FREQUENCE DE LA POSITIVITE DE LA SEROLOGIE SYPHILITIQUE CHEZ LES PATIENTS CONSULTANT EN DERMATOLOGIE
En Afrique la prévalence de la sérologie syphilitique n’est pas fréquemment étudiée. Coulibaly et coll. [12] en 2004 en Côte d’Ivoire ; Fakeya et coll.[13] en 1984 au Nigeria ; ont noté respectivement une prévalence de 1,4%, et de 0,9%. Une étude mené par l’OMS au Maroc en 1998 avait retrouvé une prévalencede 1,3% [14].Récemment, une étude avait montré une prévalence de 0,96% concernant un échantillon de 1034 tests sérologies syphilitiques réalisées dans un laboratoire de biologie toujours au Maroc [15] Notre prévalence reste toujours supérieure à celle obtenue en 1998 par MEDA et coll. [16] au Burkina Faso et celles de Soudan (2,4%) et Djibouti (3,1%) publiées par l’OMS [14] en 1998. Aux îles Comores, la prévalence est de3, 6%, [17] tandis qu’en en Mauritanie, la positivité simultanée du TPHA et du VDRL chez les donneurs de sang est estimée à 4,5% [18]. Pour la part les pays occidentaux, malgré une recrudescence observée, leur prévalence reste inférieure à celle des pays en voie de développement. Cette prévalence est de : 0,03% en Grande Bretagne [19] ; 0,04% au Canada [20] ; 0,5% en France [21] et 0,3% en Belgique [22]. Dans une étude rétrospective de cinq ans, des auteurs français avaient trouvé une sérologie syphilitique positive dans une proportion de 1,5 %. Il s’agissait d’un échantillon de 1093 patients consultant dans un service de Dermatologie [10]. La grande fréquence de positivité TPHA et VDRL dans notre étude peut être en rapport avec un certain nombre de biais. D’une part elle peut s’expliquer par la faible taille de l’échantillon en comparaison avec ces études précitées et le biais de recrutement vue que le plus grand nombre de nos patients sont recrutés au centre hospitalier régional de Saint- louis à fortiori dans un service de Dermatologie. Nous pensons que la fréquence élevée peut s’expliquer par une endémicité régionale de la maladie d’autant plus que l’étude française qui était la seule que nous avons trouvé et ayant été réalisée dans un service de 24 Dermatologie comme notre travail, avait rapporté une fréquence beaucoup plus moindre que la nôtre, 1,5% [10]. En effetl’endémicité pourrait être lié à une insuffisance de la lutte contre la syphilis vénérienne car à contrario des autres IST comme le VIH, la syphilis vénérienne serait très peu connue des populations. Ainsi les mesures préventives peuvent avérer déficitaires et expliquer les résultats. Cet argument est d’autant plus vraisemblable que nous avons trouvé une association à la limite de la significativité entre le niveau scolaire faible et la positivité de la sérologie syphilitique (p=0,05). ). Il pourrait s’agir également d’une mauvaise prise en charge des chancres syphilitiques. Pourtant depuis 2000, l’approche syndromique a permis d’améliorer les IST ulcératives. S’agit-il alors d’une résistance aux antibiotiques utilisés dans la prise en charge des syphilis primaire ou d’un sous diagnostic de ces chancres ou encore d’une résurgence de la syphilis comme ce qui est rapporté dans les pays occidentaux [1]. En réalité, il n’existe pas de grandes différences en ce concerne les modes de transmission etles attitudes préventives entre la syphilis vénérienne et l’infection par le VIH. Pourtant à St Louis la séroprévalence du VIH est de 0,9% [23].Si cette dernière est moins alarmante dans la région de Saint Louis comparer à celles du sud du Sénégal en l’occurrence Kolda et Ziguinchor où elle est respectivement de 2,4% et 1%, il serait judicieux de réaliser cette présente étude dans ces régions en vue de comparer les fréquences de la sérologie syphilitique. Ceci permettrait de savoir s’il existe dans la région de Saint Louis des facteurs locaux propices au développement du Trépaonema pallidum d’autant plus que l’étude nationale de Mboup et collrévèledéjà une fréquence très faible comparée à celle nos résultats (1,2%) [11]. Il existe autant d’homme que de femme chez les patients TPHA+ VDRL+ mais les premiers sont les plus précocement atteints. Il n’existe pas de corrélation entre le sexe et la sérologie syphilitique (p=0,7). Ceci corrobore l’étude menée 25 aux îles Comores qui avait observé les mêmes constats [17]. L’âge minimum chez eux est de 24 ans alors qu’il est de 48 ans chez les femmes. Cette disparité serait liée à une vie sexuelle plus précoce chez les garçons que chez les filles car selon des convenances socio-culturelles sénégalaises la fille est plus astreinte à avoir une vie sexuelle tardive. Nos patients sont le plus souvent mariés. Ces derniers représentaient 90,5% des cas de positivité soit 19 des 21 malades. Il n’existe pas de corrélation statistiquement significative entre le statut matrimonial et positivité sérologique (p=0,17). Nous avons rapporté 18 cas de positivité du VDRL dont 10 cas isolés soit 8,2%. Au Maroc pour un échantillon de 1034 malades, un seul cas de VDRL positif isolément était observé (0,09%) [15]. La fréquente positivité du test non spécifique pourrait être en rapport avec la forte implication des anticorps anticardiolipine qui est le substratum du test (VDRL). En effet les cardiolipines sont ubiquitaires et sont impliqués dans d’autres circonstances et pathologies telles que la grossesse, le vieillissement, certains états infectieux mais également dans le syndrome des anticorps