Généralités sur les principales urgences digestives

PRISE EN CHARGE PERIOPERATOIRE DES URGENCES CHIRURGICALES ABDOMINALES CHEZ L’ADULTE

Abdomen et appareil digestif

Abdomen L’abdomen est la partie du tronc située sous le thorax. La cavité abdominale s’étend vers le haut jusqu’au 4ème espace intercostal et se poursuit en bas par la cavité pelvienne. Elle contient le péritoine et les viscères. 

La paroi abdominale antérieure

La cavité abdominale est limitée en haut par le processus xiphoïde et le rebord costal, en arrière par la colonne vertébrale et en bas par les parties supérieures des os pelviens. Les feuillets qui la constituent sont la peau, le fascia superfiscialis, les muscles et leurs fascias, le fascia extrapéritonéal et le péritoine pariétal (figure 1) [26]. 

Péritoine

Vaste séreuse de 1,5 à 2 m2, le péritoine est composé de deux feuillets : un feuillet pariétal (10 % de la surface), qui couvre la partie interne de la paroi abdominale et du pelvis, incluant le diaphragme, et un feuillet viscéral (90 % de la surface), qui recouvre la partie intra-abdominale du tractus digestif, le foie et la rate, et forme le grand épiploon et le mésentère. Chaque feuillet est constitué d’une monocouche de cellules mésothéliales aplaties à contours polygonaux. Sur le plan embryonnaire, ces cellules mésothéliales dérivent du mésoderme, comme les cellules endothéliales des vaisseaux sanguins, ce qui leur confèrent des propriétés communes avec ces dernières. Elles sont capables d’exprimer à leur surface membranaire des marqueurs spécifiques qui leur permettent de provoquer la migration des neutrophiles, de présenter des antigènes aux cellules immunitaires, et de produire des cytokines, des facteurs de croissance, des facteurs d’activation et de désactivation du plasminogène tissulaire, etc. Ces propriétés leur octroient un rôle considérable dans la physiopathologie des péritonites. Les cellules mésothéliales péritonéales sécrètent également un liquide visqueux aux propriétés proches de celles du surfactant, qui contient une petite quantité de cellules [9] (essentiellement des lymphocytes, des polynucléaires neutrophiles et des macrophages, qui proviennent du grand épiploon, des cellules mésothéliales desquamées, et des cellules dendritiques). Ce liquide, à l’état normal d’un volume d’environ 100 ml [78], présente essentiellement deux fonctions : d’une part, il permet d’assurer le glissement des viscères intra-abdominaux au cours du péristaltisme ; d’autre part, il joue un rôle majeur de défense contre un éventuel inoculum [84]. En effet, le liquide péritonéal est soumis à un flux constant, de direction céphalique, qui l’amène vers la région sousdiaphragmatique; dans cette zone, la couche de cellules mésothéliales est 8 fenêtrée par des orifices directement reliés au réseau lymphatique, ce qui permet son absorption [84]. Ainsi, il suffit de quelques minutes pour commencer à nettoyer la cavité péritonéale en cas d’inoculum. Par ailleurs, la taille des fenêtres diaphragmatiques est modulable, notamment au cours des processus inflammatoires, ce qui permet, en cas de besoin, d’augmenter la résorption lymphatique. Chez l’adulte, le débit sanguin splanchnique total est estimé entre 1 et 2,4 l min–1. Le péritoine est très richement vascularisé. La vascularisation est issue de deux sources : la première en provenance des artères mésentériques supérieure et inférieure, avec retour veineux via la veine porte ; la seconde en provenance des artères iliaques, lombaires, circonflexes, épigastriques et intercostales, avec retour veineux indépendant du système porte [78]. Il existe un réseau capillaire très riche et très complexe. Les différentes ramifications assurent, au niveau des mésos, la vascularisation intestinale, et traversent successivement la séreuse, la musculeuse et la sous-muqueuse. En cas de dilatation de la cavité intestinale, ces ramifications artérielles peuvent être étirées et/ou comprimées, ce qui compromet la vascularisation de la paroi intestinale. Le réseau lymphatique du péritoine est très étendu et permet, comme pour les autres organes, de drainer le liquide provenant de l’interstitium. Comme nous l’avons vu plus haut, le drainage se fait de manière autonome, par voie ascendante, par l’intermédiaire des fenêtres situées dans la surface sousdiaphragmatique, vers le médiastin et les vaisseaux de la base du cou. Plusieurs facteurs physiologiques peuvent modifier le débit du drainage, tels la posture, la variation de pression hydrostatique intrapéritonéale, l’inflammation, ou certains médicaments [78]. L’innervation du péritoine est également très riche, et permet de véhiculer des informations sensitives, ainsi que des phénomènes réflexes lors des agressions : le péritoine pariétal antérieur est innervé par les six derniers nerfs intercostaux, 9 le postérieur par le plexus lombaire, le diaphragmatique par le phrénique et les nerfs intercostaux, le pelvien par les nerfs honteux et hypogastriques, et le péritoine viscéral par les nerfs splanchniques. Au niveau du péritoine pariétal antérieur, toute irritation ou manipulation déclenche une douleur éventuellement accompagnée d’une contracture musculaire si le stimulus est intense. Le péritoine viscéral est, quant à lui, sensible à d’autres stimuli (traction sur les mésos, distension de la lumière digestive, des espaces tissulaires, des capsules des organes pleins). Du fait de ses caractéristiques anatomiques, le péritoine se comporte comme une membrane semi-perméable, ce qui permet un échange bilatéral d’ions et de liquide : cette propriété, qui concerne essentiellement le péritoine viscéral, est utilisée lors de la dialyse péritonéale [78]. La capacité d’absorption d’eau est normalement de 52 ml·h–1, mais elle peut augmenter lors de l’inflammation. Les substances absorbées sont essentiellement véhiculées via le système porte (50 %), cave (33 %), et le canal thoracique (17 %). Enfin, le péritoine est un organe capable d’une grande régénération, même en cas de résection importante, cette dernière s’effectuant en 4 semaines environ.

