Evolution clinique en fonction du phénotype d’artérite à cellules géantes

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Définitions et diagnostic

L’artérite à cellules géantes (ACG) est une vascularite primitive touchant les artères de grand calibre avec dans plus de la moitié des cas une atteinte de l’aorte et de ses branches, avec une prédilection pour les branches de l’artère carotide externe et les artères vertébrales (1). C’est la vascularite systémique primitive la plus fréquente en Occident chez les personnes âgées de plus de 50 ans. La maladie a été décrite pour la première fois par Hutchinson en 1890, qui décrivait alors une douleur inflammatoire des artères temporales chez un homme ne supportant pas le port d’un chapeau. Elle a ensuite été définie comme entité à part entière en 1932 par Horton et al., puis a été reclassée comme “vascularite des gros vaisseaux” par la classification révisée de Chapel Hill en 2012 (2).
Les symptômes les plus fréquemment retrouvés au diagnostic sont les manifestations céphaliques (80%) dont les céphalées (70%) et la claudication de la mâchoire (54%) (3). Les critères de classifications de cette maladie sont les critères ACR (American College of Rheumatology) de 1990 comprenant la présence de céphalées inhabituelles, l’induration des artères temporales à la palpation, l’âge supérieur ou égal à 50 ans, une vitesse de sédimentation (VS) supérieure à 50 mm à la première heure, et une biopsie de l’artère temporale (BAT) positive. Le fait de remplir au moins 3 de ces critères permet de discerner l’ACG des autres vascularites avec une sensibilité de 93,5% et une spécificité de 91,2% (1).

Epidémiologie

L’artérite à cellules géantes atteint préférentiellement les femmes de plus de 50 ans. Dans une méta-analyse portant sur 32 essais cliniques, la proportion de femmes atteintes selon les études varie de 56,4 à 81,5% avec une médiane à 70,7% (4,5). Le risque de développer une ACG au cours de sa vie est estimée à 1% pour une femme et à 0,5% pour un homme. Bien qu’elle atteigne préférentiellement une population de plus de 50 ans, le pic d’incidence survient dans la huitième décennie de vie.
On note un gradient nord-sud avec une prévalence plus élevée dans le nord de l’Europe en particulier dans les pays scandinaves. La prévalence demeure moins importante dans les pays du sud de l’Europe et les cas d’ACG deviennent rares chez les personnes d’origine asiatique et africaine. Il semble exister une prédisposition génétique favorisant le développement de la maladie, puisque celle-ci est fréquemment associée à l’allèle HLA-DRB1*04 (1).

