Etude structurale et magnétique des alliages amorphes à base de fer

Etude structurale et magnétique des alliages amorphes à base de fer

Le magnétisme des matériaux à base de fer 

Origine de magnétisme

Le moment magnétique atomique est la résultante d’une contribution électronique (10-23A.m2 ) et d’une contribution nucléaire plus faible (5.10-27 A.m2 ), le moment magnétique électronique est lui-même composé d’un moment magnétique orbital µl, associé au mouvement de l’électron sur son orbite autour du noyau et d’un moment magnétique de spin µs, qui est une propriété purement quantique des électrons créé par la rotation de l’électron considéré autour lui-même. Le moment magnétique total est la combinaison vectorielles (produit scalaire) des moments orbitaux et de spin, ces deux moments couplés par une interaction d’origine relativiste, le couplage spin-orbite, et forment le moment magnétique élémentaire d’un atome. La théorie quantique de magnétisme a montré que le moment magnétique orbital et le moment magnétique de spin sont donnés par les deux relations suivantes : µ𝑙 = √𝑙(𝑙 + 1). 𝜇𝐵 (I.1) µ𝑠 = 2. √𝑠(𝑠 + 1). 𝜇𝐵 (I.2) Où l et s représentent le nombre quantique orbital et le nombre quantique de spin respectivement et µB est la magnéto de Bohr 𝜇𝐵 = − 𝑒ℏ 2𝑚𝑒 (I.3) Où ħ = h/2π, h : constante de Planck, e : charge de l’électron, m : masse de l’électron Dans la plupart des solides, tous les états électronique sont dédoublement occupées, et la substance reste alors diamagnétique, par contre dans le cas des métaux de transition, en particulier les matériaux ferromagnétiques (Fe, Co, Ni), les électrons responsables du magnétisme sont les électrons 3d, ces électrons appartenant aux couches électroniques externes de l’atome et ne sont pas appariés, c’est-à-dire pour lesquelles la somme des nombres quantiques m n’est pas nulles, Il faut dire aussi que le comportement magnétique dans les matériaux ferromagnétiques décrit par le model d’électrons itinérants. 

Champ moléculaire

Nous savons que d’énormes champs sont nécessaires pour produire un alignement substantiel des moments dans une substance paramagnétique. Ceci est en contradiction avec l’observation que certains matériaux, qui sont paramagnétiques à haute température, à température ambiante peuvent présenter une aimantation de l’ordre de 1T (tesla) dans des champs aussi bas que quelques dizaines d’ampères par mètre. L’hypothèse de champ moléculaire de Weiss (1907) [1] résout cette difficulté en décrivant le terme ferromagnétisme. Il a postulé que dans une substance ferromagnétique il existe un champ d’interaction fort résulte de l’interaction entre les spins voisins, qui favorise un alignement collectif des moments sur une direction commune. Il a supposé que l’intensité du champ moléculaire est proportionnelle à l’aimantation, ce champ prend ainsi la forme 𝐻⃗ 𝑚 = 𝑁𝑊𝑀⃗ (I.4) La constante 𝑁𝑊 est appelée la constante du champ moléculaire ou la constante du champ de Weiss

Interaction d’échange

Comme il existe un couplage spin-orbite, il existe également un couplage spin-spin nommé interaction d’échange d’Heisenberg. Le couplage entre les spins de deux électrons appartenant à des atomes voisins (i et j) possède une énergie dite, énergie d’échange donnée par la relation suivant : 𝐸𝑒𝑥 = − jex(S⃗ i .S⃗ j) = − 𝑗𝑒𝑥(𝑆𝑖𝑆𝑗 cos𝜑) (I.5) Cette énergie résulte des interactions interélectroniques de Coulomb et du principe d’exclusion de Pauli des spins S⃗ i et S⃗ j . Le signe de l’intégrale d’échange 𝑗𝑒𝑥 définit l’orientation des spins 𝑆 𝑖 et 𝑆 𝑗 : – ordre antiferromagnétique pour 𝑗𝑒𝑥 < 0 : cos𝜑 = −1 et les spins sont orientés dans des directions opposées. – ordre ferromagnétique pour 𝑗𝑒𝑥 > 0 : cos 𝜑 = 1 et les spins sont orientés dans la même direction. Par conséquent, une valeur positive de l’intégrale d’échange est une condition nécessaire pour le ferromagnétisme à se produire. Chapitre I Le magnétisme, propriétés remarquables 7 Les interactions d’échange dépendent principalement des distances interatomiques et non d’une géométrie régulière de la position de l’atome. La cristallinité n’est pas donc une exigence pour le ferromagnétisme. La première découverte d’un ferromagnétique amorphe a été signalée en 1965 par S. Mader et A. S. Nowick (1965) qui ont fabriqué des couches minces amorphes de l’alliage Cobalt-Or par la méthode de coévaporation.

