EVALUATION DE LA PRESCRIPTION D’ANTIBIOTIQUES

EVALUATION DE LA PRESCRIPTION D’ANTIBIOTIQUES

Critères pharmacologiques et stratégiques du choix d’un antibiotique

Un deuxième objectif essentiel de l’antibiothérapie est d’être efficace au site de l’infection. Il faut donc que la concentration tissulaire de l’antibiotique soit au moins égale à la CMI (et si possible à la CMB) du germe visé. Cette condition dépend de plusieurs paramètres qui constituent la pharmacocinétique de l’antibiotique [19].  Spectre d’activité Le choix doit se faire en priorité pour des antibiotiques à spectre étroit : oxacilline pour une infection staphylococcique, pénicilline G pour une angine streptococcique. L’utilisation des antibiotiques à large spectre fortement inducteurs de résistance doit être limitée.  Absorption et diffusion Même en cas de biodisponibilité orale maximale (100 %), l’absorption reste en partie variable (état de vacuité gastrique, état hémodynamique ou interférences médicamenteuses). Cela fait habituellement réserver la voie orale aux infections les moins sévères ou au relais de la voie parentérale. Liaison aux protéines, taux sériques, volume apparent de distribution, demi-vie d’élimination sont autant de paramètres qui permettent de définir au mieux la dose unitaire et le rythme d’administration des antibiotiques[19]. La connaissance de critères d’absorption et de diffusion permet le choix d’un antibiotique efficace au niveau même du site de l’infection. Les sites les plus difficiles d’accès pour les antibiotiques sont le LCR, l’os, la prostate et les milieux oculaires.  Demi-vie sérique La demi-vie sérique de l’antibiotique choisi doit être connue du praticien, car elle permet de préciser l’intervalle d’administration de l’antibiotique : elle est de 30 minutes environ pour la pénicilline G (benzyl pénicilline) et supérieure à 24 h pour l’extencilline (benzatinebenzylpénicilline). La connaissance de la demi-vie sérique permet une meilleure adaptation du rythme d’administration et de la posologie[16,19].  Concentration sérique Elle peut être utile à déterminer pour mieux surveiller un traitement antibiotique. Chez certains patients présentant des tares au niveau rénal et/ou auditif, les dosages des aminosides au pic sérique et au pic résiduel permettent de maintenir les concentrations de l’antibiotique dans des seuils thérapeutiques et non toxiques[20].  Elimination Les antibiotiques sont éliminés essentiellement par la voie urinaire et/ou biliaire, sous forme métabolisée ou non. La connaissance de ces voies d’élimination est utile pour le traitement d’une infection urinaire ou hépatobiliaire et l’adaptation des posologies prescrites afin de prévenir la toxicité. En cas d’insuffisance hépatocellulaire, les antibiotiques à métabolisme hépatique prédominant sont à éviter car l’adaptation posologique ne peut être qu’empirique. 23  Index thérapeutique L’activité antibactérienne d’un antibiotique est caractérisée en pratique par la CMI et la CMB. La nécessité d’obtenir des concentrations efficaces et sous forme active au niveau du foyer infectieux rend indispensable la connaissance des propriétés pharmacocinétiques de chaque antibiotique et du rapport de la concentration d’antibiotique au site infectieux à la CMI. Ce rapport est l’index thérapeutique[20]. III.3 Critères individuels Le choix d’un antibiotique doit toujours prendre en compte le terrain :  Chez le nouveau-né et le nourrisson Il faut éviter les phénicolés, les cyclines, les sulfamides, les fluoroquinolones et utiliser en priorité les β lactamines, les macrolides et seulement en cas de nécessité, les aminosides.  Chez le sujet âgé Les aminosides sont à éviter chez le sujet âgé. Pour les antibiotiques à élimination rénale, il faut tenir compte de la diminution physiologique de la fonction rénale même à créatinine normale, la dose journalière doit être adaptée et diminuée quel que soit l’état de la fonction rénale.  Chez la femme enceinte Seuls les β lactamines et les macrolides peuvent être utilisés à tous les stades de la grossesse.  Chez l’allergique Une allergie confirmée médicalement et constatée par un médecin (œdème de Quincke, choc anaphylactique, rash cutané, réaction médicamenteuse) à un antibiotique, contre-indique formellement sa réutilisation ultérieure. Mais une 24 allergie à la pénicilline ne contre-indique pas formellement l’utilisation d’une céphalosporine ou d’un monobactame car le risque d’allergie croisée n’est pas systématique entre les différents bêtalactamines et quoi que faible n’est que de 5%.  Chez l’insuffisant rénal ou hépatique Les insuffisances rénale et hépatique nécessitent l’ajustement des doses d’antibiotiques (aminosides et insuffisance rénale) voire la contre-indication de certains (izoniazide et insuffisance hépatique).  Chez le granulopénique ou l’immunodéprimé L’antibiothérapie doit obligatoirement être bactéricide et prendre en compte les entérobactéries, le bacille pyocyanique et le staphylocoque. Un sujet immuno-compétent est souvent traité en monothérapie, alors qu’un immunodéprimé peut nécessiter une association d’antibiotiques.  Autres tares – Le diabète prédispose aux infections. – Le tabac prédispose aux infections respiratoires. – L’asplénie prédispose aux infections pneumococciques. – Un obstacle sur les voies urinaires (lithiase, adénome de la prostate) prédispose aux infections urinaires[20]. III.4 Critères toxicologiques A efficacité identique, il faut toujours prescrire l’antibiotique le moins toxique. Lorsque le risque toxique résulte d’un effet cumulatif (aminosides) les dosages sériques contribuent à la prévention du risque toxique[20]. 25 III.5 Critères écologiques Les antibiotiques, essentiellement ceux à large spectre, peuvent rompre l’équilibre de l’écosystème bactérien en détruisant la flore de barrière, principalement au niveau cutané et digestif. Ces antibiotiques sont inducteurs de résistance plasmidique, entrainant par pression de sélection, la prolifération de bactéries multirésistantes, hautement pathogènes et épidémiques. Chaque fois que cela est possible, il faut donc donner la priorité à l’utilisation des antibiotiques à spectre étroit et éviter les antibiotiques à spectre large fortement inducteurs des résistances (amino-pénicillines, cyclines, phénicolés, céphalosporines et aminosides). Certaines molécules sont à proscrire en monothérapie car ils entraînent rapidement la sélection des mutants résistants[20]. III.6 Critères économiques A efficacité et tolérances égales, il faut toujours donner la préférence à l’antibiotique le moins coûteux[18]. III.7 Monothérapie ou association La prescription d’une monothérapie ou d’une association d’antibiotique représente un des éléments du bon usage des antibiotiques. Les prescriptions abusives des associations constituent une des principales causes d’antibiothérapies inappropriées. Dans une étude prospective tunisienne, 13% des prescriptions d’antibiotiques de première intention en ville comportaient une association d’antibiotiques. Ces associations étaient non justifiées dans tous les cas. 26 L’association d’antibiotiques n’est pas toujours utile, une monothérapie bien choisie est souvent suffisante dans les situations courantes en pratique de ville. Elle est également possible au cours des infections de gravité moyenne de l’immunocompétent lorsque le germe est très sensible et le foyer infectieux est facilement accessible.

Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE: GENERALITES SUR LES ANTIBIOTIQUES
I.HISTORIQUE, CLASSIFICATION ET MECANISMES D’ACTION
I.1 DEFINITION
I.2 HISTORIQUE
I.3 CLASSIFICATION ET MECANISMES D’ACTION
I.3.1.Classification
I.3.1.1 Bêta-lactamines
I.3.1.2 Cyclines
I.3.1.3 Aminosides
I.3.1.4 Macrolides
I.3.1.5 Quinolones
I.3.1.6 Autres familles d’antibiotiques
I.3.2. Mécanismes d’action
I.3.2.1. Inhibition de la synthèse de la paroi bactérienne
I.3.2.2. Action sur la membrane
I.3.2.3. Inhibition de la synthèse protéique
I.3.2.4. Inhibition de la synthèse ou de la réplication d’acides nucléiques
I.3.2.5. Inhibition de la synthèse des folates
II. RESISTANCE AUX ANTIBIOTIQUES.
II.1 Résistance naturelle
II.2 Résistance acquise
III. CRITERES DE CHOIX D’UN ANTIBIOTIQUE
III.1 Critères bactériologiques
III.2 Critères pharmacologiques et stratégiques du choix d’un antibiotique
III.3 Critères individuels
III.4 Critères toxicologiques
III.5 Critères écologiques
III.6 Critères économiques
III.7 Monothérapie ou association
DEUXIEME PARTIE : PRESCRIPTION D’ANTIBIOTIQUES AU SERVICE DES URGENCES DE L’ETABLISSEMENT PUBLIC DE SANTE DE MBOUR
I. OBJECTIFS
I.1 Objectif général
I.2 Objectifs spécifiques
II. CADRE ET PERIODE DE L’ETUDE
II.1 Présentation du cadre de l’étude
II.2 Période de l’étude
III.MATERIEL ET METHODES
III.1 Type d’étude
III.2 Population d’étude et critères d’éligibilité
III.3 Taille de l’échantillon
III.4 Recueil des données
IV. RESULTATS
IV.1 Données démographiques
IV.1.1 Distribution des patients selon le sexe
IV.1.2 Distribution des patients selon l’âge
IV.2 Principales affections diagnostiquées
Figure 12: Fréquence des diagnostics
IV.3 Prescription d’antibiotiques
IV.4 Principales bactéries isolées et profils de sensibilité aux antibiotiques
IV.4.1. Profil de sensibilité de Acinetobacter spp (A. spp)
IV.4.2. Profil de sensibilité de K. oxytoca
IV.4.4. Profil de sensibilité de K. pneumoniae
IV.4.5. Profil de sensibilité de P. aeruginosa
IV.4.6. Profil de sensibilité de S. saprophiticus
V. DISCUSSION
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
Annexes

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