Grand épiploon

Tablier graisseux s’étendant sur toute la partie antérieure du péritoine pariétal, le grand épiploon joue un rôle capital dans la défense contre l’infection. Très richement vascularisé, il présente un réseau capillaire particulier, qui repose presque au contact du mésothélium, et dont les circonvolutions sont nommées « glomérules », du fait de leur analogie structurale avec le glomérule rénal [59]. À proximité des lits vasculaires, on retrouve des « taches laiteuses » décrites par Ranvier en 1874, qui correspondent à des agrégats de leucocytes périvasculaires ; ces amas, dont le nombre diminue avec l’âge, contiennent essentiellement des macrophages à différents stades de maturation (70 % des 10 cellules), et des lymphocytes B et T (10 % chacun). Cette configuration anatomique particulière du réseau capillaire à proximité directe du mésothélium est adaptée pour permettre, en cas de besoin, la migration rapide d’une grande quantité de leucocytes [66]. Le grand épiploon est mobile, et balaie la surface antérieure de la masse intestinale. Il présente essentiellement trois fonctions. Il est capable d’adhérer à des corps étrangers intrapéritonéaux, comme les drains ou les cathéters de dialyse intrapéritonéale. En cas d’agression bactérienne, il possède une grande capacité à absorber et éliminer les bactéries : c’est le deuxième site, après les fenêtres diaphragmatiques que nous avons décrites précédemment, à présenter cette propriété. En cas de péritonite, le grand épiploon est le principal site à promouvoir la migration d’une grande quantité de macrophages vers la cavité péritonéale : d’une part les différents médiateurs de l’inflammation, sécrétés par les cellules mésothéliales, activent directement les macrophages présents dans les taches laiteuses, et favorisent la venue de neutrophiles provenant de la circulation systémique ; d’autre part, le débit sanguin local est capable d’augmenter, ce qui accélère les échanges [66]. En adhérant aux foyers infectieux, le grand épiploon produit un exsudat riche en fibrine, à l’origine de fausses membranes constituées d’éléments phagocytaires. Ces fausses membranes limitent l’extension de l’infection en la cloisonnant. Enfin, le grand épiploon est doué d’une capacité d’angiogenèse, ce qui a ouvert la voie à de nombreuses perspectives thérapeutiques, notamment en cas de chirurgie reconstructrice .

