Protocoles de stimulation
La fréquence utilisée varie de 25 Hz [42] à 30 Hz 19,[ 20, 53, 54], ce qui correspond aux fréquences ayant donné les meilleurs résultats (les différents protocoles décrits dans la littérature pour les félidés sauvages sont regroupés dans l’annexe 6).
Tous les auteurs utilisent une onde de type sinusoïde. La tension maximale du courant est choisie soit arbitrairement (identiques pour tous les individus) [20, 53-55], soit en sélectionnant une valeur minimale suffisante à provoquer l’extension des membres postérieurs et la protrusion des griffes (photo 5) [42].
Ceci correspond à une tension de 5 à 10 V. Quelle q ue soit la méthode employée, il existe un voltage seuil pour la production de plasma séminal (0 à 1 V), pour l’obtention d’un nombre maximal de spermatozoïdes (entre 2 et 8 V) et pour l’éjaculation d’un volume séminal convenable (1 à 8 V) [53].
L’érection est généralement obtenue entre 2 et 4 V[55]. Aucun consensus n’est cependant acquis sur la question : le nombre de spermatozoïdes varie avec le voltage et le nombre de stimuli électriques, à la différence du volume qui ne sembl pas être influencé par ces deux facteurs pour Zambelli et al. [53, 78]. Pineda et Dooley [19], rapportent au contraire un effet du voltage à la fois sur le nombre de spermatozoïdes, le volume total de la semence et son osmolarité. Le volume et la concentration obtenus à 1 V serait inférieurs à ceu x éjaculés à 2, 4 ou 6 V. D’après ces auteurs, Il apparaît que c’est surtout le nombre de stimulation s infligées qui influe sur le volume.
Pineda et al. [54] l’expliquent par une sensibilité des glandes sexuelles accessoires plus forte aux stimulations. La production de plasma séminal est maximale vers 1 à 2 V.
L’éjaculation est obtenue de façon inconstante avec des stimuli entre 2 et 8 V et 5 et 220 mA. L’éjaculation sans érection est possible. Nousdétaillerons plus loin le protocole de choix [20, 37]. On note que l’éjaculation se produit le plus souvent entre 4 et 8 V et les spermatozoïdes recueillis proviennent de l’épididyme et du vasa deferens. De plus, la composition d’un éjaculat recueilli à 6 V s’apparente à celle de la semence o btenue avec un vagin artificiel [19, 54]. La viabilité et la mobilité des spermatozoïdes n’est nfluencéei ni par le voltage, ni par l’intervalle entre deux collections [19, 78]. L’éjaculat le plus concentré semble être celui obtenu à la deuxième éjaculation [53, 54].
Howard et al. [37] ont déterminé des séries de stimulations électriques utilisables chez les félins (tableau 2), permettant d’éviter la contamination urinaire (voir page 62) et d’obtenir un éjaculat de qualité.
Tableau 2 : Protocole d’électro-éjaculation chez les félins[20, 37].
Le voltage est augmenté en 3 secondes, puis on reste au voltage voulu pendant 2 à 3 secondes et on revient à 0 V en 3 secondes avant de recommencer la manipulation pour le voltage suivant. Les délais peuvent être plus rapides selonles différents auteurs, cependant, la durée de la phase d’augmentation du voltage est la plus constante. On attend 2 à 5 minutes entre les séries. Au moins 60 stimulations électriques sont nécessairesà l’éjaculation.
Il existe d’autres protocoles mis au point par Johnstone [42] et Platz et Seager [55], donnant des résultats approchants.
Les auteurs font varier la force du courant de 0 V à un maximum de voltage correspondant à la valeur minimale provoquant l’extension des membres postérieurs et la protrusion des griffes.
Pour les grands félins, afin d’améliorer la quantité de l’éjaculat, un massage de la zone périnéale est parfois effectué en fin de chaque série de stimuli (Fontbonne, communication personelle). La production de liquide prostatique et l’émission de sperme par la contraction des conduits déférents sont effectivement stimulées parce massage.
Photo 5 : Positionnement optimal de la sonde avec extension symétrique des postérieurs et extrusion des griffes chez le chat (CERCA).
Platz et Seager [55] réalisent une séance comprenant 3 séries de 60 stimuli chacune entre lesquelles une période de repos de 5 minutes est respectée (tableau 3).
Tableau 3 : Protocole d’électro-éjaculation pour l’espèce linefé [55].
On augmente le voltage en 2 secondes pour le maintenir à son maximum pendant 3 secondes et redescendre en 1 seconde à 0 V avant de recommencer après 2 secondes de repos. Pour certains chats, l’éjaculation n’est obtenue qu’à la troisième série.
Le premier protocole étant plus simple d’utilisation et aboutissant aux mêmes résultats, c’est celui-ci que nous choisirons d’utiliser ultérieurement.
Avantages et inconvénients
C’est une méthode facile d’emploi, pour peu que l’on dispose du matériel nécessaire, et indiquée dans le cadre d’interventions sur des animaux sauvages. Le volume de la semence obtenu avec cette méthode est supérieur à celui obtenu à l’aide d’un vagin artificiel ou par saillie naturelle. Ceci correspond à une meilleure contribution des glandes annexes en réponse à une stimulation électrique prolongée. L’analyse de la semences’en trouve facilitée. Un même éjaculat peut être alors utilisé pour inséminer plusieurs femelles.
