IMPACT DU PAQUET HYGIÈNE SUR LA FILIÈRE AOC SALERS
Une réorganisation réfléchie dans l’optique du paquet et hygiène
Au moment où la filière doit se réorganiser se profile le paquet hygiène, nouvelle réglementation européenne en matière de sécurité sanitaire des aliments, qui est entrée en vigueur au 1er janvier 2006. L’ensemble des actions et des changements entrepris dans la filière a donc visé à concilier production fermière et nouvelle réglementation.
Présentation du paquet hygiène
Mis en application depuis le 1er janvier 2006, le « paquet hygiène » a pour but d’harmoniser et de simplifier les dispositions très détaillées et très complexes en matière d’hygiène des aliments, qui étaient jusque là dispersées dans 18 directives communautaires. La volonté de responsabiliser l’ensemble des opérateurs de l’agro-alimentaire (et en particulier les producteurs primaires) et le souci d’harmoniser la réglementation à l’échelle européenne sont les lignes directrices du paquet hygiène. Ce dernier concerne donc l’ensemble de la filière agroalimentaire, depuis la production primaire, animale et végétale, jusqu’au consommateur, en passant par l’industrie agroalimentaire, les métiers de la bouche, le transport et la distribution des denrées.
Les textes du paquet hygiène
Le paquet hygiène se compose de 6 règlements principaux et de 2 directives, l’une permettant d’abroger l’essentiel de la précédente réglementation, l’autre fixant les règles de police sanitaire. En particulier, la directive 2004/41/CE du parlement européen et du conseil du 21 avril 2004 [73] permet d’abroger en ce qui nous concerne la directive 92/46/CEE [71]du conseil du 16 juin 1992 arrêtant les règles sanitaires pour la production et la mise sur le marché de lait cru, de lait traité thermiquement et de produits à base de lait (article 2 paragraphe 14). La directive 93/43/CEE est abrogée par le règlement 852/2004.
Adopté en 2002, le règlement (CE) n°178/2002, appelé également food law dans la terminologie anglo-saxonne constitue le socle de la nouvelle législation communautaire. Il a été complété en 2004 et 2005 par les 5 autres règlements, dont certains s’appliquent aux professionnels du secteur, d’autres aux services de contrôle.
Le règlement (CE) n°178/2002
Il établit les principes généraux et les prescriptions générales de la législation alimentaire, et institue l’autorité européenne de sécurité des aliments. Il fixe également les procédures relatives à la sécurité des aliments.
La première partie du règlement expose les motivations qui ont conduit à l’élaboration du paquet hygiène, ainsi que les nouvelle applications à mettre en œuvre pour pallier à l’évolution de la réglementation. Elle se décline en 66 points. Parmi les motivations citées, on note : la nécessité d’uniformiser les concepts et principes des différents états membres, « de manière à ce qu’ils forment une base commune pour les mesures régissant les denrées alimentaires et les aliments pour animaux adoptées dans les états membres et au niveau communautaire » (point 5).
la nécessité d’inclure dans la réglementation, suite aux diverses crises ayant ponctué l’histoire de l’union européenne, les aliments destinés aux animaux de rente, et donc susceptibles d’entrer dans la chaîne alimentaire (point 7).
l’importance primordiale accordée à la confiance du consommateur et à sa sécurité (points 22 et 23).
