratégies de développement tardent encore à améliorer les conditions de vie des populations. Dans les villes comme dans les campagnes, le chômage, le sous‐emploi, la pauvreté et la vulnérabilité s’accentuent. Ainsi, la recherche des moyens de survie devient le lot quotidien d’un nombre de plus en plus croissant d’individus. Face à une telle situation de crise généralisée, la mobilité interne en tant que solution de survie ne répond plus aux attentes des populations d’où la volonté très forte de se rendre vers des destinations par-delà les frontières. En 2006, plus de 31 000 immigrants clandestins sont arrivés en Espagne à bord d’embarcations de fortune, après avoir passé des jours dans la mer. La en majorité était originaire de pays de l’Afrique subsaharienne dont la moitié est constituée de ressortissants sénégalais.
INTRODUCTION |