Définition de l’hétérogénéité
D’après le dictionnaire Larousse, l’hétérogénéité renvoie à ce qui est hétérogène, c’est-à-dire, qui manque d’unité, qui est composé d’éléments de nature différente. Au niveau de l’étymologie, «hétéros» qui vient du grec signifie «autre, différent» et «genos» renvoie à la famille, la race, le peuple.
Ainsi, à l’image de la société, toute classe est par nature caractérisée par l’hétérogénéité des sexes, des âges, du gout pour l’école et par la motivation pour réaliser son projet personnel, par les compétences et les savoirs faire, mais également par les cultures et les modes de vie en lien avec l’appartenance familiale et sociale.
La notion d’hétérogénéité des classes est apparue dans les années 70 suite à la démocratisation, la massification avec la loi Haby de 1975 instaurant le collège unique. Le regroupement des élèves par classe de niveau est supprimé, ainsi, la répartition des élèves s’effectue sans distinction et l’hétérogénéité des classes est établie.
À l’école élémentaire, le concept d’hétérogénéité existe depuis longtemps, l’école accueille tous les enfants pour leur apprendre à lire, écrire et compter.
D’après les postulats de Burns, dans une classe : Il n’y a pas deux apprenants qui progressent à la même vitesse. Il n’y a pas deux apprenants qui soient prêts à apprendre en même temps. Il n’y a pas deux apprenants qui utilisent les mêmes techniques d’étude.
Il n’y a pas deux apprenants qui résolvent les problèmes exactement de la même manière. Il n’y a pas deux apprenants qui possèdent le même répertoire de comportements. Il n’y a pas deux apprenants qui possèdent le même profil d’intérêt. Il n’y a pas deux apprenants qui soient motivés pour atteindre les mêmes buts.
Définition de la pédagogie différenciée
Tout enseignant, doit considérer sa classe comme une somme d’élèves ayant tous des besoins particuliers. Il lui faut donc s’adapter et différencier ses pratiques. Philippe Perrenoud, insiste sur la nécessité de reconsidérer positivement les différences. En effet, une des missions du professeur des écoles est de prendre en compte la diversité des élèves à travers la pratique de la pédagogie différenciée. Cette dernière, se base sur une acceptation de la discrimination positive c’est-à-dire donner à chacun des contenus et des moyens adaptés à ses besoins afin de compenser les inégalités sociales. Selon H. Przesmycki la pédagogie différenciée se définit comme :
« une pédagogie individualisée, qui reconnaît l’élève comme une personne ayant ses représentations propres de la situation de formation. »
« une pédagogie variée qui propose un éventail de démarches, selon des rythmes d’apprentissage différents, dans des durées variables et sur des supports différents ».
Pour Philippe Perrenoud, différencier c’est : «rompre avec la pédagogie frontale, la même leçon, les mêmes exercices pour tous, c’est surtout mettre en place une organisation du travail et des dispositifs didactiques qui placent régulièrement chacun, chacune dans une situation optimale.» Philippe Perrenoud précise qu’il est important d’utiliser toutes les ressources disponibles afin que les activités mises en place engendrent les situations didactiques les plus fécondes pour chaque élève et que chacun soit amené à son plus haut niveau de compétence. S. Laurent corrobore cette idée, en indiquant que la pratique de la différenciation pédagogique consiste à organiser la classe de façon à ce que chaque élève apprenne dans les conditions qui lui conviennent le mieux. Différencier la pédagogie, c’est donc selon elle « mettre en place dans une classe ou dans une école des dispositifs de traitement des difficultés des élèves pour faciliter l’atteinte des objectifs de l’enseignement. » S. Laurent insiste donc sur le fait qu’il ne s’agit pas de différencier les objectifs, mais de permettre à tous les élèves d’atteindre les mêmes objectifs par des voies différentes. Ainsi, l’hétérogénéité entre les humains étant de fait, ce fait constitue selon Philippe Perrenoud, la justification principale de la pédagogie différenciée. Cette dernière serait donc une réponse face à l’hétérogénéité des élèves. La pédagogie différenciée, ne s’adresse pas seulement aux élèves en difficulté mais à tous les élèves, y compris ceux qui sont « performants » et qui souvent, s’ennuient à l’école.
Nous pouvons faire le lien avec la conférence « pratiques différenciées », dans le cadre de l’UE , proposée en cette année de master, lors de laquelle la pédagogie différenciée a été présentée comme un «ensemble des dispositions mises en œuvre par l’enseignant, qu’il s’agisse de la mise en forme du savoir, des activités proposées de l’organisation temporelle et spatiale de la classe, des regroupements d’élèves, des règles instituées dans la classes des formes d’évaluation». L’école étant inclusive, la pédagogie différenciée est donc un geste professionnel à prendre en compte. D’autre part, nous avons pu constater lors de cette conférence que considérer tous les élèves comme différents était un premier pas vers la pédagogie différenciée et qu’en tant qu’enseignant pour que tous les élèves apprennent, il faut mettre en place et multiplier des dispositifs de pédagogie différenciée.
