Evolution spatio-temporelle des microorganismes totaux et actifs à une
échelle µm à mm dans la détritusphère
Préparation des cosmes
Les cosmes ont été préparés de la même manière que ceux décrits dans le chapitre 3 et ont été incubés dans les mêmes conditions (pF1,5 ; pF2,5 et pF3,5). Seul leur diamètre diffère, chaque cosme mesurant 20 mm de diamètre (interne) pour 40 mm de haut. Ainsi, les cosmes contiennent initialement 20,41 mg de résidus pour 16,33 g de sol sec, soit 0,52 mg C(résidus).g-1 de sol sec. Aux dates 3, 7, 15 et 45 jours, trois cosmes par potentiel hydrique ont été sacrifiés pour la préparation de lames minces.
Préparation des lames minces
La partie inférieure des microcosmes a été emballée dans une toile de maille 63 µm pour ne pas perdre de sol au cours des immersions répétées nécessaires à l’imprégnation. Les cosmes ont ensuite été plongés au tiers dans une solution de Karnovsky, solution de paraformaldéhyde et de glutaraldéhyde à 25%, permettant une fixation efficace par remontée capillaire d’une grande variété de tissus (Karnovsky, 1965; Vidal et al., 2018). Ils ont ensuite été transférés dans un dessiccateur à température ambiante pendant une heure avec un vide équivalent à -20 kPa pour favoriser la pénétration du liquide dans la porosité (figure 51, étape 1). Les microorganismes (et résidus végétaux) ont dans une étape suivante été marqués par remontée capillaire avec une solution de Calcofluor White dilué à 0,2% (SCRI Renaissance Stain 2200), le Calcofluor White se fixant sur les liaisons β(1,4) et β(1,3) des polysaccharides (Harris et al., 2002). Pour ce faire, les cosmes ont été plongés au tiers dans la solution de Calcofluor White pendant une heure sous un vide à -20 kPa (Nunan et al., 2001) (figure 51, étape 2). Par la suite, les échantillons ont été totalement déshydratés par une succession de bains d’acétone à 30%, 50%, 70%, 90% puis trois bains d’acétone purs (Nunan et al., 2001; Mueller et al., 2012). Chaque bain a été suivi de 20 minutes minimum d’une mise sous vide à -20 kPa pour optimiser la pénétration de l’acétone dans la porosité (figure 51, étape 3). Les échantillons ont ensuite été imprégnés par remplacement progressif de l’acétone par la résine 155 Araldite GY 502 10900 (Electron Microscopy Sciences) : deux bains dans l’Araldite dilué à 25% puis à 50% dans l’acétone sous vide à -20 kPa ont été réalisés avant de terminer par un bain dans de la résine pure (Mueller et al., 2012; Vidal et al., 2016, 2018; Schlüter et al., 2019) (figure 51, étape 4). Les échantillons ont enfin été chauffés à 60°C dans un four pendant cinq jours et mis de côté jusqu’à durcissement total de la résine. Les cosmes ont été sciés dans le sens de la longueur avec une scie circulaire (figure 51, étape 5), débarrassés de la résine périphérique en excès ainsi que du tube plastique autour du cosme (figures 52a et 52b), aplanis à l’aide d’une rodeuse et collés sur une lame de verre à l’aide d’une résine Epoxy à prise rapide. Ils ont ensuite été à nouveau abrasés pour atteindre une épaisseur finale de 30 µm à l’aide d’une rodeuse (figure 51, étape 6) puis polis (à l’Université Technique de Munich, au sein du laboratoire de sciences du sol) à l’aide de papiers à différents grains entre 35 µm et 5 µm (CarbiMet, Buehler) et d’un tissu de polissage muni de suspensions diamantées de 1 ; 0,25 et 0.1 µm (Allied High Tech Product) (figure 51, étape 7) afin d’obtenir une surface suffisamment lisse pour les observations en nanoSIMS (Mueller et al., 2012). Les échantillons finaux mesuraient 2 cm sur 4 cm (figures 51 et 2) sur des lames de verre de tailles variables (environ 8 cm de côté) (figure 52c). Une lame mince par cosme a été réalisée. Figure 51 – Ensemble des étapes de préparation des lames minces: 1 – fixation, 2 – marquage, 3 – déshydratation, 4 – imprégnation, 5 – sciage des cosmes, 6 – amincissement et 7 – polissage. 156 (a) (b) (c) Figure 52 – Organisation des cosmes une fois l’imprégnation terminée et avant la confection des lames minces selon des coupes longitudinales (a) et transversales (b). Lame mince finie avec bord de la lame en verre en pointillés (c). Une lame a été réalisée dans les mêmes conditions que celles décrites précédemment mais sans marquage au Calcofluor White pour estimer la part d’auto-fluorescence du sol (et sans l’étape finale de polissage car cette lame a été réalisée ultérieurement et le dispositif de polissage n’était plus accessible au moment de sa confection).
