Etudes sur Centella asiatica

Madagascar fait partie d’une douzaine de pays à « mégabiodiversité » grâce à l’originalité exceptionnelle de ses écosystèmes, de sa faune et de sa flore dont le degré d’endémicité élevé est estimé à 80-86 % pour les espèces de plantes recensées [PNUD, 2002]. Sur les 12 000 espèces végétales comptabilisées, 18,95%, soit plus 2 250 espèces recensées, sont des plantes médicinales [Randrianary, 2005]. Les écosystèmes rencontrés à Madagascar abritent des ressources phytogénétiques considérables pour l’alimentation, l’agriculture et la médecine traditionnelle [PNUD, 2002].

Centella asiatica Urb. (L.) est l’une des plantes les plus usitées dans la pharmacopée malgache. Elle est connue à Madagascar sous le nom de « Talapetraka ». Centella asiatica est originaire du sous-continent indien et pousse sur les hauts plateaux et dans les zones tropicales humides [Rouillard-Guellec et coll, 1997]. Outre ses multiples utilisations, elle est particulièrement connue pour sa propriété cicatrisante [Bruneton, 1999] attribuée aux acides triterpèniques et à ses dérivés glycosides [Rouillard-Guellec et coll, 1997].

Les endophytes contrairement aux épiphytes, microorganismes vivants à la surface des plantes, sont des microorganismes vivants à l’intérieur des tissus d’une plante sans causer de conséquences néfastes immédiates à la plante hôte [Sinclair et Cerkauskas, 2000]. Ces microorganismes endophytes peuvent être des bactéries et/ou des champignons capables de coloniser tous les tissus des différentes parties de la plante (racines, tiges, feuilles, fleurs). Les interactions plante hôte microorganismes endophytes font l’objet de plusieurs recherches [Redlin et Carris, 1996] car les endophytes sont des sources potentielles de molécules nouvelles et utiles pour l’agriculture, l’agroalimentaire, la médecine et la biotechnologie [Strobel et Daisy, 2003]. Des endophytes ont été isolés sur un bon nombre de plantes médicinales dont les molécules actives responsables de leurs activités pharmacologiques sont connues. Il importe alors de vérifier si les activités thérapeutiques observées chez les plantes médicinales sont liées à la présence des microorganismes endophytes en stimulant la synthèse des molécules actives. Il a été rapporté également que certains endophytes sont parfois capables de produire des molécules actives similaires à celles produites par la plante hôte [Strobel et Daisy, 2003]. Strobel et ses collaborateurs (2003) ont réussi à extraire des produits naturels à partir de microorganismes endophytes et aussi à tester les activités biologiques des produits extraits. Des substances bioactives importantes tels que des produits antibiotiques, antiviraux, antioxydants, des agents anticancéreux et des composés antidiabétiques et immunosuppressifs ont été isolées.

Etudes sur Centella asiatica

Systématique [Benson, 1959]

Règne : VEGETAL
Sous Règne : EUCARYOTES
Embranchement : CORMOPHYTES
Classe : ANGIOSPERMES
Sous Classe : DICOTYLEDONES
Ordre : OMBELLIALES
Famille : APIACEAE
Genre : Centella
Espèce : asiatica
Noms vernaculaires :
Talapetraka, Tamatanovotry (Madagascar)
Cocheléaria du pays (La Réunion)
Bevilaqua, Boileau (Maurice) .

Répartition géographique

La plante est initialement découverte en Inde mais se rencontre aussi dans les îles de l’Océan Indien et les régions tropicales (Madagascar, Maurice, La Réunion). Elle pousse dans les zones ombragées, plutôt humides, au bord des fossés et à une altitude de l’ordre de 600 mètre. A Madagascar, elle est surtout localisée sur les Hauts Plateaux et la côte Est [Rouillard-Guellec et coll, 1997].

Utilisations thérapeutiques traditionnelles, pharmaceutiques et cosmétiques

Les plantes de la famille des Ombellifères sont connues par leurs différentes propriétés médicinales et cosmétiques. Centella asiatica (L.) Urb. fait partie de cette famille, elle est connue spécialement par ces hautes propriétés médicinales [Babu et coll, 1995].

❥ Composition chimique de la plante

L’analyse phytochimique de Centella asiatica montre que la plante entière contient des alcaloïdes, des tanins, des coumarines, des triterpènes et des traces de saponoïdes. L’analyse phytochimique des feuilles de la plante montre qu’elles contiennent des flavonoïdes, des polyphénols, des stéroïdes, des saponines, des stérols insaturés et des désoxy2-sucres.

Cependant, il est à remarquer que la plante entière renferme plusieurs triterpènes saponines et sapogénines. Le triterpène saponine majoritaire serait l’asiaticoside dont la sapogénine serait l’acide asiatique. L’extrait alcoolique de la plante contient des huiles grasses (glycéride oléique, linoléique, lignocérique, palmitique et stéarique), le sistostérol, des tanins et des substances résineuses. Un alcaloïde, l’hydrocotyline a été répertorié dans la plante sèche. Les feuilles et les racines contiennent un principe amer, la vellarine et l’acide pectique ainsi qu’une résine. Il faut signaler toutefois que la composition chimique des plantes varie avec sa situation géographique. La plante qui pousse à Madagascar, contient l’asiaticoside tandis que la plante qui pousse au Sri Lanka, ne contient pas d’asiaticoside mais un composant voisin, le centelloside et des acides triterpéniques: centoique et centellique.