Les dispositifs de la différenciation pédagogique
D’après Jean-Marie Gilig, il existe plusieurs dispositifs de différenciation pédagogique. Différenciation des contenus d’apprentissage : C’est ce sur quoi la tache va porter. Lors de phases d’entrainements, à un moment de la semaine pendant lequel l’enseignant remédie aux difficultés de chacun, la classe est divisée en groupes et chaque groupe travaille sur des contenus différents. Les élèves sont donc répartis dans les groupes en fonction de leurs lacunes. Certains élèves peuvent apprendre, comprendre et faire certaines choses pendant que d’autres apprennent, comprennent et font d’autres choses. Différencier les contenus permet de détecter les forces et les faiblesses des élèves.
Différenciation des processus d’apprentissage :La classe est divisée en plusieurs groupes qui travaillent en simultané sur un même objectif mais impliquant des processus d’apprentissage différents. Les situations d’apprentissage varient en tenant compte des différentes façons dont les élèves traitent l’information pour favoriser l’apprentissage visé.
Les stratégies d’enseignement privilégiées doivent être suffisamment hétérogènes de façon à tenir compte de la diversité des styles cognitifs présents dans la classe. Ces stratégies sont de nature diverse : il y a les stratégies socioconstructivistes (projet, tutorat, apprentissage coopératif), les stratégies interactives (débat et groupes de discussion), les stratégies de travail individuel et les stratégies magistrales(démonstrations).
Différenciation des structures :Il s’agit ici des modalités d’organisation de la tâche. Cette différenciation peut se traduire par une alternance entre des moments de travail collectif, des moments de travail en groupe et des moments de travail individuel. Cela peut par exemple se traduire par des consignes qui sont données en collectif, des groupes de travail constitués par l’enseignant qui devront travailler ensemble lors d’une phase de recherche et enfin un retour au groupe classe pour faire une mise en commun. Tous les élèves travaillent alors autour du même type de tâches.
Différenciation des productions :Ce sont les produits ou les résultats de la tâche et la manière dont l’élève montre ce qu’il a appris.
C’est permettre aux élèves d’utiliser des moyens différents pour montrer ce qu’ils ont appris ou compris du contenu, qui est une tâche commune à tous les élèves. Les formes que peuvent prendre les productions de l’élève sont diverses : production écrite ou orale, exposition… Bruno Robbes distingue deux types de différenciation :
La différenciation successive qui consiste à alterner les outils et les situations dans le cadre d’une leçon collective (travail en collectif, puis en petit groupe avec ensuite, une mise en commun), dans le cadre d’une séance commune à tous. Il s’agit de faire varier les supports, les outils, les consignes, les situations manipulatrices ou déjà abstraites selon le stade où se situent les élèves. C’est l’enseignant qui conserve la direction du processus pédagogique mais il introduit la flexibilité dans son déroulement faisant alterner les démarches qui correspondent au mieux aux capacités de chaque élève. Cette différenciation se pratique donc dans une séance commune, avec des objectifs d’apprentissages communs mais avec des voies et des démarches multiples pour les atteindre.
La différenciation simultanée qui consiste à faire travailler en même temps des élèves sur des taches différentes adaptées à leurs besoins. Ce mode de fonctionnement d’une classe renvoie à la pratique des techniques Freinet où par exemple, pendant que certains élèves rédigent un texte individuellement, d’autres travaillent sur des fiches autocorrectives en mathématiques indiquées sur un plan de travail, d’autres encore peuvent réaliser une expérimentation en sciences avec des fiches guides pendant qu’un petit groupe fait une recherche documentaire. Cette organisation est mise en place sous la forme d’une contractualisation entre l’adulte et les élèves qui amène ces derniers à gérer leurs activités selon une démarche progressive et raisonnée. D’autre part, cette organisation se met en place à partir d’une évaluation préalable des acquis et non acquis, dans une perspective de parvenir à une plus grande maitrise des objectifs visés. Il s’agit donc, d’évaluer les besoins des élèves par une évaluation diagnostique, de programmer les compétences individuelles qui permettent de les traiter, de mettre à disposition les ressources et le matériel adéquats, et enfin d’élaborer les plans de travail avec les élèves et de les réguler de manière permanente. Le rôle de l’enseignant dans ce dispositif est de pratiquer une relation d’aide et d’évaluer les résultats obtenus.
Le travail de groupe
Objectif du travail de groupe : Le travail de groupe peut être considéré comme un scénario pédagogique temporaire créant une situation différente des situations frontales habituelles. Ce mode de fonctionnement a un objectif qui est de faire des élèves, des acteurs de leurs apprentissages, gérant leur travail avec esprit d’initiative et autonomie. Le travail de groupe est un outil pédagogique privilégié pour permettre aux élèves de construire leur savoir à travers une activité, un projet commun. Il s’agit de regrouper les élèves en divisant la classe en petits groupes afin de réaliser une même activité correspondant à un objectif fixé par l’enseignant.
