Évaluer son projet pour l’offshore
Côté client, le succès des opérations en offshore dépend autant de la compréhension du fonctionnement de l’offshore et de la mentalité des collaborateurs dans ces pays que du choix du projet et de l’organisation mise en place pour le mener à bien. Ce chapitre se concentre sur la préparation du projet en interne chez le client et aborde les éléments les plus déter – minants pour juger de la qualification du projet à être confié à un prestataire en offshore. Pour démarrer un projet en offshore, il faut au préalable s’assurer que le management de la société soutient le projet et en connaît les objectifs et les conditions. Si les orientations sont mouvantes, certaines décisions importantes peuvent être remises en question, mettant parfois en danger le projet dans sa totalité. Par exemple, si le management considère la sécurité sur le site en offshore comme une priorité, il peut s’inquiéter qu’un projet n’ait pas mis en place un niveau de sécurité suffisant et aller jusqu’à l’arrêter. La simple décision de travailler avec l’offshore est parfois difficile à prendre du fait de ses multiples implications. Même si la décision est acquise au cours d’un comité de direction, sa mise en œuvre peut se révéler délicate, surtout si la décision n’a pas fait l’unanimité au sein du comité. La décision doit tenir compte de tous les aspects des développements en offshore : choix du projet, du prestataire, des équipes et des collaborateurs en interne, communication auprès des autres équipes, outils de gestion de projet, sécurité, investissements, etc. Si le comité découvre les problèmes au fur et à mesure qu’ils se posent, les décisions peuvent être remises en question. Dans certaines sociétés, cette décision doit remonter jusqu’au conseil d’administration à titre de direction stratégique. Les enjeux stratégiques de l’offshore pour la société doivent alors être clairement présentés et mesurés. La question spécifique du choix du prestataire est abordée en détail au chapitre 8 et n’est pas traitée dans le présent chapitre, bien qu’elle relève au premier chef de l’évaluation du projet. La position du responsable R&D Le responsable recherche et développement peut être personnellement opposé à l’offshore , pour de bonnes ou mauvaises raisons. Son opinion est d’une grande importance pour le succès des opérations en offshore. Il a de nombreuses raisons d’y être a priori opposé. Évaluer son projet pour l’offshore Conduite de projets informatiques offshore 138 Il peut percevoir cette initiative comme une perte de contrôle ou d’influence sur le développement et estimer qu’elle met en cause la qualité du travail passé. Il peut aussi s’imaginer que ses équipes de développement sont menacées ou, s’estimant peu armé pour gérer les projets efficacement en offshore, qu’il risque de se retrouver en situation d’échec. Si le responsable R&D est motivé par les réalisations plus que par les coûts, il est vraisemblable qu’il sera particulièrement réticent à utiliser des ressources en offshore. À l’inverse, s’il est pleinement impliqué dans la rentabilité des développements, il cherchera clairement à réaliser plus et à garantir la flexibilité de ses ressources, même si l’opération comporte certains risques. Dans la plupart des cas, un responsable R&D gère l’utilisation d’un budget. Il réalise avec fiabilité certains développements en utilisant les ressources à sa disposition et cherche à obtenir la meilleure productivité localement. Il peut se montrer exigeant, demander plus de travail et porter beaucoup de soins à gérer et suivre son activité. Le fait de viser 40 % d’économie ou plus en utilisant des ressources en offshore est une logique complètement différente. Le responsable R&D raisonne souvent en évolution par petits pas. L’acquis est rarement mis en question. Les plus grands changements qu’il ait à connaître sont d’embaucher une équipe pour un projet majeur, réduire la taille d’une équipe ou adopter une nouvelle technologie en conservant l’environnement global. Avec les développements en offshore, il s’agit de commencer une activité à partir de rien. Équipes, méthodes et modes de fonctionnement sont à reconsidérer en totalité. Pour beaucoup de responsables R&D, cela se traduit par des risques à prendre et peu à gagner, même si les gains apportés par l’offshore peuvent être importants pour la société. Pourtant, si le responsable R&D s’y oppose, la décision d’employer des ressources en offshore a peu de chances de réussir. Toute décision a donc des chances d’être remise en cause si le responsable R&D ne fait pas partie du comité de direction et que son avis ne soit connu qu’une fois la décision arrêtée. Il peut même lancer une véritable croisade contre l’offshore.
