Généralités sur l’endométriose

 Généralités sur l’endométriose

L’endométriose est une pathologie gynécologique chronique définie comme la présence de tissu endométrial (glande et stroma) en dehors de la cavité utérine et du myomètre (1). Elle affecte autour de 10% des femmes en âge de procréer (2). Le diagnostic est porté dans un contexte d’exploration de douleurs pelviennes chroniques ou lors de bilan d’infertilité. Les principaux symptômes rapportés sont les dysménorrhées et dyspareunies qui peuvent conduire à une importante altération de la qualité de vie. En fonction du site d’atteinte, on distingue 3 formes souvent associées (3) : -l’endométriose péritonéale superficielle correspondant aux lésions à la surface du péritoine, sans le dépasser -l’atteinte ovarienne, c’est à dire l’endométriome -l’atteinte pelvienne profonde qui touche la paroi des organes pelviens et les espaces sous péritonéaux. Les formes extra pelviennes sont rares (pariétale, pleurale). L’endométriose pelvienne profonde affecterait 20% des femmes atteintes d’endométriose et serait principalement à l’origine des symptômes de la maladie et de l’infertilité (4,5). Il n’y a pas de consensus clairement établi pour la définition de l’endométriose pelvienne profonde: décrite arbitrairement par l’infiltration endométriosique sous péritonéale supérieure à 5mm (6) ou plus récemment comme une infiltration fibro-musculaire des organes ou espaces sous péritonéaux par du tissu endométrial indépendamment de la profondeur (7). Le compartiment postérieur qui correspond aux torus uterinum, ligaments utérosacrés (LUS), cul de sac de Douglas, paroi recto-sigmoïdienne et cloison recto-vaginale, est plus fréquemment atteint que le compartiment antérieur qui comprend la vessie, les bas uretères et la cloison vésico-vaginale. La physiopathologie de l’endométriose reste mal connue. L’hypothèse la plus largement acceptée est celle du reflux de tissu endométrial dans la cavité péritonéale par les trompes. Ce mécanisme dépendrait de plusieurs facteurs : des anomalies obstructives génitales, des altérations moléculaires endométriales, des facteurs génétiques, hormonaux, environnementaux et une réponse inflammatoire inadéquate (8). L’activité du tissu endométrial ectopique, tout comme l’endomètre, est régi par 4 les fluctuations hormonales physiologiques. Pour les patientes symptomatiques, le traitement de première intention est l’hormonothérapie (progestatifs et agonistes de la GnRH) par blocage du système gonadotrope. La chirurgie est le seul traitement curatif mais reste un traitement de seconde intention après échec ou intolérance au traitement médicamenteux. L’objectif est de réaliser une exérèse complète des lésions (9). La complexité du geste chirurgical va dépendre de l’extension de la maladie qui est évaluée le plus précisément possible en pré opératoire par un bilan d’imagerie crucial. L’examen gynécologique est souvent pauvre, voire normal (10) donc insuffisant pour le diagnostic d’endométriose. Par ailleurs, la présence de zones gâchettes musculaires douloureuses peut limiter l’évaluation des lésions au toucher vaginal. La classification lésionnelle la plus fréquemment utilisée est le score révisé de la American Society for Reproductive Medicine (rASRM) (11) basé principalement sur l’évaluation chirurgicale des locations péritonéales superficielles, adhérences et du nombre et de la taille des endométriomes ovariens. Elle apparaît donc peu adéquate pour détailler et évaluer la sévérité des formes d’endométriose infiltratives profondes. L’échographie endovaginale est réalisée en première intention pour le bilan d’endométriose de par son faible cout et sa facilité d’accès avec une bonne efficacité dans le diagnostic des lésions ovariennes et pelviennes profondes (12). L’IRM est réalisée en seconde intention du fait de sa disponibilité moindre mais c’est l’examen d’imagerie non invasif le plus pertinent pour le bilan d’extension des lésions avec une haute résolution spatiale (13); son recours est quasiment indispensable lorsque la chirurgie est envisagée (14). L’évaluation des lésions péritonéales superficielles n’est pas réalisable en IRM et reste l’apanage de la cœlioscopie (15). 

