Evolution de l’adhérence force-vitesse
Nous nous limitons dans ce paragraphe à une comparaison entre certaines données sur le raisonnement spontané en mécanique, issus des recherches de Laurence Viennot (1996), afin de tenter de mettre en évidence une tendance dans l’évolution de ces raisonnements. Nous focaliserons cette comparaison sur le concept de force d’interaction dont la résultante est reliée au taux de variation temporel du vecteur quantité de mouvement à un instant t donné.
Cette relation est bien connue sous l’appellation de deuxième loi de Newton. Pour des systèmes étudiés dont la masse reste constante au cours du temps, cette relation prend la forme d’une proportionnalité entre le vecteur force résultante des forces d’interaction, et le taux de variation temporel du vecteur vitesse dont la traduction en langage mathématique est :
𝐹 ⃗(𝑡) = 𝑚. 𝑑𝑣 ⃗⃗ 𝑑𝑡 (𝑡) = 𝑚.𝑎⃗(𝑡) 𝑝𝑜𝑢𝑟 𝑚 𝑖𝑛𝑑é𝑝𝑒𝑛𝑑𝑎𝑛𝑡𝑒 𝑑𝑢 𝑡𝑒𝑚𝑝𝑠 Souvent, pour le raisonnement spontané, tout se passe comme si les sondés utilisent une relation de proportionnalité entre vecteur force résultante et vecteur vitesse. L’expression « tout se passe comme si » souvent utilisée pour modéliser une situation en physique est utilisée ici dans le même sens : dire que « tout se passe comme si » ne signifie pas que ça se passe comme ça !
Cette réflexion ne fait que souligner nos positions évoquées dans la première partie. La phrase extraite du livre « Raisonner en physique – La part du sens commun » reproduite ci-dessous illustre bien cette position. «Les adhérences « force-vitesse », signent probablement une vision du phénomène physique plus étoffée que la simple substitution d’une relation (Force-Vitesse) à une autre (Force Accélération). » (Viennot, L. , 1996, p. 77)
Nous prenons comme éléments de comparaison, la balle d’un jongleur à une altitude donnée, avec des vecteurs vitesses différents (cf. Figure 2- 29 : La balle du jongleur)21 et les QCM 14 à 16 sur le lancer d’une pièce de monnaie (que nous considérons comme une situation très voisine).
Figure 2- 29 : La balle du jongleur 42% des étudiants (N=36) de première année d’université française (étudiants sondés il y a plus de vingt ans) indiquaient des forces différentes (Viennot, 1996) ce qui peut se traduire par une adhérence force-vitesse contre (52% pour la QCM 14, 69% pour la QCM 15 et 51% pour la QCM 16) pour les étudiants (N=419) de première année d’enseignement supérieur (étudiants sondés après 2013, c’est à dire les « nouveaux étudiants »).
Nous ne cherchons pas à déterminer si la différence est statistiquement significative, mais nous nous limitons à affirmer que la situation n’est pas meilleure concernant cette « conception » ; elle semblerait même pire.
Particularité des mouvements rectilignes uniformément accélérés et décélérés
Lors de l’analyse des réponses, au test conceptuel (annexe 1), de l’ensemble des étudiants testés de l’Académie de Rouen, nous avons remarqué une différence dans les répartitions de 110 Lefebvre Olivier – Thèse de Doctorat – 2018 leurs réponses, entre les situations qui faisaient référence à un mouvement rectiligne uniformément accéléré et les situations qui faisaient référence à un mouvement rectiligne uniformément décéléré.
Les questions posées pour distinguer ces mouvements sont par exemple (QCM5 et QCM7) : o Quelle force garderait le traîneau en mouvement vers la droite avec une accélération constante ? o Le traineau est en mouvement vers la droite.
Quelle force ralentirait le traîneau avec une décélération constante ? Le physicien ne voit pas, à priori, de différence en terme de difficulté pour répondre à ces deux questions. L’étudiant ne semble pas du même avis. Les quelques graphiques reproduits ci dessous dans les tableaux (2-6 à 2-9) illustrent les réponses des étudiants dont la répartition est différente en fonction du mouvement accéléré ou décéléré.
On peut remarquer que pour chaque couple de questions d’une même situation physique décrite, concernant les mouvements rectilignes uniformément accéléré (MRUA) et uniformément décéléré (MRUD), la répartition des réponses des étudiants est différente
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