Vision des Néoclassiques de la régulation
Tout en adhérant à la définition simple de la régulation, les Néoclassiques considèrent que cette action qui vise à assurer le bon fonctionnement du système économique peut être divisée en deux catégories. Ils stipulent la régulation naturelle et la régulation publique. La première vient de la théorie de la main invisible d’Adam Smith sui prône le rôle autorégulateur du marché. L’intention individuelle de régulation de chacun des agents économiques pour son propre intérêt conduit inconsciemment vers une situation d’équilibre naturelle . Quant à la seconde, ce courant de pensée économique affirme que l’intervention régulatrice des pouvoir publics doit être la plus légère possible. Les interventions de l’Etat sont limitées aux cas : de monopole, d’existence d’externalités dans les activités économiques touchant un grand nombre de population et dans le domaine des activités par rapport aux biens publics . Pour les Néoclassiques, une régulation publique trop lourde perturbe le fonctionnement du marché et pénalise la croissance économique. L’Etat doit ainsi intervenir qu’occasionnellement tout en reconnaissant la force du marché et tout en permettant le libre jeu. La régulation naturelle du marché est donc la régulation qui doit être recommandée par les néoclassiques à l’exception des trois situations citées précédemment qui demeure sous l’égide de l’Etat .Ces situations d’exception impliquent la régulation publique.
Les grands acteurs de la régulation
L’Etat
L’Etat est représenté notamment par le pouvoir publics, les ministères, les administrations sous sa tutelle. Effectivement, au-delà des débats sur le rôle actif de l’Etat, la régulation de sa part s’avère inévitable dans certains contextes de la réalité. Le bon fonctionnement du marché est plus ou moins subordonné à l’Etat. Certains secteurs impliquent si ce n’est depuis longtemps l’intervention régulatrice de l’Etat. Ce sont : la monnaie, la banque et la finance . En effet, la monnaie est l’un des instruments de régulation de l’Etat, et il en est le seul contrôleur. Sa particularité par rapport aux autres bien publics lui renvoie à la puissance publique. Puis, les Banques jouent aussi un rôle crucial dans l’ensemble du système économique notamment dans le domaine de la création monétaire. C’est la raison pour laquelle : «elles subissent une règlementation spécifique sous forme de réserves obligatoires, de ratios prudentiels et d’autres restrictions dans leurs activités d’intermédiaires financières» . Le respect de ces règles relève la compétence de l’Etat souverain. Enfin, au niveau de la finance, la complexité des interrelations entre les intermédiaires financiers fait aussi appel à la régulation de l’Etat. Les existences des incertitudes, des asymétries d’information et de l’aléa moral brouillent le fonctionnement du système financier. Ainsi, il revient à l’Etat d’intervenir en amont afin d’éviter la défaillance de l’ensemble du système économique suite à la défaillance notamment la faillite d’une seule entité économique dominante.
Les firmes transnationales
Les firmes transnationales accomplissent des activités économiques dans les pays qui les accueillent. Ces activités peuvent s’opérer au niveau sectoriel. Effectivement, l’intervention étatique n’est pas une règle absolue. Les acteurs économiques privés peuvent également faire de la régulation appelée «autorégulation» ou « soft régulation (régulation douce) » tant qu’ils définissent les règles (ex : charte) . Cette régulation pouvant être sectorielle, consiste à coordonner le fonctionnement de la filière dans laquelle la firme s’investit.
Les fondements de la théorie de la régulation
La théorie du courant régulationniste est centrée sur le mode régulation et le régime d’accumulation dont le dynamisme est régi par les mutations des institutions d’où l’importance de l’analyse institutionnelle.
Mode de régulation et régime d’accumulation
Pour la théorie de la régulation, l’ensemble des éléments contribuant au bon fonctionnement du système capitaliste constitue «le mode de développement». Cet ensemble dont les composants doivent être cohérents et constitué par le mode de régulation et le régime d’accumulation. Mode de régulation : il reflète une configuration de formes institutionnelles basées qui induit des règles du jeu social. Le mode de régulation explique : «Comment est-ce que la société capitaliste peut se reproduire continuellement, bien qu’elle soit pleine de contradictions, conflits, antagonismes et violence ?» . Le mode de régulation décrit alors les règles générales induites par le mécanisme de la formation et du fonctionnement des formes institutionnelles différentes (complémentaire ou antagoniste).