L’atteinte endométriosique des ligaments utérosacrés en IRM 

Selon Bazot et Tardivon (16), les LUS correspondent à la partie la plus haute et postérieure des lames sacro-recto-génito-pubiennes insérées sur le plancher pelvien étendues de la symphyse pubienne au sacrum. Les LUS relient la face postérieure du col utérin à la face antérieure des premières pièces sacrées. L’origine commune des ligaments droit et gauche est en arrière de l’utérus à proximité de l’isthme sur la ligne médiane où leur union correspond au torus uterinum. Les LUS et le torus sont la localisation la plus fréquente de l’endométriose profonde (5). L’atteinte peut être uni- ou bilatérale, isolée ou associée à d’autres lésions. Lorsque 5 l’atteinte endométriosique profonde postérieure est sévère, s’étendant sur plusieurs organes (recto-sigmoïde, cul de sac de Douglas, paramètres, vagin), les LUS ne sont plus individualisables en imagerie car englobés au sein du processus pathologique général (16). Dans la littérature, la sensibilité et spécificité de l’IRM pour la détection de l’endométriose des LUS sont élevées, supérieures à 0,80 (17). Pourtant il n’y a pas de critère sémiologique en IRM clairement défini pour le diagnostic de l’atteinte endométriosique des LUS. Selon Bazot et Darai (18), il s’agit d’un nodule plus ou moins spiculé ou bien un épaississement régulier ou irrégulier en hypo signal sur les séquences en pondération T2 en arrière du vagin dans l’espace sous péritonéal. La présence d’implants hémorragiques se traduit par des hyper signaux focaux « spot » en pondération T1 comme pour les autres localisations d’endométriose. Plusieurs études ont cherché à déterminer un seuil de mesure de l’épaississement des ligaments (19,20). Les évolutions récentes de la technique en IRM permettent de diagnostiquer des lésions d’endométriose plus petites en taille. La réalisation systématique de coupes fines (2-3mm) en pondération T2 pour le bilan d’endométriose améliore l’analyse des LUS en IRM (21) qui ne sont presque pas visibles à l’état normal sur les séquences T2 classiques en coupes plus épaisses (5mm). L’inconvénient de ces progrès en termes de résolution est qu’il devient difficile pour le radiologue de différencier un LUS sain bien visible d’un ligament pathologique, en présence d’un discret épaississement isolé d’un ligament sans autre atteinte endométriosique pelvienne profonde retrouvée en IRM. Ces cas précis sont notamment problématiques lors des réunions de concertation pluridisciplinaires pour déterminer une prise en charge adaptée. Méconnaitre le diagnostic ou l’affirmer à tort peut avoir des conséquences néfastes sur la qualité de vie des patientes. La présence de lésions des LUS décrites en imagerie est un des éléments qui va conduire à l’indication chirurgicale. La cœlioscopie est considérée comme le gold standard pour le diagnostic des localisations d’endométriose pelvienne profonde notamment des LUS et permet dans le même temps la résection des lésions avec envoi des pièces pour analyse anatomo-pathologique (22). 6 2. Objectif de l’étude Le but de l’étude était d’évaluer les performances diagnostiques de critères morphologiques en IRM pour le diagnostic des lésions endométriosiques des LUS par rapport à la cœlioscopie plus particulièrement chez des patientes ne présentant pas d’autre lésion évidente d’endométriose pelvienne profonde postérieure en imagerie. 

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Matériel et méthodes 

Schéma de l’étude et population 

Il s’agit d’une étude rétrospective menée dans les services d’imagerie et de gynécologie à l’Assistance Publique des Hôpitaux de Marseille en France entre janvier 2016 et décembre 2020. La population éligible correspondait à l’ensemble des patientes dont le dossier a été discuté aux réunions de concertation pluridisciplinaires mensuelles pour la prise en charge de l’endométriose entre janvier 2016 et décembre 2020. Pour être incluses, les patientes devaient avoir été opérées par cœlioscopie avec un compterendu chirurgical détaillant la présence ou l’absence de lésion endométriosique sur les LUS. L’autre critère d’inclusion était la réalisation d’une IRM pelvienne dans l’année avant la chirurgie dans le cadre de suspicion d’endométriose. Les patientes avec une atteinte pelvienne profonde étendue notamment au rectum étaient exclues lorsque les LUS n’étaient pas individualisables des autres lésions en cœlioscopie, et donc qu’il n’était pas pertinent pour le chirurgien de décrire les ligaments dans le compte-rendu opératoire. Les patientes ayant été opérées sans précision sur l’atteinte des LUS dans le compte-rendu opératoire, ce qui était le cas pour les hysterectomies ou sclerothérapies annexielles par exemple, ont dû être exclues également. 

Technique de l’IRM

 Les patientes ont eu une IRM pelvienne avant la chirurgie dans le service d’imagerie médicale de l’Hôpital de la Timone à Marseille, France, lors de vacations spécialisées d’IRM pelvienne. Les séquences ont été acquises sur un appareil Siemens Spectra 3.0 Tesla selon un protocole standardisé conforme aux recommandations pour la prise en charge de l’endométriose (23). Ce protocole inclut 7 des séquences pondérées en T2 dans les plans sagittal, axial ± coronal et une séquence en coupes fines (2mm) dans un plan oblique axial perpendiculaire au long axe du col utérin c’est à dire le plan des LUS. Le protocole comprend une préparation digestive et la prise d’un antispasmodique afin de réduire le péristaltisme intestinal. Les séquences sont acquises avec des bandes de saturation abdominales antérieure et postérieure pour s’affranchir du signal de la graisse sous cutanée.

Relecture des IRM 

Chaque IRM a été relue indépendamment par deux radiologues spécialisés en imagerie gynécologique en aveugle des éléments cliniques, des autres compterendu d’imagerie et des résultats de la chirurgie. Les examens ont été analysés sur console Universal viewer (GE Healthcare, Buc, France). Après revue de la littérature et suite à une décision collégiale, les critères morphologiques retenus pour la description des LUS étaient la présence ou l’absence d’asymétrie, entre les 2 côtés, d’un épaississement, d’un aspect irrégulier, la rectitude d’un ou des LUS sur les séquences en pondération T2; la présence d’un nodule sur n’importe quelle séquence et la présence d’un hyper signal T1 focal sur un LUS. Les lecteurs devaient chacun remplir une grille pour déterminer les caractéristiques des LUS pour chaque coté, droit et gauche. Comme cela a été réalisé dans des études antérieures (19,20), il a été demandé aux radiologues de mesurer le diamètre proximal de chaque ligament sur la séquence T2 dans le plan sagittal ou axial. Les radiologues devaient également rapporter la présence de lésions d’endométriose ovarienne, superficielle ou profonde diagnostiquées selon des critères établis précédemment publiés (20) .

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