EXPRESSION DU TEMPS DANS LE LANGAGE NATUREL
Les adverbiaux temporels
Un moyen très courant d’exprimer le temps dans les textes est d’utiliser des expressions qui ont, de manière assez explicite et directe, une valeur temporelle. Ces expressions sont regroupées sous le nom d’adverbiaux temporels. Le terme adverbial est à mettre en relation avec la notion de complément adverbial (Gross [1986], cité par Borillo [1998])1 , c’est-à-dire d’un ensemble d’éléments qui peuvent prendre la fonction d’adverbe2 . La variété rencontrée au niveau des différents adverbiaux est assez grande, tant en ce qui concerne leur nature (la manière dont ils sont construits, voir section 4.2.1), que leur rôle (le sens qu’ils véhiculent, voir section 4.2.2) ou encore leur interprétation (les mécanismes nécessaires pour passer de l’expression au sens véhiculé, voir section 4.2.3). Les sections suivantes abordent les adverbes temporels selon ces trois axes.
Nature des adverbiaux temporels
En ce qui concerne les adverbes, une caractéristique marquante, en plus de leur caractère facultatif, invariable et mobile, est leur hétérogénéité. Les adverbes de temps n’y échappent pas. En effet, aussi bien morphologiquement que du point de vue de leur comportement syntaxique, les adverbes de temps constituent un groupe varié. Morphologie et catégories grammaticales Pinchon [1969] fait remarquer que, dans les adverbes de temps, on rencontre des mots venant du latin (« hier »), des mots formés à l’aide d’un suffixe (« actuellement »), ceux formés par soudure de plusieurs éléments (« aussitôt »), des locutions (« tout de suite »). De plus, certains adverbes sont susceptibles d’être accompagnés de marques d’intensité (« (très) souvent ») alors que d’autres ne les acceptent pas (« aujourd’hui »). La variété des éléments qui peuvent prendre la fonction d’adverbial temporel est également illustrée par les différentes catégories grammaticales qui sont concernées : adverbes simples ou composés tels que « hier », « aujourd’hui », « demain », « plus tard », noms ou groupes nominaux (« jeudi », « le 25 juin 2009 », « ce matin ») et groupes prépositionnels (« dès le lendemain », « après 14h00 », « en 2009 »). Certaines formes peuvent se combiner pour donner naissance à des expressions plus complexes, par exemple un groupe nominal suivi d’un adverbe (« trois ans plus tard »). Syntaxe Au niveau syntaxique, et toujours selon Pinchon [1969], il existe des mots dont l’usage peut entraîner une ambiguïté entre adverbe et préposition (« avant ») ou conjonction de coordination (« ensuite »). Elle note également que si les adverbes de temps peuvent tous porter sur le verbe (« Il convient maintenant de décider […] »), ils peuvent aussi modifier un adjectif (« […] deux exigences parfois contradictoires »). Quelques adverbes peuvent être postposés à des substantifs (« deux jours avant »). Certains adverbes peuvent faire l’objet d’une construction indirecte avec les prépositions à (« à tantôt »), de (« d’aujourd’hui »), dès (« dès potron-minet »), depuis (« depuis toujours »), jusque/jusqu’à (« jusqu’à maintenant ») ou pour (« pour toujours »). À l’échelle d’une proposition, la place de l’adverbe n’est pas fixe et est souvent déterminée par le style, même si le nombre de constituants a aussi une influence à cet égard3 . Enfin, suivant les adverbes, l’insertion entre l’auxiliaire et le participe passé d’un verbe conjugué à un temps composé sera ou non permise. Certains adverbes de temps peuvent parfois perdre leur valeur temporelle. C’est le cas de « alors », utilisé pour introduire une conclusion, ou de « maintenant » utilisé en tête de phrase comme dans : « Maintenant, il avait peut-être raison ». Caractérisation sémantique Plusieurs classes particulières de noms peuvent être distinguées pour exprimer le temps et plus spécialement la durée. Tout d’abord, celle qui reprend les noms de temps (Ntps) et que Borillo [1986] définit plus précisément comme la catégorie des noms qui désignent des découpages temporels (« jour », « semaine », « saison »). Une autre catégorie de noms temporels est mise en avant par Borillo [1988], les noms de durée (Ndur) : des noms relatifs à des événements ou des faits qui possèdent un caractère duratif et dont l’emploi permet donc d’exprimer la durée. Ces Ndur sont des nominalisations de verbes (« traversée », « voyage ») ou d’adjectifs (« maladie », « jeunesse »). Il peut également s’agir de noms prédicatifs qui, lorsqu’ils sont utilisés avec un verbe support, fournissent un prédicat (« prendre des vacances », « être en congé »). Les Ndur peuvent être utilisés en combinaison avec les Ntps dans des constructions telles que Ndur de Quant Ntps (« une sieste de deux heures »). Borillo [1988] précise que les deux catégories sont liées : les Ntps sont des Ndur qui présentent la particularité de pouvoir servir d’unité de mesure.