Généralités sur le niébé
Origine
Vigna unguiculata est une légumineuse annuelle dont le centre d’origine était controversé avant les études de Faris (1963 ; 1965). Piper (1913), a donné une double origine au niébé: l’Inde et l’Afrique. Faris (1963, 1965), après des études qui se sont reposées sur une description cytologique et morphologique des formes sauvages et cultivées du niébé montre que l’Afrique de l’Ouest et plus probablement le Nigeria est le centre d’origine du niébé. Selon Vavilov (1951), une zone présentant une diversité maximale pour une plante cultivée donnée est également susceptible de devenir le centre de domestication de l’espèce. La grande diversité et la large distribution des espèces sauvages de niébé en Afrique constitueraient donc une des preuves les plus sérieuses quant au fait que le niébé soit originaire du continent africain (Padulosi et Ng, 1997). Certains auteurs ont situé cette origine en Ethiopie (Vavilov, 1951 ; Steele, 1972) tandis que d’autres la situent en Afrique de l’Ouest (Piper, 1913 ; Rachie et Roberts, 1974). Cependant, les travaux de Rawal (1975) indiquant une abondance d’espèces sauvages à la fois dans les écologies de savanes et de forêts au Nigeria sont en faveur d’une origine ouest africaine et plus vrai semblablement nigériane.
Classification
Le niébé (Vigna unguiculata) est une dicotylédone appartenant à l’ordre des Fabales, à la famille des Fabaceae, à la sous famille des Faboideae, à la tribu des Phaseoleae, à la sous tribu des Phaseolinae (Verdcourt, 1970; Maréchal et al. 1978). Le niébé, qui est mentionné dès l’Antiquité par Dioscoride, a été décrit par Linné, à partir d’une forme cultivée provenant des Antilles, sous le nom de Dolichos unguiculatus, qui deviendra Vigna unguiculata (Pasquet et Baudouin, 1997). V.unguiculata inclut des formes cultivées et des formes sauvages. Les formes cultivées se distinguent des formes sauvages par des gousses indéhiscentes, des graines et des gousses de taille plus importante (Lush et Evans, 1981).
Bio-écologie du niébé
Le niébé est une espèce qui se présente bien aux écosystèmes des pays du sahel. Le plant de niébé a une tige cylindrique légèrement striée hélicoïdale quelquefois creuse et glabre. Les feuilles sont alternes, trifoliées et de couleur vert foncé ou vert clair ; leur forme est globuleuse à effilée avec des formes intermédiaires. Le système racinaire est pivotant avec une abondante ramification, ce qui confère au niébé une certaine tolérance à la sécheresse. Les racines portent des nodosités de bactéries fixatrices d’azote. L’inflorescence est un racème axillaire non ramifié portant plusieurs fleurs. Le rachis est contracté et le pédoncule a une longueur variable. Le cycle des variétés est déterminé au stade 50% de floraison. On distingue des variétés à cycle court (60-65 jours), à cycle intermédiaire (65-85 jours) et les variétés tardives (85-110 jours) (Pandey, 1987). Les gousses sont rattachées à l’axe du racème. A maturité, elles renferment des graines dont la couleur, la taille et la forme sont variables. Le niébé est une légumineuse herbacée, plante des régions tropicales et subtropicales. Les températures optimales de sa culture varient entre 25 et 28°C. Le niébé affiche une bonne performance dans les zones agro-écologiques où la pluviométrie est de 500 à 1200 mm/an. Cependant, grâce aux variétés précoces et extra-précoces, il peut pousser dans le Sahel où la pluviométrie est inférieure à 500 mm/an (Dugje et al., 2009). Selon Diaw, (1999), les besoins en eau du niébé sont de l’ordre de 200 mm/tonne de matière sèche/ha. En matière de sol, le niébé n’est pas très exigeant mais croît de préférence sur des sols bien drainés, sablo-limoneux à limono-argileux, à pH= 6 ou 7 (Dugje et al, 2009).
