Généralités sur le niobate de lithium

Cette thèse a été réalisée au sein du Laboratoire Matériaux Optiques, Photonique et Systèmes (LMOPS) et publier sur clicours.com, qui relève de la double tutelle de l’Université de Lorraine et de l’école d’ingénieurs CentraleSupélec. Cette thèse contient deux volets complémentaires, l’un fondamental consacré à l’étude du transport dans le niobate de lithium LiNbO3 (LN), l’autre consacrée aux applications électro-optiques dans le LN périodiquement polarisé (PPLN). Nos travaux sur le transport de charges dans le niobate de lithium se sont appuyés sur une collaboration triangulaire avec l’Université de Padoue (Italie) et l’Université d’Osnabrück (Allemagne). Les opérations nécessaires à la fabrication des PPLN et à la réalisation des structures électro-optiques ont été effectuées en partie au centre de développement technologique FEMTO Engineering et en collaboration avec le laboratoire FEMTO-ST (Besançon, France).

Le LN est un matériau clé pour la réalisation de dispositifs acoustiques, électrooptiques et d’optique non linéaires. Aujourd’hui, nous pouvons l’appeler « le silicium de la photonique ». La diversité de ses propriétés (électro-optiques, non linéaires, piézoélectriques et photoréfractives) ainsi que la maîtrise de son élaboration sous forme de cristaux de grandes tailles et de compositions variées en font un matériau modèle pour la recherche fondamentale et appliquée.

Actuellement, les études optiques fondamentales dans le LN ont pour but de comprendre les processus de photo-excitation et de retour à l’équilibre des charges au sein de ce matériau, à l’échelle microscopique, en présence ou non de défauts. Ces derniers peuvent être intrinsèques, comme les antisites et les lacunes, ou extrinsèques tel que le fer (Fe), le cuivre (Cu) ou le magnésium (Mg). Ils sont identifiables par diverses techniques : Secondary Ion Mass Spectrometry (SIMS), Résonnance Paramagnétique électronique (RPE), spectroscopie Mössbauer, spectroscopie d’absorption naturelle ou photo-induite (API). La particularité des effets photo-induits dans le LN réside essentiellement dans la valeur exceptionnellement élevée de l’effet photoréfractif qui, dans le LN dopé fer, produit des variations d’indice supérieures à 2×10⁻³ sous des intensités lumineuses aussi faible que quelques W.cm⁻². Cette propriété, avantageuse ou  nuisible selon les applications visées, est la conséquence d’une part de l’effet photovoltaïque de volume découvert en 1974 précisément dans le LN, et d’autre part d’une photoconductivité spécifique particulièrement faible, de l’ordre de 10⁻¹⁴ Ω⁻¹W⁻¹m . Malgré la quantité considérable de travaux consacrés à cet effet particulier, et aux autres effets photo-induits dans le LN (près de 14000 articles), les processus de photo-excitation et de transport dans le LN restent imparfaitement compris au niveau fondamental. Plusieurs modèles ont bien sûr été développés pour décrire ces effets mais nous verrons qu’ils sont loin d’être généraux et complets. Notre premier objectif a donc été de dépasser les limites voire les contradictions des modèles existants et de construire si possible un modèle plus général, qui prenne en compte la nature et les propriétés microscopiques des porteurs.

Le LN est un oxyde qui présente un grand effet polaronique. Du fait de sa forte interaction avec le réseau, l’électron peut se localiser spontanément sur un ion niobium en site normal (NbNb) et son niveau d’énergie se trouve à 0,33 eV en bas de la bande de conduction, c’est le polaron libre. Les antisites de niobium NbLi 5+ constituent des pièges superficiels où les électrons forment des polarons liés notés NbLi 4+ et possèdent une large bande d’absorption photo-induite dans le visible et dans le proche infra-rouge. Nous verrons que ces polarons liés présentent un intérêt majeur dans les phénomènes de transport et de relaxation de charges. Dans le LN dopé fer, les ions Fe3+ forment des pièges profonds pour les électrons. L’excitation de l’électron à partir d’un piège profond rempli (Fe2+) ainsi que sa relaxation et son piégeage par un piège profond vide (Fe3+) forment un cycle qui laisse une empreinte optique. La compréhension de ce cycle est indispensable pour comprendre les effets photo-induits dans le LN. L’originalité de notre modèle se présente dans la prise en  compte de toutes les espèces polaroniques recensées et de leurs divers processus de piégeage et de dépiégeage. Ce modèle a été étayé par des simulations numériques originales de type Monte Carlo (MC). Le désordre énergétique dû à la présence de défauts est pris en compte et son implication dans les phénomènes de transport a été déterminée. Dans le cadre de cette thèse, nous avons également employé plusieurs techniques expérimentales dans le but d’étudier ces phénomènes dans le LN.