La suite du règlement se compose de 5 chapitres :
chapitre I : le champ d’application du paquet hygiène s’étend « à toutes les étapes de la production, de la transformation et de la distribution des denrées alimentaires et des aliments pour animaux. » Il ne s’applique pas à la production privée ni aux différentes manipulations d’ordre privé (article premier)
Les articles 2 et 3 donnent plusieurs définitions :
o « entreprise du secteur alimentaire : toute entreprise publique ou privée
assurant, dans un but lucratif ou non, des activités liées aux étapes de la production, de la transformation et de la distribution de denrées alimentaires. »
o « exploitant du secteur alimentaire : la ou les personnes physiques ou morales chargées de garantir le respect des prescriptions de la législation alimentaire dans l’entreprise du secteur alimentaire qu’elles contrôlent. »
o « commerce de détail : la manipulation et/ou la transformation de denrées alimentaires ainsi que leur entreposage dans les points de vente ou de livraison au consommateur final, y compris les terminaux de distribution, les traiteurs, les restaurants d’entreprise, la restauration collective, les restaurants et autres prestataires de services de restauration similaires, les commerces, les plateformes de distribution vers les grandes surfaces et les grossistes. »
Chapitre II : il établit la législation alimentaire générale, et instaure notamment le principe de précaution, qui prévoit que des mesures transitoires peuvent être prise dans le cas où il y aurait possibilité d’atteinte de la santé humaine, mais où il persiste une incertitude scientifique. L’article 14 fixe les prescriptions relatives à la sécurité des aliments, et il n’existe pas de nouveauté dans ce domaine par rapport à l’ancienne réglementation (aucune denrée alimentaire n’est mise sur le marché si elle est dangereuse, une denrée alimentaire dangereuse étant une denrée alimentaire non conforme à la réglementation, etc.). Ce chapitre insiste aussi sur la consultation et l’information des citoyens de la communauté européenne (articles 9 et 10), ainsi que sur les obligations générales concernant le commerce des denrées alimentaires. Enfin, et il s’agit de l’une des grandes réformes du paquet hygiène, l’article 17 responsabilise les exploitants du secteur alimentaire quant à la conformité à la législation des denrées alimentaires placées sous leur contrôle, comme ceci était précisé par le point 30 : « un exploitant du secteur alimentaire est le mieux à même d’élaborer un système sûr de fourniture de denrées alimentaires et de faire en sorte que les denrées alimentaires qu’il fournit sont sûres. Il y a lieu par conséquent que la responsabilité juridique primaire de veiller à la sécurité des denrées alimentaires lui incombe.»
De même, c’est à l’exploitant d’entamer la procédure de retrait/rappel de ses produits lorsque celle-ci a lieu d’être.
Chapitre III : il institue l’autorité européenne de sécurité des aliments, nouvel organisme crée par le paquet hygiène. Il s’agit d’un organisme européen indépendant, dont le rôle est de rendre des avis scientifiques sur les points litigieux. C’est donc l’organisme de référence de l’union européenne en matière de sécurité des aliments. Le chapitre III décrit sa composition et son fonctionnement en différentes circonstances.
Chapitre IV : il décrit le système d’alerte rapide, réseau crée autour de l’autorité européenne de sécurité des aliments pour maîtriser la situation en cas de danger pour la santé des consommateurs.
Chapitre V : il s’agit des dispositions finales comportant une clause de révision.
Les règlements concernant les professionnels
La différence fondamentale avec les anciens textes est la liberté laissée aux acteurs quant aux moyens à mettre en œuvre pour atteindre les objectifs fixés. Les textes applicables aux professionnels fixent en effet les objectifs à atteindre, mais laissent une certaine latitude sur les moyens, responsabilisant ainsi chaque acteur de la filière. La mise en place de procédures basées sur les principes de la méthode HACCP est rendue obligatoire (sauf pour la production primaire) et le recours aux guides de bonnes pratiques d’hygiène est fortement encouragé.
Règlement 852/2004
Il établit, à l’intention de tous les exploitants du secteur agro-alimentaire les règles générales d’hygiène applicables à toutes les denrées alimentaires. Cependant, ce règlement ne s’applique pas « à l’approvisionnement direct par le producteur, du consommateur final ou du commerce
de détail local fournissant directement le consommateur final, en petites quantités de produit primaire.» Ainsi, il ne s’applique normalement pas aux producteurs affinant eux mêmes leurs fromages et les vendant sur place (vente directe à la ferme). Ceci ne concerne pour l’année 2007 qu’environ 20% des producteurs. La grande majorité (plus de 80% pour la campagne 2007) vend le fromage à un affineur, qui n’est pas le consommateur final. D’autre part, il existe une incertitude sur les termes utilisés dans la réglementation : la notion de « petite quantité » doit être éclairée par un texte national, qui n’est pas encore paru. Dans le doute, et le texte s’appliquant à plus de 80% des producteurs, la volonté de l’ensemble de la filière a été de se conformer à ce texte, notamment en ce qui concerne la mise en place du système HACCP.
Ce règlement abroge la directive 93/43/CEE dont il reprend en fait les grandes lignes :
l’obligation de mise en place d’une procédure HACCP est généralisée à tous les niveaux de la chaîne de production, sauf à la production primaire (article 5), même si cela est fortement encouragé dès ce stade de la chaîne de production : « il convient toutefois que les Etats membres encouragent les exploitants exerçant des activités de production primaire à appliquer ces principes autant que possible. »
La traite n’est donc pas concernée, mais la fabrication du fromage est soumise à cette obligation.
le recours aux guides de bonnes pratiques d’hygiène rédigés par les professionnels et validés par l’administration est fortement encouragé (chapitre III). L’article 8 paragraphe 5 précise que les guides élaborés conformément à la directive 93/43/CEE restent applicables après l’entrée en vigueur du paquet hygiène.