Problématique de la fibrillation atriale en hémodialyse
La présence d’une FA augmente la surmortalité chez les patients avec une MRC d’un facteur 1,7 tout stade confondu . Chez les patients nécessitant un traitement de suppléance, la mortalité est doublée en cas de FA (26.9/100 patients-année contre 13.4/100 patients-année) . La FA est un facteur de risque indépendant de mortalité chez les patients hémodialysés .
La FA multiplie par 2 le risque d’accident vasculaire cérébral chez les patients en MRC tout stade confondu . En dialyse, l’incidence des AVC est presque triplée en cas de FA (5,2/100 patients-année contre 1,9/100 patients-année) . La FA est un facteur de risque indépendant d’accident vasculaire cérébral. Le risque d’AVC chez les patients en dialyse avec une FA est de loin supérieur au risque retrouvé en population générale avec une FA, estimé à 1,5/100 patients-année . Ainsi les patients hémodialysés en FA ont un risque d’AVC 3 fois supérieur à la population générale en FA. La prise en charge de la fibrillation atriale dans la population générale repose sur le traitement anticoagulant en tenant compte du risque embolique et sur le contrôle du rythme ou de la fréquence cardiaque . La prévention du risque embolique en cas de fibrillation atriale repose t sur les traitements anticoagulants. Il existe 2 grandes classes d’anticoagulants oraux qui peuvent être utilisés : les antivitamines K et les anticoagulants oraux directs.
GENERALITES SUR L’ADENOSINE PLASMATIQUE
L’adénosine appartient au métabolisme des purines. On peut citer dans la famille des purines, l’adénine, l’adénosine triphosphate (ATP), l’adénosine diphosphate (ADP), l’adénosine-monophosphate (AMP) et l’adénosine. L’adénosine est une molécule endogène ubiquitaire qui affecte presque tous les aspects de la physiologie cellulaire. Le relargage de nucléotides et nucléosides endogènes (ATP, ADP, adénosine) par les cellules est l’étape initiale de la cascade de signalisation purinergique. Ce relargage a lieu pendant les blessures mécaniques, l’hypoxie, la nécrose ou l’apoptose, l’ischémie et l’inflammation . L’efflux de nucléotides est médié par l’exocytose de vésicules ou granules intracellulaires (terminaisons nerveuses, plaquettes) ou par des canaux ioniques et transporteurs.
Production :L’adénosine est générée soit par la dégradation des nucléotides (ATP, ADP) au niveau extracellulaire, soit par relargage cellulaire après production intracytoplasmique : la synthèse extracellulaire est obtenue majoritairement par dégradation de nucléotides comme l’ATP, de l’ADP en AMP par l’ecto-nucléoside triphosphate-diphospho-hydrolase (e-NTPDase, CD39) puis conversion de l’AMP en adénosine par la 5’-ectonucleotidase (CD73) ou rarement par déphosphorylation des nucléotides par la phosphatase alcaline ; la synthèse intracellulaire est effectuée soit par déphosphorylation de l’AMPc en adénosine par la 5’- nucleotidase ou par hydrolyse de la s-adenosyl-homocystéine (SAH) par la SAH-hydrolase.
La principale source d’adénosine est extracellulaire par la dégradation d’ATP par le CD39 et le CD73. On retrouve le CD39 au niveau des cellules musculaires lisses et endothéliales, des lymphocytes, des cellules dendritiques, des cellules pancréatiques exocrines, des cellules du système nerveux central, et autres . Le CD73 est retrouvé au niveau du cœur et des poumons, dans l’endothélium des vaisseaux de gros calibres, dans le colon, le rein, le cerveau et le foie. La concentration plasmatique en adénosine est de l’ordre de 0,02 à 0,4 µmol/L . Cette concentration augmente en condition d’hypoxie, d’ischémie et de dommages cellulaires, notamment par dégradation de l’ATP relargué .
