Fractionnement analytique de la graine de neem et de la graine de dattier du désert
Le neem (Azadirachta indica A. Juss) et le dattier du désert (Balanites aegyptiaca L.), deux arbres tropicaux et subtropicaux répandus au Sénégal
Origine, classification et description
Originaire du sub-continent indien (Chopra et al., 1952), et plus précisément, de la Birmanie et/ou du Sud de l’Inde (Troup, 1921; Vartak and Ghate, 1990), et pour d’autres de la partie Sud-Est au Sud de l’Asie, allant de l’Indonésie à l’Iran (National Research Council, 1992), le neem, désigné par les botanistes sous le nom d’espèce Azadirachta indica A. Juss, est une plante de la famille Meliaceae (Tableau I-1). Il possède aussi de nombreux noms vernaculaires en fonction des régions et pays où il a été identifié (Asie) et introduit (Pacifique Sud, Australie, Amérique et Afrique) (Schmutterer, 1995). Cependant, le dattier du désert, désigné par le nom d’espèce Balanites aegyptiaca L, est une plante de la famille botanique des Zygophyllaceae ou Balanitaceae (Tableau I-1). Il a été planté en Egypte depuis plus 4000 ans et s’est progressivement répandu dans d’autres parties d’Afrique (Chapagain, 2006). Balanites aegyptiaca et ses sous-espèces sont néanmoins aussi présentes dans le sous-continent indien. Plusieurs synonymes peuvent aussi être rencontrés pour le désigner [Ximenia aegyptiaca L. (Balanites roxburghii Planch), Agialida senegalensis Van Tiegh., Agialida barteri Van Tiegh., Agialida tombuctensis Van Tiegh., Balanites ziziphoides Milbr et Schlechter, Balanites latifolia Van Tiegh.]. Il est connu sous plusieurs 13 noms vernaculaires : Dattier du désert, Balanite ou Hagueleg en Français, Desert date, Soapberry tree, Thorn tree en Anglais et Soump en Wolof (langue nationale sénégalaise). Tableau I-1 : Classification botanique du neem (Schmutterer, 1995) et du dattier du désert (Chothani et Vaghasiya, 2011) Neem Dattier du désert Sous Règne Trachebionta Trachebionta Division Magnoliophyta Magnoliophyta Classe Magnoliopsida Magnoliopsida Sous Classe Rosidae Rosidae Ordre Sapindales Sapindales Sous Ordre Rutineae – Famille Meliaeae Zygophyllaceae (Balanitaceae) Sous famille Meloideae – Genre Azadirachta Balanites Espèce Azadirachta indica A. Juss Balanites aegyptiaca (L.) Delile Les caractéristiques morphologiques de ces deux arbres sont très différentes (Figure I-1), tant par leur port et leur taille que par leur feuillage ainsi que leurs fleurs et fruits (Tableau I-2). 14 a b c d a : arbre de neem b : arbre de dattier du désert c : feuilles de neem d : feuilles de dattier du désert Figure I-1 : Photographie du neem et du dattier du désert 15 Tableau I-2 : Description de l’arbre de neem et du dattier du désert Neem Dattier du désert Taille ▪ 25 à 30 m dans son pays d’origine ; ▪ Jusqu’à 35 à 40 m dans des conditions de bon développement (Schmutterer, 1995) ; ▪ 5 à 15 m au Sénégal (Berhaut, 1979). ▪ Arbuste ou petit arbre pouvant atteindre 12 m de haut ; ▪ De morphologie variable. Tronc ▪ Relativement court, habituellement droit, pouvant atteindre 1,5 à 3,5 m de diamètre ; ▪ Ecorce de couleur variable d’une plante à une autre, selon l’âge et la localisation, grise à noirâtre, faiblement fissuré ; ▪ Cœur du bois dur, rouge brun avec des veines rosées. ▪ Court, généralement droit et souvent ramifié à la base ; ▪ Ecorce de couleur brune foncée à grise, profondément fissurée ; ▪ Bois dur et résistant à l’attaque d’insectes. Branches et feuillage ▪ Branches en général écartées, formant avec ses multiples feuilles