La cellule est l’unité de base du vivant, elle est capable de s’auto-entretenir tout en interagissant avec son environnement. Elle représente l’image même d’un assemblage dont chaque élément est essentiel au bon fonctionnement de l’entité. Depuis des décennies, la cellule, procaryote ou eucaryote, est ainsi non seulement un sujet majeur de la biologie mais également un outil biotechnologique performant de production de biomolécules. De la recherche académique à la production industrielle, la cellule est devenue un allié technologique fiable offrant une machinerie robuste capable de produire à façon des molécules variées (ADN, peptides, protéines) avec des rendements importants. Pour ce type d’applications, l’utilisateur se repose sur des modules unitaires biologiques bien définis (réplication, transcription, traduction) où les propriétés spécifiques du vivant peuvent apparaître, en première approximation, comme un degré supplémentaire de complexité.
Depuis plusieurs décennies, dans un souci de performance et de reproductibilité, les chercheurs se sont donc intéressés à développer des systèmes minimaux se limitant aux fonctions essentielles à la production de molécules biologiques d’intérêt en s’affranchissant de la complexité inhérente à la cellule vivante. C’est ainsi qu’ont émergé dans les années 1960 les systèmes dits « cell-free », dans lesquels les protéines sont synthétisées in vitro à partir de leur ADN codant et en l’absence de cellules, par assemblage des constituants nécessaires aux réactions biochimiques mises en jeu. Compte tenu de leurs faibles rendements par rapport aux systèmes cellulaires, les systèmes « cell-free » ont été longtemps cantonnés à des études spécifiques de laboratoire. Avec l’amélioration des rendements de production, l’apparition de systèmes optimisés, l’intérêt grandissant pour la biologie synthétique, un regain d’intérêt est apparu récemment pour ces systèmes, allant d’études fondamentales des systèmes de régulation jusqu’à la production industrielle de protéines d’intérêt.
Les systèmes « cell-free » constituent donc des outils potentiellement très puissants pour la synthèse de protéines à façon. Néanmoins, compte tenu de leur utilisation intensive relativement récente, un certain nombre de défis restent à relever. En particulier, le contrôle dynamique de la production protéique « cell-free » par des stimuli de natures diverses reste relativement mal documenté. De même, il reste à inventer des méthodes permettant de mettre en œuvre ces systèmes pour la synthèse efficace de protéines complexes comme, par exemple,les protéines membranaires. Cette thèse a ainsi pour principal objectif de s’intéresser à ces deux questions.
Les protéines sont des édifices primordiaux impliqués dans la régulation des fonctions physiologiques de tous les êtres vivants. Il y a donc un intérêt naturel à mieux comprendre les divers mécanismes qui régulent la production, la structure et l’activité de ces biopolymères. D’un point de vue plus applicatif, les protéines sont aujourd’hui non seulement au cœur des développements pharmaceutiques mais sont aussi impliquées dans les avancées biotechnologiques, par exemple dans le domaine de la détection de molécules.
Les protéines sont des objets biologiques responsables des fonctions biologiques de tous les organismes vivants. D’un point de vue structurel, les protéines sont des enchaînements d’acides aminés qui se replient dans l’espace pour donner un édifice tridimensionnel doté d’une fonction spécifique. Parmi les fonctions réalisées par les protéines, on trouve par exemple la transformation de molécules biologiquement pertinentes, catalysée par l’action d’une enzyme, la transmission de signaux par des récepteurs dédiés ou encore les échanges contrôlés d’ions entre les milieux intra- et extracellulaires à l’aide de canaux ou de pompes ioniques.
L’ensemble des fonctions physiologiques d’un organisme vivant (unicellulaire ou pluricellulaire) ou même non appartenant au vivant (i.e. virus), se trouve sous le contrôle des protéines. Un fort intérêt est donc porté à la compréhension de la production et aux mécanismes d’action de ces biopolymères. En plus de l’amélioration des connaissances fondamentales, des motivations plus pratiques en bio- et nanotechnologies sont également identifiables.
En effet, les développements de ces dernières années dans les domaines des biotechnologies font appel à l’utilisation de ces biopolymères à des fins très variées. La compréhension des mécanismes de production ainsi que du fonctionnement de certaines protéines permet, par exemple, de produire aujourd’hui celles-ci dans un but purement thérapeutique. L’étude de la localisation cellulaire de certaines protéines membranaires est un exemple de mise en pratique des protéines fluorescentes (Chudakov et al., 2005)(Shaner et al., 2005). Dans le cadre de la production de bio-capteurs, l’utilisation de protéines est très développée pour leurs propriétés de reconnaissance spécifique ou pour leur activité d’oxydoréduction vis-à vis d’une molécule particulière (Lipscomb et al., 1958)(Vaitukaitis, 2004).
Introduction générale |