Évaluation d’un kit diagnostic des infections respiratoires basses à l’AP-HM, intérêt et application en médecine générale
Epidémiologie
La pneumonie aiguë, définie comme une infection du parenchyme pulmonaire d’évolution rapide, est une des pathologies infectieuses les plus fréquentes et les plus sévères. Il s’agit de la 5éme cause de décès toutes causes confondues dans le monde et la 1ère cause de décès par maladie infectieuse. On estime à 2,74 millions le nombre de décès par pneumonie aiguë en 2015 (1) dont 922 136 décès d’enfants de moins de 5ans (soit 15% des décès des enfants de cet âge) (2). Le nombre d’années de vie « perdues » (défini par DALYs : Disability Adjusted Life Years) qui en résulte est estimée à 103 millions (1). Au vu de ces données, la pneumonie aiguë reste de nos jours un problème de santé publique international et sa prise en charge une des priorités des organismes de santé mondiaux tels que l’OMS. La France n’est pas épargnée avec une incidence d’infections respiratoires basses évaluée à 200 000 cas par an (3) et une mortalité estimée à 19,1 pour 100 000 habitants en 2012 (mais atteignant des taux à 490 pour 100 000 habitants chez les patients âgés de plus de 60 ans et 2900 pour 100 000 habitants chez les patients âgés de plus de 85 ans) (4). En réponse au vieillissement de la population et à l’augmentation des maladies chroniques associées, l’incidence des pneumonies aiguës ne fait que croitre. Au Royaume Uni, le nombre d’hospitalisations pour pneumonie aiguë a augmenté de 34% de 1997 à 2005 (5). Actuellement les infections respiratoires basses engendrent en France environ 20 millions de consultations médicales par an. De plus, l’impact en terme de morbidité est majeur : les infections respiratoires sont la première cause de consommation d’antibiotiques en France (67% des prescriptions d’antibiotiques). Les infections respiratoires basses représentent quant à elle un quart de cette consommation (6). Elles sont également responsables de 9% des arrêts de travail de moins de 6 mois. 3 Les médecins généralistes sont souvent les premiers professionnels de santé concernés par les pneumonies puisque ces infections représentent 5% des motifs de consultation en médecine de ville et l’incidence des pneumonies est de 6,7 pour 1000 habitants (8). La prise en charge des pneumonies aiguës est actuellement un réel enjeu de santé publique en France ; le rôle du médecin généraliste en sa qualité de premier acteur et coordinateur de la chaîne de soins y est majeur.
Pathogènes
Les pathogènes responsables des pneumonies aiguës varient selon les conditions de vie, le terrain (âges extrêmes de la vie), la présence ou non de comorbidités (immunodépression, affection pulmonaire sous-jacente, troubles de la déglutition, tabagisme), les antécédents d’hospitalisation récente ou non (définissant l’origine communautaire ou nosocomiale de la pneumonie aiguë) ou encore le statut vaccinal de chaque patient. L’origine bactérienne est actuellement l’étiologie la plus fréquente (9). Streptococcus pneumoniae, responsable de 55,8% des décès par infections respiratoires basses des enfants de moins de 5 ans dans le monde est encore le principal pathogène documenté au cours des pneumonies aiguës , notamment en Europe . On peut également citer Haemophilus influenzae, Moraxella catarrhalis, Staphylococcus aureus, Klebsiella pneumoniae, certaines bactéries intra cellulaires : Mycoplasma pneumoniae, Chlamydia psittaci, Chlamydia pneumoniae, Coxiella burnetti et Légionella pneumophila comme principaux germes pourvoyeurs de pneumonies. Concernant l’étiologie virale, le rhinovirus, le Virus Respiratoire Syncytial (VRS), les virus de la grippe A et B, le virus para influenzae et le métapneumovirus (13 ; 12) sont les plus fréquemment retrouvés. Dans la littérature, des études épidémiologiques récentes soulignent l’augmentation de la prévalence des pneumonies aiguës d’origine virales. Elles sont souvent polymicrobiennes 4 et également associées dans certains cas à une infection bactérienne, remettant en doute la pathogénicité de ces virus respiratoires (11 ; 13).
Outils diagnostics actuels
L’ensemble des arguments cliniques, radiologiques et biologiques détenus par le clinicien sont très peu discriminants concernant l’étiologie microbiologique (14), élément essentiel dans la décision thérapeutique. Initialement, la culture bactérienne et les tests sérologiques étaient les seules techniques d’identification réalisables. Après les années 2000, de nouveaux moyens diagnostics se sont développés : la recherche d’antigènes urinaires dirigés contre le pneumocoque et la légionelle (15 ; 16), puis les techniques par PCR (Polymerase Chain Reaction). Il s’agit de techniques de biologie moléculaire permettant de sélectionner et d’amplifier en très grande quantité des fragments d’ADN cibles. Dans le cadre du diagnostic microbiologique, ce procédé permet d’identifier un pathogène par détection d’une séquence spécifique d’ADN qui lui est propre, et ce sur l’ensemble des prélèvements biologiques (sang, crachat, liquide pleural, écouvillon nasopharyngé). Actuellement, le (les) pathogène(s) sont identifiés dans 30 à 40% des cas de pneumonies aiguës . Plusieurs études ont mis en évidence la possibilité d’augmenter de façon considérable le nombre de diagnostics microbiologiques par l’utilisation combinée et systématique des techniques de culture, de sérologie et de PCR . Dans l’étude de Gadsby et Al. (19), un diagnostic microbiologique était établi dans 83% cas avec la technique par PCR contre 32% sans cette technique. Ces méthodes diagnostiques, de réalisation simple et accessibles (pratiquées dans l’ensemble des laboratoires biologiques), ne font cependant l’objet d’aucune recommandation officielle (20). Elles ne sont pas pratiquées en médecine de ville et le sont de manière encore trop aléatoire en médecine hospitalière et notamment aux urgences, où l’afflux de patients présentant une pneumonie aiguë est pourtant majeur.
I. INTRODUCTION |