Imagerie cardiaque

Imagerie cardiaque

Apport de l’échographie cardiaque

L’échographie cardiaque trans-thoracique avec étude Doppler, est un examen fortement recommandé dans le cadre de l’exploration d’une atteinte cardiaque de la ScS. C’est un examen relativement simple, facile d’accès et peu invasif, mais qui souffre d’une possible variabilité inter-opérateur. L’étude de la fonction systolique et diastolique, ainsi que des pressions de remplissage reste essentielle pour évaluer la fonction cardiaque globale. De nombreux paramètres peuvent être mesurés (Figure 12), apportant des informations sur la fonction ventriculaire droite et gauche, sur la présence d’arguments en faveur d’une hypertension artérielle pulmonaire ou d’une myocardite (14). La fonction systolique du VG est calculée par la méthode de Simpson, en mesurant les volumes télédiastolique et télésystolique du VG. Cette méthode repose donc sur la mesure de la déformation radiale du myocarde, tandis que la contraction du myocarde associe plusieurs mouvements : épaississement, raccourcissement et torsion. Le développement de l’imagerie du strain myocardique, c’est-à-dire l’analyse du mouvement d’un segment 38 myocardique dans les 3 axes de l’espace (longitudinal, radial et circonférentiel), permet d’évaluer avec plus de précision la fonction systolique du VG. Le strain peut être mesuré en Doppler tissulaire, mais également à l’aide d’une nouvelle technique échographique : speckle tracking ou 2D strain. Il s’agit de marqueurs acoustiques naturels au sein du myocarde, répartis de façon homogène, dont le mouvement peut être mesuré précisément. Exprimé en pourcentage, il est négatif en cas de raccourcissement, mais positif en cas d’étirement. L’un des avantages de cette technique est de pouvoir s’affranchir de l’angle imposé par la sonde d’échographie, permettant de diminuer la variabilité inter- et intra-observateur (51) (Figure 13).La fonction diastolique du VG et les pressions de remplissage du VG sont évaluées par l’analyse du flux mitral au niveau de l’anneau mitral. Le Doppler pulsé met en évidence des profils de vitesse, à partir desquels on mesure plusieurs paramètres : la vitesse maximale de l’onde E (protodiastolique, reflet du remplissage ventriculaire rapide), la vitesse de l’onde A (télédiastolique, reflet de la systole auriculaire), le temps de décélération de l’onde E et la durée de l’onde A (52) (Figure 14).Sur un profil Doppler mitral normal, l’onde E est légèrement plus élevée que l’onde A. En cas d’anomalie de relaxation, l’onde A devient supérieure à l’onde E, sans élévation associée des pressions de remplissage (sauf en cas de cardiomyopathie hypertrophique). Cependant, lorsque la dysfonction du VG augmente, les pressions de remplissage se majorent et le profil est normalisé. Le stade évolué de dysfonction diastolique du VG laisse place à un profil Doppler restrictif, avec des pressions de remplissage très élevées (52). Pour affiner la mesure de la fonction diastolique du VG et des pressions de remplissage, il est également possible de réaliser d’autres mesures, parmi lesquelles le rapport E/E’, E’ étant la mesure de l’onde protodiastolique recueillie en Doppler tissulaire pulsé à l’anneau mitral. Un rapport E/E’ > 13 est en faveur d’une élévation des pressions de remplissage si la FEVG est normale (53,54). Le profil Doppler peut néanmoins être influencé par de nombreux facteurs : l’âge, la fréquence cardiaque, interaction du VG (VD, péricarde, poumons, valves), propriétés diastoliques du VG (relaxation, compliance), et conditions de charge du VG (précharge et postcharge)(52). La fonction ventriculaire droite est influencée par les conditions de précharge, postcharge et des mécanismes d’interdépendance ventriculaire. La situation anatomique rétrosternale, sa géométrie complexe et son mode de contraction (raccourcissement longitudinal prédominant) rendent l’évaluation échographique complexe (55). La fonction systolique du VD peut être évaluée par le calcul de la fraction de raccourcissement plus facilement réalisable en échographie 3D qu’en échographie 2D. La mesure de l’excursion systolique du plan de l’anneau tricuspide (TAPSE) et celle de sa vélocité systolique (pic de l’onde S) sont des mesures simples et reproductibles, qui s’appuient sur l’hypothèse que le mouvement de la paroi livre du VD est un reflet de la fonction globale du VD (56). Cette évaluation de la fonction systolique du VD peut être encore améliorée par la technique du Doppler tissulaire ou speckle tracking, déjà évoquée ci-dessus (57). Une étude de 2019, chez 25 patients sclérodermiques comparés à 25 sujets sains, retrouvait une altération significative du strain longitudinal du VD, en faveur d’une altération infraclinique de la fonction ventriculaire droite. Les deux groupes étaient comparables en âge et en sexe, la fonction systolique ventriculaire gauche était conservée, et il n’y avait pas de différence significative de pression artérielle pulmonaire (58). Une autre étude, réalisée en 2016, chez 138 patients sclérodermiques américains comparés à 40 sujets sains, met en évidence une diminution du strain longitudinal du VD significativement plus importante chez les patients sclérodermiques, mais variable selon le territoire étudié. En effet, la mesure du strain met en évidence une hyperkinésie de la base associée à une hypokinésie de la région moyenne et de l’apex en systole (59). Ces anomalies focales de la contractilité myocardique du VD, chez des patients sclérodermiques avec des pressions pulmonaires dans les limites supérieures de la normale pourraient traduire l’adaptation du VD à l’augmentation progressive des pressions artérielles pulmonaires (57), mais également la présence locale de fibrose ou d’inflammation myocardique. La mesure du strain rate n’est cependant pas recommandée systématiquement chez les patients sclérodermiques. Des études pronostiques sont également nécessaires pour évaluer l’impact de ces anomalies infra-cliniques. L’IRM cardiaque reste la technique de référence d’évaluation de la FEVD (55).  

