HISTOIRE DU CHÂTEAU DE VAURENARD
De très nombreux châteaux du Beaujolais d’époque médiévale revendiquent avoir été bâtis pour être des rendez-vous de chasse des puissants sires de Beaujeu12. Même s’il n’existe aucune certitude à ce sujet, plusieurs indices tendent à confirmer que Vaurenard aurait bien été construit à cet effet. Les seigneurs de Beaujeu13 « contrôlaient l’un des principaux axes de communication entre le Sud et Paris, via le Bourbonnais »14. Depuis le Xe siècle, ils ont étendu peu à peu leur domination sur les régions du Lyonnais, du Mâconnais, du Forez et de la Dombes. Ce pouvoir a été instauré par des guerres autant que par des alliances politiques. Certains de ces seigneurs ont pris la tête de l’armée royale, comme Humbert V, quand d’autres ont participé aux croisades15. Le mariage de Guichard IV16 avec Sybille de Hainaut et de Flandres en 1195 fit entrer les Beaujeu dans la famille royale, le sire de Beaujeu devenant le beau-frère du roi Philippe-Auguste. A la fin du XIVe siècle, Édouard II de Perreux refusa de rendre hommage pour ses possessions en Bresse. Le roi Charles VI le déposséda alors de ses biens. Le Beaujolais perdit ainsi son autonomie et la lignée des Beaujeu, tout comme la ville éponyme, n’eut plus qu’une importance de second ordre.
Il n’existe pas de document mentionnant Vaurenard comme un rendez-vous de chasse des sires de Beaujeu du XIIe ou du XIIIe siècle, mais seulement une tradition orale. Le bâtiment était entouré de forêts, les vignes n’étant alors que rares dans la région beaujolaise17. Le nom du site de Vaurenard trouverait une explication dans son étymologie : vau évoquant une modification du relief, et renard faisant référence aux mammifères qui peuplaient les forêts. « La simple racine du nom de la localité ne prouve-t-elle pas d’ailleurs surabondamment que les rusés mammifères carnassiers […] devaient foisonner dans les fourrés du début de XVIIe siècle. À partir de cette période, les différentes variantes Veaurenard, Vauxrenard, Vaulxrenard et Vaulx Regnard se rapportent en effet à la petite commune de Vauxrenard, qui existe toujours dans le département du Rhône20, à environ trente-cinq kilomètres de la commune de Gleizé, au nord-est du département du Rhône. Il n’existe pas de lien historique connu entre cette commune21 et le domaine homophone. La seigneurie de Beaujeu possédait un château à Montmelas22 et un à Pouilly-le-Chatel, sur l’actuelle commune de Denicé23, situé à un peu plus d’un kilomètre de Vaurenard. Toutefois, selon H. Peyrelongue, les sires de Beaujeu « habitaient celui de Pouilly24 de préférence car il était entouré de bois giboyeux »25. Les riches seigneurs auraient construit au Vaurenard d’est en ouest. Le tracé en effet correspond à une ligne droite rejoignant le centre- ville, Vaurenard et Pouilly-le-Chatel28.
Nul ne sait en revanche quel seigneur aurait pu faire bâtir Vaurenard. On trouve trace de Pouilly-le-Chatel sous Humbert III de Beaujeu (1130-1193)29. Pour Louis Falcon de Longevialle (1866-1936), Guichard IV le Grand, seigneur de Montpensier (1160-1216) et petit- fils de Humbert III, connût le domaine. L. de Longevialle s’appuie pour cela sur le récit évoquant la rencontre de Guichard et de saint François d’Assise : revenant de Constantinople vers 1209 où il fut accueilli en tant qu’ambassadeur de France auprès du pape Innocent III, Guichard traversa l’Italie et rencontra saint François à Assise. Convaincu de la piété et des préceptes de ce dernier, il ramena en France trois frères « nommés Michel, Dreux et Guillaume, qu’il mena en ses terres sur la fin de l’année 1210 »30. Il les installa à Pouilly-le-Châtel, puis à Villefranche31 où ils fondèrent un couvent franciscain32, « censé [être] le premier couvent de l’Ordre de St-François en France »33. Des fouilles archéologiques préventives ont mis à jour en 2006 les vestiges de l’église conventuelle des Cordeliers34 datant du XIIIe siècle35.