Pineda et al [54] n’ont constaté, après 22 collectes réparties urs 32 semaines, aucun effet nuisible, décelable cliniquement, de la répétitiondes anesthésies et des stimulations électriques sur les animaux. Seuls des problèmes de fatigue musculaire, d’échauffement de la muqueuse rectale et de déséquilibres ioniques à la surface de cette muqueuse ont été observés [78]. Aucune des études citées n’a fait part d’effets néfastes dûs à l’électro‐éjaculation lorsque les prélèvements sont réalisés à 2 ou 3 jours d’intervalle.
La contamination urinaire s’ajoute enfin aux inconvénients majeurs rencontrés ; nous en reparlerons ensuite, page 62.
Méthodes d’appréciation et caractéristiques de laemences
Nous développerons dans cette partie le spermogramme à proprement parler. Celui ‐ci ne constitue qu’une approche, une évaluation du pouvoir fécondant du sperme des félidés sauvages.
Le spermogramme est un examen médical au cours duquel on analyse le sperme. Il vise à quantifier les spermatozoïdes et décrit entre autre le volume de l’éjaculat, son pH, la mobilité et la morphologie des spermatozoïdes.
Les éjaculats sont très variables selon les individus en volume, pH, osmolarité et concentration en spermatozoïdes [19, 42, 54, 78]. Les prélèvements sur un même félin peuvent également subir de grandes variations, c’est pourquoi 5 prélèvements et spermogrammes semblent nécessaires pour juger du potentiel reproducteur d’un mâle [54] (Sojka et al. [67] n’en recommandent que deux à quinze jours d’intervalle). Le printemps est plus propice à la récolte du sperme car c’est la période où les éjaculats sont esl plus concentrés et les plus volumineux, à relier avec l’activité sexuelle grandissante des femelles [42].
La semence de félidés sauvages n’a fait l’objet que d’un petit nombre de publications, mais qui donnent des résultats relativement similaires.
Intérêt de l’analyse de la semence
Le spermogramme est un excellent recours lors de problèmes de fertilité avérés. Cet examen de routine peut être mis en relation avec des informations essentielles concernant aussi bien le mâle que la femelle, comme la fréquence des saillies, lalibido, le comportement sexuel et les moyens de reproduction assistée déjà employés ainsi que leurs résultats. Le spermogramme reste le meilleur moyen d’évaluer le potentiel reproducteur d’un mâle.
Toutes ces informations doivent permettre de mettre en lumière l’origine de l’infertilité. Le mâle peut avoir été infertile depuis toujours (infertilité d’origine congénitale). Il peut également l’être devenu récemment à la faveur d’une infectionurinaire, d’une inflammation du tractus génital ou d’un problème matériel lors de la récolte du sperme. Il peut également être subfertile. Il faut toujours vérifier la fertilité de la femelle en même temps.
Il existe évidemment des différences intraspécifiques en ce qui concerne la fonction de reproduction des félidés sauvages, comme l’atteste l’étude de Moray et al. (annexe 4). Chez trois félins sauvages que sont l’ocelot, le margay ou chat-tigre et l’oncille, des prélèvements sanguins, des mesures d’organes (testicules, prostate) et des récoltes de semence par électroéjaculation ont été mises en œuvre par l’équipe de chercheurs sur une p ériode de quatorze mois [48]. Il en ressort que l’ocelot est le félin qui a la plus haute mobilité des spermatozoïdes et le plus grand nombre de formes normales. La concentration de testostérone sérique est à peu près identique pour les trois espèces. La production de sperme est plus importante quantitativement en été pour chaque espèce sans exception.
Examen macroscopique
Les paramètres d’analyses qui vont être présentés dans ce paragraphe sont ceux utilisés lors d’études de terrain (étude sans moyens de laboratoire élaborés comme un compteur CASA, la cytométrie de flux, une coloration de Diff-Quick,…) . Cette étude s’est voulue spécifique de l’application expérimentale qui lui fait suite.
Examen physique de l’animal
Un examen physique doit toujours compléter une évaluation de la semence. Une attention particulière doit être portée au système cardiovasculaire, au système musculaire, au squelette ainsi qu’à toute anomalie qui pourrait entraver la libido ou l’intromission, et de ce fait, être responsable d’une stérilité ou d’une hypofertilité.
Aspect
La semence féline a un aspect lactescent. Elle est homogène, mais trouble. Elle peut être de couleur anormale, signe d’une contamination par l’urine (jaune), par du sang (rouge ou brun), ou par du pus (vert). Le volume de l’éjaculat étant très faible, il est parfois difficile de distinguer les décolorations.
Volume
On mesure le volume à l’aide d’une pipette graduée de 100 µL ou d’une pipette à volume variable [55]. Les différentes quantités récoltées au cours de diverses études expérimentales sont répertoriées en annexe 7.
Le chat domestique libère, en moyenne à chaque éjaculation 0,04 ml de sperme, obtenu de façon spontanée. Le faible volume (photo 6) des éjaculats de félins de petits gabarits est à l’origine d’un certain nombre de contraintes. Les techniques d’examen de la semence doivent être adaptées, de manière à ne pas en gaspiller. En effet, en raison du faible volume récolté chez les félidés, les techniques habituellement utilisées dans les autres espèces, comme chez le chien, ne sont pas directement transposables.