Généralités sur la rhéologie des systèmes particulaires

Généralités sur la rhéologie des systèmes particulaires

Un système particulaire correspond à une suspension plus ou moins concentrée en objets solides désignés comme étant des particules. La rhéologie des systèmes particulaires est fonction des propriétés des particules (concentration, masse volumique, taille, rigidité, forme, interactions), des propriétés de la phase continue (viscosité, masse volumique, coefficient de diffusion brownien) et des conditions expérimentales de l’étude (température, déformation, temps) (Quemada, 2006). Le volume occupé par les particules rapporté au volume total est la fraction volumique des particules. En 1906, Einstein établit que la viscosité d’une suspension de particules rigides en milieu très dilué dépend de la fraction volumique occupée par les particules, notée Ф, et de la viscosité de la phase continue, notée η0, telle que : 𝜂(Ф) = 𝜂0 (1 + 2,5Ф) (5) Depuis, de nombreux modèles, y compris des modèles phénoménologiques ont été développés pour étendre la relation à des milieux semi-dilués à concentrés, comportant des particules de propriétés diverses, en intégrant les interactions particules-phase dispersante. Pour la plupart des systèmes particulaires, il existe une fraction volumique critique pour laquelle la viscosité croit fortement et brusquement (on dit que la viscosité diverge). La fraction volumique des particules dépend de la concentration, de la taille, de la forme et de la déformabilité des particules. Shewan et Stokes (2013) proposent une représentation de l’évolution de la viscosité et de la viscoélasticité des systèmes de particules molles en fonction de la fraction volumique (Figure 22). Dans des milieux dilués et semiconcentrés, l’évolution de la viscosité est semblable à celle mesurée pour des systèmes de particules solides. La viscosité augmente lorsque la fraction volumique augmente jusqu’à un niveau d’encombrement maximal, traduit par une fraction volumique proche de 1. Cependant, dans le cas des particules molles, les particules en contact (régime concentré) sont capables de se déformer permettant l’augmentation de la concentration en particule et de la fraction volumique au-delà de 1. Figure 22 : Schéma du comportement rhéologique des suspensions de micro-gels en fonction de la fraction volumique (Φ) et de leur microstructure sous la forme d’un gel. Les micro-gels ont un comportement visqueux jusqu’à la fraction volumique maximale (Φ m) au-dessus de laquelle ils présentent un comportement élastique.  Dans le domaine alimentaire, la plupart des particules sont compressibles, ce qui complexifie la détermination d’une fraction volumique réelle qui dépend de la méthode choisie (filtration, centrifugation) et des paramètres définis par l’expérimentateur (Rao, 2007). Lors de la gélatinisation de suspensions d’amidon, la fraction volumique s’accroit avec le gonflement des granules. En gonflant, la déformabilité des granules augmente. D’après Bagley et Christianson (1982), la déformabilité des granules gonflés est telle qu’ils peuvent occuper 100% du volume (Figure 23). Figure 23 : Domaines de concentration de suspensions de particules molles (amidons gélatinisés), d’après Steeneken (1989) : de gauche à droite : dilué, intermédiaire et concentré. Φ est la fraction volumique des particules et Véq est le volume à l’équilibre occupé par une particule. En milieu dilué les granules d’amidon absorbent l’eau au maximum de leur capacité, jusqu’à leur volume d’équilibre. Pour une concentration intermédiaire en amidon, les granules gonflent à leur volume d’équilibre jusqu’à remplir 100% du volume de la suspension. En régime concentré, les granules gonflent sans atteindre leur volume d’équilibre et sont moins déformables qu’en régime intermédiaire. La vitesse d’augmentation de la viscosité en fonction de la fraction volumique diminue lorsque φ>1. Lors du traitement thermique d’une pâte, l’amidon ne gonflerait pas à son maximum de capacité, au vu de la concentration en amidon et de l’encombrement de la pâte par d’autres composés. Dans les systèmes particulaires concentrés, les propriétés viscoélastiques et d’écoulement dépendent principalement de la rigidité des particules, de leur forme, des interactions de contact entre particules (frictions) et de leur organisation spatiale (aléatoirement ou selon un schéma défini). La prépondérance de la propriété de rigidité des particules sur les propriétés rhéologiques des systèmes concentrés a notamment été observée par Steeneken (1989) dans des expériences mettant en jeu des échantillons d’amidon de capacité de gonflement différente. La capacité de gonflement est positivement corrélée à la déformabilité des granules. L’auteur montre que pour une fraction volumique donnée, en régime concentré, la viscosité d’une suspension chauffée de granules d’amidon déformables est inférieure à la viscosité d’une suspension chauffée de granules d’amidon moins déformables. Ces résultats sont confirmés par ceux d’Adams et ses collaborateurs (2004)sur des microgels d’agar-agar dont la rigidité est modifiée par le degré de réticulation des polysaccharides. 