Régime d’accumulation : il permet de désigner les régularités dans le domaine d’accumulation issues du mode de régulation. Ce régime d’accumulation décrit alors simplement les mécanismes d’accumulation qui permettent à l’économie de se reproduire. Il y a deux types de régime d’accumulation : le régime d’accumulation extensif qui se focalise dans l’accumulation en stock de facteur de production comme la main d’œuvre et le régime d’accumulation intensif qui se concentre dans l’accumulation en gains de productivité.
Analyse institutionnelle
Afin d’analyser les effets sociaux et économiques de l’articulation des institutions en dynamisme permanent, l’analyse institutionnelle s’avère indispensable pour toute étude économique selon les partisans de la théorie de la régulation. Les cinq formes institutionnelles définies par Boyer constituent la base d’analyse institutionnelle de la théorie de la régulation.
Tout d’abord, les institutions « pour l’essentiel, (…) se modèlent en fonction de contraintes historico-sociales : la dynamique institutionnelle résulte largement de l’évolution conflictuelle des intérêts des groupes sociaux en longue période » . Cela signifie que ce sont les institutions qui accomplissent le rôle de régulation toujours dans le but de chercher un équilibre ou mode de régulation souhaitable pour l’ensemble des agents économiques. Un équilibre qui s’adapte aux contextes considérés, tout en assurant la cohérence du régime d’accumulation avec les autres formes institutionnelles. Quand bien même que ces formes institutionnelles constituent le fondement théorique du courant des régulationnistes, ils ont plutôt des théories diversifiées par rapport à la considération accordée à certaines formes institutionnelles.
Le rapport salarial : Boyer le définit dans son ouvrage de 1986 comme « l’ensemble des conditions juridiques et institutionnelles qui régissent l’usage du travail salarié, ainsi que la reproduction de l’existence des travailleurs ». Après son constat de la montée des structures monopolistes, pour lui, l’ajustement par le prix n’est plus valide afin de substituer la situation monopole à la situation concurrentielle . Pour y, remédier la régulation en instaurant un « rapport salarial adéquat » est la piste de sortie, cela implique l’émergence d’un institut qui peut rétablir la stabilité. Ainsi, selon Boyer et Mistral Jaques, les conventions collectives sont les exemples des institutions qui peuvent combler l’endiguement entre le gain de productivité industrielle en croissance et les salaires des employés qui stagnent.
La monnaie : elle constitue un élément de rupture de la théorie de la régulation. Pour Aglietta et Orléan, ils considèrent que la monnaie est juste une unité de compte définie par la société mais celle-ci ne représente aucune substance de valeur . Donc, la régulation en ce domaine n’est pas vraiment utile. Quant à Aglietta, l’évolution des cours boursiers, des taux de change et la viabilité économique l’ensemble des entreprises dans le pays accorde une place importante à la politique de taux d’intérêt poursuivie par chaque banque . La monnaie n’est donc pas neutre vis-à-vis de la croissance économique.