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Apport du TDM cardiaque 

Les dernières recommandations de la société européenne de cardiologie renforcent la place du coroscanner, comme alternative à la coronarographie lorsque la probabilité de coronaropathie est faible ou moyenne (60). Une étude de 2014, portant sur 62 patients sclérodermiques sans cardiopathie pré-existante connue, a tenté de mieux décrire les lésions cardiaques par la réalisation d’une ETT, d’un TDM cardiaque et d’une IRM cardiaque. La moitié (52%) des patients de l’étude présentaient des pressions artérielles pulmonaires élevées à l’échographie, pouvant faire suspecter une HTAP sous-jacente. Aucun patient ne présentait de lésion coronaire significative et seuls 15,5% des patients présentaient des signes d’athérosclérose non significative sur le TDM. Par ailleurs, la distribution de la fibrose myocardique et des anomalies microvasculaires visibles en IRM, ne suivait pas celles de territoires coronaires (22). Cependant, cet examen est relativement peu utilisé pour l’étude du myocarde en raison des bonnes performances de l’IRM cardiaque dans cette indication. Néanmoins, il peut être utile dans le cadre de la recherche de thrombus intra-cardiaque chez des patients ayant une contre-indication à l’IRM ou dans le bilan d’extension d’une masse cardiaque ou la recherche de calcifications intra-lésionnelles (61). Par ailleurs, il pourrait également permettre d’évaluer les volumes ventriculaires ainsi que la fraction d’éjection de façon relativement fiable. Cela nécessite cependant l’acquisition de nombreuses séquences, qui rendent cette imagerie très irradiante. L’arrivée de scanners photoniques, plus rapides et à faible irradiation pourrait, à l’avenir, favoriser le développement des scanners cardiaques (61). Enfin, l’étude du péricarde est également possible grâce au TDM, mais les très bonnes performances de l’échographie et de l’IRM n’en font pas non plus un examen de première intention pour l’étude du péricarde. 

Apport du TEP TDM cardiaque

 La TEP (Tomographie par Emission de Positron) cardiaque est un examen encore peu pratiqué qui possède néanmoins plusieurs indications. La TEP de perfusion du myocarde (à l’aide de 82-rubinium) est indiquée pour l’évaluation des patients avec une coronaropathie suspectée ou avérée, pour lesquels un examen à l’effort ne peut être réalisé (incapacité à réaliser l’effort nécessaire, résultats des tests précédents discordants …) (62), mais également pour la recherche de sarcoïdose cardiaque en complément d’une TEP au 18-FDG (Fluoro-désoxy-glucose)(63). La TEP de viabilité du myocarde est indiquée dans certains cas avant une revascularisation ou une greffe, la TEP-TDM est également indiquée dans le cadre d’une recherche d’infection vasculaire (infection du greffon vasculaire, infection de dispositifs cardiaques implantables ou de valves prothétiques), et dans l’exploration de tumeurs cardiaques primaires (64). Dans le cadre de la ScS, une étude réalisée en 2019, chez 16 patients sclérodermiques asymptomatiques consécutifs et 9 patients contrôles (non atteints de sclérodermie, ni de maladie inflammatoire ou de pathologie cardiaque, et qui avaient réalisé un TEP pour un autre motif) avait pour but de rechercher des arguments en faveur d’une inflammation myocardique, par TEP au 18 FDG et des signes de dysfonction cardiaque précoce par échographie cardiaque avec la technique du speckle tracking (2DSTE). Chez les patients sclérodermiques, 8 avaient un TEP considéré comme positif avec un index d’hétérogénéité significativement plus important que chez les patients contrôles. Chez les patients sclérodermiques pour lesquels la TEP était considérée comme négative, le ratio de SUV normalisé et l’index d’hétérogénéité ne différaient pas significativement de ceux des patients contrôles. Lors de l’analyse échographique, il n’y avait pas de différence significative entre la mesure du strain longitudinal global chez les patients considérés comme positifs à la TEP et ceux négatifs. Aucune corrélation n’a pu être établie entre la mesure du strain longitudinal et les valeurs mesurées par la TEP. Cette étude souffre cependant de quelques limites, parmi lesquelles : un échantillon de petite taille, et l’absence d’éléments de comparaison pour évaluer l’inflammation myocardique (par exemple en réalisant une IRM cardiaque à chaque patient).

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