Généralités sur les alliages
Les alliages désordonnés (solution solide)
Dans un métal pur A, on peut ajouter des atomes étrangers B sans modifier la structure cristalline du métal de base A:l’élément B entre en solution dans A, ils forment la solution solide A-B. Dans la plupart des cas*, il existe une concentration limite au delà de laquelle la structure cristalline est modifiée.
Les atomes des éléments d’alliage B peuvent entrer en solution dans le métal A, soit en se substituant aux atomes A aux noeuds du réseau de celui-ci, soit en se plaçant dans les interstices du réseau de A. D’où deux grandes classes de solutions solides suivant que l’élément d’alliage est en substitution ou en insertion dans le réseau.
Les alliages ordonnés
Dans le cas précédent, nous ne nous sommes pas intéressés à savoir si tel site était occupé par des atomes A ou par des atomes B. Nous avons parlé de substitution en considérant les atomes A et B parfaitement équivalents. En considérant par exemple une différence d’encombrement stérique entre A et B, il est alors possible de d’obtenir un arrangement régulier des atomes A et B sur le réseau, de façon à obtenir une structure aussi compacte que possible. Un tel arrangement ne peut se produire que pour des compositions déterminées, c’est-à-dire certaines valeurs stoechiométriques (A 3B, AB, AB3 ). De façon générale, il y a possibilité d’ordre, si du point de vue énergétique, les liaisons interatomiques AB sont favorisées par rapport aux liaisons AA et BB.
Transition de phase et Paramètre d’ordre
A haute température, l’ordre peut être détruit par l’agitation thermique qui provoque un échange permanent des atomes de site en site. Ainsi, la structure ordonnée * Autres cas : Au et Ag miscibles en toutes proportions. peut disparaître au dessus d’une température Tc. L’ordre correspond à un état d’énergie interne minimale et le désordre à un état d’entropie maximale.
On peut donc observer des structures ordonnées à basse température. Si on élève la température, l’ordre va être progressivement détruit. Il est alors nécessaire de mesurer un paramètre évaluant l’état d’ordre par rapport à l’état parfaitement ordonné. Cette grandeur thermodynamique est le paramètre d’ordre à longue distance notée h.
Il est important de signaler que l’ordre d’une transition est fixé par le comportement de ce paramètre au cours de la transition ordre/désordre. La transition est dite du premier ordre lorsqu’il passe brusquement, pour T=T c, d’une valeur finie à 0, et plus précisément, s’il y a discontinuité du paramètre d’ordre à T c . Dans le cas d’une transition du second ordre, hpasse continûment de 1, dans la phase basse température,à 0 à la température de transition.
Alliage de surface
Le dépôt d’un métal B sur une surface métallique A peut former un alliage de quelques couches atomiques . Des études expérimentales et théoriques montrent que la formation d’un alliage de surface ou interfacial est possible dans de nombreux couples métal sur métal [2].
On peut distinguer deux classes d’alliage de surface. La première classe représente les alliages de surface à 2 dimensions, formés par la combinaison de deux métaux immiscibles en volume. Dans ce cas, la pénétration du dépôt métallique ne peut dépasser la première couche atomique. L’alliage 2D représente un minimum dans le diagramme d’énergie libre du système et est un état d’équilibre. Typiquement, l’adsorbat forme une « surcouche » à basse température et un alliage à haute température.
Un des premiers exemples d’alliage de surface de ce type est la structure c(2×2) formée par dépôt de 0.5 ML de Cu, Ag ou Au sur du W(100), découverte par Bauer [3]. De plus, des études structurales par LEIS [4] et par analyse LEED I-V ont clairement démontré que la structure W(100)-c(2×2)Cu correspond à un alliage bidimensionnel.
Plus récemment, il a été montré que le dépôt de Pb sur Cu(100) forme un alliage, après un recuit au delà de 500 K, dans le premier plan de surface [5,6].
La seconde classe, plus fréquente, diffère fondamentalement de la première. En effet, les alliages de cette famille sont formés entre métaux qui ont une forte solubilité, formant parfois une solution solide ou un alliage stoechiométrique ordonné sur plusieurs couches. Dans ce cas, l’alliage de surface représente une structure métastable, cinétiquement gelée dans un minimum local d’énergie libre. L’état d’équilibre parfait est dans ce cas une solution solide diluée.
