Etudes des galaxies lointaines et optiques adaptatives tomographiques pour les ELT

Etudes des galaxies lointaines et optiques adaptatives tomographiques pour les ELTs

Morphologie des galaxies

Propriétés morphologiques des galaxies

Les galaxies de l’Univers local sont regroupées en deux grandes catégories : les galaxies elliptiques (E) d’une part et les galaxies spirales (S) d’autre part. Chacune de ces catégories étant subdivisée en sous-catégories. Les galaxies elliptiques sont divisées selon leur  ellipticité e = (a − b/a) o`u a et b sont respectivement les grand et petit axes de l’ellipse observée en projection sur le ciel. Elles sont notées En, o`u n = 10e, n étant compris entre 0 et 7. Les galaxies spirales, elles, sont subdivisées en spirales barrées (SB) et non barrées. Le disque présente généralement des bras spiraux qui se rattachent au bulbe. Selon l’importance relative du bulbe par rapport au disque, les galaxies sont classées de Sa à Sc. Le lien entre les spirales et les elliptiques est introduit par une troisième catégorie de morphologie intermédiaire : les galaxies lenticulaires notées S0. Ces dernières présentent un bulbe important et un petit disque mais pas de bras de spiraux (Hubble, 1936). Enfin, toutes les galaxies qui n’entrent pas dans ces catégories sont regroupées dans une catégorie supplémentaire : les galaxies irrégulières (Shapley et Paraskevopoulos, 1940). On représente généralement les galaxies selon une séquence qui va des elliptiques aux spirales, on parle alors de séquence de Hubble (Cf. Fig. 2.1). Une revue complète sur le sujet est présentée dans Sandage (2005). Fig. 2.1 – Classification de Hubble des galaxies. De gauche à droite on trouve les galaxies elliptiques (E), les lenticulaires (S0) puis les deux branches des Spirales (Sp) barrées ou non et enfin les Irrégulières (Irr). 