Classes de matériaux magnétiques

Souvent, dans la matière, les moments magnétiques atomiques ne sont pas libres mais interagissent entre eux et avec leur environnement, il en résulte un comportement collectif qui se manifeste, en dessous d’une certaine température critique par l’apparition d’ordre magnétique, parmi lesquelles, le ferro, ferri et antiferromagnétisme qui sont les principaux classes des matériaux magnétiques. N’oublier pas les matériaux paramagnétiques qui ne présentent aucune interaction collective entre les moments magnétiques atomiques et ne sont pas magnétiquement ordonnées [2]. Figure I.1. Classification des matériaux en fonction de leur comportement magnétique, Jij représente l’intégrale d’échange

Diamagnétisme

Le diamagnétisme est une propriété fondamentale (intrinsèque) de la matière, (conséquence de la loi de Lenz). L’origine du diamagnétisme est le comportement non coopératif des Chapitre I Le magnétisme, propriétés remarquables 8 électrons lorsqu’ils sont exposés à un champ magnétique appliqué. Ce phénomène se trouve dans les matériaux qui possèdent des couches électroniques complètement remplies par les électrons, comme dans le cas des gaz rares (ex. Krypton – 3d10 4s2 4p6 ). Toutefois, lorsque le matériau est exposé à un champ, une aimantation induite s’oppose à la direction du champ magnétique et donc la susceptibilité est négative Comme le diamagnétisme est une propriété très faible elle est observée uniquement en l’absence d’autre forme de magnétisme. Figure I.2. Evolution de l’aimantation (M) en fonction du champ magnétique appliqué (H) pour un matériau diamagnétique et évolution de la susceptibilité (χ) en fonction de la température (T)

Paramagnétisme

Le paramagnétisme est une propriété magnétique connue qui caractérise un classe de matériaux où les atomes ou les ions ont un moment magnétique permanent en raison des électrons non appariés occupent des couches électroniques extérieurs partiellement remplies [3]. Cependant, les moments magnétiques individuels ne sont pas ordonnés magnétiquement, en l’absence de champ magnétique appliqué aux matériaux, l’aimantation est nulle. En présence d’un champ les moments magnétiques tendent à s’aligner partiellement dans la direction du champ magnétique et il en résulte une aimantation positive et une susceptibilité positive. Par ailleurs, l’efficacité du champ magnétique dans l’alignement des moments magnétiques est combattue par les effets de la température (agitation thermique). Il en résulte une susceptibilité dépendante de la température, connue sous le nom de loi de Curie : 𝜒 = 𝐶 𝑇 (I.6) Où C est la constante de Curie et T est la température. Figure I.3. Structure magnétique d’un matériau paramagnétique (a), évolution de l’aimantation en fonction de la température (b) et évolution de la susceptibilité magnétique en fonction de la température (c)

Ferrimagnétisme

Dans les matériaux ferrimagnétiques, les moments magnétiques des sous-réseaux A et B ne sont pas égaux et orientés alternativement dans deux sens opposés, il en résulte donc une aimantation spontanée non nulle, les ferrimagnétismes se comportent de façon très semblable aux ferromagnétiques. Cependant, leur aimantation à saturation est en général plus faible. Notons que les matériaux ferrimagnétiques sont en général des isolants. Figure I.4. Structure magnétique d’un matériau ferrimagnétique (a), évolution de l’aimantation en fonction de la température (b) et évolution de la susceptibilité magnétique en fonction de la température (c)

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Antiferromagnétisme

Les matériaux antiferromagnétiques sont des substances constituées en général de deux sousréseaux magnétiques dont les moments magnétiques atomiques sont égaux et couplés antiparallèlement, les aimantations des deux sous-réseaux se compensent et alors les  matériaux antiferromagnétiques ne présentent pas d’aimantation macroscopique. Par contre cette classe de matériaux magnétiques a une susceptibilité faible est positive. L’état magnétique ordonné des moments magnétiques dans l’antiferromagnétisme est liés à une température TN, (température de Néel), au-dessus de laquelle le matériau présente une réponse paramagnétique et la susceptibilité obéit à la loi de Curie – Weiss (figure I.5). 𝜒 = 𝐶 𝑇𝑁 + 𝜃 (I.7) Où C est la constante de Curie, T la température de Néel et θ est la température de Curie paramagnétique (asymptotique). Figure I.5. Illustration schématique des deux sous-réseaux d’un matériau antiferromagnétique couplé antiparallèlement (a), évolution de l’aimantation en fonction de la température (b) et évolution de 1/χ en fonction de la température (c)

Ferromagnétisme

Les moments magnétiques dans ces matériaux présentent une très forte interaction. Ces interactions d’échange quantique donnent naissance à un alignement parallèle des moments magnétiques atomiques, il se manifeste une forte aimantation (aimantation spontanée) même en l’absence de champ magnétique externe. L’ordre magnétique dans les ferromagnétismes est lié aussi à la température de Curie, au-dessus de la quelle, l’ordre magnétique disparait et le matériau devient paramagnétique. La variation de la susceptibilité en fonction de la température à T > TC suit la loi de CurieWeiss : 𝜒 = 𝐶 𝑇 − 𝜃𝑃 (I.8) Figure I.6. Illustration de l’alignement du moment magnétique atomique dans le réseau d’un matériau ferromagnétique (a) et évolution de l’aimantation en fonction de l’amplitude du champ magnétique appliqué (b) et évolution de l’aimantation spontanée pour T < Tc et de la susceptibilité magnétique pour T > Tc (c)

Magnétisme macroscopique 

Définition de l’hystérésis

C’est un fait d’expérience évident : quand on mesure les variations d’aimantation d’un matériau, on constate que le résultat acquis dépend non seulement des conditions expérimentales utilisées (le champ d’excitation, la température, la pression, etc…) mais aussi de tous les états d’aimantation antérieurs. Les matériaux magnétiques gardent la mémoire de tous leurs états d’aimantation antérieurs par l’intermédiaire des domaines élémentaires. C’est J-A. Ewing, un expérimentateur remarquable, qui a montré ce comportement spécifique dans le cas du fer, et qui l’a appelé “hystérésis”. 

Cycle d’hystérésis

Si on diminue le champ d’excitation à partir de l’état saturé où l’aimantation atteint sa valeur maximale, cette dernière n’est plus réversible et garde une valeur non nulle pour H = 0, appelée aimantation résiduelle ou induction rémanente Br, il est nécessaire d’appliquer un champ H dans le sens opposé (champ coercitif Hc) pour faire annuler la rémanence. On dit que le matériau représente l’hystérésis quand la courbe M = f(H) qui représente tous les points lorsqu’on varie le champ d’excitation entre les deux valeurs extrêmes ± Hs, décrit une courbe fermée et symétrique [4] (figure I.7). Induction rémanent Br : Cette valeur représente l’aimantation mémorisée par le corps magnétique quand on applique un champ magnétique suffisamment élevé puis qu’on l’enleve.  Champ coercitive Hc : correspond au champ nécessaire pour annuler l’induction rémanente. Le champ coercitif mesure l’ordre de grandeur du champ qui doit être appliqué à un matériau a fin d’inverser son aimantation, d’après la valeur de champ coercitif en peut dire qu’un matériau magnétique est facile ou difficile à s’aimanter, ou bien, que le matériau magnétique est doux ou dur .

