Groupe de Witt d’une algèbre simple centrale à involution

Le travail de recherche pr´esent´e dans cette th`ese est ax´e sur deux th`emes centraux reli´es entre eux. Le premier de ces th`emes est la th´eorie des formes hermitiennes (´equivariantes pour un groupe fini G) sur une alg`ebre simple centrale `a involution. Si les th´eories des formes quadratiques et des formes hermitiennes presentent beaucoup de caract`eres similaires, on ne leur connaˆıt effectivement que peu de points communs. Dans ce travail, nous avons tout d’abord souhait´e illustrer le passage de la th´eorie des formes quadratiques `a celle des formes hermitiennes en nous appuyant sur diverses notions telles que la decomposition de Witt, l’isotropie, le discriminant `a signe ou les n-formes de Pfister .Le groupe de Witt (´equivariant) d’une alg`ebre simple centrale est un outil essentiel `a la comprehension des formes hermitiennes (´equivariantes) sur cette alg`ebre mais il est rare que l’on puisse le d´eterminer de fa¸con explicite. Le second objectif de ce travail est la collecte d’informations sur ce groupe soit par des crit`eres d’isomorphie, soit par construction de suites exactes permettant de comparer plusieurs de ces groupes.

Alg`ebres simples centrales `a involution

Les premi`eres alg`ebres non commutatives apparaissent en 1844 dans les travaux de Hamilton lorsqu’il d´ecouvre l’alg`ebre des quaternions sur le corps des nombres reels. En 1878, Frobenius d´emontre que celle-ci constitue en fait le seul exemple de corps non commutatif (de dimension finie) sur le corps des nombres r´eels. Le d´ebut du XXe si`ecle voit la naissance d’une tendance commune `a toute l’Alg`ebre : l’abandon de toute restriction sur les corps et les anneaux. En particulier, la commutativit´e ne devient plus syst´ematique dans l’´etude des corps et, sous l’impulsion des travaux de Dickson, Moore et Wedderburn, la th´eorie des alg`ebres `a division est d´evelopp´ee. La cons´equence la plus marquante de ces travaux est sans doute le th´eor`eme de Wedderburn ´etablissant qu’une alg`ebre `a division finie est n´ecessairement commutative.

Parall`element `a ces travaux, Wedderburn, en 1907, cherche le premier `a ´etudier les alg`ebres simples et d´emontre d’importants r´esultats de structure les concernant. En 1927, Brauer et Noether (rejoints par Albert et Hasse en 1930) continuent l’´etude syst´ematique des alg`ebres `a division et d´eveloppent la th´eorie des alg`ebres simples `a la lumi`ere des r´esultats de Wedderburn. Sur la base de ces travaux et de ses propres recherches, Albert con¸coit, au cours des ann´ees 1930, la th´eorie des alg`ebres simples centrales `a involution sur un corps quelconque telle qu’on l’aborde aujourd’hui.

En 1929, Brauer r´eussit `a munir l’ensemble des classes d’isomorphies d’alg`ebres `a division qui sont de dimension finie sur leur centre commun K d’une structure de groupe ab´elien de torsion, que l’on appelle aujourd’hui groupe de Brauer de K. Au debut desann´ees 1930, Noether montre l’importance de ce groupe comme invariant de K en le reliant `a la cohomologie galoisienne au moyen des produits crois´es. La cons´equence la plus remarquable de ces travaux est sans doute la description compl`ete du groupe de Brauer d’un corps de nombres alg´ebriques obtenue quelques ann´ees plus tard par Albert, Brauer, Hasse et Noether : voir l’exemple 1.1.9(5).

Le langage de toute cette th´eorie trouve ses sources dans les livres d’Albert (voir [1]) et de Deuring (voir [18]). Nous recommandons la lecture de [22] et [71] qui offrent un traitement de cette th´eorie `a la lumi`ere de r´esultats plus r´ecents. On pourra egalement consulter [33] qui a par ailleurs ´et´e une grande source d’inspiration tant pour la pr´esentation de cette section que pour les notations adopt´ees tout au long de ce travail.

Alg`ebres simples centrales `a involution

Dans ce travail, K d´esignera un corps commutatif. Sauf mention contraire, toutes les alg`ebres consid´er´ees dans ce travail seront unif`eres et de dimension finie et tous les modules seront des modules `a droite suppos´es finiment engendr´es. Les notations fix´ees dans ce chapitre seront conserv´ees (autant que possible) tout au long de ce travail. Une alg`ebre simple centrale sur K est une alg`ebre (de dimension finie) A 6= {0} de centre K et qui ne poss`ede, outre {0} et A, aucun id´eal bilat`ere. Une alg`ebre A 6= {0} est une alg`ebre `a division (ou un corps gauche) si tout ´element non nul de A est inversible pour la multiplication ; une alg`ebre `a division est une alg`ebre simple centrale sur son centre. Etant donn´ees une alg`ebre simple centrale sur K et une extension de corps L/K, on obtient, par extension des scalaires de K `a L, la L-alg`ebre simple centrale AL = A⊗K L. A toute alg`ebre A correspond son alg`ebre oppos´ee Aop : Aop = A en tant que K-module mais sa multiplication ∗ est d´efinie par a ∗ b = ba pour tous a, b ∈ A.

