FORMATION ET ANALYSE DES COUCHES MINCES DE CuIn (Se, S) 2
ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE SUR LE DISELENIURE DE CUIVRE ET D’INDIUM (CuInSe2) ET SES DERIVES
La majorité des connaissances fondamentales sur les composés ternaires à base de CuInSe2 a été établie avant les années 1980 tandis que les propriétés électriques, optiques structurelles de chalcopyrites ternaires semi-conducteurs CuMX2 (M= Al, Ga, In et X = Se, S et Te) ont été examinés dans les années 1960 et 1970. En 1974, Wagner a produit la première cellule photovoltaïque à grand rendement (12,5%) basée sur la jonction CuInSe2/CdS où le CdS (type n) était évaporé sur un cristal de CuInSe2 de type p. Par la suite un regain d’intérêt pour ces matériaux a eu lieu lors de la réalisation d’une cellule photovoltaïque en couches minces. L’intérêt de CuInSe2 et ses dérivés dans le domaine photovoltaïque est dû en grande partie à son coefficient d’absorption assez élevé et à sa bande interdite directe. Malgré tout cet intérêt l’énergie de son gap reste inférieur à la valeur optimale pour un matériau absorbeur d’une cellule photovoltaïque [3, 4]. I-1 La structure cristalline Le diséléniure de cuivre et d’indium CuInSe2 ou CIS appartient à la famille des chalcopyrites. La chalcopyrite est une structure cristalline tétragonale à corps centré. Dans cette structure de type AI BIIICVI2, les atomes A et B sont tétraédriquement liés à quatre atomes de C chacun tandis que chaque atome de C est tétraédriquement lié à deux atomes de A et à deux atomes de B de manière ordonnée. La position précise des atomes C dans la structure chalcopyrite dépend de la force des interactions A-C et B-C. Selon Robbins et al. [1], les liaisons entre l’atome C et ses deux plus proches atomes A voisins sont plus fortes à cause probablement de la contribution des électrons d de l’atome A à ces liaisons. Ceci conduit à deux conséquences principales : – les atomes C sont légèrement déplacés de leur position idéale d’une faible quantité x, appelé paramètre libre de la structure chalcopyrite. – le rapport est généralement différent de la valeur idéale 2. La quantité (2 – ) est alors utilisée comme une mesure de la distorsion tétragonale qui résulte de cet arrangement atomique. I-2 La structure électronique On rappelle que les structures électroniques du cuivre, de l’indium et du sélénium sont : Cu (Z = 29): 1s2 2s2 2p6 3s2 3p6 4s2 3d9 In (Z = 49): 1s2 2s2 2p6 3s2 3p6 4s2 3d104p6 5s2 5p6 4d5 Se (Z = 34): 1s2 2s2 2p6 3s2 3p6 4s2 3d104p4 Les valeurs des bandes interdites et les structures cristallographiques de ces composés ternaires I-III-VI2 et de leurs alliages ont aussi été examinés par calcul théorique. Ces études ont montré l’existence d’une parenté du point de vue structurale entre les chalcopyrites ternaires et les composés II-VI à structure zinc-blende. Celle-ci suggère une relation étroite entre les structures de bandes d’énergie de ces matériaux. C’est en fait ce sur quoi se fonde l’approche utilisée par Shay et Wernick [2] pour simplifier et modéliser la structure des bandes d’énergie des chalcopyrites ternaires. Pour chaque composé ternaire I-III-VI2, ils définissent un composé binaire analogue II-VI. Le modèle de bande obtenu par cette approche prévoit trois transitions de la bande de valence à la bande de conduction résultant de la triple levée de dégénérescence due aux effets conjugués du champ cristallin et de l’interaction spin-orbite. Cependant, les observations expérimentales ont permis de faire les constats suivants : – l’énergie des gaps directs des composés I-III-VI2 est faible par rapport à l’énergie des gaps des composés binaires analogues. – la valeur expérimentale du paramètre d’interaction spin-orbite est plus faible que la valeur prévue théoriquement et celle des composés binaires analogues. Zincbl d Chalcopyrite Bande de d i Champ i lli Interaction spinbi A B Figure 1: Structure des bandes d’énergie de chalcopyrites ternaires semi-conductrices Ce phénomène s’explique par le fait que les bandes de valence des composés binaires zincblende analogues des composés I-III-VI2 sont composées d’orbitales de types s et p tandis que les niveaux supérieurs des bandes de valence des composés ternaires sont fortement influencés par la proximité des niveaux d du métal noble qui est ici l’atome A. Il en résulte une hybridation p-d entre les niveaux p de l’anion C et les niveaux d du métal noble A. C’est cette interaction dans la bande de valence des composés I-III-VI2 qui serait à l’origine de ces anomalies. Les estimations quantitatives du caractère d se situent entre 16 et 45 dans la série de composés chalcopyrites étudiés. Les paramètres d’interaction spin-orbite ∆SO théorique étant plus faibles pour les sulfures que les séléniures ; cette interaction entre différents niveaux énergétiques dans la bande de valence conduit à des valeurs proches de zéro pour les sulfures d’où l’observation pour ces derniers composés de deux transitions au lieu de trois comme les séléniures.