Méthodes d’analyses morphologiques

Les méthodes de classification morphologique sont abondamment étudiées et utilisées en astronomie. Cette section tente de résumer les principales méthodes, leurs spécificités ainsi que leurs limites (voir aussi le § 2.3). Classification Visuelle La première méthode historiquement utilisée fut une méthode de classification visuelle par Hubble (1926). Elle est construite selon l’analyse de trois critères que sont : (1) la taille ou l’importance du bulbe par rapport au disque, (2) la forme des bras spiraux, (3)  le degré de résolution des bras spiraux. Selon l’appréciation de l’observateur à évaluer ces critères, on assigne un type morphologique à la galaxie étudiée. La principale limite aux classifications visuelles est leur caractère subjectif. Naim et al. (1995) montrent par exemple que pour un même échantillon étudié par différents observateurs, les disparités des résultats sont non négligeables et augmentent lorsque la résolution des images diminue. De fait, l’autre limitation des classifications visuelles est qu’elles sont difficilement transposables à l’étude des galaxies lointaines et ce, pour trois raisons principales : 1. Les galaxies sont de moins en moins résolues à mesure que l’on s’intéresse à des redshift croissants. Non seulement les galaxies sont intrinsèquement plus petites, mais l’effet de projection les rend de moins en moins discernables. Il devient dès lors difficile de distinguer les différences entre les objets et les erreurs de classification sont donc plus fréquentes. 2. L’effet de “dimming Factor” affecte la surface de brillance des objets d’un facteur (1 + z) 4 . Ainsi, pour un temps de pose donné, on risque de perdre les structures à faible brillance de surface lorsque l’on s’intéresse à des galaxies plus éloignées. 3. La “K-correction” morphologique, due au décalage spectral, fait apparaˆıtre les galaxies distantes à des longueurs d’ondes plus courtes que la longueur d’onde d’observation. Une même galaxie observée à différents redshifts dans un filtre donné changera d’aspect car les populations stellaires sondées par ce filtre seront différentes (Cf. Fig.2.2). Fig. 2.2 – Illustration de l’effet de “K-correction”. Inspiré de Conselice et al. (2008) Pour limiter la subjectivité des classifications, mais aussi pour pouvoir traiter de grandes quantités de données rapidement et de manière reproductible, des méthodes assistées par ordinateur se sont développées. L’idée sous-jacente à toutes ces méthodes est de  trouver des paramètres communs aux galaxies qui puissent être mesurés facilement avec l’outil informatique. Les méthodes paramétriques La première grande classe d’outils pour l’analyse morphologique regroupe les méthodes paramétriques. Le but de ces méthodes est d’ajuster un ou plusieurs modèles analytiques connus à la distribution de lumière observée. L’ajustement se fait généralement par la minimisation d’un χ 2 . A partir du meilleur modèle, on remonte alors à des paramètres physiques tels que le flux, la taille, la forme, l’orientation… Mais généralement, ces méthodes sont utilisées pour déterminer le rapport entre le flux associé au bulbe, normalisé au flux total ( % de bulbe noté rapport B/T) car celui-ci est fortement corrélé avec le type morphologique. En effet, une galaxie elliptique aura un B/T proche de 1, alors qu’une galaxie de type tardif aura un B/T plutˆot proche de 0. On donne par exemple dans la Table 2.1 une correspondance entre type morphologique et rapport B/T tiré de Kent (1985). Type E S0 Sa Sb Sc B/T 1 0.65 0.5 0.25 0.1 Tab. 2.1 – Relation entre le rapport B/T et le type morphologique. Tiré de Kent (1985) Les premières méthodes ainsi développées utilisent le profil de luminosité moyen, ou une coupe selon un axe particulier, on parle alors de méthode à une dimension. Le profil de luminosité est ensuite ajusté par la combinaison d’un modèle de disque et un modèle de bulbe. Le disque est modélisé par une loi exponentielle de type f(r) = f0e −(r/rd) o`u f0 est le flux au centre de la galaxie et rd le rayon de disque. Le bulbe est modélisé soit par une loi dite de “de Vaucouleurs” (de Vaucouleurs, 1948) de type f(r) = fee (−r/re) 1/4 o`u re est le rayon effectif et fe le flux au rayon effectif, soit par une loi de Sersic (Sersic, 1968). Dans ce cas, la puissance 1/4 est remplacée par une puissance en 1/n et n (l’indice de Sersic) doit alors aussi être ajusté. Les méthodes 1D ont principalement été utilisées pour les galaxies de l’Univers local (e.g. Kormendy (1977), Burstein (1979), Boroson (1981), Kent (1985), Pignatelli et al. (2006)) et peu pour l’étude morphologique des galaxies plus distantes. En effet, la principale limite de ces méthodes réside dans la technique utilisée pour passer de la distribution bidimensionnelle au profil 1D. Généralement, on utilise la répartition des isophotes pour le choix de l’orientation des axes. Cependant, de nombreuses galaxies distantes présentent des irrégularités dans leurs isophotes, ou une orientation de ces isophotes qui change avec le rayon. Il devient donc périlleux de restreindre la distribution de lumière à un profil 1D.  Fig. 2.3 – Exemple d’ajustement Bulbe / Disque. Tirés de Kent (1985) (en haut) et de Boroson (1981) (en bas). Kent (1985) étudie le profil de luminosité selon le grand axe et le petit axe de la galaxie. Boroson (1981) étudie des profils moyens calculés dans des ouvertures elliptiques. La solution consiste alors à considérer l’ensemble de la distribution de la lumière pour contraindre les modèles. Dans ce cas, on parle de méthode d’ajustement 2D (e.g. Schade et al. (1995, 1996); de Jong (1996); Simard (1998); Trujillo et al. (2001); Peng et al. (2002); de Souza et al. (2004)). Les paramètres ajustables sont plus nombreux que dans le cas 1D, il est donc nécessaire d’avoir des images o`u les objets sont non seulement bien résolus, mais aussi pour lesquels le rapport signal à bruit est bon afin d’éviter les possibles dégénérescences (e.g. Simard et al. (2002); H¨aussler et al. (2007) pour une discussion sur l’impact du rapport signal à bruit). Limiter le nombre de paramètres libres est aussi une alternative afin de réduire les possibles dégénérescences. Par exemple, Ravindranath et al. (2004); Barden et al. (2005) proposent d’utiliser une classification morphologique uniquement sur la base de l’indice de Sersic n. Selon la valeur de n, ils distinguent les galaxies de  type sphéro¨ıdal (n > 2.5) des galaxies de type tardif (n < 2.5). Cependant, Cassata et al. (2005) et Sargent et al. (2007) montrent qu’une telle classification est incertaine et moins robuste qu’une classification basée sur l’indice B/T. L’autre principale limite de ces méthodes est qu’elles font l’hypothèse sous-jacente que la distribution de