Génération d’états impulsionnels intriqués en quadratures

Génération d’états impulsionnels intriqués en quadratures

Selon Einstein, Podolsky et Rosen, l’existence d’états intriqués et l’expérience de pensée ci- dessus mettent en question la mécanique quantique en tant que théorie complète de description des phénomènes physiques. Le point clé de leur raisonnement est qu’ils conçoivent les phénomènes physiques dans une hypothèse réaliste et locale, c’est-à-dire que les mesures faites à un endroit ne peuvent influencer les résultats en un autre endroit, et que les propriétés physiques possèdent des valeurs indépendamment de l’observation. Cette publication a depuis suscité de nombreux et fructueux débats, des échanges avec Niels Bohr aux tests expérimentaux des inégalités de Bell, qui seront abordés au chapitre 11.Si cette interrogation est d’une importance capitale pour la compréhension des fondements de la physique quantique, une autre lecture de l’article EPR [132] offre une application tout aussi essentielle pour l’information quantique : l’exploitation des corrélations quantiques d’états intriqués. L’aspect important des états EPR est qu’ils peuvent offrir des corrélations plus fortes qu’aucun système classique. L’intrication a depuis été reconnue comme une ressource physique essentielle pour effectuer des tâches nouvelles de traitement de l’information quantique ou pour améliorer l’efficacité de certains autres protocoles [141, 1, 3]. Parmi ces applications pour les variables continues, on peut donner quelques références pour la téléportation quantique [158, 146, 150], le codage dense [162, 153], certains protocoles spécifiques de cryptographie quantique [62, 63, 64, 67, 69, 70], les répéteurs quantiques [160, 127] ou le calcul quantique [161, 3].

Dans le domaine spécifique des recherches entreprises lors de ce travail de thèse, le rôle de l’intrication quantique dans les protocoles de cryptographie avec des états cohérents a été discuté au chapitre 6, où il est démontré que nos protocoles à états cohérents exploitent une intrication quantique “virtuelle” pour garantir la sécurité du transfert. Nous avons de plus introduit un protocole spécifique exploitant des états EPR qui dans certaines conditions peut s’avérer plus avantageux et plus robuste que les protocoles à états cohérents. Par ailleurs, comme nous l’avons souligné dans l’introduction du chapitre 9, l’utilisation réelle de l’intrication est une condition indispensable pour mettre en œuvre des procédures de distillation quantique afin d’améliorer la portée des protocoles actuels de cryptographie quantique. Il est donc très intéressant de pour- suivre notre développement de ressources de base pour le traitement de l’information quantique avec des variables continues en y adjoignant un dispositif de production d’états EPR [157].Forts de nos expériences dans la génération d’états comprimés et d’états non-gaussiens monomodes (chapitres 7 et 9), nous reprenons le montage expérimental pour produire des fais- ceaux intriqués en quadratures à partir de l’amplification paramétrique non dégénérée d’impul- sions femtosecondes. Comme pour toute ressource, une caractérisation de l’intrication expéri- mentale est nécessaire pour pouvoir exploiter tout son potentiel. Après une brève description de la manipulation de l’intrication en quadratures à la section 10.1, le dispositif d’amplification paramétrique classique non dégénérée est décrit lors de la section 10.2, avant d’aborder la ca- ractérisation expérimentale d’états impulsionnels intriqués (section 10.3).

Retour sur l’intrication avec des variables continues

Quelques précisions sont apportées sur l’intrication quantique entre les composantes de quadra- ture d’un état EPR à deux modes, en s’appuyant sur trois aspects : production, caractérisation et quantification.Plusieurs techniques différentes ont été développées au cours de ces dernières années pour produire des faisceaux intriqués en quadratures. Parmi les expériences ayant été menées, deux classes particulières émergent : l’amplification paramétrique non-dégénérée et le couplage sur une lame semi-réfléchissante de deux vides comprimés déphasés de π/2. L’amplification paramétrique a été utilisée pour la première expérience de production de faisceaux EPR en 1992 [143, 144]. Le couplage de deux vides comprimés a constitué la source nécessaire d’intrication pour la première réalisation de la téléportation quantique avec des variables continues en 1998 [146].), généralement dans un cristal de KTP en accord de phase de type II placé en cavité optique, formant ainsi un oscilla- teur paramétrique optique (OPO) [143, 144, 147, 149, 154, 155]. Suivant une autre approche, la combinaison de deux vides comprimés déphasés permet d’utiliser l’ensemble des techniques de production des états comprimés : oscillation paramétrique dégénérée [150, 151, 152, 153], effet Kerr dans des fibres optiques [148, 199]. . . Pour ces différentes expériences, les corrélations en quadratures mesurées sont typiquement de l’ordre de 4 dB en dessous du niveau de bruit quantique standard, mais la possibilité d’utiliser des sources d’états fortement comprimés per- met d’atteindre des corrélations de plus de 7 dB [115]. Citons enfin la possibilité de produire des faisceaux intriqués en quadrature par l’interaction entre un champ cohérent et un nuage froid d’atomes de Cesium placés dans une cavité de forte finesse [200, 201].

 

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