Propriétés électriques
Les propriétés électriques des composés ternaires
VI2 ont fait l’objet de nombreuses études. Celles-ci montrent que les propriétés électriques de ces composés sont données par des défauts structuraux dans le réseau cristallin de ces matériaux. Ces défauts natifs électriquement actifs résultent généralement des écarts à la stœchiométrie. Selon le type de défauts présents, le matériau peut avoir une conductivité de type n ou p ou même isolant. On montre que ces propriétés peuvent être contrôlées par un certain nombre de paramètres. En particulier pour les sulfures et les séléniures, les propriétés électriques peuvent être contrôlées par des conditions de traitements thermiques convenables. Ainsi on montre que les sulfures et séléniures à base de cuivre, recuits à des températures comprises entre 600 et 800°C pendant 24 heures, sous pression maximale de chalcogène donnent une conductivité de type p. Par contre, lorsque le traitement thermique est effectué sous pression minimale du chalcogène, les composés à large gap très résistants et les composés à faible gap donnent une conductivité de type n. Comme pour tous les chalcopyrites ternaires, la conductivité électrique, la concentration et la mobilité des porteurs de charge dans le CuInSe2 sont fortement contrôlées par les rapports Cu/In et (Cu + In)/Se dans le matériau ainsi que les conditions de dépôts et de traitement thermique de ces couches. Cette dépendance de la conductivité électrique vis-à-vis de la composition des couches offre la possibilité de doper le matériau sans impuretés extrinsèques. Par simple introduction de défauts natifs, les couches peuvent être semi-conductrices de type n ou de type p. Ces défauts natifs qui résultent comme nous venons de le préciser des écarts à la stœchiométrie, sont introduits au cours de la croissance des films ou de leur traitement thermique sous pression de chalcogène. On montre que les couches de CuInSe2 contenant un excès de cuivre présentent toujours une conductivité de type p alors que les couches riches en indium peuvent être semi-conductrices de type p ou de type n. Le traitement thermique sous pression maximale de sélénium peut convertir les couches de type n en couches de type p. Inversement des matériaux de type p peuvent être convertis en matériaux de type n par recuit sous faible pression de sélénium. I-4 Caractéristiques électro-optiques A partir des observations expérimentales issues d’études optiques réalisées sur le CIS, des informations concernant les transitions A, B et C ainsi que les éclatements dus au champ cristallin et au champ d’interaction spin-orbite ont été obtenues mais aussi la différence d’énergie ECA entre les transitions A et C et EBA entre les transitions A et B. Les études effectuées sur des monocristaux en particulier montrent que le CIS est un semiconducteur à bande interdite directe et que les énergies des transitions permises A, B et C sont respectivement 1,04 eV, 1,04 eV et 1,27 eV. Le paramètre d’interaction spin-orbite déduit de ces résultats est de 0,23 eV Ainsi, à l’instar des sulfures I-III-VI2 et contrairement à tous les séléniures étudiés, le CIS ne présente que deux transitions directes permises ; les transitions A et B sont équivalentes. Les différences d’énergie entre les transitions A et B et les transitions C et A sont respectivement : EBA = B – A = 0 eV ECA = C – A = 0,23 eV Les valeurs de ∆SO et ∆CF trouvées étant respectivement de 0,23 eV et 0 eV. Plusieurs études ont montré que la valeur de ces énergies dépend de la composition chimique du composé et du rapport Cu/In. I-5 Propriétés photovoltaïques Pour réaliser une cellule photovoltaïque de couches minces, il faut une