La plante renferme aussi des saponines: isothankuniside, thankuniside et des triterpènes notamment les acides: brahmique, isobrahmique, isothankunique, madasiatique, médicassique et thankunique.

Centella asiatica, provenant de Madagascar, contient aussi des triterpènes dont les acides madasiatique et madécassique. Ce dernier est aussi répertorié chez Centella de l’Inde et dénommé acide brahmique. Une saponine voisine du madécassoside a été identifiée dans le Centella qui pousse en Chine. Ces triterpènes sont dérivés de l’acide ursénoique qui contient le noyau ursane. En plus de ces triterpènes, d’autres composés mono et sesquiterpéniques ont été répertoriés dans la plante comme alpha-pinène, béta-pinène, myrcène, gamma terpinène, l’acétate de bornyl, alpha-copaène, béta-élémène, béta-caryophyllène, trans-béta-farnésène, germacrène-D qui seraient les composants majeurs. Divers polyacétylènes aussi bien que le quercétine-3-glucoside et le kaemférol-3 glucoside sont répertoriés dans la plante [FuribFakim et Guého, 1990].

❥ Utilisations thérapeutiques traditionnelles

Centella asiatica est d’utilisation ancienne en Inde, pour le traitement des plaies, et est actuellement sous forme d’extrait titré prescrite en phlébologie et en dermatologie pour traiter les brûlures, les cicatrices, les plaies et les lésions cutanées diverses. Les saponines exhiberaient une activité sédative importante. L’extrait de la plante entière serait aussi insecticide [Furib-Fakim et Guého, 1990].

Cette plante est utilisée dans différents pays en médicine traditionnelle comme cicatrisant, contre la lèpre, la gale, les ulcères et la syphilis. Pour ces différentes utilisations, la plante est utilisée telle qu’elle, c’est-à-dire que la feuille est appliquée directement sur la plaie ou broyée ou en infusion avec de l’eau tout simplement. La plante a d’autres vertus thérapeutiques, et elle est notamment utilisée dans les traitements suivants :
1. traitement symptomatique des troubles fonctionnels de la fragilité capillaire cutanée,
2. traitement des manifestations subjectives de l’insuffisance veineuse (jambes lourdes) et hémorroïdaire,
3. traitement d’appoint adoucissant et antiprurigineux des affections dermatologiques, traitement contre les piqûres d’insectes comme trophique protecteur,
4. traitement en cas d’érythème solaire, de brûlures superficielles ou peu étendues et en cas d’érythèmes fessiers [Bruneton, 1999].

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❥ Utilisations pharmaceutiques

La connaissance des différents composés se trouvant dans la plante ouvre des voies importantes dans son utilisation pharmaceutique de cette plante. Centella a une teneur importante en triterpènes, particulièrement en acides triterpèniques bioactives [Inamdar et coll, 1996] (acide asiatique et acide madécassique) et leurs glycosides (asiaticoside et madécassoside) [Rouillard-Guellec et coll, 1997]. L’asiaticoside est rapporté comme étant actif contre la bactérie responsable de la lèpre: Mycobacterium leprae, in vivo et in vitro. Il fragilise la membrane de la bactérie devenant alors plus susceptible aux médicaments. L’asiaticoside agit également contre Mycobacterium tuberculosis. Les acides madécassique, asiatique, et l’ asiaticoside, composés triterpèniques responsables de l’activité cicatrisante de Centella manifesteraient des effets cicatrisants après application sur une plaie ou une brûlure [Furib-Fakim et Guého, 1990].

Mise à part l’activité cicatrisante, la plante est aussi connue pour ses effets biologiques divers (antibiotique, antivirale, anti-inflammatoire, antiallergique) grâce à ses composés phénoliques notamment les flavonoïdes [Zainol et coll, 2002]. Les extraits aqueux, éthanoliques, basiques et acides de la plante seraient antifongiques contre Trichophyton rubrum et Aspergillus niger, in vitro. De plus, l’extrait éthanolique serait antiviral contre les souches Murine cytomégalovirus (MCMV) et le Sindbis virus (SV) à une concentration minimale de 125 et 65 (µg/ml) respectivement [Furib-Fakim et Guého, 1990].

La plante a une activité antioxydante. Cette activité est attribuée aux composés phénoliques par leur facilité à céder des atomes d’hydrogène aux radicaux libres dont les activités sont supérieures à celles des composés antioxydants naturels (α tocophérol) [Zainol et coll, 2003]. L’extrait méthanolique de Centella asiatica contient aussi des enzymes antioxydantes [A. Gnanapragasam et al, 2004] tels que les superoxyde dismutases (SOD), catalases et le glutathion peroxydase (GSHPx) [Jayashree et coll, 2003].