Nous avons étudié un tel alliage de surface formé par dépôt de palladium sur une face de cuivre (chapitre V).
Introduction à la mise en ordre (Allen-Cahn)
Au cours de la mise en ordre, après la phase de nucléation et la formation de domaines ordonnés, on observe en volume une évolution de la taille caractéristique des domaines en t1/2 . Allen et Cahn [14] ont développé un modèle permettant d’interpréter ce comportement. Le point de départ a été le modèle de Ginzburg-Landau permettant d’étudier les transitions à paramètre d’ordre non conservé. Le modèle d’Allen et Cahn explique la croissance des domaines par le déplacement des parois d’antiphase.
Choix de la face
Notre choix s’est porté sur une orientation cristallographique (1,1,11). La coupe idéale de volume est décrite Figure I-14. Cette face présente un des meilleurs compromis entre une densité de marche suffisamment élevée et des largeurs de terrasse suffisamment grandes. Ce compromis est dicté par les techniques expérimentales employées:les marches doivent être suffisamment espacées pour être résolues en microscopie à effet tunnel ; leur densité doit être suffisante pour avoir un intervalle suffisant entre les pics de diffraction (2p/L) dans l’espace réciproque (diffraction de rayons X et d’atomes d’hélium).
Adsorption avec formation d’un alliage de surface
Les cas exposés au paragraphe précédent portaient sur la croissance d’éléments à faible miscibilité et dans le cas où aucune interdiffusion dans le substrat n’intervenait.
Une autre situation plus complexe peut apparaître lorsque les composants d’un système bimétallique sont très miscibles et qu’il y a possibilité d’interdiffusion. Dans ce cas, des atomes du substrat et du dépôt peuvent s’échanger, ce qui conduit à la formation d’un alliage dont la composition et la structure cristallographique varient en fonction de la température de recuit.
En 1968, P.W. Palmberg et al. [34] observent les premiers, un alliage ordonné après dépôt d’Au sur Cu(100). Récemment, un nombre important de systèmes métal sur métal qui forment un alliage ordonné ont été étudiés. Les dépôts de 0.5 Ml d’ Au [35], Pd [36], ou Mn [37] sur Cu(100) forment des alliages de surface reconstruits c(2×2).
Dans ces systèmes, la première couche est composée à 50-50% du mélange de l’adsorbat et du Cu. Dans notre étude de Pb/Cu(1,1,11) [6], nous avons observé un phénomène intéressant : les deux composés sont immiscibles en volume et pourtant si le dépôt est recuit à suffisamment haute température un alliage se forme dans la première couche de surface.
Dans le chapitre IV, nous étudierons plus en détail le système Pd/Cu(1,1,11).
Etude que nous ferons précéder d’une analyse bibliographique.
Dispositif expérimental
Le microscope (OMICRON â )
L’échantillon et la pointe sont disposés sur une plate-forme suspendue, sous ultravide. Le déplacement de la pointe dans les directions X,Y et Z est assuré par un trièdre de tubes en céramique piézo-électriques. Les tensions maximales que l’on peut appliquer à ces céramiques sont de ± 140 V, ce qui correspond à une fenêtre de positionnement de la pointe de 1,4 µm×1,4 µm. L’aire maximale de balayage est de 2000Å× 2000 Å. Les céramiques piézo-électriques sont sensibles à des variations de température et de tension qui se traduisent par des phénomènes de dilatation et de relaxation, provoquant une dérive de la position de la pointe au cours du temps. Il faut donc, après un chauffage ou une brutale variation de tension, attendre un certain temps la stabilisation des céramiques avant l’acquisition d’images, mais elle ne sera jamais totalement négligeable au cours des expériences. L’effet de la dérive sera d’autant plus gênant que le temps d’acquisition d’une image sera grand.
L’échantillon est monté sur un moteur inertiel piézo-électrique qui assure son déplacement « macroscopique » dans les directions X et Z, avec un pas variant entre 50 nm et 250 nm et une fréquence ajustable.