lumière des galaxies est symétrique et lisse. De fait, toutes les structures asymétriques tels que les bras spiraux, les régions de formation d’étoiles ou les galaxies en cours de fusion ne seront pas ou mal ajustées. Généralement, on contraint la qualité de l’ajustement par la valeur du χ 2 résiduel. Les galaxies pour lesquelles l’ajustement n’est pas bon ont un χ 2 résiduel plus élevé que les galaxies régulières. On pourrait alors penser utiliser ce paramètre pour différencier les galaxies régulières des galaxies irrégulières. Mais celui-ci ne fait pas la différence entre des irrégularités dues à des bras spiraux et de vraies irrégularités. Il n’est donc pas concluant concernant l’état d’irrégularité des galaxies. C’est ce que l’on montre dans l’article Neichel et al. (2008) : une galaxie spirale clairement identifiée comme telle peut avoir le même χ 2 qu’une galaxie de type irrégulier. Le χ 2 résiduel ne peut être utilisé comme un indicateur du type morphologique. Une méthode plus intéressante consiste à prendre en compte les résidus de l’ajustement dans la classification morphologique (e.g. de Souza et al. (2004)). Cela implique d’inspecter les objets un à un, ce qui n’est parfois pas évident, notamment dans le cas de grand échantillon de galaxies. Toutefois, l’information contenue dans les résidus est tout aussi importante que la distribution de flux originale et ce, notamment, pour faire la distinction entre de vraies irrégularités et des bras spiraux par exemple. La Fig. 2.4 illustre un exemple de décomposition bulbe/disque pour une galaxie spirale. La première ligne montre l’image originale, le meilleur modèle et les résidus. La carte des résidus montre clairement les bras spiraux qui n’ont pas été pris en compte dans le modèle. La deuxième ligne montre le profil de luminosité selon le grand axe de la galaxie. En conclusion, l’analyse paramétrique de la distribution de lumière fournit une source riche d’informations sur la morphologie des galaxies, mais elle nécessite une interaction et une inspection minutieuse des résultats. Il faut parfois plusieurs itérations sur une même galaxie avant d’obtenir une solution optimale. C’est pourquoi l’analyse des grands échantillons de galaxies se base plus souvent sur des méthodes non paramétriques. Les méthodes non paramétriques Au contraire des méthodes paramétriques, les méthodes dites non paramétriques analysent directement la distribution de lumière des galaxies sans “à priori” sur sa distribution. L’idée générale de ces méthodes est d’utiliser des quantités liées à la distribution de lumière pour remonter au type morphologique de l’objet étudié. S’il existe une corrélation forte entre ces paramètres et le type morphologique, on peut les utiliser comme indicateur morphologique.  Fig. 2.4 – Exemple de décomposition Bulbe / Disque par ajustement d’un modèle 2D. En haut et de gauche à droite : distribution originale de luminosité, modèle calculé et résidus de l’ajustement. En bas : profil de luminosité original et ajusté selon le grand axe de la galaxie exprimé en flux (à gauche) et en magnitude (à droite). Bien que ces méthodes n’utilisent pas d’à priori sur la distribution de lumière dans les galaxies, elles nécessitent un étalonnage à partir de galaxies dont le type morphologique est connu. C’est à partir de cet étalonnage que l’on peut extrapoler pour des galaxies de types morphologiques à déterminer. Les premiers paramètres (historiquement) ainsi utilisés furent la brillance de surface moyenne, le rayon contenant la moitié de la lumière et la concentration de lumière. Cette dernière étant définie soit comme le rapport entre deux rayons contenant chacun une fraction de la lumière totale, soit comme le rapport de deux flux à l’intérieur de deux isophotes. Plusieurs définitions de l’indice de concentration co-existent dans la littérature, toutes plus ou moins équivalentes. Fondamentalement, il faut que le rayon interne soit suffisamment grand pour inclure un grand nombre de pixels et que le rayon extérieur ne soit pas trop grand afin d’éviter d’inclure du flux provenant du fond de ciel. Le rayon maximum est généralement défini à partir d’un niveau de signal au dessus du bruit du fond de ciel. Typiquement, tous les pixels ayant un flux supérieur à N fois la valeur du bruit de l’image σ sont retenus, avec N qui vaut quelques unités. Pour l’étude des galaxies distantes, le problème d’une telle définition est qu’elle est fortement sensible à l’effet de “Cosmological Dimming”. Pour s’affranchir de tels effets, Bershady et al. (2000) utilisent un rayon normalisé : le “Petrosian Radius” (Petrosian, 1976). Celui-ci est défini comme étant le rayon rp à partir duquel le rapport entre le flux moyen dans le rayon rp et le flux  au rayon rp égale une valeur prédéterminée η : η = I(rp) hI(r < rp)i (2.1) On choisit généralement η = 0.2. Dans la suite, nous retiendrons les définitions de Concentration introduites par Kent (1985) et par Abraham et al. (1994), car ce sont celles qui sont effectivement le plus souvent utilisées : C = 5log  R0.8 R0.2  C = P P i,jǫE(α) Ii,j P P i,jǫE(1) Ii,j (2.2) L’utilisation de la Concentration comme paramètre morphologique est relativement ancienne. Elle est introduite par Morgan et Mayall (1957) dans le système de classification “Yerkes”. Ceux-ci montrent que la concentration de lumière est corrélée avec les populations stellaires : les galaxies ayant la concentration la plus faible ont plutˆot les propriétés spectroscopiques des galaxies de type tardif, quant aux galaxies ayant la concentration la plus élevée, elles ont des propriétés spectroscopiques de type précoce. L’idée sous-jacente est que les galaxies de type précoce (les elliptiques) sont les systèmes les plus concentrés en terme de lumière ; cette concentration de lumière décroˆıt avec l’évolution vers des types plus tardifs. C’est une conséquence directe de la distribution de lumière des galaxies, la concentration est corrélée avec B/T (Conselice et al., 2003). La concentration sera dans la suite principalement utilisée en regard de la brillance de surface moyenne < µ > (e.g. de Vaucouleurs (1977); Okamura et al. (1984); Kent (1985); Doi et al. (1993); Abraham et al. (1994)). Par exemple, Doi et al. (1993) montrent qu’une ségrégation des galaxies par un plan < µ > −C permet de retrouver une classification à l’oeil avec un taux de réussite de l’ordre de 85%. Abraham et al. (1994) montrent qu’une classification basée sur < µ > −C est plus robuste aux effets de seeing qu’une classification à l’oeil et qu’elle pourrait être utilisée jusqu’à z∼0.5. La principale limite de l’utilisation du plan < µ >-C est que la brillance de surface dépend beaucoup du redshift des galaxies, notamment à cause de l’effet de “cosmological dimming”. 