Distribution spatio-temporelle des microorganismes totaux
Acquisition d’images par microscopie à fluorescence Les lames minces de sols ont ensuite été observées à l’aide d’une loupe binoculaire Zeiss AXIO.Zoom.V16 muni d’un objectif PlanNeoFluar Z 2.3x et photographiées grâce à une caméra monochromatique AxioCam HR R3 et une lampe Zeiss HXP 120C. Une mosaïque d’images 16-bits a été obtenue pour chaque lame mince de manière semi-automatique (déplacement de la platine automatique et mise au point semi-automatique). La zone ciblée mesurait 4 mm de largeur pour 14 mm de hauteur depuis le résidu vers le sol et ce, dans les deux sens, à partir du lit de résidus. La zone totale analysée était donc un rectangle de 4 sur 28 mm contenant 1862 images à un grossissement x258 et une résolution de 0,25 µm. Un traitement de correction des jointures et des ombres a été appliqué aux différentes images 157 pour reconstituer la zone totale observée (figure 53). Les observations de sol sont généralement réalisées à l’aide de microscopes à épifluorescence et non à l’aide de loupes binoculaires comme ici. Nous avons donc comparé ces deux méthodes d’acquisition d’images (sup mat, annexe 1, figures 83 et 84). (a) (b) (c) (d) Figure 53 – Résultats du prétraitement des images : images obtenues en fin d’acquisition de la mosaïque totale de 2 par 14 mm (a) et d’une sous partie de la mosaïque (zoom) (c) où l’on observe des zones doubles sur le bord des images (flèches rouges) et après correction (b et d). Après correction de la mosaïque, le réalignement génère des bords noirs (flèches jaunes) (b).
. Division en zones d’intérêt
Les images totales ont ensuite été divisées en zones d’intérêt correspondant aux zones déjà étudiées dans le Chapitre 3, à savoir sur 4 mm de large et à une distance aux résidus de 0-2 158 mm, 2-4 mm, 4-6 mm et 12-14 mm. Cela nous a permis dans un premier lieu de travailler sur des images de mêmes dimensions (2 mm x 4 mm) mais aussi de couper les bords noirs de l’image générés par le programme lors du réalignement issu de la première correction (figure 53b). Par ailleurs, cela nous a permis de travailler sur des fichiers moins volumineux et donc de faciliter le traitement d’images. Pour chaque zone d’intérêt, nous avons sélectionné 3 réplicats sur les 6 disponibles (2 zones équivalentes de part et d’autre des résidus sur chacune des lames minces et 3 lames minces par traitement) en fonction de la qualité des images (problème d’épaisseurs variables des lames suite au polissage, problème de mise au point). Ce travail de découpe a été réalisé avec le logiciel libre d’accès Zeiss ZEN. Le champ de profondeur obtenu lors de l’acquisition de ces images est de 1.7 µm. Les dimensions (2 mm x 4 mm) et la densité apparente (1.3) des échantillons étant connues, nous avons pu calculer la quantité de sol analysée par lame. Elle est de 17.7 µg et représente 0.0001% de la masse de sol totale contenue dans le cosme (16.33 g).