Fatigue des élastomères

Fatigue des élastomères

Optimiser l’estimation des durées de vie de pièces en élastomères représente un enjeu industriel im- portant. L’étude de la fatigue des matériaux est un outil indispensable pour atteindre cet objectif. Deux approches sont développées dans la littérature pour appréhender la fatigue des matériaux :– La propagation , qui consiste à quantifier l’avancée d’une fissure pré-éxistante au sein d’une structure. – L’amorçage, qui décrit la réponse du matériau, initialement sans défauts apparents, à des chargements à long terme dans le but de réaliser une représentation des résultats en fatigue de type courbe SN. D’autre part, une voie pour se rapprocher des conditions de fonctionnement industrielles, des solli- citations multiaxiales, combinant différents types de chargements (traction biaxiale, traction-torsion, cisaillement-traction, …), sont introduites (Mars, 2001). L’objectif de ce chapitre est de proposer une méthode d’estimation des durées de vie de pièces en caou- tchouc, à partir des lois de comportement déterminées dans le chapitre 2. Dans cette partie, nous nous plaçons dans le cadre de l’approche en amorçage de fissure. L’énergie dissipée est le paramètre choisi pour décrire le comportement en fatigue uniaxial puis multiaxial du polychloroprène. Il sera comparé aux principaux critères de fatigue formulés dans la littérature. Au préalable, une bibliographie, traitant de la fatigue des élastomères, est développée, présentant les deux approches précédemment citées. Le protocole expérimental est ensuite détaillé, avec une partie dédiée à la campagne en fatigue uniaxiale et l’autre à la fatigue multiaxiale. Enfin, les résultats sont exposés et commentés.

Approche en propagation de fissure

Une approche globale de la propagation de fissure se base sur les travaux de Griffith (1921), dans lesquels il présente un critère énergétique de rupture en traction. Il considère la présence de forces cohésives entre atomes en pointe de fissure et postule ainsi la nécessité d’une énergie potentielle pour que celle-ci puisse se propager. Rivlin et Thomas (1953) adaptent les travaux de Griffith (1921) dans l’étude de la rupture du caoutchouc naturel en définissant une énergie de déchirement T :Où h correspond à l’épaisseur de l’échantillon, W à l’énergie de déformation , A à la taille de fissure. L’indice l indique que la différenciation se fait dans des conditions de déplacement constant. Cette ap- proche est validée pour des élastomères non cristallisables et différentes sollicitations (Thomas, 1960), (Greensmith, 1960), pour différents types de renforts (Greensmith et Thomas, 1955b), et pour différentes conditions (Greensmith et Thomas, 1955a). Suivant la structure de l’éprouvette étudiée, une approxima- tion est faite dans l’expression de l’énergie de déchirement :– T = W h dans le cas d’une éprouvette de cisaillement pur (Thomas, 1960)– T = 2kW a dans le cas d’une éprouvette pré-entaillée sur le côté (Greensmith, 1963)où h correspond à la hauteur de l’éprouvette, a à la taille de fissure, k une fonction dépendant de l’état de déformation de l’échantillon. Lindley (1972) en donne une approximation :

A partir de ce constat, de nombreux modèles décrivant la propagation de fissure sont développés dans la littérature. Mars et Fatemi (2002) en font une description exhaustive. Ils présentent le phénomène de fatigue comme étant la propagation de microfissures, de taille caractéristique initiale a(Mars, 2001), (Mars et Fatemi, 2007), (Mars et Fatemi, 2009). Ils supposent que la totalité de la propagation de fissure dans les élastomères suit une loi de puissance, et obtiennent un modèle d’estimation des durées de vie en intégrant la loi de propagation de fissure (eq. 3.3).(Mars, 2001), (Mars, 2003),(Mars et Fatemi, 2007), (Mars et Fatemi, 2009) (eq. 3.4). Cette modification permet de prendre en compte le phénomène de cristallisation sous tension (cf. paragraphe 1.2.3.5) dans les estima- tions des durées de vie (fig. 3.2).

Toutefois, peu de travaux sont disponibles dans la littérature concernant l’étude de la propagation de fissure liée à des chargements multiaxiaux. Mars (2001) met en évidence l’influence de l’angle initial du plan de fissure dans le comportement en propagation de fissure expérimentale du matériau. La sollicita- tion utilisée dans ses travaux reste néanmoins la traction simple.La description globale de la propagation de fissure propose une méthode intuitive d’estimation des durées de vie, par l’intégration de lois de Paris. Cette méthode est principalement utilisée pour la pro- pagation de fissure en traction. Il ne nous semble pas qu’il existe de travaux relatant d’une méthode expérimentale de quantification de la propagation de fissure sous chargement multiaxial. Ce manque est partiellement comblé par son étude en mode mixte (Mars, 2001), (Nait Abdelaziz et al., 2005).

 

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