couche absorbante à grand coefficient d’absorption dans le domaine du visible. Il faut donc de préférence utiliser un semi-conducteur ayant une bande électronique interdite directe (et non indirecte comme le silicium) et dont la valeur est adaptée au spectre solaire (de l’ordre de 1,1 – 1,7 eV). Ces matériaux permettent une absorption de tout le spectre solaire dans une épaisseur relativement faible (de l’ordre de 1 µm). Cette faible profondeur d’absorption présente l’avantage de rendre la cellule photovoltaïque relativement tolérante aux défauts qui agissent comme des centres de recombinaison des porteurs de charges. Ces propriétés correspondent à celles du CIS. Evidemment sa bande interdite est un peu plus faible (Eg = 1,02 eV) mais des pistes d’optimisation de celle-ci existent. I-6 Les méthodes de dépôt du CuInSe2 Plusieurs techniques de dépôt ont été utilisées pour la croissance en couches minces du diséléniure de cuivre et d’indium CuInSe2 ou CIS. Chacune des techniques de dépôt et les paramètres associés à son processus ont un effet important sur la nucléation, la microstructure de la croissance des couches minces et leur composition. Le choix de la méthode de croissance est donc très important pour l’élaboration de matériaux de haute qualité et pour la réalisation de cellules photovoltaïques très performantes. Les principales méthodes de dépôt utilisées sont : – la co-évaporation sous vide, – la sélénisation des précurseurs métalliques, – la pulvérisation cathodique, – le dépôt chimique en solution, – le déplacement redox ou electroless, etc…
La co-évaporation sous vide
Son principe consiste à mettre dans un creuset un cristal du matériau à déposer et à porter ce creuset à une température convenable. Dés que la température de liquéfaction est dépassée ; le corps commence à s’évaporer, la pression de vapeur du matériau à déposer devient légèrement supérieure à la pression résiduelle dans l’enceinte. Des atomes s’échappent du matériau et se déplacent jusqu’à ce qu’ils rencontrent un obstacle : une surface solide (substrat). On obtient ainsi par condensation une couche mince du matériau à la surface du substrat. Dans le cas particulier de l’élaboration du CIS en couches minces on utilise soit un seul creuset dans lequel on introduit un cristal de CIS soit on utilise trois creusets dans lesquels on introduit des sources indépendantes des trois éléments (Cu, In, Se). Dans ce dernier cas chaque creuset est relié à un thermocouple permettant de contrôler sa température. Cette technique de dépôt a permis de réaliser des couches minces de CIS de très bonne qualité et demeure aujourd’hui celle qui a conduit aux cellules photovoltaïques en couches minces détenant les meilleurs rendements de conversion.
La sélénisation de précurseurs métalliques
La sélénisation d’un alliage de cuivre et d’indium est une méthode prometteuse pour former des couches minces de CIS de bonne qualité. Cette méthode de dépôt nécessite deux étapes. La première étape consiste à la préparation de l’alliage métallique précurseur. Cet alliage peut être obtenu par la co-évaporation sous vide de sources indépendantes de cuivre et d’indium. On peut également l’obtenir par le dépôt électrochimique de couches successives de cuivre et d’indium. La deuxième étape est la sélénisation proprement dite. Cette dernière consiste à chauffer le précurseur métallique en présence de vapeur de sélénium. La formation de la couche mince de CIS s’effectue par diffusion de Se dans l’alliage Cu-In dans un cas ou par inter-diffusion entre les couches de cuivre d’indium accompagnée simultanément de la diffusion de Se au sein du matériau. On obtient ainsi une couche mince de CIS.
Introduction |