Système anti-vibrations
La résolution du microscope dépend très fortement de la stabilité de la pointe par rapport à l’échantillon, donc de l’isolation du microscope vis-à-vis des vibrations internes et externes. Pour pouvoir mesurer des amplitudes de l’ordre du dixième d’angström, cette distance doit être stabilisée au moins à quelques centièmes d’angströms près. Les vibrations mécaniques externes sont des vibrations de basses fréquences (10~100 Hz) provenant de l’environnement. L’isolement vis-à-vis des vibrations est assuré par une suspension de la plate-forme support du microscope grâce à quatre ressorts (filtres de basse fréquence) fixés par l’intermédiaire de joints (filtres passe-bas). De plus, les oscillations de la plate forme sont amorties par des courants de Foucault dans des plaques de cuivre placées entre des aimants disposés en tore. Les vibrations internes sont dues aux modes de vibration propres des éléments constituant le microscope.
Equipement électronique
L’électronique de pilotage permet le balayage de la pointe dans les directions X et Y, par l’intermédiaire de rampes linéaires agissant sur des amplificateurs haute tension, tout en maintenant la distance pointe-échantillonconstante -(c’est-à-dire le courant constant)-, grâce à une boucle d’asservissement.
Diffraction d’atomes d’Hélium intérêt: sensible principalement à la morphologie de surface
Historique
Le phénomène de diffraction d’atomes par une surface cristalline a été mis en évidence pour la première fois par I. Estermann et O. Stern (1930) avec un faisceau d’Hélium rétrodiffusé par un cristal. Ces expériences ont confirmé l’hypothèse de De Broglie sur la nature ondulatoire des particules atomiques. Cependant, alors que la diffraction d’électrons mise en évidence quelques années plus tôt, allait avoir un succès rapide, le développement de la diffraction d’atome d’hélium (TEAS: Thermal Energy Atom Scattering) après les premières observations a été très lent. Les raisons principales ont été l’impossibilité d’obtenir des surfaces suffisamment propres ainsi que les mauvaises performances des sources de faisceaux moléculaire à cette époque et jusqu’à la fin des années 60. En l’occurrence, les jets atomiques effusifs donnaient des faisceaux largement non-monochromatiques. Un sélecteur de vitesse rajouté à la collimation nécessaire pour avoir un faisceau fin sur la surface ne laissait qu’une intensité presque inutilisable. Le véritable essor de la TEAS apparaît au début des années 70, avec l’obtention par Tendulkar, Stickney (1971) des premiers pics de diffractions autres que le spéculaire sur une surface métallique. Profitant du développement des techniques du vide et de l’utilisation de jet supersonique, l’intensité du faisceau et sa monochromaticité furent simultanément améliorés de plusieurs ordres de grandeur. Dès cette période, la diffraction par jet moléculaire, longtemps étudiée pour l’interaction gaz-surface, évolua en véritable outil d’analyse des surfaces (observations de reconstructions [4], transitions de phase [5] [6], …).
Généralités
Du fait de la nature ondulatoire de la matière, un faisceau d’atomes est réfléchi sur une surface périodique dans des directions discrètes, conduisant à un spectre de diffraction, pourvu que la longueur d’onde lassociée au faisceau soit du même ordre de grandeur que le pas a du réseau de la surface (le régime classique correspond à l<<a ).
Les atomes d’hélium sont peu énergétiques, et sont réfléchis à une distance ou la corrugation du potentiel d’interaction hélium-surface de faces denses de métaux est très faible. La diffraction d’atomes d’hélium ne permet donc pas de « voir » les atomes, mais seulement les grandes structures comme les marches. Au contraire, la diffraction d’électrons lents permet d’observer facilement la périodicité atomique car les électrons sont sensibles à cette corrugation. Pour des faibles énergies du faisceau, dans le domaine thermique, le point de rebroussement des particules est à quelques angströms de la surface, ce qui permet une analyse exclusive, non destructrice de la surface.
