Gestion de l’obsolescence
L’objectif de la gestion de l’obsolescence est de minimiser les coûts supplémentaires et l’impact négatif de l’obsolescence. La norme IEC 62402 de la gestion d’obsolescence fournit des orientations et des lignes directrices aux entreprises pour les aider à planifier un processus efficace pour gérer l’obsolescence et d’assurer le support tout au long du cycle de vie des pièces (Adetunji, Bischoff, & Willy, 2018; Zaabar, Beauregard, & Paquet, 2018) .
Trois niveaux de gestion d’obsolescence ont été abordés dans la littérature : la gestion réactive, proactive et stratégique (Bartels, Ermel, Sandborn, et al., 2012; P. Sandborn, 2013). En pratique, la plupart des entreprises ne disposent pas de méthodes proactives pour gérer l’obsolescence et sont donc obligées de compter sur des stratégies réactives à court terme. Les approches réactives les plus connues et applicables par les entreprises à court terme sont : « le stock existant » : c’est un stock détenu par la chaîne d’approvisionnement qui contient les composants de rechange originaux. Le stock existant doit être suffisant pour assurer l’approvisionnement tout au long du cycle de vie restant du système (Bartels, Ermel, Pecht, & Sandborn, 2012a; Livingston, 2000; Pince & Dekker, 2011; F. R. Rojo et al., 2010; Z. Shi & Liu, 2020).
« Le dernier achat » (en anglais : last time buy) consiste à acheter une quantité suffisante pour supporter la production jusqu’à la reconception (C. Jennings & Terpenny, 2015). La troisième approche réactive est la « substitution d’un composant» (en anglais alternate part), consiste à remplacer un composant ou un équipement par un autre avec la même performance, les mêmes dimensions et les mêmes caractéristiques mécaniques. Néanmoins, ces approches ne sont que temporaires et peuvent engendrer des coûts importants non prévus si l’entreprise manque de moyens pour se procurer les pièces requises.
La gestion proactive, soit la méthodologie à long terme, repose sur la surveillance proactive des informations relatives au cycle de vie des pièces afin d’éviter les arrêts de production. La prévision de l’obsolescence, qui est le centre d’attention de cette recherche, s’avère essentielle au niveau de la gestion proactive.
L’approche stratégique, quant à elle, constitue une combinaison de la gestion réactive et proactive pour minimiser le coût du cycle de vie. La prévision d’obsolescence peut être utilisée comme une entrée dans un niveau de gestion stratégique.
Stratégie de prévision de l’obsolescence
La prévision est une estimation probabiliste concernant un événement. Les prévisions fournissent aux décideurs des informations qui peuvent être utilisées pour gérer, de manière proactive, l’écart entre ce à quoi pourrait ressembler l’avenir et ce à quoi nous voulons qu’il ressemble (Parvin & Beruvides, 2017).
La prévision de l’obsolescence est une approche de gestion proactive qui permet aux fabricants des systèmes d’identifier l’obsolescence des composants en avance. La prévision d’obsolescence est basée sur des méthodes qualitatives et quantitatives, c’est-à-dire soit les données sont disponibles et c’est possible de les collecter, soit aucune donnée n’est disponible et, par conséquent, la méthode qualitative devient la meilleure approche de prévision. La méthode Delphi est l’une des approches qualitatives qui ont été appliquées pour estimer le risque d’obsolescence (F. R. Rojo et al., 2012). Cette méthode est basée principalement sur des questionnaires et des enquêtes faites auprès des experts pour identifier les facteurs qui ont un impact sur l’obsolescence.
Les méthodes quantitatives de prévision d’obsolescence auxquelles la thèse est consacrée sont divisées en deux types, la prévision du risque et la prévision de cycle de vie. Par ailleurs, il existe deux démarches de prévision : la prévision à long terme (un an ou plus) qui permet une gestion proactive basée sur la planification du cycle de vie pour soutenir un système, et la prévision à court terme qui peut être observée à partir de la chaîne d’approvisionnement. Les prévisions à court terme peuvent impliquer la réduction du nombre de sources, la réduction des stocks et l’augmentation des prix.
