Généralités sur les modèles de bioaccumulation Quels outils Quelles utilisations
Pendant des années, la description des organismes et des systèmes était la principale méthode appliquée par les biologistes et les naturalistes. Ainsi, après une série d’observations judicieuses, les organismes et leur comportement étaient décrits, résultats d’expériences après un éventuel filtrage statistique. Une autre voie d’approche est la méthode scientifique de critique rationaliste, à savoir la formulation d’hypothèses de telle manière qu’elles peuvent être désapprouvées si elles sont fausses et l’expérience adéquate pour refuser ces hypothèses. Dés que les systèmes marins sont approchés, les échelles d’espace et de temps associées aux processus sont tellement diverses et complexes que la modélisation s’est avérée un outil complémentaire indispensable. Un modèle mathématique est une formulation graphique, symbolique ou numérique d’une série d’hypothèses établies de telle façon qu’elles puissent être traitées par des opérations mathématiques. Une fois validé, un modèle permet de réaliser des simulations pour établir l’importance relative de ces différents processus. Un modèle mathématique d’un écosystème peut être développé en quantifiant les interactions biogéochimiques en équations mathématiques et en mettant en relation ces équations par des programmes informatiques. Ce sont des outils importants pour formaliser les connaissances et pour valider des hypothèses incorporées dans celles ci. Ils nous aident à comprendre un processus en testant des théories mécanistiques. Est ce que notre théorie (traduite en équations mathématiques) est suffisante pour décrire le phénomène observé dans la réalité ? Le compromis entre la complexité et le réalisme du modèle est central pour tout exercice de modélisation. La plupart des modèles complexes peuvent être très réalistes, mais du fait de la considération de paramètres non-connus, il devient impossible de les valider. De tels modèles fournissent une légère compréhension du processus étudié mais ne permettent pas d’augmenter la confiance en une théorie. En effet, ils sont souvent confrontés à un manque de connaissances concernant les processus biologiques clés et leurs mécanismes qui ne peuvent pas être remplacés par des expertises mathématiques (Kuiper, 1984). Le dilemme en modélisation est de décrire le plus grand nombre de processus sans en sacrifier le réalisme et l’applicabilité. Dans ce chapitre, une étude bibliographique sur les modèles de bioaccumulation est présentée afin de faire une synthèse des différentes approches de modélisation, d’en dégager les structures de base ainsi que les principaux processus considérés et de définir les questions auxquelles ils permettent de répondre. Les modèles cinétiques suivent les substances chimiques dans les organismes, les réseaux trophiques ou les écosystèmes (Veith et al., 1979; Ernst, 1980; Zaranko et al., 1997). Plusieurs modèles thermodynamiques ont été proposés pour évaluer la distribution des composés entre les compartiments de l’environnement: air, eau, sédiment et organisme (Gobas, 1993). Les modèles décrivant la cinétique du contaminant peuvent être divisés en deux classes: les modèles cinétiques à compartiments, les modèles cinétiques à base physiologique ou énergétique (Landrum et al., 1992).
Les modèles cinétiques à compartiments
L’approche dominante de modélisation en écotoxicologie se fait via les modèles à compartiments. Mais leurs limitations et leur conditions d’usage ne sont pas toujours bien connues. Ce paragraphe tente d’expliquer la nature basique du modèle à un compartiment et de ses taux constants quelque soit la situation et explore ce qu’il se passe lorsque les hypothèses de régime stationnaire du milieu environnant ne sont pas respectées. Beaucoup d’études en biologie ou écotoxicologie peuvent être réalisées en utilisant des modèles à compartiments. Au fond, l’analyse commence par l’identification des compartiments, qui peuvent être n’importe quelle entité traitée de façon homogène au regard d’une entité transportée à partir ou vers ce compartiment. Pour être plus explicite, la focalisation se fait sur un problème écotoxicologique où les compartiments peuvent être une part de l’environnement (comme un lac ou un site expérimental), ou un organisme (comme un poisson ou un bivalve) ou une partie spécifique d’un organisme (comme l’estomac ou le soma). L’entité transportée est dans ce cas le contaminant. Le choix du compartiment ne dépend pas seulement du système décrit mais surtout de l’échelle spatiale et/ou temporelle du problème étudié. Par exemple, pour décrire le transfert de contaminants à travers une chaîne trophique, le poisson pourra être décrit comme un compartiment unique. Quand il s’agit des cinétiques de contamination dans un organe spécifique, il est nécessaire d’ajouter plus de compartiments pour décrire le système.