EXPÉRIENCE DES SYMPTÔMES
L’expérience des symptômes met en avant la perception, l’évaluation et la réponse aux symptômes. A partir des articles analysés, différents thèmes et sous-thèmes ont pu être identifiés en lien avec les spécificités des échelles ainsi que les barrières rencontrées par les soignants.
PERCEPTION DES SYMPTÔMES
Items de l’échelle
Dans les deux échelles Algoplus et PAINAD, il y a une certaine ressemblance dans les items d’évaluation notamment pour les « expressions faciales », « plaintes / vocalisation » et « position / langage corporel ». Dans l’échelle Algoplus, les auteurs mettent l’accent sur le « regard » et les « comportements atypiques ». Tandis que pour l’échelle PAINAD, les items complémentaires sont la « respiration » et la « consolabilité » (Bonin-Guillaume et al., 2016 ; DeWaters et al., 2008 ; Mosele et al., 2012). Les items de « consolabilité » et « respiration » sont les items de l’échelle PAINAD qui selon les auteurs DeWaters et al. (2008), sont les moins référencés.
Les auteurs Bonin-Guillaume et al. (2016), relèvent une différence de fréquence des items selon les groupes (démence, dépression, démence & dépression, contrôle) lorsque l’on compare les patients avec et sans douleur. Pour le groupe des personnes atteintes de démence, tous les items sont significatifs (p<0.033 à 0.001). Pour les patients atteints de démence & dépression, l’item des « comportements atypiques » n’est plus significatif (p<0.109). Pour le groupe contrôle, les items significatifs sont « expressions faciales » (p<0.001), « plaintes » (p<0.001) et « position corporelle » (p<0.001). Pour les personnes atteintes de dépression, seules deux items sont significatifs : « expressions faciales » (p<0.001) et « plaintes » (p<0.001). Dans les groupes sans douleur, il y a également une disparité dans la fréquence des items.
D’après les chercheurs Rat et al. (2010), l’item « regard » semble plus fréquent chez les patients incapables de communiquer que chez les patients communicants (p<0.0001).
Difficultés de percevoir les manifestations de la douleur
D’après les auteurs Fry, Chenoweth, Arendts (2015), les infirmières n’utilisent pas systématiquement des échelles d’hétéroévaluation. Parfois, pour les aider dans l’évaluation de la douleur, elles reprennent des échelles destinées à la pédiatrie. Autrement, elles fondent leur évaluation sur l’observation des comportements comme les grimaces, les réactions au toucher, le manque de mouvement et l’agitation. Elles appuient leur jugement également sur les changements physiologiques tels que la fréquence respiratoire, la pression sanguine et la fréquence cardiaque. Les infirmières se basent beaucoup sur leur expérience et leur jugement pour évaluer les douleurs chez les patients. Elles ont des connaissances sur le degré de douleur rencontré en post-opératoire auprès de personnes sans trouble cognitif. A partir de ce savoir, elles transposent leurs idées préconçues sur des patients atteints de troubles cognitifs.
Dans l’étude menée par McLiesh, Mungall et Wiechula (2009), les infirmières ont été questionnées sur les manifestations de la douleur auprès de personnes ayant des difficultés à communiquer. On leur a demandé de citer 6 items. Au début de l’étude, elles sont capables de nommer 3.7 items sur 6. Suite à une formation donnée sur l’échelle de l’Abbey Pain Scale, les infirmières arrivent à citer 4.06 items sur 6. Ce résultat n’est pas réellement significatif, cependant la formation donnée au préalable montre qu’une amélioration des connaissances est possible.
ÉVALUATION DES SYMPTÔMES
Pour pouvoir évaluer correctement, les échelles doivent avoir une sensibilité importante aux fluctuations de la douleur et permettre de s’approcher de la douleur réelle du patient au plus juste. Elles doivent être une aide pour les infirmières et pas un outil contraignant.
Corrélation avec NRS
Dans les quatre articles, les chercheurs ont évalué essentiellement les douleurs aiguës. Les échelles d’hétéroévaluation ont été mises en corrélation avec des échelles d’autoévaluation numérique comme par exemple NRS (numerical rating scale) et VAS (visual analog scale). Ainsi, grâce à des groupes contrôles sans trouble cognitif, on peut analyser la douleur subjective qu’ils ressentent et la mettre en corrélation avec les échelles d’hétéroévaluation.
Selon les auteurs Mosele et al. (2012), l’échelle PAINAD a une corrélation hautement significative avec l’échelle d’auto-évaluation NRS (p<0.0001). Ils ont repris les stades de la douleur selon la NRS en 4 groupes afin de mettre en lien avec les scores de l’échelle PAINAD pour déterminer l’intensité de la douleur chez les patients non-communicants.
Selon leurs recherches, ils ont déterminé que :
• Absence de douleur correspond à un score de PAINAD de 0.
• Douleur légère correspond à un score PAINAD entre 1-3
• Douleur modérée correspond à un score PAINAD entre 4-6
• Douleur sévère correspond à un score PAINAD supérieur à 7
D’après les auteurs Rat et al. (2010), l’échelle Algoplus est hautement corrélée avec les échelles d’autoévaluations NRS, VAS, VDS (p<0.0001). Cette corrélation avec l’échelle NRS a été également démontrée par les auteurs Bonin et al. (2016). Toutefois, les recherches actuelles ne permettent pas de mesurer l’intensité de la douleur.
Les échelles d’hétéroévaluation sont des outils précieux dans la pratique infirmière. Toutefois, il faut utiliser les échelles adaptées à la pathologie et aux types de patients. En effet, on ne peut pas utiliser des échelles de pédiatrie pour des personnes âgées. De plus, les auteurs Fry et al. (2015) recensent que les infirmières dans leur pratique utilisent souvent des échelles d’autoévaluation bien qu’elles ne sont pas adaptées aux personnes atteintes de troubles cognitifs
Mobilité
Dans plusieurs études, les chercheurs ont utilisé des échelles pour comparer les scores durant une mobilisation qui peut engendrer une douleur aiguë et au repos.
DeWaters et al. (2008) ont déterminé que les résultats de la douleur selon PAINAD sont significativement plus élevés lors de la mobilisation qu’au repos (p<0.001). Les scores sont similaires quel que soit le statut cognitif. Les scores sont plus élevés lors des mouvements pour le groupe sans déficit cognitif (p<0.002) que pour le groupe avec un trouble cognitif (p<0.006).
Pour l’évaluation durant le mouvement, le score d’Algoplus est suffisamment sensible pour ne pas révéler de changement significatif pour les patients sans douleur (p<0.13). Le score est significativement plus élevé lors de la mobilisation des patients confrontés à des douleurs aiguës (p<0.0001). Pour les patients souffrant de démence, tous les items: « expressions faciales, regards, plaintes, comportements atypiques » ont été fréquents durant le mouvement, excepté pour l’item « position corporelle ». Les items qui ont la plus grande différence de fréquence entre le repos et la mobilisation sont les « plaintes » et les « comportements atypiques » (Rat et al., 2010).
Évaluation avant et après le traitement
Il a été démontré que les infirmières ont beaucoup de difficulté à évaluer un changement dans l’intensité de la douleur après la prise d’antalgique (Fry et al., 2015). Grâce aux échelles PAINAD et Algoplus, il est possible de mesurer cette évolution.
1. INTRODUCTION |