LIRE AUSSI :  Cours mathématiques les systèmes non linéaires

Quelques grands th´eor`emes

Dans cette sous-section, nous nous bornons `a rappeler sans preuve(s) quelques grands r´esultats qui nous seront utiles par la suite. A tout ´el´ement inversible u de A correspond un automorphisme de A not´e Int(u) et d´efini par x 7→ uxu⁻¹ ; cet automorphisme est appel´e automorphisme int´erieur de A induit par u.

Nous en venons `a un r´esultat de base dans la th´eorie des alg`ebres simples centrales, le th´eor`eme de Skolem-Noether, qui caract´erise les automorphismes des alg`ebres simples centrales en terme de leurs automorphismes int´erieurs.

Th´eor`eme 1.1.4 (Skolem-Noether). Soient A une K-alg`ebre simple centrale et B une sous-alg`ebre simple de A. Alors, tout homomorphisme de K-alg`ebres ρ : B → A peut ˆetre ´etendu `a un automorphisme int´erieur de A. En particulier, tout automorphisme de K-alg`ebres de A est un automorphisme int´erieur.

Groupe de Brauer

Nous rappelons la d´efinition d’un groupe introduit par Brauer en 1929.

Grˆace au th´eor`eme 1.1.1(4), nous savons que toute alg`ebre simple centrale sur K est isomorphe `a une alg`ebre de matrices sur un corps gauche de centre K, celui ci etant uniquement d´etermin´e `a isomorphisme pr`es. Deux K-alg`ebres simples centrales A et B sont Brauer-´equivalentes (et on ´ecrit A ∼ B) si elles sont K-isomorphes `a des alg`ebres de matrices sur des corps gauches isomorphes ou, de fa¸con ´equivalente, s’il existe deux entiers n et m tels que Mn(A) ∼ Mm(B). Il est clair que ∼ d´efinit une relation d’´equivalence sur les K-alg`ebres simples centrales de dimension finie ; la classe d’une K-alg`ebre simple centrale A sera not´ee [A].

Le produit tensoriel (sur K) de deux K-alg`ebres simples centrales ´etant `a nouveau une K-alg`ebre simple centrale (d’apr`es le th´eor`eme du double centralisateur dˆu `a Brauer, voir [71, Chapter 8, Theorem 3.2]), l’ensemble des classes d’´equivalences de K-alg`ebres simples centrales muni de la loi induite par le produit tensoriel de K-alg`ebres est un groupe ab´elien appel´e groupe de Brauer de K et note Br(K). Dans ce groupe, l’´el´ement neutre est [K] et l’inverse de [A] est [Aop] (par l’assertion (2) du th´eor`eme 1.1.1). La 2-torsion de ce groupe ab´elien sera notee Br2(K).

Table des matières

Introduction
1 G´en´eralit´es
1.1 Alg`ebres simples centrales `a involution
1.2 Formes
1.3 Groupe et anneau de Witt
2 Equivalence de Morita et isomorphismes de groupes de Witt ´equivariants
2.1 Pr´eliminaires
2.2 Le r´esultat principal
2.3 Quelques cons´equences
3 Equivalence de Morita et formes ε-hermitiennes
3.1 Isotropie et d´ecomposition de Witt
3.2 Rang et discriminant `a signe
3.3 Quelques autres invariants
4 Suites exactes de groupes de Witt
4.1 Introduction
4.2 D´efinitions des applications
4.3 La preuve du th´eor`eme 4.1.1
4.4 Comportement des applications pour les alg`ebres `a division
4.5 Suites exactes de groupes de Witt ´equivariants
5 Sous-modules du groupe de Witt
5.1 Restrictions de suites exactes de groupes de Witt
5.2 Formes de Pfister hermitiennes .
6 Crit`eres de Harrison, ´equivalences de Witt et ´equivalences de r´eciprocit´e
6.1 Introduction
6.2 R´esultats de base
6.3 Analogues du crit`ere de Harrison
6.4 Equivalences de r´eciprocit´e
7 Groupes de Whitehead r´eduits
7.1 Introduction
7.2 Groupes de Whitehead r´eduits d’une alg`ebre simple centrale. R´esultats principaux
7.3 R´esultats pr´eliminaires `a la section 7.5
7.4 Autour d’un r´esultat de Merkurjev et Suslin
7.5 Preuves des r´esultats

Cours gratuitTélécharger le document complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *