Expérimentations, simulations numériques et analyses de la réponse dynamique de la voie ferrée sous impact
Campagne expérimentale de mesures de réceptance
Dans cette partie, la zone de transition étudiée dans cette thèse est présentée. Les différentes structures de voie qui la composent sont détaillées en 3.1.1. Le dispositif expérimental utilisé pour mesurer la réceptance en basses fréquences sur ces zones est détaillé en 3.1.2, puis les résultats obtenus sont analysés en 3.1.3 pour mettre en évidence l’influence d’un changement dans la sous-structure de la voie et en particulier la visibilité de la transition.
Cas d’étude : la zone de transition de Chauconin
Le cas d’étude principal est une zone de transition entre voie ballastée et une zone de voie sans ballast expérimentale mise en place sur la LGV Est Européenne qui relie Paris à Strasbourg. Cette zone présente un grand intérêt puisqu’elle regroupe en quelques mètres quatre structures de voie différentes. D’une part, ces zones peuvent être étudiées séparément, et mises à profit pour valider les résultats de mesure pour différentes conceptions de voie. D’autre part, l’étude de la transition en elle-même est un cas de validation du logiciel très adapté. En effet, elle permet évaluer dans quelle mesure des discontinuités de géométrie ou de matériaux peuvent être prises en compte en simulations malgré les hypothèses 69 Expérimentations, simulations numériques et analyses de la réponse dynamique de la voie ferrée sous impact de périodicité sous-jacentes à la méthode de réduction. De plus, que l’étude des zones de transition est un sujet faisant l’objet de nombreuses recherches dans la communauté ferroviaire [Shahraki et al., 2015, Paixão et al., 2015, Momoya et al., 2015, Sañudo et al., 2016]. La zone de transition de Chauconin est en particulier intéressante du point de vue de son comportement dynamique, puisque la tenue de la géométrie s’est révélée, après plusieurs passages de TGV peu satisfaisante, avec l’apparition rapide de traverses danseuses (c’est-à-dire des traverses pour lesquelles le contact avec le ballast n’est plus assuré) [Costa d’Aguiar et al., 2015]. Cette dégradation de la géométrie de la voie a conduit à une réduction de la vitesse commerciale à 230 km/h peu après la première mise en circulation. Un retour d’expérience complet est alors très intéressant pour SNCF Réseau afin de comprendre les phénomènes ayant généré cette dégradation rapide de la géométrie. Un schéma explicitant la géométrie de la zone est présenté en Fig. 3.1. La partie ballastée de cette transition présente trois conceptions différentes pour une superstructure identique. L’étude de la voie sur dalle, qui est une déclinaison de la pose STEDEF [Dieleman et al., 2008] n’entre pas dans le cadre de ce travail. Le but de cette transition est, d’une part, d’apporter un changement progressif de géométrie et, d’autre part, d’apporter une transition de raideur progressive entre les conceptions très différentes de voie ballastée et de voie sur dalle, sachant que la voie sur dalle est conçue avec un système d’attaches très souple pour qu’un minimum de déplacements et de contraintes soit transmis à la structure en béton. FIGURE 3.1 : Description de la géométrie du site d’essais de Chauconin (d’après [Costa d’Aguiar et al., 2015]). Les trois structures ballastées sont les suivantes : — La voie ballastée : cette zone présente les propriétés habituelles d’une ligne à grande vitesse sur le RFN qui ont été détaillées dans la partie 1.1.1. La superstructure est composée d’un rail UIC 60, d’un système d’attache de type Fastclip avec semelles de 9 mm cannelées et de traverses monobloc M450. L’épaisseur de la couche de ballast est de 30 cm. Elle repose sur une couche de sous-ballast compactée mais non traitée, qu’une couche de forme sépare du sol support. — La zone de transition avec le tapis 2 : cette zone apporte une transition progressive de géométrie pour la sous-structure entre celle de la voie ballastée et celle de la voie sur dalle. Ainsi, la hauteur de ballast est progressivement réduite de 30 à 22 cm. La couche de sous-ballast est remplacée par la couche en grave traitée qui est utilisée sous la dalle pour assurer la portance nécessaire. Pour éviter que le remplacement d’une couche simplement compactée par une couche de grave traitée conduise à une zone globalement plus raide que la voie ballastée, un tapis est introduit sous le ballast. Sa raideur est comprise entre 0.031 N/mm3 et 0.051 N/mm3 . Les propriétés de la superstructure sont strictement identiques à celles de la voie ballastée.
Dispositif expérimental
Pour compléter les mesures temporelles disponibles (voir chapitre 4), disposer dans le cadre de cette thèse d’une quantification du comportement fréquentiel de la voie non influencée par le passage d’un train est apparu intéressant. Le cas d’étude de Chauconin étant une ligne exploitée, des dispositifs expérimentaux peu intrusifs sont privilégiés pour pouvoir facilement, en quelques nuits, récupérer des informations sur le site. Pour déterminer le comportement de la zone dans le domaine fréquentiel, des essais de réceptance ont alors été privilégiés. Ces mesures de réceptances sont réalisées avec deux objectifs principaux : 1. Vérifier sur des résultats expérimentaux dans quelle mesure les sous-couches influencent la courbe de réceptance. En particulier mettre en évidence un changement de sous-structure par simple analyse des mesures. 2. Utiliser les courbes de réceptance pour valider le modèle numérique mis en œuvre dans le chapitre 2, et apporter un diagnostic au mauvais comportement dynamique de la zone. Ces résultats de mesures seront dans un premier temps analysés dans une gamme de fréquences réduite (10 Hz-100 Hz) pour détecter un changement de sous-structure puis dans un second temps étudiés sur une gamme de fréquences plus étendue (jusqu’à 1300 Hz) de manière à mettre en évidence les points caractéristiques de la réceptance précisés dans la section 1.1.2. Les mesures ont été réalisées dans l’ensemble des zones identifiées. Un marteau lourd, de 5,440 kg est choisi pour réaliser les impacts, de manière à obtenir une cohérence correcte en basses fréquences permettant de solliciter les couches inférieures de la voie. Des capteurs sont positionnés à la fois au niveau du rail et au niveau des traverses. Une illustration du dispositif expérimental est proposée en Fig. 3.2. Les points d’impacts sont spécifiés au droit des traverses et à l’inter-travée.