Formalisme mathématique des impulsions ultracourtes
Ce chapitre présente les bases mathématiques nécessaires à l’étude de la propagation non- linéaire d’une impulsion ultracourte dans une fibre creuse : la définition complexe d’une im- pulsion ultracourte dans le domaine temporel et spectral, l’effet de dispersion dans un milieu, l’équation de propagation non-linéaire et les modes spatiaux d’une fibre creuse. La dernière section lève les ambiguïtés entre certaines définitions physiques et mathématiques. L’intégralité de la théorie de l’optique non-linéaire est décrite dans le livre de R. W. Boyd [21].A0(t) est l’enveloppe (fonction réelle) et φ(t) est la phase temporelle de l’impulsion. La phase temporelle se décompose en trois éléments : φ(t) = φ0 − ω0t + φNL(t) (développement de Taylor en t = 0, centre de l’impulsion), φ0 = φ(0) est la phase entre l’enveloppe et la A0(ω) est l’enveloppe (fonction réelle) et Φ(ω) la phase spectrale, on décompose de même Φ(ω) = Φ0 + t0ω + ΦNL(ω). Une variation de la composante continue Φ0 modifie la CEP, une variation de la composante linéaire t0 déplace temporellement l’impulsion sans la déformer et enfin une variation de la phase spectrale non-linéaire ΦNL et/ou de l’enveloppe spectrale A0(ω) modifie l’impulsion.
Pour une impulsion d’enveloppe gaussienne (de la forme A(t) = e−t représentée Fig. 1.1), la largeur temporelle τ et la largeur spectrale ∆ν satisfont la relation d’incertitude τ ∆ν ≥ a (Cauchy-Schwarz), où a dépend de la forme de l’impulsion et de la définition des largeurs. L’égalité est vraie quand φNL(t) ≡ 0 ou ΦNL(ω) ≡ 0 (ces deux conditions sont équivalentes), c’est le cas de l’impulsion Fig. 1.1. Cela signifie que pour une largeur spectrale donnée, l’ajout d’une phase spectrale non-linéaire augmente la durée de l’impulsion. C’est un des effet de la dispersion d’une impulsion dans un milieu.Dans un milieu optique (verre, air, etc.), la vitesse de propagation (vitesse de groupe) dépend de la longueur d’onde, cela provient de la présence d’absorption aux fréquences de résonance du milieu (relation de Kramers-Krönig). Une impulsion ultracourte ayant une distribution de fréquences (voir Fig. 1.1(b)), on assiste à un étalement temporel des différentes fréquences lors de la propagation dans un milieu. Ce phénomène, appelé dispersion de vitesse de groupe, conduit au « chirp » (décalage linéaire de fréquence) de l’impulsion, visible sur la porteuse (Fig. 1.2(a)). Cet effet s’exprime mathématiquement par l’ajout d’un terme quadratique Φ(2) dans la phase spectrale. Les termes d’ordre supérieur de la phase spectrale sont définis ainsi :L’effet de la phase spectrale quadratique sur l’impulsion se décrit analytiquement dans le cas d’une impulsion d’enveloppe gaussienne. On part du champ E0 d’une impulsion comprimée, dont les expressions temporelle et spectrale sont :
On remarque qu’une impulsion comprimée ne possède pas de terme de phase dans le domaine spectral. Pour un spectre donné, la durée minimale d’une impulsion correspond en effet à la transformée de Fourier du spectre sans terme de phase, cette durée est dite limitée par transformée de Fourier. On recherche maintenant l’effet d’un chirp Φ(2) sur cette impulsion, on définit d’abord le chirp normalisé ξ :Le chirp normalisé ξ quantifie l’ensemble de ces changements. ξ étant inversement propor- tionnel au carré de la durée d’impulsion, la propagation dans un milieu modifie l’impulsion laser d’autant plus fortement que sa durée est courte. Il est important de noter que cet effet est indépendant de l’intensité laser (effet linéaire). Cet effet est donc à différencier des effets non linéaires, dépendants de l’intensité, et amplement décrits dans le chapitre 2.En réalité, l’ajout d’une phase spectrale quadratique seule correspond à une approximation à l’ordre 1 de la dispersion d’une impulsion dans un milieu. A l’ordre 2, il faut ajouter un terme en ω3, cette phase d’ordre trois agit de manière asymétrique sur l’élargisement de l’impulsion, créant une pré-impulsion ou post-impulsion selon son signe.