Table des matières

INTRODUCTION
Première partie
Rappels .
1. Rappels anatomo-physiologiques
1.1. Abdomen et appareil digestif
1.1.1. Abdomen
1.1.1.1. La paroi abdominale antérieure
1.1.1.2. Péritoine
1.1.1.2.1. Grand épiploon
1.1.2. Appareil digestif
1.1.2.1. L’œsophage
1.1.2.2. L’estomac
1.1.2.2.1. Données anatomiques
1.1.2.2.2. Sécrétion gastrique et sa régulation
1.1.2.3. L’intestin grêle et le colon
1.1.2.3.1. Anatomie descriptive
1.1.2.4. Foie
1.1.2.5. Le pancréas
1.1.2.6. La rate
2. Généralités sur les principales urgences digestives
2.1. Appendicites aigues
2.1.1. Définition
2.1.2. Etio-physiopathologie
2.2. Occlusion intestinale aigue
2.2.1. Définition
2.2.2. Etiologies
2.2.3. Mécanisme
2.2.4. Occlusion et troisième secteur
2.3. Hernie étranglée
2.3.1. Définition
2.3.2. Physiopathologie
2.4. Les péritonites aigues
2.4.1. Définition
2.4.2. Etiologies
2.4.3. Physiopathologie
3. Notion d’estomac plein
4. Prise en charge périopératoire des urgences abdominales
4.1. Etape préopératoire
4.1.1. Apprécier le degré d’urgence
4.1.2. Évaluation préopératoire
4.1.2.1. Hypovolémie et insuffisance rénale
4.1.2.2. Atteinte pulmonaire
4.1.2.3. État cardiovasculaire
4.1.2.4. Conditions d’intubation
4.1.2 .5. La classification ASA
4.1.3. Réanimation préopératoire
4.1.3.1. Corrections des anomalies hémodynamiques
4.1.3.2. Monitorage hémodynamique
4.1.3.2.1. Critères cliniques d’efficacité
4.1.3.2.2. Échographie transoesophagienne
4.2. Période peropératoire
4.2.1. Choix des drogues
4.2.1.1. Les hypnotiques
4.2.1.2. Les morphinomimétiques
4.2.1.3. Les curares
4.2.1.4. Les agents volatils
4.2.1.4.1. Les halogénés
4.2.1.4.2. Le protoxyde d’azote
4.2.2. Monitorage peropératoire
4.2.2.1. Monitorage hémodynamique
4.2.2.1.1. Tracés électrocardioscopiques
4.2.2.1.2. Mesure non invasive de la pression artérielle
4.2.2.1.3. Monitorage hémodynamique invasif
4.2.2.2. Monitorage respiratoire
4.2.2.2.1. Oxymétrie de pouls
4.2.2.2.2. Capnographie
4.2.2.2.3. Monitorage de la température
4.2.3. Préoxygénation
4.2.4. Induction anesthésique
4.2.4.1. Induction à séquence rapide
4.2.4.2. Manœuvre de Sellick ou compression cricoïdienne
4.2.5. Entretien de l’anesthésie
4.2.6. Curarisation peropératoire
4.3. La période postopératoire
DEUXIEME PARTIE  MATERIEL ET METHODE
1. Matériel et méthode
1.1. Cadre d’étude
1.1.1. Urgences chirurgicales
1.1.2. Service d’anesthésie-réanimation
1.1.3. Déroulement de la garde
1.2. Type et durée de l’étude
1.3. Critères d’inclusion
1.5. Critères d’exclusion
1.6. Le recueil des données
1.7. Méthodologie
1.8. Paramètres étudiés
RESULTATS
2. Résultats
2.1. Données épidémiologiques
2.1.1. Nombre de patients
2.1.3. Sexe
2.1.4. Les pathologies chirurgicales
2.1.5. Indications chirurgicales
2.2. Données cliniques
2.2.1. Terrains et antécédents
2.2.2. Clinique
2.3. Examens paracliniques
2.3.1. Le groupage sanguin
2.3.2. Le taux d’hémoglobine
2.3.3. Le bilan d’hémostase
2.3.4. L’ionogramme sanguin
2.3.5. Le bilan rénal
2.3.6. Le bilan hépatique
2.3.7. Les examens d’imagerie
2.4. Classes ASA
2.5. Prise en charge anesthésique
2.5.1. Préparation pré opératoire
2.5.2. Période peropératoire
2.5.2.1. Antibioprophylaxie
2.5.2.2. Antibiothérapie
2.5.2.3. Type d’anesthésie
2.5.2.4. Entretien de l’anesthésie
2.5.2.5. Remplissage peropératoire et monitorage
2.5.2.6. Pertes sanguines et transfusions
2.5.2.7. Durée de chirurgie
2.5.2.8. Durée de l’anesthésie
2.5.2.9. Données de l’exploration
2.5.2.10. Geste chirurgical réalisé
2.5.2.11. Incidents peropératoires
2.5.3. Période post-opératoire
2.5.3.1. Délai d’extubation
2.5.3.2. Transfert en réanimation
2.5.3.3. Analgésie post opératoire
2.5.3.4. Anticoagulation préventive
2.6. Evolution
2.6.1. Evolution favorable
2.6.2. Evolution défavorable
2.7. Etude analytique
DISCUSSION
3. Discussion
3.1. Aspects épidémiologiques
3.1.1. Age
3.1.2. Le sexe
3.1.3. Diagnostic
3.2. Données cliniques
3.2.1. Terrain et antécédents
3.2.2. Clinique
3.3. Examens paracliniques
3.3.1. Le groupage sanguin
3.3.2. Le taux d’hémoglobine
3.3.3. Les examens d’imagerie
3.4. Classification ASA
3.5. Prise en charge anesthésique
3.5.1. Préparation préopératoire
3.5.2. Période peropératoire
3.5.2.1. Technique anesthésique
3.5.2.1.1. Anesthésie générale
3.5.2.1.2. Anesthésie locorégionale
3.5.2.2. Remplissage per opératoire et monitorage
3.5.2.3. Pertes sanguines et transfusion
3.5.2.4. Durée de l’anesthésie
3.5.2.5. Incidents peropératoires
3.5.3. Période postopératoire
3.5.3.1. Transfert en réanimation
3.5.3.2. Analgésie post-opératoire
3.5.3.3. Anticoagulation préventive
3.6. Evolution
CONCLUSION

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