une couronne assez dense, ronde ou ovale, pouvant atteindre 15 à 20 m de diamètre pour les arbres matures (National Research Council, 1992; Schmutterer, 1995); ▪ Feuillage persistant. ▪ Branches armées d’épines jaunes ou vertes pouvant atteindre 8 cm de long ; ▪ Réparties en général de manière irrégulière ou pendante, formant parfois une couronne ronde (Chapagain, 2006; Chothani et Vaghasiya, 2011) ; ▪ Feuillage persistant. Feuilles ▪ Alternes, folioles dentées et le limbe absent à la base des folioles (Fortin et al., 1997) ; ▪ Face dorsale de couleur verte-foncée, face ventrale plus claire ; ▪ 20 à 40 cm de long, plus denses à l’extrémité des branches (Puri, 1999). Alternes, de couleur verte à grisâtre, avec deux folioles subsessiles, obovales, orbiculaires et rhomboïdes ; ▪ 3 cm de long et 2,5 cm de large avec pétiole de 1 cm de long (Dial NDiaye, 1997) ; ▪ Feuillet séparés ; folioles ovales, asymétriques, de longueur 2,5 à 6 cm, vert-clair avec des poils fins lorsqu’il est jaune (Chothani et Vaghasiya, 2011). Fleurs ▪ Petites blanches en panicule axillaire lâche, parfois ramifiées pouvant atteindre 25 cm de long ; ▪ Sève à odeur attirante pour les abeilles ; ▪ Inflorescences embranchées jusqu’au 3 ème degré, comportant jusqu’à 150 à 250 fleurs (Gruber, 1991) ; ▪ 5 à 6 mm de long et 8 à 11 mm de large pour chaque fleur (Schmutterer, 1995). ▪ Petites tailles, réunies en plusieurs types d’inflorescences (glomérulaires, clusters et funicules), portées par des branches latérales ; ▪ Forte odeur spécifique, hermaphrodites et pollinisées par les insectes. 16 Tableau I-2 (suite) : Description de l’arbre de neem et du dattier du désert Neem Dattier du désert Fruits ▪ Drupes de forme presque cylindrique (Fortin et al., 1997) ou ellipsoïdale 1,4 à 2,8 cm de long et 1 à 1,5 cm de large (Schmutterer, 1995) ; ▪ Recouvertes d’un péricarpe de couleur verte et jaune à maturité ; ▪ Contiennent un noyau ligneux représentant le quart de leur volume (Mensier, 1957). ▪ Drupes de 2,5 à 7 cm de long et 1,5 à 4 cm de diamètre ; ▪ Vert devenant jaune à glabre à maturité (Chothani et Vaghasiya, 2011) ; ▪ Composé d’un épicarpe (5-9%), d’un mésocarpe (28-33%) et d’un endocarpe (graine : coque et amande) (49-54%) (Mohamed et al., 2002). Floraison et fructification ▪ Au bout de 3 à 5 ans, et forte productivité à partir de 10 ans ; ▪ Une à deux périodes de floraison (voire trois) : janvier-février à mai dans l’hémisphère Nord, novembre-décembre au Sud de l’Equateur ; mars-avril et juillet-août en Afrique de l’Ouest et au Sénégal (Schmutterer, 1995). ▪ À partir de 5 à 7 ans et productivité maximale à 15-25 ans (Mohamed et al., 2002) ; ▪ Floraison entre novembre et avril et fructification entre décembre et juillet (Bein et al., 1996; El-Ghazali et al., 1994). Le neem est un arbre à croissance rapide dans de bonnes conditions climatiques et pédologiques, et est connu pour vivre jusqu’à 200 ans (Radwanski, 1977). Un seul arbre peut produire plus de 100 kg de fruits par an au Kenya (Saxena et al., 1988), mais en moyenne, un arbre de 8 m de hauteur produit entre 37 et 55 kg de fruits par an (Ketkar, 1976). Le dattier du désert est un arbre à croissance plus lente, qui peut vivre pendant 100 ans dont 75 ans de fructification, et dont la production annuelle de fruits est estimée entre 100 et 150 kg (Elamin et Satti, 2013). Ces deux arbres sont adaptés à des conditions pédoclimatiques différentes mais largement rencontrés dans de nombreux pays tropicaux et subtropicaux, en particulier africains, dont le Sénégal.