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Table des matières

1 Introduction Générale 1 I Formation et évolution des galaxies : étude des galaxies distantes
2 Méthodologie pour l’étude morphologique et dynamique des galaxies à z<1
2.1 Morphologie des galaxies
2.2 Dynamique des galaxies
2.3 Synthèse des méthodes de classifications
3 Résultats: dynamique et morphologie des galaxies lointaines
3.1 Observations Cinématiques
3.2 Résultats dynamiques
3.3 Comparaison de la dynamique avec la morphologie
3.4 Comparaison des méthodes de classification morphologique
3.5 Tests des scénarios de formation des galaxies spirales
3.6 Conclusions / Perspectives
4 Du VLT à l’ELT: Besoins instrumentaux pour la dynamique des galaxies à z>>1
1 Propriétés des galaxies à z>>1
4.2 Spécifications scientifiques pour un instrument 3D sur ELT
5 Phase turbulente et imagerie à travers la turbulence
5.1 Formation d’image
5.2 Turbulence atmosphérique et propriétés statistiques de la phase
5.3 Imagerie à travers la turbulence
5.4 Caractérisation des effets de la turbulence sur l’imagerie
6 Optique Adaptative
6.1 Optique Adaptative et représentation dans l’espace de Fourier
6.2 Propagation
6.3 Analyse de Surface d’onde
6.4 Reconstruction spatiale du front d’onde
6.5 Correction du front d’onde: projection sur le DM
6.6 Limitation d’une Optique Adaptative
6.7 Comparaison Fourier / E2E
6.8 Etoiles Lasers
6.9 Conclusion
7 Optique Adaptative Tomographique
7.1 Introduction
7.2 Propagation
7.3 Mesure du volume turbulent
7.4 Reconstruction spatiale du front d’onde: La tomographie
7.5 Projection sur les miroirs: spécificité de chaque OA tomographique
7.6 Limitations d’une OA tomographique
7.7 Comparaison Fourier/E2E et zones non-vues
7.8 Etoiles Lasers
7.9 Conclusion
Mémoire de thèse Benoˆıt NEICHEL vi TABLE DES MATIERES ` III Design Préliminaire du système d’OA d’EAGLE
8 Quelle OA pour EAGLE ?
8.1 Les données du problème
8.2 Choix de l’OA tomographique
8.3 La SMCAO: un concept original pour EAGLE ?
8.4 Analyse de la MOAO pour EAGLE
8.5 Correction partielle du Tip/Tilt
8.6 Bilan de l’OA d’EAGLE
8.7 Couverture de ciel
8.8 Conclusion
Conclusions & Perspectives
Annexes
A l’E-ELT
A.1 Présentation générale
A.2 Design Optique
A.3 Instrumentation
A.4 Le projet EAGLE
B Calcul de la DSP du bruit d’aliasing
B.1 Cas OA classique
B.2 Cas OA tomographique
C Calcul de la commande optimale en SMCAO
C.1 Deux boucles indépendantes
C.2 Mesures partagées
C.3 Commande optimale
Mémoire de thèse Benoˆıt NEICHEL vii TABLE DES MATIERES ` D SPIE Marseille Juin 2008 : “PSD based simulation algorithm for Wide FoV AO design. Application to ELT studies”
E Liste des publications

 

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