Genèse de la médecine psychosomatique :
On parle de médecine psychosomatique pour designer des aspects de la pathologie générale qui sont en relation avec la vie psychique consciente et surtout inconsciente [19]. Cette démarche s’est développée au cours du XIXe siècle. Pour la pathologie neurologique par exemple, tout a commencé par la recherche par les neurologues d’un signe objectif d’atteinte du système nerveux lorsqu’ils se trouvaient face à des manifestations neurologiques telles que la paralysie, des contractures, des mouvements anormaux, ou de l’hypertonicité. Ils devaient ainsi différencier, parmi les plaintes, lesquelles étaient ou non rattachées à une maladie précise du système nerveux [20]. Le Docteur CHARCOT a essayé de réaliser des tableaux cliniques pour dépister les symptômes qui pouvaient faire penser que les troubles n’avaient pas de support anatomique. Plus tard, Babinski à décrit un signe qui permettait de caractériser et de différencier les patients ayant une lésion anatomique, de ceux qui n’en ont pas : le Signe de Babinski qui se produit en cas de lésion du faisceau pyramidal. Babinski crée un terme pour caractériser les patients n’ayant pas de lésion anatomique : le Pithiatisme, symptôme réversible par persuasion.
Parmi les pithiatiques, il y a aussi bien les simulateurs (patient faisant semblant consciemment d’avoir une paralysie) et les hystériques (symptômes liés à une problématique inconsciente). Il est à noter que, les simulateurs ne sont pas considérés comme des individus souffrant de troubles fonctionnels. Au cours du XXe siècle, la multiplication et l’efficacité croissante des examens complémentaires, ont permis plus aisément que dans le passé, de retrouver des lésions en rapport avec le symptôme. Par conséquent, l’absence de lésions dépistées devient encore plus suspecte, mais on a vu l’essor des groupes BALINT, en référence Michael BALINT qui sont des groupes de médecins généralistes se réunissant pour essayer de comprendre le sens des symptômes. Ils ont mis en évidence la fréquence avec laquelle les malades présentent le trouble [21]. Pour Marty P., pour pouvoir dire qu’une maladie est psychosomatique on doit pouvoir établir « la relation précise qui existe entre la situation conflictuelle du malade et sa maladie» [22]. Cependant certaines maladies ont acquis le statut de maladies psychosomatiques telles que l’asthme, l’ulcère gastroduodénal, l’eczéma etc.… pour lesquels le rôle des facteurs psychiques est généralement admis. Certaines personnalités sont apparues comme plus exposées aux décompensations psychosomatiques et la notion de structure psychosomatique a été développée. Les sujets psychosomatiques présenteraient une certaine forme d’immaturité dans laquelle le psychisme parait insuffisamment armé pour éloigner les conflits et canaliser dans des conduites caractéristiques de la vie de relation. Les conflits se déchargent alors sur l’appareil viscero- végétatif. La pensée opératoire a été décrite par certains auteurs pour rendre compte de la personnalité psychosomatique : il s’agit d’une pensée collée à la réalité et au concret, dépourvue de capacité de fantasmatisation et de fantaisie.
Approches théoriques de la pathologie psychosomatique :
Les approches théoriques sont multiples, pour expliquer la pathologie psychosomatique. Le plus souvent, le mot psychosomatique s’applique à tout symptôme ou syndrome fonctionnel ou lésionnel dans lequel le médecin rencontre à la fois une expression physiologique et une expression psychologique manifestement coordonnées [23]. Dans une perspective neurophysiologique les théories du stress corticoviscérales à la suite de Pavlov, montrent qu’expérimentalement des altérations peuvent survenir lorsque le sujet est dans une situation insoluble, pressent un désagrément impossible à éviter, ou est dans l’impossibilité de prévoir l’issue. Pour la théorie de la communication, le malade se sert du corps, étant resté à un stade infantile et ne pouvant pas comprendre le langage symbolique. Sociologiquement on note l’augmentation de ces maladies dans les sociétés industrialisées fortement médicalisées rejetant la folie et le sacré, la maladie est un message, expression du triomphe de la médecine [24]. Les phénoménologues dans une optique, ont envisagé le sens du vécu de la maladie sans se préoccuper de l’étiologie ou du mécanisme. Pour les psychanalystes, la maladie psychosomatique n’a pas pour but d’exprimer une émotion, mais une réponse physiologique des organes viscéraux à un retour constant ou périodique des états émotionnels.
