Grands consommateurs de soins à l’urgence
Définition
Les GCSU sont des patients qui effectuent de multiples visites à l’urgence au cours d’une même année. La classification des GCSU ne fait pas l’unanimité. En effet, certains auteurs et organisations gouvernementales classent les GCSU selon une fréquence de visites et d’autres ciblent les patients qui ont engendrés le plus de dépenses (Ginde et al., 2014; Ondler et al., 2014). Bien qu’ il persiste une hétérogénéité dans la fréquence, la majorité des auteurs s’ entendent pour dire que les GCSU sont des usagers qui consultent au moins quatre fois par année à l’urgence. Pour la présente recension, les écrits concernant les patients ayant consulté à deux reprises et plus ont été conservés.
Incidence et coûts
Au Canada, pour l’ année 2016-2017, on estime que les GCSU représentent 9 % de l’ensemble des patients qui ont consultés à l’urgence et qu’ils ont effectués 30 % de l’ ensemble des visites à l’urgence (lClS, 2018). Selon Shapiro et al. (2013) ces données pourraient être revu à la hausse, en effet, en combinant les données de différentes urgentes d’une même région, les auteurs ont identifié 20 % plus de GCSU et 16 % plus de visites que sur un seul site.
En plus de présenter des taux d’ hospitalisations plus élevés qu’un usager occasionnel de l’urgence, il est aussi démontré que les GCSU utilisent différentes ressources et services de soins de santé tels que les cliniques externes et les services de spécialistes (Billings & Raven, 2013; Bodenmann et al., 2015; Castner et al., 2015; Moe et al., 2015; Van Tiel et al., 2015).
Au Québec, en moyenne, une visite à l’urgence est de l’ordre de 157$ (Régie de l’assurance-maladie du Québec, 2016). Bien qu’Ondler et al. (2014) constatent qu’une visite d’un GCSU n’engendre pas plus de dépenses qu’ une visite effectué par un patient sporadique, c’ est plutôt la somme des visites qui fait bondir les coûts. De plus, les résultats des données précédemment présenté par Shapiro et al. (2013) indiquent qu’il pourrait être raisonnable de croire que si un GCSU consulte à différentes urgences, les coûts globaux s’en trouveront nécessairement augmenté.
Définition de l’urgence et actions ministérielles. Selon le Guide des urgences du MSSS, les services d’ urgence servent à évaluer et à traiter des conditions médicales dont les symptômes sont apparus subitement et sont assez graves pour qu’ une personne prudente, possédant un niveau moyen de connaissances en santé, soit amenée à croire qu’une visite médicale urgente est nécessaire (2006, p. 21).
Au Québec, 60 % des visites à l’urgence sont jugées non-urgentes et pourraient être traitées ailleurs (CSBE, 2017a). Depuis 2006, le Guide de gestion des urgences recommande d’ assurer une planification liée au départ du patient (MSSS, 2006).
Cette planification doit permettre, d’ une part, d’identifier les patients qui reçoivent déjà des services de la mission CLSC afin d’aviser l’ intervenant et d’ autre part, évaluer la situation des patients qui ne reçoivent pas de services afin de leur offrir des services qui répondent à leurs besoins. Cette recommandation vise essentiellement à éviter des recours inappropriés à l’urgence.
Par la suite, en 2013 , des actions ont été élaborées afin d’ améliorer le suivi et la coordination des services aux patients cumulant 10 visites et plus à l’ urgence et ce, particulièrement auprès des GCSU présentant des maladies chroniques ou des troubles de santé mentale (ASSSMCQ, 2013).
En 2016, le MSSS affirme que des problèmes d’accès à un médecin de famille et aux services sociaux peuvent contribuer à une hausse de l’utilisation des services d’urgence chez les clientèles vulnérables. Cependant, 60 % à 70 % des patients qui consultent à l’urgence ont un médecin de famille, il semble donc que l’ accès à un médecin de famille ne soit pas nécessairement en lien avec l’utilisation excessive des services de l’urgence (Palmer et al., 2014; Rising, Padrez, et al., 2014). Selon le CSBE (2014), une des causes qui amènerait les patients à se tourner vers l’urgence serait la difficulté à rencontrer le médecin de famille en temps opportun. Or, Doran et al. (2014) affirme que près de 67 % des GCSU consultent déjà leur médecin de famille de façon répétée. II semble donc exister un désalignement entre les besoins des patients et les services offerts (Castner et al., 2015), et ce, tant à l’urgence que chez le médecin de famille.
Bref, malgré la diversification des actions portées par le MSSS et l’ASSSMCQ pour améliorer la situation dans les urgences, cela ne semble pas complétement porter fruit. D’ailleurs, les dernières données du CSBE (20I7b) indiquent que les patients qui ont fait au moins trois visites à l’urgence représentent 16 % de l’ensemble des utilisateurs de l’urgence, soit une augmentation de 5 % comparativement à 2012. Un GCSU qui consultent de façon répétée dans une ou plusieurs urgences, pourrait être le résultat de besoins biopsychosociaux non comblés lors des visites initiales. Il est donc possible que la question de la prise en charge des GCSU doive, non seulement porter sur un objectif d’ amélioration dans les urgences, mais aussi sur la prise en compte des besoins biopsychosociaux qui influencent l’ état de santé des GCSU.
Chapitre 1 : Problématique |