Depuis l’année 2000, les techniques isotopiques ont été utilisées pour la gestion et le développement des ressources en eau à Madagascar. Par le biais des projets financés principalement par l’Agence Internationale de l’Energie Atomique (AIEA) et la Fondation Internationale pour la Science, les techniques isotopiques ne cessent de s’améliorer et contribuaient dans les projets d’adduction en eau potable dans les milieux ruraux.
En 2007, le laboratoire de tritium a été installé et Madagascar-INSTN, grâce à son laboratoire d’Hydrologie Isotopique, peut déterminer la teneur en tritium dans un échantillon d’eau en utilisant un compteur à scintillation liquide, en passant par la distillation et l’enrichissement électrolytique des échantillons. Les techniques isotopiques apportent des informations sur l’âge des eaux, le temps de séjour et les vitesses d’écoulement des eaux souterraines, et le taux de renouvellement en eau de pluie des aquifères.
GENERALITES SUR LE TRITIUM
Définition
L’atome d’hydrogène comprend 3 isotopes :
– l’hydrogène proprement dit ¹H est le plus léger et le plus abondant (≈99.98%). Il ne comporte qu’un électron et un proton et il est stable.
– l’isotope «deutérium» ²H noté D est constitué d’un électron, un proton et un neutron, également stable (≈0.015%).
– l’isotope ³H ou «tritium» a un noyau composé d’un proton et de deux neutrons; son abréviation est notée T. Ce dernier est en quantité infime et son unité de concentration est exprimée en Unité tritium (UT) (un atome de tritium pour 10¹⁸ atomes d’hydrogène).
Transfert du tritium dans l’environnement
Le tritium existe sous trois formes chimiques:
• l’eau tritiée (HTO) qui est la forme la plus abondante du tritium dans le milieu naturel et les espèces vivantes.
• le tritium gazeux (HT).
• le tritium lié à la matière organique (OBT=Organically Bound Tritium) retrouvé dans les végétaux, l’homme et l’animal.
Les formes prépondérantes du tritium dans l’environnement sont par ordre d’importance décroissante, l’eau tritiée (HTO), l’hydrogène tritié (HT) et le méthane tritié (CH3T). De part leur faible solubilité, l’hydrogène tritiée et le méthane tritié sont peu entraînés par la pluie (captation faible). La vapeur d’eau tritiée, quant à elle, est facilement captée par les gouttes de pluie (captation facile).
Au contact et dans les premiers centimètres du sol, l’hydrogène tritiée se transforme rapidement en eau tritiée. Ce phénomène est attribué à la présence de microorganismes. Une partie de cette eau tritiée est ré-émise dans l’atmosphère par évaporation, à la vitesse d’environ 1% par heure. Une autre partie s’enfonce dans le sol et se mélange à l’eau du sol. Le tritium peut aussi être apporté à la surface du sol par infiltration directe d’eau tritiée liquide .
Comme isotope de l’hydrogène, le tritium participe au cycle de cet élément dans l’environnement. C’est un radionucléide qui, sous forme d’eau tritiée, est très mobile.
Variation de la concentration du tritium à l’echelle du globe
A l’échelle du globe, la distribution de tritium dans l’atmosphère, et par conséquent dans les précipitations, n’est pas homogène. Elle dépend essentiellement de trois effets :
1- l’effet de continentalité : les teneurs en tritium sont plus élevées à l’intérieur des continents que sur le littoral. Des échanges peuvent exister entre les masses de vapeurs océaniques et continentales. Le tritium est alors dilué par les vapeurs océaniques, dépourvues de cet isotope à cause des longs temps de séjour des eaux marines (plusieurs millénaires).
2- l’effet d’altitude : les précipitations collectées en altitude sont plus tritiées que celles qui ont traversé la totalité des basses couches de l’atmosphère où les mélanges avec la vapeur appauvrie en ³H sont plus efficaces.
3. l’effet de saisonnalité : on remarque aussi un cycle annuel de concentrations maximales durant le printemps et l’été, et un minimum dans l’hiver .
Tritium dans les précipitations
L’AIEA mesure à l’échelle mondiale les concentrations isotopiques dans les précipitations dans le cadre du GNIP (Global Network for Isotopes in Precipitations).
✔ De 1927 à 1945, le taux de tritium est environ de 5UT [Lal. et Suess, 1968]. C’est le niveau naturel du tritium. Aucun essai n’a eu lieu à cette époque.
✔ Entre octobre 1952 et la fin de 1962, le tritium a été produit par tous les types de tests nucléaires en atmosphère. La quantité de tritium injectée dans l’environnement a été énorme, approximativement 650 kg de tritium ont été injectés dans l’atmosphère par les tests russes, américains et anglais. La teneur moyenne de tritium sur la planète est passée de 0,6 Bq/l d’eau de pluie à 350 Bq/l.
Pendant cette période, le taux de tritium est proportionnel au nombre des essais nucléaire :
– Entre 1950 à 1962, les Etats-Unis ont effectué en tout 106 essais atmosphériques dans le Pacifique
– Entre 1952 et 1958, le Royaume-Uni a effectué 21 essais atmosphérique dans le Pacifique
– La France a effectué en tout 193 essais entre 1966 et 1980 .
En conséquence de ces essais nucléaires, le taux de tritium dans l’athmosphère est largement supérieur aux teneurs naturelles et concnetrées dans l’hemisphère nord.
➥ En 1963, cette valeur atteint jusqu’à 5 000 à 10 000 UT [Blavoux et Letolle, 1995]. Les activités en tritium dans l’atmosphère ont atteint leur maximum. On parle du «pic de 1963». Pour débloquer la situation tout en répondant aux problèmes environnementaux posés par les essais nucléaires atmosphériques, le Président John F. Kennedy, lors d’un discours d’ouverture prononcé en juin 1963 à l’American University, a proposé un traité interdisant les essais nucléaires dans l’atmosphère, l’espace extra-atmosphérique et sous l’eau. Le Traité sur l’interdiction partielle des essais d’armes nucléaires (LTBT), négocié en 10 jours en juillet 1963 et en octobre 1963, a résolu les problèmes environnementaux les plus saillants [10].
➥ Par la suite, seules la Chine et la France ont effectué de tels tests produisant dans l’atmosphère environ 20 kg de tritium entre 1967 et 1980. A partir de 1980, aucune explosion en atmosphère n’a eu lieu. Environ 75% de tout ce tritium a été injecté dans l’hémisphère nord de la stratosphère, et le reste dans la partie équatoriale de la stratosphère. La stratosphère au dessus du pôle sud n’a subi aucune injection de tritium (Rozanski et al., 1991). On observe une décroissance régulière jusqu’à obtenir actuellement des teneurs tout de même encore trois fois plus élevées (15 UT) qu’avant les premiers essais [Blavoux et Letolle, 1995].
➥ Depuis 1980, aucun essai aérien important n’a eu lieu et la teneur aurait du atteindre le niveau naturel (5UT). Or, il se maintient depuis cette époque entre 10 et 30 UT [Krimissa, 1995]. Ce qui est du à l’apport des centrales nucléaires civiles.
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