Importance de la culture
Le niébé est l’une des légumineuses les plus importantes en Afrique tropicale, en témoignent la production et les multiples usages de la plante (FASO et al., 2016). En effet, il est cultivé sur environ 12,76 millions d’hectares par an dans le monde (Omovbude et al., 2013). La production annuelle mondiale est estimée à 5670076 tonnes de graines sèches dont 95% est réalisée en Afrique (FAOSTAT, 2015). Le Nigeria, le Niger, le Burkina Faso et le Sénégal, constituent les principaux bassins de production (Soule et Gansari, 2010) tropicale. Sa culture présente des retombées nutritionnelles, agronomiques et économiques, considérables. Sur le plan nutritionnel Les jeunes feuilles, les gousses immatures, et les graines sont utilisées dans l’alimentation humaine. La valeur nutritionnelle des graines est élevée avec en moyenne 23 à 25% de Synthèse bibliographique 5 protéines et 50 à 67% d’amidon, ce qui confère au niébé un rôle important dans la lutte contre la déficience protéique chez les enfants (Quin, 1997). La graine du niébé est également riche en lysine et en zinc. Les teneurs élevées en calcium (90 mg/100 g), en fer (6 à 7 mg/100 g), en acide nicotinique (2 mg/100 g) contenues dans le niébé contribuent pour une part substantielle à combler les besoins alimentaires des populations dans les pays tropicaux (Bressani, 1997 ; N’gbesso et al., 2013). En cela, il constitue un supplément important pour les aliments à base de céréales généralement pauvres en ces éléments nutritifs (Madamba et al., 2006). La graine sèche est généralement moulue et consommée dans plusieurs plats traditionnels africains (bouillie, pain, beignets, aliment de sevrage pour enfants, etc.). Le niébé joue ainsi un rôle important dans la sécurité alimentaire des populations en tant qu’aliment de soudure. L’alimentation animale bénéficie aussi des qualités nutritionnelles du niébé. En effet, le niébé est généralement utilisé sous forme de fanes ce qui joue une part importante dans l’alimentation animale notamment pendant la saison sèche en l’absence de pâturage. Sur le plan agronomique Le niébé n’est pas seulement une plante d’intérêt alimentaire. Il a aussi des vertus agronomiques. C’est une plante améliorante très utile dans les assolements. De par sa croissance rapide, le niébé assure une couverture du sol, le protégeant ainsi contre l’érosion et contre l’envahissement des adventices. Les fanes abandonnées au champ constituent une source importante d’enrichissement du sol en matières organiques et en éléments minéraux. Le niébé améliore la teneur du sol en azote grâce à ses racines qui comportent des nodules renfermant des bactéries du genre Rhizobium capables de fixer l’azote atmosphérique ce qui contribue à restaurer la fertilité du sol (Adjei nsiah et al., 2006). Les travaux de Bado (2002) ont montré qu’une culture pure de niébé peut fixer de 50 à 115 kg d’azote/ha; ce qui participe pour 52 à 56% à la satisfaction de ses propres besoins en azote. En association avec le sorgho ou le mil, le niébé contribue à lutter contre Striga hermonthica par la réduction du stock de semences de Striga dans le sol (Lawané et al, 2009). La couverture du sol par le niébé permet de garder une humidité constante au niveau du sol et le protège ainsi contre l’érosion hydrique (Dabiré, 2001). Cette couverture soustrait aussi le sol de la dégradation causée par le vent, le soleil, et l’eau de pluie. Enfin, le niébé facilite l’intégration entre l’agriculture et l’élevage car les animaux nourris avec les fanes du niébé produisent un fumier de qualité pour la fertilisation des champs (Kaboré, 2004). Ces multiples atouts nutritionnels et agronomiques montrent donc l’importance du niébé au niveau économique. Synthèse bibliographique 6 Sur le plan économique Le niébé est une source de revenus pour les pays producteurs. Selon Langyintuo et al., (2003) le Nigeria, le Niger, le Burkina Faso, le Bénin, le Mali, le Cameroun, le Tchad, et le Sénégal sont les principaux pays exportateurs du niébé ; tandis que, le Ghana, le Togo, la Cote d’ivoire, le Gabon, et la Mauritanie sont les pays importateurs. En plus du commerce des graines du niébé, les fanes sont aussi commercialisées et utilisées dans l’alimentation du bétail. En Afrique occidentale et centrale, le commerce du fourrage du niébé permet une augmentation de 25% du revenu annuel des paysans (Quin, 1997). Malgré sa large adaptation et son importance, la productivité du niébé est généralement très faible à cause de nombreuses contraintes biotiques et abiotiques (lshikawa., et al., 2013).
Contraintes de la culture du niébé
L’accroissement de la production de niébé notamment par l’amélioration de la productivité se heurte à plusieurs contraintes qui limitent ou même anéantissent les récoltes. Ces contraintes sont d’ordres biotiques et abiotiques. Les contraintes abiotiques Les contraintes abiotiques constituent l’une des principales contraintes de la production du niébé. Elles sont essentiellement de type pédoclimatiques. Les contraintes climatiques sont liées à la mauvaise répartition des pluies, aux températures très élevées, et aux vents. Les contraintes pédologiques sont liées essentiellement à une faible fertilité des sols en éléments minéraux nécessaire à la croissance et au développement de la plante. De plus, malgré sa plasticité, le niébé est rarement cultivé sous des conditions édaphiques et climatiques optimales permettant d’obtenir les rendements potentiels liés aux variétés utilisées (Hamidou et al., 2018). Les contraintes biotiques Au champ, le niébé subit durant tout son cycle végétatif l’action de plusieurs ennemis. Les mauvaises herbes interviennent dès les premiers stades de la croissance de la plante en établissant une compétition ou un parasitisme avec celle-ci. Elles peuvent ainsi avoir un effet négatif direct par compétition avec la culture vis-à-vis des éléments nécessaires à la croissance : eau, nutriments, lumière, espace de développement occasionnant les pertes de récolte. A cause de son adaptation aux zones tropicales, le niébé subit les attaques de différents insectes ravageurs. Il est en effet attaqué par les insectes à tous les stades de son développement. Certains insectes ravageurs du niébé jouent aussi un rôle important de vecteurs de maladies. Il s’agit par exemple des pucerons et des coléoptères fréquemment impliqués dans la transmission de virus. Le niébé est également l’hôte de nombreuses maladies. Celles dignes d’intérêt sont constituées de maladies cryptogamiques, bactériennes et virales. Le Cowpea Aphid Borne Mosaic Virus (CABMV) ou virus de la mosaïque du niébé transmis par les pucerons constitue la maladie virale endémique en Afrique de l’ouest (Sawadogo, 2004). Les maladies bactériennes et fongiques majeures qui affectent particulièrement la production de niébé sont celles causées par Macrophomina phaseolina (pourriture charbonneuse), Colletotrichum capsici (maladie des taches brunes), Rhizoctonia solani (rhizoctone noire) et Xanthomonas vignicola (chancre bactérien) (Sérémé, 1985).