Le neem
L’arbre de neem se développe dans des régions où les moyennes pluviométriques annuelles varient entre 250 et 2000 mm (Berhaut, 1979; Fortin et al., 1997). Toutefois, son développement est possible dans des régions à haute pluviométrie (3000 à 4000 mm par an), en particulier dans l’Est de l’Equateur, dans le bassin d’Amazonie et dans l’île Tsonga (Schmutterer, 1995). Il ne nécessite pas de sol très riche. Un pH du sol compris entre 6,2 et 7 semble être meilleur pour le développement du neem. Il tolère toutefois des pH de 5,9 à 10 dans certaines conditions (Rice, 1993). Le neem, comme tout arbre tropical, vit dans des conditions de températures annuelles comprises entre 21 et 32°C. Cependant, le système racinaire du neem, constitué d’une forte racine pivotante et d’un ensemble de racines latérales bien développées qui pénètrent profondément le sol et produisent des surgeons, lui permettent de résister dans des zones arides (Schmutterer, 1995). Il peut aussi tolérer les hautes températures voire très hautes températures. C’est le cas au Nord-Est et au centre de l’Afrique où celles-ci peuvent atteindre 50°C pendant l’été. Les températures inférieures ou égales à 4°C sont défavorables et peuvent entrainer la mort des jeunes plantes. Le neem est d’habitude retrouvé dans les plaines et les petites montagnes, jusqu’à 700-800 m au-dessus de la mer et occasionnellement à 1000 m d’altitude (Schmutterer, 1995). La lumière est un autre facteur environnemental important de son développement. Bien que les jeunes plantes poussent souvent sous l’ombre, les arbres adultes exigent beaucoup de lumière. Ainsi, la vitesse de photosynthèse mesurée en Australie était de 10-17 µmol de CO2/m2 s, cette valeur est supérieure à celle de la plupart des plantes tropicales (Gruber, 1991). Aujourd’hui largement répandu dans les régions tropicales et subtropicales, notamment d’Asie, d’Amérique, d’Australie et des îles du Sud Pacifique (Schmutterer, 1995), c’est l’Afrique, avec une population estimée entre 31 et 45 millions d’arbres (Forster et Moser, 2000), qui serait le continent qui a le plus d’arbres de neem. Actuellement, il est présent un peu partout en Afrique (dans un peu moins de 30 pays), en particulier dans la frange méridionale du Sahara, où il est devenu un véritable pourvoyeur de charbon de bois et de bois de charpente (National Research Council, 1992). Il est présent le long de la côte de l’Afrique orientale (Somalie, Kenya, Tanzanie et Egypte). En Afrique centrale, le neem est présent le long du bassin du lac Tchad (Est du Niger, Nord-Est et Sud-Est du Nigéria, Sud-Ouest du Tchad et Nord du Cameroun). Le neem est aussi très présent en Afrique de l’Ouest notamment au Bénin, au Togo, au Burkina Fasso, au Ghana, en Côte d’Ivoire, au Mali, en 18 Mauritanie, au Sénégal, en Gambie, en Guinée Bissau, en Guinée Conakry et en Sierra Leone (Faye, 2010; Schmutterer, 1995). Au Sénégal, sa population est estimée entre 18 et 30 millions d’arbres, affichant ainsi une des biomasses les plus importantes du continent (Fortin et al., 1997). Le neem est présent partout dans le pays dans des conditions climatiques et édaphiques différentes. Et même s’il est connu pour son association avec beaucoup d’autres plantes dans leur milieu naturel (Benge, 1989), le neem est une espèce qui contient des principes inhibant la germination et la croissance de la flore environnante (Berhaut, 1979). Parfois, sous certaines conditions (forte précipitation, abondance d’oiseaux et de sauve-souris) qui occasionnent la propagation des graines, les arbres de neem peuvent devenir invasifs. Cette situation est observée en Afrique de l’Ouest, particulièrement au Sud du Sénégal (Schmutterer, 1995).