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Purées de fruits et légumes

Les purées de fruits et légumes sont des suspensions concentrées de particules végétales déformables en suspension dans une phase aqueuse riche en sucres et pectines solubles. Les purées sont obtenues par un traitement thermomécanique des fruits/légumes développé pour déstructurer plus ou moins intensément le tissu ou « parenchyme » des matières premières végétales. Ces procédés thermomécaniques ont un effet sur la taille et la dispersion de taille des particules (fragments de parenchyme, cellules isolées ou amas de cellules), sur leurs propriétés physico-chimiques et sur la viscosité de la suspension. La pulpe correspond à l’amas de cellules obtenues après transformation. La paroi des cellules végétales est majoritairement composée de fibres (cellulose, hémicellulose et pectines). Pour une concentration en parois cellulaire de l’ordre de 1 à 3 g /100 g de purée, selon l’origine botanique (Borowska et al., 2003; Tarea, 2005), la totalité du volume de la purée est occupé par les amas de cellules ou de cellules individuelles contenant la phase continue (Espinosa, 2012). La phase aqueuse est le sérum, composé de sucres solubles, de pectines solubilisée par le traitement thermique, d’acides organiques et de minéraux (Espinosa, 2012). Selon l’origine botanique, la composition en sucres solubles du sérum varie : dans le sérum de pomme le sucre majoritairement en solution est le fructose (Le Bourvellec et al., 2011) tandis que le sérum de carottes est majoritairement composé de saccharose (Demi and Savas, 2007). La porosité des parois des cellules permet l’équilibre de composition entre les sérums intracellulaire et extracellulaire. 3.3 Lait et yaourt brassé Le lait de vache est le lait majoritairement utilisé dans l’industrie alimentaire. Cette suspension est composée de 82 et 88% d’eau, de matière grasse (3,5 à 7%) dispersée dans la phase aqueuse sous la forme de globules gras, de protéines (3 à 4,5%), de lactose (entre 4 et 5,5%) et de divers minéraux (potassium, calcium phosphore, sodium) (de 0,7 à 1%) (Iyengar, 1982). Le lait est un système colloïdal dans lequel sont dispersés des globules gras et des micelles de caséines. Dans le lait les globules gras sont composés à 97% de triacylglycérol (Lindmark Månsson, 2008) et ont un diamètre compris entre 4 à 5 µm. Les caséines sont associées sous la forme de micelles sphériques dont la taille varie entre 50 et 600 nm, de taille moyenne de 150 nm et qui représentent 80% des protéines du lait (Fox and Brodkorb, 2008). Les protéines de lactosérum sont des protéines solubles représentant 20% des protéines du lait. On distingue 4 types de protéines sériques dans le lait : l’α-lactoglobuline (taille de 1,8 nm), la βlactoglobuline (sous la forme de dimère de taille 3.5 nm), l’albumine sérique bovine (BSA, de taille 4 nm) et les immunoglobulines de taille 6 nm (De Wit, 1998). L’agrégation des protéines laitières est à l’origine de la formation des gels de yaourts. Les étapes de la fabrication d’un yaourt sont par ordre chronologique, la pasteurisation du lait, l’homogénéisation, et l’acidification. Sous l’action de la température lors du procédé de pasteurisation, les protéines globulaires du lait se déplient (pour une température supérieure à 60°C pour les b-lactoglobulines) et exposent des régions hydrophobes et des groupements thiols alors accessibles pour des réactions. La poursuite du traitement thermique conduit à l’agrégation irréversible des protéines sériques entre elles et des protéines sériques avec la k-caséine, protéine participant à la structure de la micelle de caséine. La structure de la micelle n’est globalement pas altérée par le traitement thermique.

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