Identification de nouvelles cibles pro-apoptotiques dans les leucémies aiguës myéloblastiques
LES LEUCEM IES AIGUËS MYELOBLASTIQUES A. CARACTER IST IQUES CL IN IQUES 1. EP IDEM IO LOG I E
INC IDEN CE ET MORTAL IT E
Les leucémies aiguës sont des affections relativement rares. Les projections issus d’une modélisation statistique des données d’incidence observées dans les registres pour la période 15-2008 ont permis à l’institut de veille sanitaire d’estimer à 3777 cas les leucémies aiguës en France en 2011, ces affections représentent 1 % des 25 cancers étudiés par l’Institut de Surveillance Sanitaire mais également 2,2% des décès par cancer.(Anon s. d.) L’incidence des leucémies aiguës augmente de façon régulière de 10 à 2005 et cette progression semble être confirmée par les projections jusqu’en 2011 (figure 1). On peut émettre l’hypothèse que cette augmentation d’incidence porte davantage sur les LAM, notamment secondaires, du fait du vieillissement de la population (voir paragraphe étiologie, p. ). Des analyses ultérieures des différents sous-types permettront de confirmer cette hypothèse. La stagnation relative de la mortalité pourrait être la conséquence du plus grand nombre de décès survenant chez des sujets plus âgés. En effet, ces patients ont un pronostic moins favorable à cause de la forte prévalence de co-morbidités et le caractère plus souvent secondaire des leucémies et donc moins sensible aux thérapies. Figure 1 : Pas d’autorisation de diffusion Les LAM sont les formes les plus fréquentes des leucémies (25% des leucémies sont des LAM dans le monde occidental (Deschler & Lübbert 2006)). Les LAM constituent un groupe hétérogène de leucémies caractérisé par la prolifération clonale de précurseurs myéloïdes, appelés blastes leucémiques, plus ou moins engagés dans leur différenciation, devenus anormaux par l’accumulation de réarrangements chromosomiques et de mutations génétiques multiples. Ces cellules, bloquées dans leur différenciation, ne sont plus capables de répondre aux régulateurs de la prolifération et/ou de l’apoptose. Ces anomalies entraînent une altération de l’hématopoïèse normale, une accumulation dans la moelle osseuse, puis dans le sang de ces cellules anormales, et à terme une anémie, une neutropénie et une thrombocytopénie.
POPULAT ION S CON CERNEE S
L’incidence des LAM augmente avec l’âge (Anon s. d.) (figure 2). En effet, si l’on observe un pic de fréquence en dessous de 5 ans chez l’enfant, ce sont plutôt des pathologies de l’adulte, l’âge médian de survenue de la maladie étant de 65 ans. Figure 2 : Pas d’autorisation de diffusion Ce sont des affections mortelles dans un grand nombre de cas, notamment chez les sujets âgés difficiles à traiter avec les chimiothérapies conventionnelles (Deschler & Lübbert 2006). En effet, les conditions de co-morbidités chez les sujets âgés telles que des maladies cardiaques, des insuffisances rénales ou des maladies vasculaires impactent le métabolisme des agents thérapeutiques et empêchent l’administration de fortes doses de thérapies. De plus, les patients âgés sont plus susceptibles de développer une infection en cours de traitement. Enfin, les caractéristiques biologiques de ces LAM des personnes âgées ne sont pas les mêmes que celles des patients plus jeunes (voir paragraphe étiologie, âge p. 16) (Laubach & Rao 2008).
ET IOLOG IE
L’étiologie des LAM n’est pas connue, même si certains facteurs de risques ont été identifiés tels que l’exposition au benzène, aux radiations d’origine industrielle, militaire ou thérapeutique, aux solvants industriels et aux chimiothérapies cytotoxiques. Certaines maladies génétiques ont aussi été reconnues comme étant un facteur de risque concernant ces leucémies. Mais ces facteurs de risques sont responsables d’un petit nombre de cas.