Compte tenu de ces différentes activités, Centella asiatica (L.) Urb. entre dans la composition de nombreux médicaments ou phytomédicaments comme adjuvant (médicaments essentiellement à base de plantes). Les spécialités contenant cette plante et produites par l’IMRA sont par exemple :

− O.F.A (Ody Fery Anaty)
Utilisations : Contre les ulcères de l’estomac et de l’intestin, l’hyperchlorhydrie, la flatulence, le ballonnement abdominal, les rectorragies des dysentéries amibiennes, les ankylostomiases et les hémorroïdes.
− T.O.F.A (Tsifady Ody Fery Anaty)
Utilisations : Cicatrisant et anti-infectieux
− POMMADE MEVA
Utilisations : Contre les brûlures, les coups de soleil, les plaies traumatiques et opératoires, ulcères chroniques (jambes variqueuses, éléphantiasis, lèpre, tuberculose cutanée) et les mycoses cutanées.
− MADECASSOL
Utilisation : Cicatrisant [Navarron, 1976] .

❥ Utilisations cosmétiques

Centella astiatica est utilisée dans différents produits cosmétiques grâce à ses propriétés adoucissantes, calmantes, réparatrices et antirides [Rouillard-Guellec et coll, 1997]. L’IMRA a mis aussi sur le marché national une crème antiride appelée MAVANA active pour le traitement de la peau sèche.

Table des matières

I. INTRODUCTION
II. ETUDES BIBLIOGRAPHIQUES
II.1 Etudes sur Centella asiatica
II.1.1 Systématique
II.1.2 Description botanique
II.1.3 Répartition géographique
II.1.4 Utilisations thérapeutiques traditionnelles, pharmaceutiques et cosmétiques
II.2 Etudes sur les microorganismes endophytes
II.2.1 Généralités
II.2.1.1 Définitions
II.2.1.2 Mode de transmission des endophytes dans la plante
II.2.2 Notions différentielles entre pathogènes latents, phytopathogènes et endophytes symbiotiques
II.2.3 Isolement des champignons endophytes
II.2.4 Identification des champignons
II.2.5 Conservation des champignons
II.2.6 Intérêt de l’étude des endophytes
II.2.6.1 Relation entre plantes et endophytes
II.2.6.2 Relation entre endophytes et phytopathogènes
II.2.6.3 Diversités biologiques des microorganismes endophytes
II.2.6.4 Sources potentielles de nouvelles molécules utiles pour l’homme et l’agriculture
III. METHODOLOGIE
III.1 Première étape : Production de métabolites secondaires
III.1.1 But
III.1.2 Principe
III.1.3 Mode opératoire
III.1.3.1 Matériels utilisés
III.1.3.2 Régénération des souches
III.1.3.3 Cultures fermentatives
a. Production de biomasse
b. Production des métabolites secondaires en présence d’inducteur
c. Production des métabolites secondaires sans inducteur
III.2 Deuxième étape : Extraction des métabolites secondaires
III.2.1 But
III.2.2 Principe
III.2.3 Mode opératoire
III.2.3 1 Matériels utilisés
III.2.3.2 Traitements physiques
III.2.3.3 Traitements chimiques
III.3 Troisième étape : tests d’activités antibactériennes et antifongiques
III.3.1 But
III.3.2 Principes
a. Méthode de diffusion sur gélose
b. CCM bioautographie directe sur plaque de silice avec C. cucumerinum
III.3.3 Mode opératoire
III.3.3.1 Matériels utilisés
III.3.3.2 Tests antimicrobiens (méthode de diffusion sur gélose)
III.3.3.3 Tests antifongiques sur les champignons filamenteux
a. Méthode de diffusion sur gélose
b. CCM bioautographie directe sur Cladosporium cucumerinum
III.4 Quatrième étape : Screening chimique sur CCM
III.4.1 But
III.4.2 Principe
III.4.3 Mode opératoire
III.4.3.1 Matériels utilisés
III.4.3.2 Migration sur plaque de silice
III.4.3.3 Révélations
IV. RESULTATS
IV.1 Régénération des souches
IV.2 Production et extraction des métabolites secondaires
IV.3 Activités antimicrobiennes par la méthode de diffusion sur gélose
Tables de matières
IV.3.1 Activités antibactériennes
IV.3.2 Activités antifongiques
IV.4 Activité antifongique par CCM bioautographie directe sur C. cucumerinum
IV.5 Screening chimique sur CCM
V. DISCUSSIONS
V.1 Production de biomasse
V.2 Production de métabolites secondaires
V.3 Extraction de métabolites secondaires
V.4 Tests d’activités antimicrobiennes
V.4.1 Méthode de diffusion sur gélose
V.4.2 Méthode de CCM bioautographie directe sur plaque de silice sur C. cucumerinum
V.4.3 Effet de l’ajout d’inducteur dans la culture fermentative sur les activités antimicrobiennes
V.5 Recherche de quelques familles chimiques dans les extraits actifs
VI. CONCLUSIONS
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXES

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