anticardiolipines. Chez nos patients qui avaient une fausse sérologie syphilitique, nous avons retrouvé des antécédents d’avortement et de thrombose. Le TPHA négatif chez la plus grande partie de notre échantillon corrobore la quasi-totalité des études . Ceci peut s’expliquer soit par une absence de contact avec le Tréponème ou par un traitement précoce de la syphilis. En effet une Extencillinothérapie est encore utilisée de manière abusive par le personnel médical sans qu’un diagnostic ne soit établi. Ce traitement est introduit par certains pratiquants non avertis devant toute anomalie survenant sur la peau. Cette pratique serait certainement en rapport à l’histoire 26 médicalenationale des grandes endémies dont la syphilis qui motivait une utilisation à grande échelle de L’Extencilline. Nous avons observé 8 cas de syphilis évolutive dont 7 cas vénériens et 1 cas de Béjel. Les formes évolutives de syphilis vénérienne sont réparties comme suit : 4 formes secondaires, deux cas de syphilis primaire et 1 cas de forme tertiaire.Ces résultats sont similaires à ceux de l’étude de Amlot à Montpellier qui montrait une prédominance de la syphilis secondaire avec un pourcentage de 49% [24]. Il faudra cependant noter que cette dernière était réalisée dans plusieurs spécialités et avait enrôlé plus de malades que notre échantillon. Sur le plan clinique, le quart (24%) des patients qui avaient une sérologie positive présentait une gale. Cette dernière étant considérée comme une IST mineure confirme l’aphorisme qui dit « Une IST en cache toujours une autre » Nous avons noté un seul cas d’infection par le VIH soit 0,8% de l’échantillon. La faible représentativité de cette infection n’a pas permis de faire des analyses multi variées. Cette faible prévalence de l’infection à VIH par rapport aux tréponématoses a été également retrouvée par Dada aux îles Comores qui l’avait estimée à 0,025% alors que la dernière était de 3,6% .
CONCLUSION
La syphilis est une infection bactérienne responsable de lésions cutanéo muqueuses et phanériennes pouvant toucher de nombreux organes. La fréquence de la maladie reste importante dans les pays en voie de développement. L’OMS estime l’incidence de la syphilis à 12 millions dont 90% dans ces pays. La transmission de l’infection est strictement interhumaine. La sérologie syphilitique est réalisée en pratique médicale dans plusieurs circonstances. Depuis les années 2000, il est observé une recrudescence de la syphilis et ceci dans ses différentes formes de présentation clinique. La syphilis est une véritable simulatrice pouvant mimer plusieurs affections tant sur le plan viscéral que dermatologique. En outre la syphilis latente passe le plus souvent inaperçue car asymptomatique et peu contagieuse en dehors de la transmission mère-enfant. Les indications de la sérologie syphilitique sont nombreuses. La prévention de la transmission mère enfant reste un des piliers de la réalisation ce test à titre préventif en dehors des dons de sang, des candidats à l’immigration ou du service militaire. Au Sénégal, dans les centres nationaux de transfusion, la prévalence de la sérologie syphilitique est de 0,18% en 2014 contre 0,34% l’année précédente selon le rapport de la DLSI de 2014. Chez les populations clé, elle est de 2,8% en 2014 contre 4,3% en 2013. Nous avons réalisé une étude prospective multicentrique ayant été déroulé aux services de Dermatologie de : l’hôpital régional de Saint Louis, IHS et HALD. Etait inclus tous les patients consultant dans ces services et ayant accepté de participer à l’étude. 28 Nous avons inclu 156 patients dont 45 ont été exclus de l’analyse. Finalement, 121 patients ont été enrôlés. Concernant l’échantillon nous avons trouvé un âge moyen de 38,1 ans avec de extrêmes de 10 ans et 82 ans. L’échantillon était composé de 56 hommes avec sexe ratio était de 0,86. Au terme de cette étude, nous avons colligé 21 cas de positivité de la sérologie syphilitique soit une prévalence de 17,3%. Ils sont constitués de 10 hommes et 11 femmes soit un sexe ratio de 0,9. Nous avons noté 8cas de syphilis évolutive dont 7 cas vénériens et 1 cas de Béjel. Les formes évolutives de syphilis vénérienne sont réparties comme suit : 4 formes secondaires, deux cas de syphilis primaire et 1 cas de forme tertiaire. Parmi les 21 malades, un seul cas de comportement sexuel à risque. Il s’agissait d’un MSM. Un usager de drogue par voie intraveineuse a été répertorié. Aucune professionnelle du sexe n’a été répertoriée.Concernant les pathologies associées, nous avons noté deux cas d’eczéma lichénifié chez les patients présentant une syphilis secondaire.Les deux derniers cas de syphilis secondaire et celui de la syphilis primaire sont isolés. Concernant les patients qui ont un VDRL + TPHA-, la répartition des pathologies était comme suit : 3 cas de gale, 2 cas d’eczéma, une dermite séborrhéique, une KPP mycosique, une onychomycose et un prurigo La seule patiente infectée par le VIH présentait un TPHA positif isolé. Le diagnostic retenu chez elle était un syndrome de Feissinger Leroy Reiter. Nous avons noté une corrélation statistiquement significative entre le faible niveau scolaire et la positivité de la sérologie syphilitique. Cependant il n’en existe pas entre cette dernière et : le statut matrimonial, l’âge, le sexe et la classe professionnelle.
INTRODUCTION JUSTIFICATIFS |