La concurrence : certes la théorie de la régulation s’oppose au principe d’autorégulation du marché, mais cela n’écarte pas l’idée que ce courant prône la concurrence pour Boyer, le marché en concurrence fixe le prix. Puis, Aglietta inclut dans son approche cette notion en définissant le lien entre les forces de la concurrence et l’inégalité des revenus. Chacun a ses propres perceptions de la concurrence et établit leur propre approche selon leur appréhension l’histoire et de son évolution. L’Etat : la prise de position par rapport à l’intervention régulatrice de l’Etat est parcellaire entre les partisans du courant régulationniste . Il y en a ceux qui stipulent l’action de régulation structurelle de l’Etat en agissant sur les forces productives. Cette théorie est jugée envahissante par d’autres. Par ailleurs, l’approche intermédiaire pose l’Etat en tant que régulateur à court terme en cas de «capitalisme monopoliste achevé». Une fois arrivée à ce stade, l’Etat doit fluidifier le mécanisme du marché pour parvenir au retour du capitalisme concurrentiel. Cette approche est critiquée comme lacunaire pour les autres partisans de ce courant. Enfin, les autres membres régulationnistes considèrent que «l’Etat apparaît comme la totalisation, souvent contradictoire» . En cette perspective, la régulation de l’Etat est perçue comme organisationnelle qui cherche la cohérence entre les différentes forces sociales et le mode de régulation. L’Etat est alors un vecteur de développement à long terme tout en assurant le respect des compromis visant l’intérêt collectif. Les relations internationales : le courant de la théorie de la régulation prône aussi le principe du libre échange par la polarisation des échanges. Pour cela, la réalisation de l’économie d’échelle accroît la productivité suite à l’augmentation du taux d’investissement (effet Kaldor – Aglietta), cette situation s’ensuit par l’augmentation de la taille des marchés ce qui rend les échanges profitables pour la productivité (effet Smith), ensuite l’augmentation de la rentabilité est envisageable après la formation des branches internationalisées (effet Ricardo) ; enfin à ce stade, la maîtrise des biens d’équipement va accélérer la modernisation des autres secteurs (effet Mistral). Pourtant, ces étapes ne peuvent être franchies que si des institutions de régulation ayant des compétences à l’échelle mondiale comme les institutions internationales sont établies afin d’harmoniser les relations internationales en permettant le bon fonctionnement du mécanisme de polarisation des échanges pour l’intérêt des adhérents.
Définition simple de la régulation
La régulation est comprise comme l’action qui consiste à rétablir l’équilibre dans un système complexe afin d’en assurer le bon fonctionnement. Pour cela, la régulation définit le mécanisme à procéder pour maintenir un régime ou même le modifier afin que le système puisse s’adapter aux circonstances en vigueur. Ainsi, par symétrie, la régulation en tant que terme économique s’agit d’une action ou processus par lequel un système économique parvient à atteindre un état réputé souhaitable ou acceptable et ce système arrive aussi à s’adapter aux contextes auxquels il est soumis. La nature, le point d’application et l’intensité des actions de la régulation reste un sujet de débat. Toutefois, quelques formes de régulation peuvent-être distinguées :
la régulation de l’ensemble de l’économie qui a pour rôle de reproduire le système économique ainsi que les autres systèmes qui peuvent conduire au développement et à la reprise de la croissance. Elle peut inclure la régulation micro ou macro prudentielle ayant pour mission de réduire les risques de faillite ou de dysfonctionnement du système économique. Pour s’y faire, les acteurs de régulation qui sont responsables de cette régulation surveillent surtout les activités économiques des entités économiques dont la faillite peut porter atteinte directement à la croissance économique du système considéré que ce soit national ou international .
la régulation sectorielle assure le bon fonctionnement de certaines branches d’un secteur d’activité. la régulation des marchés qui consiste à encadrer les marchés confrontés à des dysfonctionnements pour parvenir à l’intérêt général. Elle peut s’agir de la régulation des marchés financiers qui consiste à veiller la stabilité du système financier en instaurant la confiance avec des règles déjà établies par les acteurs de la régulation pour régir les activités financières.
Cette vision simple de la régulation ainsi définie est le point de départ des avis des autres économistes qui méritent d’être abordés.
