Depuis 1978, l’Organisation Mondiale de la Santé préconise la mise en place d’une politique nationale pharmaceutique dans les pays en développement. Cette politique doit prioriser l’utilisation des médicaments essentiels afin de limiter les dépenses destinées à l’achat de produits pharmaceutiques. Dans de nombreux pays, les coûts trop élevés et les ruptures de stock sont des problèmes permanents de l’approvisionnement en médicaments. Ceci est dû à de nombreuses raisons.
D’une part, certaines firmes pharmaceutiques ont tendance à encourager l’utilisation de médicaments coûteux sous forme de produits de spécialité, alors que les médicaments essentiels génériques sont nettement moins chers et aussi efficaces. D’autre part, le système d’approvisionnement n’est pas suffisamment maîtrisé et se trouve à l’origine de l’insuffisance et de l’utilisation incorrecte des médicaments. Face à une demande sans cesse croissante et des ressources limitées, les médicaments manquent [1].
MEDICAMENTS ESSENTIELS
Définitions
• Médicaments essentiels
Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), « les médicaments essentiels sont ceux qui satisfont aux besoins de la majorité de la population en matière de soins de santé ; ils doivent donc être disponibles à tout moment en quantité suffisante et sous la forme pharmaceutique appropriée » .
• Les médicaments génériques
Un médicament générique est la copie d’un médicament original (de spécialité) dont le brevet est arrivé à expiration. Il doit être équivalent à la spécialité initiale, du point de vue de la qualité pharmaceutique, de l’efficacité et de la tolérance, ainsi que de la biodisponibilité .
• Les médicaments essentiels génériques
La plupart des médicaments essentiels de la liste de l’OMS existent sur le marché international sous forme de génériques à des prix relativement bas. Les fabricants de médicaments génériques, dispensés des coûts de la recherche et du développement des produits, peuvent commercialiser des copies à des tarifs très inférieurs à ceux des produits de spécialités correspondants. Le développement du marché des génériques introduit la concurrence par le prix dans le domaine du médicament, et a mis fin au monopole des laboratoires sur les médicaments dont le brevet est expiré .
Le concept de médicaments essentiels
Historique
Dans le rapport qu’il a présenté en 1975 à la vingt-huitième assemblée mondiale de la santé, le Directeur Général de l’OMS a passé en revue les principaux problèmes pharmaceutiques auxquels les pays en développement sont confrontés. Il a évoqué les nouvelles politiques qui pourraient être envisagées dans ce domaine.
Il a ainsi fait allusion à l’expérience acquise dans certains pays qui ont mis en place des systèmes reposant sur la notion de médicaments essentiels. Ces systèmes ont pour but d’améliorer l’accessibilité des médicaments grâce à une sélection de médicaments essentiels correspondant aux besoins sanitaires, plus particulièrement dans l’optique de la couverture par les soins de santé primaire. Le rapport du premier comité d’experts de la sélection des médicaments essentiels, paru sous le numéro 615 dans la série des rapports techniques, était devenu un best-seller depuis sa publication en 1977 [3].Les réactions de l’industrie pharmaceutique étaient d’abord négatives, mais plus tard, grâce à un dialogue continu entre l’industrie et l’OMS, l’atmosphère d’affrontement a fait place à une volonté de collaboration.
Liste modèle de médicaments essentiels
La première liste modèle de médicaments essentiels de l’OMS paru en 1977 a pour but d’aider les pays à identifier leurs propres priorités et à faire leur propre sélection. Le rapport du premier comité d’experts établi les critères pour la sélection.
Quelques recommandations étaient inscrites dans ces directives.