Le dattier du désert
Le dattier du désert pousse dans les savanes des régions arides et semi arides d’Afrique et d’Asie (Mohamed et al., 2002). Il y est rencontré dans de nombreux types d’habitats et tolère une large variété de sols, allant du sable à l’argile dans des zones humides. Il est aussi adapté à une variété de conditions climatiques, surtout les régions arides dont les températures moyennes sont élevées (Ndoye et al., 2004). Ainsi, dans le Sahel, les dattiers du désert qui fleurissent avant la saison des pluies (vers avril) et dont les fruits mûrissent et tombent en décembre-janvier, poussent sur une large variété de sols : sols lourds autour des étangs, le long des oueds, les dépressions occasionnellement inondées et les vallées fossiles quaternaires du Sahara ; sur éboulis rocheux-argileux; également sur des sols sableux (Chapagain, 2006). Le dattier du désert est une espèce qui vit en général sur les plaines, jusqu’à 1000 m d’altitude dans les régions où les températures moyennes annuelles varient entre 20 et 30°C, et celles où les précipitations moyennes annuelles vont de 250 à 400 mm (Schmidt et Jøker, 2001; The Wealth Of India, 1998). Dans les zones plus désertiques, dans le Sahel et en Afrique subsaharienne, le dattier du désert dépasse rarement 10 m de hauteur, mais dans ces conditions, les feuilles épaisses et dures avec un revêtement brillant, offrent une protection contre l’air sec (Hall et Walker, 1991). Le système racinaire s’étend verticalement et horizontalement pour trouver de l’eau jusqu’à 7 m de profondeur et dans un rayon allant jusqu’à 20 m. Ce système racinaire développé permet également à l’arbre de supporter les invasions par le sable, fréquentes dans ces régions et qui déracinent et détruisent d’autres arbres. Dans ces conditions difficiles, le revêtement de sable autour de chaque racine fournit 19 une couche d’air isolante, qui modère ses variations de température et réduit l’évaporation. Les longues épines vertes et les branches assurent la photosynthèse en l’absence des feuilles pour permettre la survie de la plante. C’est donc une plante bien adaptée aux conditions extrêmes du désert. Dans le sous-continent indien, Balanites aegyptiaca et ses sous-espèces sont présents seulement en Inde et en Birmanie voisine (Union du Myanmar). En Inde, le Balanite est largement cultivé dans le Rajasthan et dans les pays voisins, alors que dans la Birmanie cette plante n’existe que dans la vallée de l’Irrawady et l’une des deux zones adjacentes entre Yeu (environ 22º 50′ N), dans le nord et Prome (environ 18º 15′ N), dans le sud (Chapagain, 2006; Sands, 2001). Il pousse aussi naturellement dans le Myanmar et est rencontré dans les régions les plus sèches du Pakistan et de l’Inde. Les dattiers du désert ne sont pas seulement cultivés dans le continent africain, ils sont aussi cultivés au Moyen-Orient, dans la Péninsule arabique. Hors de l’Afrique, l’Israël, la Jordanie, l’Arabie Saoudite, le Nord et le Sud du Yémen, sont les pays où le dattier du désert pousse naturellement. En Israël, Balanites aegyptiaca est rencontré dans la vallée de l’Arava (près de la frontière jordanienne), dans l’Eilat (près de la mer Rouge), dans l’oasis d’Ein-Gedi (près de la mer Morte) et dans la vallée de Bet-Shean (près de la mer de Galilée) (Chapagain, 2006). Balanites aegyptiaca se développe des latitudes 35° Nord (Bet Shean-Valley, Israël) à environ 19º Sud (district Budi, Zimbawe) (Zohary, 1973). Cependant, il est principalement rencontré dans les zones arides et semi-arides en Afrique tropicale où il est l’une des plantes ligneuses les plus répandues. Il est rencontré en Mauritanie, au Sénégal, au Bénin, au Burkina Faso, au Cameroun, au Tchad, en Djibouti, en Ethiopie, en Gambie, au Ghana, en Guinée Bissau, en Guinée, en Côte-d’Ivoire, au Kenya, au Mali, au Nigeria, au Niger, au Soudan, en Somalie, en Tanzanie, au Togo, en Ouganda, en RDC et en Zambie où il est cultivé, en plus de ceux qui poussent à l’état sauvage (Booth and Wickens, 1998). L’Algérie, l’Angola, le Burundi, la République centrafricaine, la Libye, le Maroc et le Rwanda sont les autres pays africains où se trouvent les dattiers du désert (Chapagain, 2006; Hall et Walker, 1991) (Figure I-2 ).
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