Table des matières
Introduction
Chapitre I : Approche conceptuelle de la « Régulation »
Section 1 : Régulation
1. Définitions de la régulation
a) Définition simple de la régulation
b) Vision des Néoclassiques de la régulation
c) Vision de Keynes de la régulation
2. Les grands acteurs de la régulation
a) L’Etat
b) Les firmes transnationales
c) Les grandes institutions mondiales de régulation et les ensembles régionaux
d) Les ONG (Organisations non gouvernementales)
Section 2 : Théories de la régulation
1. Origine et concept
2. Les principaux précurseurs de la théorie de la régulation
a) Michel Aglietta
b) Robert Boyer
3. Les fondements de la théorie de la régulation
a) Mode de régulation et régime d’accumulation
b) Analyse institutionnelle
Section 3 : Analyse critique de la théorie de la régulation
Chapitre II : Fonds Monétaire International
Section 1 : Présentation du FMI
I. Historique du FMI
1. Raison d’être
2. L’évolution des missions du FMI
II. Taille et structure
1. La taille du FMI
2. La Structure du FMI
a) Le conseil des gouverneurs
b) Le conseil d’administration
c) Le directeur général du FMI
Section2 : Régulation du FMI
I. Rôles régulateurs du FMI
1. Equilibre de la balance des paiements : assistance financière
a) Examen de conditionnalités
b) Résolution de crise récente : Crise financière 2008-2009
2. Prévention de crise : surveillance
a) La mission de surveillance
b) Assistance technique
3. La lutte contre la pauvreté
a) Les programmes d’ajustement
b) Examen des conditionnalités des facilités de prêt
II. Les instruments de régulations du FMI
1. Les prêts du FMI
a) Les tranches de crédits
b) Mécanisme spéciaux
c) Facilités en faveur des pays membres à faible revenu relevant du fonds fiduciaires pour la réduction de la pauvreté et pour la croissance (RPC)
2. Les sources de financements
a) Les quotes-parts
b) Les accords d’emprunts
c) Les Conventions bilatérales
d) Les Accords à l’appui des activités de financement en faveur des pays à faible revenu
e) Vente d’or
f) Revenu net
III. Les critiques du FMI
Chapitre III : Banque Mondiale et les relations entre les des deux institutions
Section 1 : La carte d’identité de la Banque Mondiale
I. Historiques
1. Raison d’être
2. Evolution des tendances de la Banque mondiale
II. Le groupe de la Banque Mondiale
1. La Banque Internationale pour la Reconstruction et le Développement (BIRD ou IBRD)
2. L’Association Internationale de Développement (AID ou IDA)
3. La Société Financière Internationale (SFI ou IFC)
4. L’Agence Multilatérale de Garantie des Investissements (AMGI ou MIGA)
5. Le Centre international pour Règlement des Différends Relatifs aux Investissements (CIRDI ou ICSID)
III. Structure de la Banque Mondiale
1. Le conseil des gouverneurs
2. Le conseil d’administration
3. Le Président de la Banque mondiale
4. Les Comités
Section 2 : Régulation de la Banque Mondiale
I. Rôles régulateurs de la Banque Mondiale
1. Régulation de la BIRD et l’AID
a) Distinction de la BIRD et l’AID
b) Rôles régulateurs de la BIRD et l’AID
2. Régulation de la SFI
3. Régulation de l’Agence multilatérale de garantie des investissements (AMGI ou MIGA)
4. Régulation du centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI ou ICSID)
5. La Banque mondiale et la crise financière de 2008-2009
II. Les instruments de régulation de la Banque Mondiale
1. Cycle de projet de la Banque Mondiale
a) Stratégie d’Assistance au Pays (SAP ou CAS)
b) Identification
c) Préparation
d) Evaluation ex-ante
e) Approbation
f) Exécution et supervision
g) Le rapport de la d’exécution
h) Evaluation ex-post
2. Ressources de financement
a) Ressource de la BIRD
b) Ressources de l’AID
c) Ressource de la SFI
III. Les critiques de la Banque Mondiale
Section 3 : Les relations entre le FMI et la Banque Mondiale
I. Historique de la relation entre la Banque mondiale et le FMI
1. Tableau d’étude comparative des deux institutions de Bretton Woods
2. Convergence des activités de régulation et collaboration des deux institutions
II. Régulations conjointes des deux institutions
1. Allègement de la dette : PPTE et IADM
2. Poursuite des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD)
III. Les critiques de régulation des deux institutions
Conclusion
Bibliographie
Annexes