✔ i. Chaque pays devra désigner une commission qui sera chargée d’établir une liste de médicaments essentiels ;
✔ ii. La sélection devra être fondée sur les résultats d’une étude des avantages et de la sûreté des médicaments ;
✔ iii. On utilisera les dénominations communes internationales des médicaments ou substances pharmaceutiques chaque fois qu’elles existent ;
✔ iv. Le contrôle de qualité, notamment en ce qui concerne la stabilité et la biodisponibilité devra être assuré par des tests ou une réglementation ;
✔ v. Le coût devra constituer un critère important. On devra prendre en considération, non seulement le coût unitaire, mais aussi le coût total du traitement;
✔ vi. Les autorités sanitaires doivent décider du niveau de compétence exigé pour prescrire un médicament, ou groupe de médicaments donné appartenant à telle ou telle catégorie thérapeutique ;
✔ vii. L’influence des maladies ou affections locales sur les paramètres pharmacocinétiques et pharmacodynamiques devra être prise en considération lors de la sélection, par exemple : une malnutrition, une affection hépatique ;
✔ viii. Lorsqu’il existe plusieurs médicaments pour une même indication, on choisira la substance et la forme pharmaceutique qui assurent le meilleur rapport avantages/risques ;
✔ ix. Lorsque deux médicaments ou plus sont équivalents sur le plan thérapeutique, on choisira en fonction de conditions spécifiées : par exemple, le médicament qui a fait l’objet des études les plus approfondies ;
✔ x. Des associations en proportions fixes ne sont admissibles que dans certaines conditions, par exemple, pour améliorer l’observance ;
✔ xi. La liste nationale de médicaments essentiels devra être révisée au moins une fois par an ou chaque fois que la nécessité s’en fera sentir, et de nouveaux médicaments ne seront inclus que s’ils présentent un net avantage par rapport aux substances sélectionnées antérieurement .
Mise en œuvre du concept de médicaments essentiels
Les problèmes de médicaments dans les pays en développement
Pour l’acquisition, la distribution et l’utilisation des médicaments dans les pays en développement, on peut distinguer les points principaux suivants :
– insuffisance des ressources pour traiter une population importante ;
– médiocrité des soins de santé en dépit de l’effectif relativement important de personnel à formation médico-sanitaire ;
– inégalité dans la distribution des produits pharmaceutiques entre les agglomérations urbaines et les zones rurales, au détriment de ces dernières ;
– contrôle insuffisant au port d’entrée ;
– manque de contrôle de qualité des médicaments ;
– prolifération de produits pharmaceutiques sous des dénominations différentes dans le secteur privé et manque d’informations pharmaceutiques objectives ;
– observance médiocre des règlementations existantes concernant la vente et la distribution des médicaments sur ordonnance ;
– rupture périodique des stocks dans les entrepôts ;
– possibilités très limitées pour la population rurale d’acheter des médicaments dans des pharmacies privées lorsque le stock du secteur public est insuffisant ;
– détérioration et perte de médicaments par suite de mauvaises conditions de stockage et de manipulation ;
– non respect par les pharmacies privées de la liste nationale des médicaments essentiels pour les commandes directes à l’extérieur ;
– les médicaments destinés aux différents niveaux des services de santé ne sont pas alloués et distribués conformément aux besoins et aux niveaux des prescripteurs ;
– nécessité de développer et de mettre en œuvre une politique pharmaceutique nationale .
Politique pharmaceutique nationale
La mise en œuvre du concept de médicaments essentiels doit être marquée par l’établissement de politiques pharmaceutiques nationales. Ces politiques devront intéresser les systèmes de santé fondés sur les soins de santé primaires.
Les principales activités à examiner lors de la formulation d’une politique pharmaceutique nationale sont les suivantes :
– déterminer les besoins thérapeutiques,
– choisir les médicaments essentiels,
– assurer le bon emploi des médicaments essentiels,
– fournir des informations et des formations,
– améliorer le système d’approvisionnement,
– implanter une formulation locale de certains médicaments essentiels lorsque c’est techniquement et économiquement faisable,
– implanter une production locale si c’est techniquement et économiquement faisable et souhaitable,
– assurer le contrôle de la qualité,
– instituer la législation nécessaire,
– intégrer la surveillance des réactions secondaires,
– couvrir les besoins en personnel,
– assurer une action coordonnée de tous les secteurs intéressés,
– instituer un processus d’évaluation,
– organiser l’analyse des besoins financiers et des modalités de financement .
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