Prévision du risque d’obsolescence
Notions et concepts du risque
La gestion du risque permet à une organisation d’évaluer tous les risques liés à la chaîne logistique et de contrôler les mesures d’atténuation de manière structurée. Pour cela, les entreprises doivent adopter une approche proactive pour identifier le risque en avance. Dans le pratique, le risque industriel est généralement associé aux notions tels que, un obstacle potentiel, une vulnérabilité d’un produit, une probabilité d’occurrence d’un évènement, etc. De ce fait, ISO31000 a été élaboré dans le but d’atteindre et de gérer efficacement le risque. Cette norme établit un ensemble d’exigences et de lignes directrices aux entreprises pour assurer l’amélioration continue du service. Selon cette norme, le risque est défini comme la probabilité d’occurrence d’un évènement et sa conséquence.
Prévision du risque d’obsolescence
Les méthodes de prévision du risque d’obsolescence sont utilisées pour estimer la probabilité qu’une pièce devienne obsolète et son impact sur le système, en se basant sur une matrice de criticité. Ce concept est équivalent à celui défini par la norme ISO31000. Dans le cas de prévision d’obsolescence, une analyse du risque doit être effectuée dans le but d’obtenir un aperçu sur la disponibilité future des pièces critiques, généralement basé sur des facteurs et des indices d’obsolescence.
Deux principales approches qui utilisent des facteurs pour identifier le niveau du risque (faible, moyen ou élevé) ont été adoptées et largement discutées dans la littérature (F. R. Rojo et al., 2012). Dans ce contexte, Rojo a développé une méthodologie pour prévoir le risque d’obsolescence en se basant sur des indicateurs d’obsolescence tels que l’année de fin de vie, le nombre de sources disponibles, le taux de consommation de la pièce et la disponibilité du stock. En effet, ces facteurs ont été identifiés à partir d’une enquête auprès d’une équipe d’experts industriels. Cette approche a permis d’élaborer un plan d’évaluation du risque pour chaque composant identifié. L’approche développée par Josias (2009), quant à elle, vise à créer un indice de risque pour mesurer le risque d’obsolescence. Parmi les paramètres identifiés grâce à cette technique, on retrouve : le nombre de sources disponibles pour chaque pièce et le niveau du risque de l’entreprise. Ces paramètres sont mesurés sur une échelle de risque de zéro à trois (C. L. Josias, 2009). Pour calculer l’indice de risque, un poids est associé à chaque paramètre, ce poids est modulable selon chaque entreprise.
Prévision du cycle de vie d’obsolescence
La prévision du cycle de vie fait référence à un processus pour prévoir la durée pendant laquelle le produit sera en production et estimer la date à laquelle il deviendra obsolète. Ces dates permettent aux industriels de choisir la meilleure approche proactive pour gérer l’obsolescence avant qu’elle ne se produise. Il existe dans la littérature de nombreux modèles de prévision qui peuvent être utilisés. Les méthodes courantes incluent : la régression, les méthodes par séries chronologiques, les moyennes mobiles et le lissage exponentiel. Toutefois, la méthode choisie dépend généralement des caractéristiques de la pièce et des données disponibles.
Les méthodes de prévision du cycle de vie sont développées en se basant sur la période pendant laquelle le produit est disponible sur le marché et que le client peut se le procurer. En effet, la majorité des produits suivent cinq étapes durant leur cycle de vie : introduction, croissance, maturité, déclin, et obsolescence (C.-M. Huang, Romero, Osterman, Das, & Pecht, 2019; Solomon et al., 2000). La phase d’introduction se réfère à la technologie introduite dans le marché pour la vente, et tout ce qui survient avant la phase d’introduction représente la période de développement du produit. Une fois que les produits sont introduits et réussissent à être vendus, après une certaine période les concurrents à faibles coûts entrent dans le marché et ainsi le volume de la demande commence à diminuer. De ce fait, de nombreuses entreprises cessent la production, ce qui rend le produit sans support et obsolète.
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