FACTEURS DE R I SQUE S : LE S TOX IQUE S
EXPOS IT ION CH IM IQUE
Le benzène a une action leucémogène connue depuis longtemps en raison de l’observation de l’augmentation de la fréquence des leucémies aiguës dans les cas d’exposition professionnelle chronique. En conséquence, son utilisation obéit à des règles strictes publiées dans le code du travail et une pathologie développée à son exposition peut être reconnue maladie professionnelle. L’exposition au benzène a été associée à l’apparition de nombreuses aberrations chromosomiques dans les lymphocytes du sang circulant des individus fortement exposés au benzène. Il est très probable que l’apparition de ces aberrations soit responsable de l’induction de LAM chez ces individus (McHale et al. 20). Les actions leucémogènes du benzène sont dues à sa métabolisation par les cytochromes qui produit des molécules dangereuses pour l’organisme. En effet, ces métabolites du benzène sont capables d’induire des mutations dans l’ADN soit par leurs interactions directes avec l’ADN et la formation d’adduits, soit par leurs interactions indirectes via la modification de la topoisomérase II ou les mécanismes de réparation de l’ADN. Les métabolites du benzène pourraient aussi modifier la différenciation cellulaire par des changements de méthylation de certains gènes. Enfin l’augmentation du stress oxydatif qu’il induit peut entraîner une prolifération cellulaire (Meek & Klaunig 2010). Certains chercheurs ont alors suggéré que le tabagisme pourrait être un facteur de risque au vu de l’exposition au benzène qu’il entraîne. Des recherches ont été menées notamment une grande étude par E.V. Kane et ses collègues en 19. Leurs conclusions étaient que les personnes qui fumaient régulièrement au cours de leur vie avaient plus de risques (1,2 à 2,3 fois) que les individus n’ayant jamais fumé de développer une leucémie aiguë (Kane et al. 19).
RADIATION
Le rôle des radiations ionisantes est également bien démontré notamment chez les survivants d’explosion atomique (D. A. Pierce et al. 16). En effet, il a été observé que certaines aberrations chromosomiques, notamment sur les chromosomes 5 et 7, étaient beaucoup plus répandues chez les patients qui avaient survécu à Hiroshima ou Nagasaki que chez les patients nés avant 1945 (M. Nakanishi et al. 19). Les individus exposés professionnellement aux radiations ionisantes peuvent aussi avoir un risque augmenté de leucémies mais les protocoles et les systèmes de protection utilisés de nos jours diminuent fortement ces risques et aujourd’hui il n’y a plus de corrélation entre l’incidence des cancers et le fait de travailler avec des radiations ionisantes (Yoshinaga et al. 2004). Par ailleurs, les malades traités par radiothérapie ont un risque accru de LAM. Ces LAM induites par les traitements sont appelée LAM secondaires.
CHIMIOTHERAPIES
Les leucémies aiguës secondaires peuvent également être le résultat de complications tardives de traitements chimiothérapiques. Ces leucémies sont considérées comme étant une conséquence directe des évènements mutationnels induits par la chimiothérapie mais les mécanismes rentrant en jeu ne sont pas encore bien définis (Godley & R. A. Larson 2008). Il existe deux types de LAM induites de façon secondaire par les chimiothérapies selon le type de traitement administré. Les caractéristiques cytogénétiques, morphologiques et le temps de développement après exposition de ces deux types sont différents. -Le premier type concerne les patients traités par des agents alkylants (melphalan, cyclophosphamide) ou ayant subi des séances de radiothérapie. Ces leucémies secondaires concernent des précurseurs hématopoïétiques précoces, sont souvent associées avec des aberrations des chromosomes 5 et /ou 7 (retrouvées aussi dans les LAM de novo, c’est-à-dire dans les leucémies non secondaires) et précédées dans un grand nombre de cas par une phase myélodysplasique préleucémique. Leur temps de latence est d’environ 5 à 7 ans et la médiane de survie 8 mois. -Le deuxième type de LAM induite par les chimiothérapies est celui des leucémies dues à des expositions aux agents qui inhibent la topoisomérase II (étoposide, teniposide et les anthracyclines). Ces LAM ont un temps de latence plus court (2 à 3 années), sont généralement associées avec des anomalies du bras long du chromosome 11 (à la localisation du gène MLL, anomalie retrouvée aussi dans les LAM de novo) et ne sont généralement pas précédées d’un syndrome myélodysplasique. Le pronostic est plus sévère que les LAM de novo mais moins sévère que le premier type de leucémie secondaire. Dans les deux cas, les anomalies retrouvées sont identiques à celles des LAM de novo mais la fréquence des anomalies défavorables est considérablement plus élevée dans les LAM secondaires, ce qui explique le taux inférieur de rétablissement dans ces cas. Le fait que les anomalies retrouvées dans ces leucémies secondaires soient les mêmes que celles des LAM de novo et que le temps de latence soit relativement long laissent penser que la leucémogenèse est le résultat de plusieurs mutations sur des gènes codant pour un avantage prolifératif et/ou de survie et des gènes impliqués dans la différenciation des progéniteurs hématopoïétiques, comme c’est le cas dans les LAM de novo (Qian et al. 2010). Par ailleurs, certains polymorphismes concernant les gènes impliqués dans le métabolisme des médicaments, la protection contre le stress oxydant ou encore la réparation de l’ADN, ont été reliés à un risque plus élevé de développer une leucémie secondaire. L’étude de ces polymorphismes pourrait permettre de définir un facteur de risque pour les patients traités par des chimiothérapies de développer une leucémie secondaire (Godley & R. A. Larson 2008).
PARTIE 1 – INTRODUCTION |
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