Modèle de 2 marches couplées traité par la méthode de matrice de transfert
On se pose maintenant le problème de 2 marches (énergie de cran Ek1, Ek2) évoluant ensemble dans un potentiel. Dans notre modèle d’une face (1,1,11), on ne considère qu’un potentiel (V(h)) de type mur dur (on néglige l’interaction élastique entre paires) qui traduit l’interaction de non croisement avec les paires voisines. Sa demi largeur est donnée par la distance moyenne séparant deux couples de marches appariées. Il contraint donc les deux marches à évoluer sur 21 sites * . A chaque site n le long de y, on définit 2 variables associées à la position de la marche supérieure (1) et de la marche inférieure (2) : h1 n et h2 n . Les variables h1 et h2 peuvent prendre toutes les valeurs de position h i avec une condition supplémentaire de non croisement qui impose h1<h2. D’après les observations expérimentales (Figure III-17), il n’existe que 3 distances possibles séparant les deux marches appariées (0.5a 0 , 1.5a 0 , 2.5a 0 ). A chaque distance, on associe une valeur W(h1-h2) (W0=0, W1, W2) de l’énergie d’interaction entre les deux marches. Ceci limite le nombre de configurations à considérer. Ces conditions définissent la taille de la matrice de transfert (60 x 60). On peut également introduire une quatrième valeur du potentiel (W3) pour une distance entre marches de 3.5 a 0 pour laquelle on doit obtenir une probabilité négligeable (Figure III-19).
Table des matières
Introduction
Chapitre I:Alliages ordonnés Surfaces vicinales
I – GÉNÉRALITÉS SUR LES ALLIAGES
1° Les alliages désordonnés (solution solide)
2° Les alliages ordonnés
3° Alliage de surface
II – LES ALLIAGES CFC A3
B DE STRUCTURE L12
1° Description de la phase désordonnée (solution solide) et de la structure ordonnée L12
2° Description de la phase ordonnée : ondes de concentration et facteur de structure
3° Description des variants d’ordre dans la structure L12: variants et parois d’antiphase
4° Mise en désordre – Rôle des interfaces
5° Introduction à la mise en ordre (Allen-Cahn)
III – LE SYSTÈME CU83PD17
1° Choix du système
2° Surfaces de l’alliage CuPd17
IV – LES SURFACES VICINALES
1° Présentation générale
V – CHOIX DE LA FACE (1,1,11)
1° Adsorption sur les faces vicinales
BIBLIOGRAPHIE
Chapitre II: Les Techniques expérimentales
I – LES TECHNIQUES EXPÉRIMENTALES ANNEXES
II – LA MICROSCOPIE PAR EFFET TUNNEL -STM-
1° Généralités
2° Principes de la microscopie par effet tunnel
3° Dispositif expérimental
4° Autres dispositifs
III – DIFFRACTION D’ATOMES D’HÉLIUM
1° Historique
2° Généralités
3° Dispositif expérimental
4° Porte échantillon et détecteur
5° Diffraction par une surface vicinale
6° Debye-Waller
7° Adsorbtion-Section efficace
IV – DIFFRACTION RAYONS X EN INCIDENCE RASANTE
1° Dispositif expérimental à l’ESRF
2° La détection
3° Calcul de l’intensité diffractée
BIBLIOGRAPHIE
Chapitre III: Morphologie d’équilibre
I – ALLIAGE ORDONNÉ L12 CU83PD17 (1,1,11) À 293K
1° Etude STM
II – ETUDE EN TEMPÉRATURE PAR DIFFRACTION D’ATOMES D’HÉLIUM NEUTRES.
1° Température ambiante
2° Etude à T>Tc
3° Evolution de la morphologie en fonction de la Température
4° Conclusion des résultats par diffraction d’hélium
III – ETUDE DE LA TRANSITION PAR DIFFRACTION DE RAYONS X
1° Définition du réseau réel, réseau réciproque. Notations cristal CFC
2° Calcul de l’intensité des tiges de troncatures pour une structure de marches simples et de
marches appariées
3° L’Alliage
4° Intensité des tiges de troncature
5° Résultats expérimentaux
6° Conclusion de l’étude rayons X
7° Bilan de l’étude « Morphologie d’équilibre »
BIBLIOGRAPHIE
Chapitre IV: Cinétique de mise en ordre
I – INTRODUCTION
ARTICLE PHYSICAL REVIEW B
II – DISCUSSION ET CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
Chapitre V: Pd/Cu(1,1,11) : Formation d’un alliage de surface et évolution de la structure
I – POINT BIBLIOGRAPHIQUE
II – EXPÉRIENCES DE DIFFRACTION D’HÉLIUM
1° Calibration du dépôt de Palladium
2° Mesure de sections efficaces de diffusion pour He
3° Etude au taux de couverture qPd=0.5 ML à 340K
4° Dépendance en température et en taux de couverture
5° Etude cinétique
III – CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
Conclusion générale
Annexe A
Annexe B