Dégradation :L’adénosine est dégradée en intra ou extracellulaire par l’adénosine désaminase (ADA) pour former l’inosine. Cette enzyme est exprimée dans l’intestin, le thymus, la rate, les cellules mononuclées et les tissus lymphoïde. L’inosine est ensuite dégradée par la purine nucléoside phosphorylase (PNP) qui forme l’hypoxanthine. L’hypoxantine est dégradée en xanthine puis en acide urique par la xanthine oxydase (XO) ou xanthine deshydrogenase (XDH). Cependant l’adénosine peut aussi être métabolisée en AMP par l’adénosine kinase (AK) Le niveau d’adénosine intra et extracellulaire est régulé par les transporteurs nucléotidiques qui captent l’adénosine extracellulaire vers le milieu intracellulaire. Il en existe 2 types : les transporteurs nucléotidiques concentrateurs (CNTs) qui sont liés à un transport de cations, ils facilitent le passage d’adénosine contre le gradient de concentration en utilisant le sodium ; les transporteurs nucléotidiques d’équilibration (ENTs) qui sont indépendant et qui permettent le passage libre d’adénosine selon le gradient de concentration
Ainsi, l’adénosine a une demi-vie physiologique courte de l’ordre de quelques secondes . Lorsque la concentration en adénosine augmente, l’adénosine est d’une part dégradée par l’ADA au niveau extracellulaire et d’autre part captée au niveau intracellulaire puis métabolisée. L’adénosine peut aussi se lier à ses récepteurs spécifiques.
ADENOSINE LORS DE LA MALADIE RENALE
Physiologie : L’adénosine joue un rôle physiologique au niveau rénal. Ce rôle a été mis en évidence à partir des années 60, en effet l’injection d’adénosine dans l’artère rénale entrainait une vasoconstriction rénale avec une augmentation des résistances vasculaires rénales . L’adénosine est impliqué dans plusieurs éléments de physiologie rénale : baisse de la filtration glomérulaire principalement par la vasoconstriction de l’artériole afférente, excrétion sodée, rétrocontrôle tubulo glomérulaire, influence sur la sécrétion de la rénine .
Pathologie :A des niveaux élevés et de manière chronique, l’adénosine semble participer à la progression de l’insuffisance rénale . La première preuve de ce lien a été découverte dans l’analyse du tissu rénal chez des patients atteints de déficience en adénosine désaminase ADA. L’analyse histologique montrait une sclérose mésangiale . Les souris ADA-KO deviennent protéinuriques, de manière réversible par l’utilisation d’antagoniste des récepteurs à l’adénosine .
L’adénosine semble avoir à court terme un rôle de protection rénale contre l’inflammation. Cependant, l’élévation de l’adénosine extracellulaire sur une longue période aggrave les lésions de fibrose rénale en particulier via A2AR et A2BR .
Evolution des taux de l’adénosine lors de la MRC :Certaines études ont mis en évidence une élévation des taux d’adénosine plasmatique lors de la maladie rénale chronique (MRC). Une étude utilisant la chromatographie liquide couplée à la spectrométrie de masse montre une élévation des taux d’adénosine chez 31 patients en hémodialyse en comparaison à 30 patients en dialyse péritonéale et 31 patients en IRC stade 5 non dialysée . Les taux d’adénosine, d’inosine et d’acide urique chez les semblent augmenter chez patients avec une néphropathie diabétique. L’élévation du taux d’adénosine était corrélée au déclin de la fonction rénale . Le taux d’adénosine était de 0,5 µM chez les sujets contrôles, 0,7 µM chez les patients avec une néphropathie diabétique stade 3, 0,9 µM en cas de néphropathie diabétique stade 4 et de 7 µM chez les patients avec une néphropathie diabétique stade 5.
Dans une autre cohorte utilisant la chromatographique liquide, les patients en hémodialyse ont des taux d’adénosine plus élevés, au niveau plasmatique, à 3,5 µM (contre 0,7 µM chez les sujets contrôles) et au niveau des cellules mononucléées . Les taux d’adénosine n’étaient pas augmentés chez les patients en IRC non dialysée avec une créatininémie médiane à 470 µmol/L (0,79 µM) et en dialyse péritonéal (0,62 µM) . Enfin, une autre cohorte montre que les taux d’adénosine, d’inosine et d’acide urique sont plus élevés chez les patients avec une MRC (DFG moyen 27 mL/min/1,73m²) (1 µM) et en dialyse (1,5 µM).