Elle se situe au niveau du système nerveux végétatif. Les conflits émotionnels sont en rapport avec les conflits affectifs prégénitaux de l’enfant où la dépendance joue un grand rôle. Le symptôme psychosomatique n’a pas de signification symbolique, il est l’expression directe dans le corps du conflit par rapport à l’organisation libidinale, quelque chose dans l’histoire apporte une contradiction rendant le fantasme impossible. La maladie psychosomatique est l’expression d’une contradiction avec la cohérence du mode du sujet. Par exemple, l’agressivité qui est une des émotions fondamentales est bien canalisée dans les conditions normales dans la société. Dans ces cas les pulsions et les sentiments agressifs peuvent s’exprimer dans une activité soit réelle (travail, jeux, sport, activité sexuelle, etc.) soit imaginaire (rêves), soit encore par des procédés de défense comme la projection (aspect clés de violences : boxes, films etc.…), tout au moins chaque fois que la décharge verbale est impossible et que le sujet doit garder sa contenance. Mais ces activités qui se substituent à l’agressivité brutale peuvent ne plus être suffisantes pour neutraliser les frustrations croissantes. L’agressivité peut alors rester intérieure et se décharger directement dans une réponse, symbole fonctionnel ou organique à des étapes différentes. C’est à dire de la pulsion à l’organisme sans passer par les modulations et les fantasmes de l’inconscient [25].
Importance et rôle de la psychothérapie dans la prise en charge des troubles fonctionnels et psychosomatiques :
1- Définition de la psychothérapie : On désigne sous le nom de psychothérapie toutes méthodes de traitement des désordres psychiques ou corporels qui utilisent les moyens ou procédés psychologiques. La psychothérapie est une branche de la psychologie. Etymologiquement le mot psychologie dérive du grec (psukhe) – âme et logos – science [26]. Elle est la science qui étudie les lois de la formation, des développements et du fonctionnement du psychisme ; par psychisme on comprend comme étant une fonction du cerveau dont le rôle consiste à refléter la réalité objective [27]. Théoriquement, la psychothérapie est faite de l’ensemble des interventions qui modifient le malade sans action directe sur le corps. Elle n’agirait que par la signification psychologique des moyens employés alors que les thérapeutiques somatiques agiraient par leurs propriétés physiques. C’est un acte par lequel un esprit vient au secours d’un autre dans une rencontre à base de compréhension et de restauration. Cette action sur le psychisme de l’autre s’établit dans une relation d’homme à homme.
L’instrument essentiel du psychothérapeute est le langage qui est un puissant moyen d’action sur le patient. La parole du thérapeute libère, réconcilie et resocialise, elle n’est point un simple instrument de communication. L’apport de la psychanalyse a été fondamentale pour les psychothérapies soit une méthode de traitement connue : Le terme psychanalyse érigé par Freud laisse place à de nombreuses catégories de psychothérapies: psychothérapies psychanalytiques, individuelles mais aussi les psychothérapies analytiques groupales [28]. Ces thérapies sont basées sur les relations d’objets, la psychologie du Moi et du Self. Mais aussi sur l’analyse de la relation transférentielle entre les membres du groupe et entre celui-ci et le thérapeute. C’est avec les outils issus de la psychanalyse que les progrès vont être les plus remarquables dans la psychothérapie de groupe. En 1905 Pratt est le premier à établir la thérapie de groupe comme méthode de traitement. Pratt en 1956 présentait ses travaux sous le nom de psychothérapie de groupe. C’est entre ces deux dates et notamment à partir de la deuxième guerre mondiale que l’avancée de la psychothérapie de groupe a été fulgurante. Burrow introduit le terme analyse de groupe en 1918. En 1931, L. G. Marsh utilise la méthode de refoulement de l’inspiration et de théorie du milieu. Suivront d’importants apports comme ceux de Bion: la situation émotionnelle du groupe était semblable aux premières étapes du développement du Moi (dans la lignée de Klein), De Schill en 1973, et d’autres encore, issus de la psychosociale (LE BON) ont joué un rôle important dans l’établissement de la (et des) psychothérapie(s) de groupes telles qu’on les connaît aujourd’hui.
I)-Introduction |