Par ailleurs, les propriétés optiques du LN, matériau électro-optique, peuvent être changées par application d’un champ électrique. C’est le principe de base pour le fonctionnement des dispositifs optoélectroniques. De plus, le LN étant un matériau ferroélectrique, sa polarisation spontanée peut être tournée de 180° par application d’un champ électrique supérieur au champ coercitif selon l’axe ternaire. Ainsi, le niobate de lithium périodiquement polarisé (PPLN) est un cristal de LN dont l’orientation de la polarisation spontanée change périodiquement d’un domaine ferroélectrique à un autre. De nombreux champs d’application en optique impliquent les PPLN dont la microstructuration est aujourd’hui assez bien maîtrisée. Les PPLN sont généralement utilisés pour des applications en optique non-linéaire, telles que la conversion de fréquences. Les applications électro-optiques dans les PPLN restent encore peu développées. Le deuxième volet de cette thèse est consacré aux applications électrooptiques dans le PPLN. Sous l’effet d’une tension électrique, l’indice de réfraction du PPLN est périodiquement diminué et augmenté selon l’orientation de la polarisation spontanée, formant ainsi un réseau d’indice activable électriquement. Un premier composant utilisant l’effet électro-optique dans du PPLN, a été développé et démontré expérimentalement. C’est un déflecteur de Bragg qui permet la déflection de la lumière sous l’effet d’une faible tension électrique. Cela a été rendu possible par la réalisation d’une structure multicouche qui assure cette fonction électro-optique dans un guide plan. Un deuxième composant a également été proposé, où la lumière se propage perpendiculairement aux parois de domaines du PPLN. Dans cette configuration un réflecteur de Bragg électro-optique peut être réalisé. Un tel composant pourrait permettre l’insertion et l’extraction de longueurs d’onde. Pour une période appropriée du PPLN, la longueur d’onde de Bragg peut correspondre aux longueurs d’onde télécoms. Ce composant prend alors le rôle d’un multiplexeur actif et commutable électriquement. Une première démonstration expérimentale de ce principe a été initiée au cours de cette thèse avec le développement d’un protocole technologique spécifique pour réaliser un réflecteur de Bragg intégré, utilisant un PPLN de période 10 microns et des guides rubans en relief de dimensions 5×5 µm.

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
Chapitre I. GENERALITES SUR LE NIOBATE DE LITHIUM
I. 1 Introduction
I. 2 Structure cristalline et croissance du niobate de lithium
I. 2. 1 Structure cristalline idéale
I. 2. 2 Défauts ponctuels dans le LiNbO3
I. 2. 2. 1 Défauts intrinsèques
I. 2. 2. 2 Défauts extrinsèques
I. 2. 3 Croissance du niobate de lithium
I. 3 Effet électro-optique
I. 3. 1 Définition
I. 3. 2 Effet électro-optique dans le niobate de lithium
I. 3. 3 Influences de la configuration sur l’effet électro-optique dans le LN
I. 3. 3. 1 Propagation suivant X
I. 3. 3. 1. 1 Champ électrique appliqué suivant X
I. 3. 3. 1. 2 Champ électrique appliqué suivant Y
I. 3. 3. 1. 3 Champ électrique appliqué suivant Z
I. 3. 3. 2 Propagation suivant Y
I. 3. 3. 2. 1 Champ électrique appliqué suivant X
I. 3. 3. 2. 2 Champ électrique appliqué suivant Y
I. 3. 3. 2. 3 Champ électrique appliqué suivant Z
I. 3. 3. 3 Direction de propagation suivant Z
I. 3. 3. 3. 1 Champ électrique appliqué suivant X
I. 3. 3. 3. 2 Champ électrique appliqué suivant Y
I. 3. 3. 3. 3 Champ électrique appliqué suivant Z
I. 4 Effet photoréfractif dans le niobate de lithium
I. 4. 1 Introduction
I. 4. 2 Effet photovoltaïque dans le LN
I. 4. 3 Photoconductivité à basse intensité lumineuse
I. 4. 4 Champ de charge d’espace
I. 4. 4. 1 Cas d’un réseau d’indice de faible amplitude
I. 4. 4. 1. 1 Ecriture
I. 4. 4. 1. 2 Effacement
I. 4. 4. 2 Conséquences
I. 4. 4. 3 Hypothèses et simplification des équations
I. 4. 5 Effets photo-induits à forte intensité lumineuse
I. 4. 5. 1 Modèle à deux centres
I. 4. 5. 2 Photoconductivité et champ de charge d’espace
I. 4. 6 Absorption photo-induite
I. 5 Formation du polaron dans le niobate de lithium
I. 5. 1 Généralités
I. 5. 2 Polaron dans le niobate de lithium
I. 5. 2. 1 La formation du polaron
I. 5. 2. 2 Polaron libre
I. 5. 2. 3 Polaron lié à l’antisite
I. 5. 2. 4 Polaron lié au fer
I. 6 Spectroscopie Raman
I. 6. 1 Introduction
I. 6. 2 Spectroscopie Raman dans le LN
I. 7 Conclusion
Chapitre II. MODELISATION DU TRANSPORT DE CHARGES DANS LE NIOBATE DE LITHIUM
II. 1 Introduction
II. 2 Insuffisance des modèles de bande
II. 2. 1 Problème n°1 : durée de vie et distance de diffusion des porteurs
II. 2. 2 Problème n°2 : l’efficacité quantique
II. 2. 3 Problème n°3 : activation thermique de la photoconductivité
II. 2. 4 Problème n°4 : anomalie de la photoconductivité aux forts dopages
II. 2. 5 Problème n°5 : violation du principe de micro-réversibilité
II. 2. 6 Modèle de saut de Sturman
II. 3 Modèle alternatif
II. 3. 1 Base théorique du modèle
II. 3. 2 Simulations numériques
II. 3. 2. 1 Algorithme simplifié
II. 3. 2. 2 Algorithme complet (sans désordre électrique)
II. 3. 3 Résultats et discussions
II. 3. 3. 1 Influence du paramètre orbital a
II. 3. 3. 2 Temps de vie et nombre de sauts des polarons liés
II. 3. 3. 3 Effet de taille des pièges
II. 3. 3. 4 Temps de vie des polarons libres
II. 3. 3. 5 Effet du désordre électrique
II. 3. 4 Diffusions et mobilités des polarons dans le LN
II. 3. 4. 1 Diffusion et mobilité du polaron libre
II. 3. 4. 2 Diffusion et mobilité du polaron lié
II. 3. 5 Conclusion
II. 3. 6 Perspectives
CONCLUSION

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