Les objectifs du client
Le client doit définir ses objectifs à court et à long terme. Le tableau 7.1 donne une idée des questions auxquelles il doit répondre avant de se lancer dans des opérations en offshore. Tableau 7.1. Questions stratégiques concernant l’offshore Catégorie Question Importance Implication en offshore Quelles sont les raisons qui poussent la société à sous-traiter en offshore ? 3 Quels seront les projets confiés en offshore ? 2 Quel pourcentage des développements sera réalisé en offshore à long terme ? 2 Livre Offshore.book Page 138 Lundi, 21. février 2005 7:44 19 Chapitre 7 – Évaluer son projet pour l’offshore 139 Catégorie Question Importance Budget Quelles sont les priorités budgétaires ? 2 Quelle économie vise-t-on en offshore ? 2 Dispose-t-on d’un ordre de grandeur des dépenses qui seront impliquées ? 2 Sécurité Quel est le niveau minimal de sécurité que l’on souhaite atteindre ? 3 Souhaite-t-on évaluer plusieurs solutions de sécurité et leur coût de façon à choisir celle qui convient le mieux au client ? 1 Projet test Veut-on réaliser un projet test ou souhaite-t-on démarrer sur un projet important ? 3 Quels enseignements espère-t-on du projet test ? 3 Quel serait le projet test ? 2 Management Qui va prendre en charge le management des opérations en offshore ? A-t-il suffisamment d’expérience ? 2 Est-il motivé pour l’offshore ? 3 Veut-on placer une personne de la société en offshore chez le prestataire offshore pour contrôler ou manager les équipes distantes ? 3 L’offshore complète-t-il les opérations locales ou est-il censé les remplacer partiellement et, si oui, de quelle façon ? 3 Souhaite-t-on se faire accompagner dans la mise en place ou le management des opérations en offshore ou embaucher une personne expérimentée sur l’offshore ? 2 Prestataire offshore Peut-on déjà décider du type de montage que l’on souhaite en offshore ? 2 Quelle taille d’équipe pense-t-on construire ? 3 Veut-on monter une équipe en offshore ou deux équipes ? 3 Y a-t-il des contraintes particulières que l’on souhaite prendre en compte ? 2 Méthodologie et procédures Quelle méthodologie veut-on mettre en œuvre ? La méthodologie locale peutelle être appliquée en offshore ? Quels documents a-t-on pour expliquer et supporter cette méthodologie ? 2 Souhaite-t-on utiliser une méthodologie standard comme RUP ou XP ? Si oui, comment ? 2 Souhaite-t-on se faire accompagner par un consultant pour la mise en place de la méthodologie retenue ? 2 Cette méthodologie sera-t-elle aussi appliquée en interne ? 2 Tableau 7.1. Questions stratégiques concernant l’offshore(suite) Livre Offshore.book Page 139 Lundi, 21. février 2005 7:44 19 Conduite de projets informatiques offshore 140 De ces décisions découle l’ensemble des actions fondatrices des opérations en offshore. Mieux vaut donc avoir l’essentiel des réponses aux questions du tableau avant de communiquer en interne sur l’initiative de l’offshore. Celles-ci doivent être consignées par écrit et conservées avec une confidentialité raisonnable. Si l’on change d’avis sur certaines d’entre elles, les solutions devront probablement être revues ou remises en question. Un des points essentiels de ce questionnaire est de déterminer ce que représente l’initiative de l’offshore pour la société. Ces développements distribués se limiteront-ils à des développements mineurs ou sont-ils censés devenir une direction majeure pour le client ? Il est bien évident que la mise en place de l’offshore sera très différente selon que l’on considère le prestataire comme une force d’appoint utilisée par période ou qu’il s’agit de construire un ensemble de ressources à utiliser pour la majorité des réalisations. Sans une définition globale des objectifs, il est très difficile de démarrer les opérations de préparation de l’offshore. Pour éviter de payer cher les premières expériences, il est utile de se faire accompagner par des personnes qui ont une réelle expérience de l’offshore. Les conseils de telles personnes peuvent éviter certaines erreurs qui sont très difficiles à corriger par la suite.