Effets cardiovasculaires de l’adénosine
Le système purinergique joue un rôle important dans la physiologie du système cardiovasculaire. La production et la dégradation de l’adénosine au niveau cardiaque sont celles décrites précédemment . Les taux d’ATP et d’adénosine s’élèvent notamment en cas d’hypoxie . Les récepteurs à l’adénosine sont retrouvés au niveau cardiaque . Les plus exprimés et les plus affins pour l’adénosine sont A1R et A2AR. A1R est plus fortement retrouvé au niveau atrial que dans les ventricules. L’activation d’A1R diminue la production d’AMPc entraînant l’inhibition de la protéine kinase A et l’activation de la phospholipase C. L’adénosine via A1R exerce un effet chronotrope et inotrope négatif entraînant donc une bradycardie et un ralentissement de la conduction atrioventriculaire. L’activation d’A1R active aussi directement le canal rectificateur d’influx potassique lié aux protéine G(GIRK ou IK Ado) et entraine un efflux de potassium . La stimulation de l’efflux potassique entraine un raccourcissement du potentiel d’action au niveau atrial et une hyperpolarisation des cellules nodales.
A2AR est globalement exprimé au niveau cardiaque, mais plus particulièrement au niveau des vaisseaux, de l’atrium et des ventricules. Son activation inhibe les canaux calciques voltage dépendants. L’adénosine a ainsi un effet hypotenseur et une action vasodilatatrice sur les coronaires .
A2BR est exprimé au niveau des myocytes et des fibroblastes et A3R est très peu présent. Le principal impact de l’adénosine au niveau cardiaque est son effet sur la conduction atrioventriculaire. En effet, l’adénosine entraîne une baisse de la conduction atrioventriculaire ce qui explique le lien avec le bloc atrio-ventriculaire, et sert en thérapeutique dans la prise en charge des tachycardies supraventriculaires . Le système adénosynergique semble jouer un rôle physiologique protecteur au niveau cardiaque. L’adénosine et l’ATP ont un effet chronotrope et dromotrope négatif sur l’activité pace-maker cardiaque et la conduction atrioventriculaire. L’adénosine exerce un effet inotrope négatif alors que l’ATP semble exercer un effet inotrope positif sur la contractilité des cardiomyocytes. Ils ont aussi un effet vasodilatateur sur les coronaires . Les taux d’adénosine sont élevés chez les patients avec une insuffisance cardiaque . Cette élévation est liée à une libération d’adénosine par les tissus en ischémie . Ses effets suggèrent que l’adénosine exerce un rôle compensateur cardioprotecteur.
Table des matières
I. INTRODUCTION
1. FIBRILLATION ATRIALE EN HEMODIALYSE
1.A. EPIDEMIOLOGIE
1.B. PROBLEMATIQUE DE LA FIBRILLATION ATRIALE EN HEMODIALYSE
2. GENERALITES SUR L’ADENOSINE PLASMATIQUE
2.A. PRODUCTION
2.B. DEGRADATION
2.C. EFFETS METABOLIQUES DE L’ADENOSINE
2.D. DEFICIT EN ADENOSINE DESAMINASE
3. ADENOSINE LORS DE LA MALADIE RENALE
3.A. PHYSIOLOGIE
3.B. PATHOLOGIE
3.C. EVOLUTION DES TAUX DE L’ADENOSINE LORS DE LA MRC
3.D. MECANISMES SUSPECTES DE L’ELEVATION DES TAUX D’ADENOSINE EN DIALYSE
3.E. EFFETS DEMONTRES DE L’ADENOSINE LORS DE LA MRC
4. ADENOSINE AU NIVEAU CARDIOVASCULAIRE
4.A. EFFETS CARDIOVASCULAIRES DE L’ADENOSINE
4.C. ADENOSINE ET RISQUE DE FA
II. FIBRILLATION ATRIALE ET TAUX D’ADENOSINE EN HEMODIALYSE (FATAH)
RESUME
INTRODUCTION
MATERIELS ET METHODES
RESULTATS
III. DISCUSSION
IV. BIBLIOGRAPHIE