Différents phénotypes d’artérite à cellules géantes

Au cours des dernières années, plusieurs phénotypes cliniques et vasculaires de l’artérite à cellules géantes ont été rapportés, notamment la forme crânienne dite aussi céphalique, la plus classique, et la forme extra-céphalique ou “LV-GCA” (Large Vessel-GCA). Initialement considérées comme une vascularite avec un tropisme pour les artères céphaliques, carotides et vertébrales, des études post-mortem de l’ACG ont mis en évidence une atteinte des gros vaisseaux dans 80% des cas. D’autres séries issues d’études d’imagerie ont mis en évidence une vascularite des gros vaisseaux chez plus de 83% des patients atteints d’ACG. Cette entité est aujourd’hui considérée, en l’absence de consensus, comme une atteinte inflammatoire de l’aorte (aortite) et/ou de ses premières branches de division, déterminée en imagerie. Les patients concernés remplissent rarement les critères ACR, en raison d’une très grande représentation de l’atteinte céphalique incluant notamment 3 items pouvant être liés à une atteinte de l’artère temporale. En effet, dans une étude de Muratore et al., ces critères étaient validés chez seulement 39% des patients avec une LV-GCA contre 95% des patients avec une forme céphalique (6).
Epidémiologie
Cette dichotomie entre forme crânienne et forme extra-crânienne est finalement mal connue et la fréquence de la forme extra-céphalique ainsi que sa distribution géographique sont difficiles à estimer compte tenu de l’hétérogénéité des explorations vasculaires et de l’absence d’évaluation systématique des vaisseaux de gros calibre au diagnostic dans de nombreux centres (2,7). Néanmoins, les patients atteints de LV-GCA semblent être plus jeunes (68,2 ± 7,5 ans versus 75,7 ± 7,4 ans ; p < 0,001). Il semble également y avoir une prédominance féminine plus marquée, un retard au diagnostic plus important (3,5 [2,0-7,2] mois versus 2,2 [1,2-3,7] mois ; p < 0,001) (6,8) et une tendance à observer des marqueurs inflammatoires biologiques moins élevés au diagnostic (6).
La prévalence de l’atteinte des vaisseaux de gros calibres chez les patients atteints d’ACG a beaucoup évolué ces dernières années, du fait d’une évaluation de plus en plus systématique des gros vaisseaux actuellement. Les premières études rétrospectives faisaient état d’une prévalence entre 3 et 15% selon les séries en se basant sur la symptomatologie clinique seule. Les séries plus récentes semblent retrouver, chez les patients atteints d’une forme crânienne d’ACG, une prévalence d’atteinte vasculaire périphérique de 68 à 83% avec une prédominance d’aortite thoracique (45-65%) (2,9), puis d’aortite abdominale (27-54%), d’atteinte inflammatoire
des carotides (17-62%), des artères sous-clavières (26-100%) et enfin des artères fémorales (12-53%) (9). Dans la cohorte de De Boysson et al., l’atteinte de l’aorte ou des vaisseaux périphériques concernaient environ 50% des patients suivis pour une ACG. Le nombre médian de territoire atteint était par ailleurs de 4 avec en premier lieu l’atteinte de l’aorte thoracique (80%) (3).
Cependant, l’atteinte périphérique est souvent asymptomatique. Sa recherche reste néanmoins pertinente d’autant que les complications vasculaires à type d’anévrismes de l’aorte et l’augmentation de la mortalité qui découlent de ces atteintes rendent leur dépistage primordial. De par leur fréquence et leurs conséquences potentielles, il est d’ores et déjà recommandé au diagnostic d’ACG de réaliser un angioscanner ou une angio-IRM de l’aorte (10–12).
Par ailleurs, il a été constaté que les formes extra-crâniennes d’ACG sont le plus souvent associées à des fortes concentrations de transcrits du gène IL-2 dans les tissus artériels et à une sur représentation de l’allèle HLA-DRB1*0404, témoin d’un mécanisme pathogénique différent (13).
Présentations cliniques
La présentation clinique des patients avec et sans atteinte de l’aorte et/ou des gros vaisseaux est significativement différente.
En effet, dans la cohorte rétrospective de De Boysson (3), les patients sans atteinte extra-céphalique présentaient des manifestations crâniennes plus fréquentes dont l’hypersensibilité du scalp (68 vs. 30%, p < 0,001) et la claudication de la mâchoire (83 vs. 25%, p < 0,001). Ces patients remplissent volontiers les critères ACR de 1990.
En revanche, les formes extra-céphaliques se manifestent plus volontiers par des signes généraux (malaise, fièvre, anorexie, perte de poids) (9). Certaines études décrivent une fréquence plus importante de la pseudo-polyarthrite rhizomélique (6) tandis que d’autres constatent un taux comparable (13). La symptomatologie et les signes cliniques tels qu’une claudication des membres inférieurs, un phénomène de Raynaud, des ischémies digitales, des signes d’ischémies cérébrales sont plus spécifiques mais moins classiques (9). Dans la cohorte rétrospective de Brack et al., les signes d’ischémie des membres supérieurs dominaient la présentation clinique des patients ayant une forme extra-crânienne d’ACG (13).

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Table des matières

PAGE DE COUVERTURE
REMERCIEMENTS
TABLE DES MATIERES
INTRODUCTION
Définitions et diagnostic
Épidémiologie
Différents phénotypes d’artérite à cellules géantes
Biopsie de l’artère temporale
Apport récent de l’imagerie
Evolution clinique en fonction du phénotype d’artérite à cellules géantes
Objectif
MATERIEL ET METHODES
Inclusion des patients
Analyses en sous-groupes
Définitions
Analyses statistiques
RÉSULTATS
Caractéristiques de la population étudiée
Examens complémentaires réalisés au diagnostic
Prise en charge thérapeutique
Évolution de la maladie
DISCUSSION
Points forts
Limites
Perspectives
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
RESUME ET MOTS CLÉS
SIGNATURES

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