Généralités sur la bioaccumulation des métaux traces (Hg, Cd, Pb, Cu et Zn) chez la moule (Mytilus sp.)
Le milieu marin, biotope particulièrement riche, est caractérisé à la fois par une remarquable stabilité de ses propriétés fondamentales et une grande variabilité de ses microconstituants. L’eau de mer contient en solution des combinaisons de tous les éléments chimiques mais seulement certains d’entre eux, au nombre de douze, ont des concentrations égales ou supérieures au mg.L-1. Ces douze éléments majeurs interviennent pour 99,4 % en masse du total de la croûte terrestre (O, Si, Al, Fe, Ca, Na, K, Mg, Ti, H, P et Mn par ordre d’abondance). Les éléments traces, au nombre de 68, ne représentent en masse que 0,6 % du Ces éléments sont engagés dans des réactions biochimiques et contribuent à l’équilibre du milieu marin. Mais l’apport de contaminants métalliques par l’intermédiaire des effluents industriels et de l’atmosphère, des fleuves et de leur estuaire, peut modifier la composition de l’eau de mer qui peut devenir toxique pour les plantes et les animaux.
L’étude de l’interaction entre les contaminants et les barrières biologiques est d’un intérêt considérable pour la compréhension des phénomènes écotoxicologiques, particulièrement la bioaccumulation et les transferts à travers les chaînes trophiques. Les processus impliqués sont très complexes et sont influencés par le contaminant (taille molécule, spéciation chimique, etc.), l’organisme récepteur (propriétés membranaires, composition chimique, processus actifs, etc.) et l’environnement intra et extracellulaire (température, pH, etc.).
Les métaux en milieu marin
Un métal est un élément chimique, issu le plus souvent d’un minerai doté d’un éclat particulier, bon conducteur de chaleur et d’électricité, ayant des caractéristiques de dureté et de malléabilité, se combinant aisément avec d’autres éléments pour former des alliages utilisés par l’homme depuis l’Antiquité. Si les métaux sont souvent indispensables au déroulement des processus biologiques (oligo-éléments), nombre d’entre eux peuvent s’avérer contaminants pour diverses formes de vie, lorsque leur concentration dépasse un seuil, lui-même fonction de l’état physico-chimique (spéciation) de l’élément considéré. C’est le cas du fer (Fe), du cuivre (Cu), du zinc (Zn), du nickel (Ni), du cobalt (Co), du vanadium (V), du sélénium (Se), du molybdène (Mo), du manganèse (Mn), du chrome (Cr), de l’arsenic (As) et du titane (Ti) (Miquel, 2001). D’autres ne sont pas nécessaires à la vie et peuvent être même préjudiciables comme le mercure (Hg), le plomb (Pb), le cadmium (Cd) et l’antimoine (Sb) (Chiffoleau et al., 2001). L’appellation communément utilisée pour désigner les éléments métalliques naturels, caractérisés par une masse volumique élevée, supérieure à 5 g.cm-3 .
Les utilisations des métaux sont multiples et très diversifiées, depuis les additifs de plomb dans les carburants jusqu’aux sels d’argent de l’industrie photographique, au nickel ou au cadmium des batteries d’accumulateurs, au zinc des gouttières ou au chrome des aciers inoxydables, au cuivre de l’industrie électrique ou à l’arsenic des produits phytosanitaires. Les sources de contamination le sont par conséquent aussi. Durant toutes les phases d’élaboration, d’utilisation et/ou de recyclage de ces produits, des métaux sont rejetés dans l’environnement, soit directement dans les eaux continentales ou marines, soit dans l’atmosphère transportés par les vents, associés aux aérosols avant de se déposer par voie sèche ou humide à la surface de la terre ou de l’océan.
Situation générale des métaux en Méditerranée
Comme son nom l’indique, la Méditerranée est une mer semi-fermée, entourée de trois continents, les apports atmosphériques et telluriques sont donc importants. Sa superficie est de 2,5.1012 m2, alors que son bassin versant représente 1,8.1012 m2. Le rapport des surfaces bassin versant sur mer est donc de 0,7 alors qu’il est de 0,3 pour l’océan mondial. Cet effet du bassin versant reste toutefois inférieur à ce que subit la mer Noire où le rapport des surfaces respectives atteint 4,4. Dans la vingtaine de pays riverains de la Méditerranée sont hébergés près de 400 millions d’habitants, dont 100 millions de résidents sur la zone côtière, recevant 120 millions de visiteurs par an. En conséquence, au lessivage naturel des sols et à l’érosion éolienne, s’ajoutent les apports (ou rejets) liés aux activités industrielles, agricoles et urbaines du bassin versant. De plus, les apports atmosphériques, inclus dans la circulation atmosphérique, peuvent venir de régions extérieures au bassin versant: Europe du Nord et régions sahariennes.