Selon M. Barlow la règle d’or du travail de groupe est « ne jamais proposer aux élèves d’effectuer en groupe une activité qu’ils pourraient accomplir aussi bien sinon mieux isolément ». L’enseignant doit se demander si dans le contexte, le travail de groupe est une façon d’acquérir plus vite, plus durablement et plus efficacement les savoirs et les savoir-faire considérés. Maria Alice Médioni, corrobore cette idée en avançant que l’objectif du travail de groupe n’est pas de répondre à une question simple, ceci pouvant se faire individuellement. Elle ajoute que « l’objectif du groupe c’est d’ouvrir des pistes, d’émettre des hypothèses ce qui ne peut se faire qu’avec d’autres que soi si on veut avoir plusieurs pistes et les hypothèses les plus variées et néanmoins possibles. Le point de vue des autres, aide à envisager ce qu’on n’avait pas vu soi-même et à examiner la pertinence d’une proposition ».
Pour M. Barlow, le travail de groupe permet de faire ressortir un avantage quantitatif puisque les élèves vont multiplier les temps de parole et que chaque élève pourra s’exprimer dans le groupe. Nous pouvons donc évoquer un objectif de socialisation puisqu’il s’agit pour les élèves d’apprendre à organiser un travail en commun, de planifier les étapes de celui-ci et de s’intégrer dans un groupe. L’attitude sociale des élèves est donc importante. Selon P. Meirieu, il faudra amener les élèves à s’interroger sur les conditions nécessaires au travail de groupe et à ce que chacun peut faire pour améliorer les relations sociales au sein de ce groupe.
D’autre part, le travail de groupe permet également de mettre en avant un avantage qualitatif, dans le sens où l’échange entre pairs peut enrichir chacun. En effet, les élèves vont bénéficier d’une multitude de points de vue sur l’objet d’étude, ce qui va leur permettre de mettre en commun leurs perceptions, les procédures de résolution de problème. De plus, raisonner à haute voix est bénéfique pour soi-même et permet de clarifier ses pensées. L’apport n’est donc pas à
sens unique, chaque élève reçoit et apporte au groupe. Un autre objectif du travail en équipe, est donc la confrontation car l’interaction entre les pairs va permettre de déstabiliser des représentations ou des préjugés et inciter les élèves à argumenter et justifier leurs points de vues. Cette confrontation avec autrui et la divergence des points de vue est ce que l’on nomme à la suite de Piaget, le conflit socio-cognitif. Pour conclure sur les objectifs du travail en groupe, nous pouvons citer Philipe Meirieu, qui relève cinq objectifs dont certains ont déjà été cités précédemment, et les questions qui en découlent pour chacun. Chaque groupe qui finit son travail en collaboratif tentera de répondre à ces questions :
Objectif de finalisation : la question à laquelle devront répondre les élèves sera « sur quelles difficultés le groupe a-t-il buté ? Que convient-il d’apprendre maintenant pour que chacun soit capable d’affronter ces difficultés tout seul ? ».
Objectif de socialisation : « Que découvrez-vous sur les conditions nécessaires d’un travail collectif? Qu’est-ce que chacun peut faire pour améliorer les relations sociales au sein du groupe ou de l’équipe ? ».
Objectif de monitorat : « Qu’as-tu appris de l’autre ? Soit qu’il t’a expliqué et que tu n’avais pas compris, soit qu’il t’a contraint à expliquer et que tu as pu ainsi véritablement t’approprier ? » Objectif de confrontation : « Sur quelles conceptions chacun a-t-il changé d’avis ? Pourquoi ? As-tu été vraiment convaincu ? Comment ? Pourrais-tu convaincre quelqu’un, à ton tour de ce que tu as découvert ? ».
Objectif d’apprentissage : « Qu’est-ce que chacun a appris pour lui grâce à sa participation à la tâche commune ? »
Ainsi, inciter les élèves à travailler en équipes sous-entend d’amener les élèves à mettre en commun leurs richesses, à les étayer pour construire ensemble leur intelligence. C’est une idée corroborée par Yves Chevallard, pour qui le savoir étant l’enjeu de la relation didactique, est mis en scène à travers les interactions des élèves avec un ensemble d’objets en relation avec ce savoir visé. D’après lui, les attentes réciproques entre élèves et enseignant se mettent alors en place, souvent sans être formulées, en étant implicites, afin que la relation didactique puisse se poursuivre et qu’un apprentissage se réalise.
D’autre part, «mettre en commun leurs richesses» renvoie vers la notion de milieu didactique développé par Brousseau, en référence aux objets présents dans la situation au démarrage ou faisant leur apparition au fur et à mesure de l’interaction de l’élève avec la situation.
Table des matières
Introduction
I. Cadre théorique
1. Contexte institutionnel
2. Définition de l’hétérogénéité
3. Gestion de l’hétérogénéité
a) Définition de la pédagogie différenciée
b) Les dispositifs de la différenciation pédagogique
4. Le travail de groupe
II. Problématique et hypothèses
III. Méthodologie de recherche
1. Population testée
2. Dispositif
IV. Dispositif pédagogique et résultats
1. Place de la reproduction de figures dans les instructions officielles les compétences mises en jeu lors de la reproduction de figures
2. Présentation des activités de reproduction et variables didactiques
3. Analyse des résultats
a) Première activité
b) Deuxième activité
c) Troisième activité
Conclusion
Bibliographie
Annexes