Table des matières

Chapitre I : Le magnétisme, propriétés remarquables
I.1. Le magnétisme des matériaux à base de fer
I.1.1. Origine de magnétisme
I.1.2. Champ moléculaire
I.1.3 Interaction d’échange
I.1.4. Classes de matériaux magnétiques
I.1.4.1. Diamagnétisme
I.1.4.3. Ferrimagnétisme
I.1.4.4. Antiferromagnétisme
I.1.4.5. Ferromagnétisme
I.2. Magnétisme macroscopique
I.2.1. Définition de l’hystérésis
I.2.2. Cycle d’hystérésis
I.2.3. Notion de dureté dans les matériaux magnétiques
I.3. Eléments de théorie du ferromagnétisme
I.3.1. L’anisotropie
I.3.2. L’échange
I.3.3. Approche microscopique avec l’énergie d’échange 17
I.4. Etude du comportement ferromagnétique d’un système de moments, dans l’approximation du champ moléculair
I.4.1. Les effets d’un champ magnétique appliqué à une population de moments
I.4.2. Le champ moléculaire de Weiss
I.4.3. La température de Curie TC
I.5. Comparaison avec l’expérience
Chapitre II : Les matériaux ferromagnétiques à base de fer
II.1. les matériaux ferromagnétique amorphes à base de fer (MG 2605 S2)
II.1.1 Propriétés thermomagnétiques et structurales de l’amorphe MG 2605 S2
II.1.2. Familles d’alliages amorphes à base de fer
II.1.3. Les alliages amorphes FeBSi
II.1.3.1. Etat du développement de l’alliage amorphe FeBS
II.1.4. Critères de choix des alliages amorphes pour les différentes utilisations
II.1.5. Recristallisation (traitement thermique)
II.1.6. Effet de certaines impuretés sur les matériaux
II.1.7. Condition de traitement de relaxation structurale
II.1.8. L’alliage amorphe “METGLAS“2605-S2
Chapitre III : Les méthodes thermiques dans les transformations structurales
III.1. Notions générales sur les propriétés de transport électronique
III.1.1. Conductivité électrique et coefficient de Peltier d’un élément
III.1.2. Conductivité thermique et coefficient Seebeck d’un élément
III.1.3. Relations de Kelvin
III.1.4. Les effets thermoélectriques dans un couple
III.1.4.1. L’effet Seebeck d’un couple
III.1.4.2. L’effet Peltier à une jonction
III.1.4.3. L’effet Thomson
III.1.5. L’effet Joule
III.2. La Calorimétrie Différentielle à Balayage (DSC)
III.2.1. La capacité calorifique
III.2.2 Composition du thermogramme
III.2.2.1. La température de transition vitreuse
III.2.2.2. La Cristallisation
III.2.3. Interprétation avancée en DSC
Références
Chapitre IV : Techniques expérimentales
IV.1. Méthodes d’élaboration des amorphes
IV.1.1. Méthode du melt-spinning
IV.1.2. Méthode du flot planaire
IV.2. Méthodes de caractérisations thermiques
IV.2.1. Techniques expérimentales de mesures du transport électronique
IV.2.1.1. Principe de mesure de la résistivité électrique
IV.2.1.2. Protocole de mesure de la résistivité électrique
IV.2.2.1. Principe de mesure du pouvoir thermoélectrique absolu
IV.2.2.2 Le protocole de mesure de PTA par la méthode des petits ΔT
IV.2.3. Méthodes utilisées pour mesurer la résistivité électrique
IV.2.3.1. Méthode à 4 fils
IV.2.3.2. Méthode à 6 fils
IV.2.3.3. Vraie méthode à 4 fils
IV.2.4. Dispositif d’acquisition des mesures de résistivité et de PTA
IV.2.5. L’usinage des dominos en alumine
IV.2.6. Étalonnage de la résistivité autour de la température ambiante
IV.2.6.1. Choix de la valeur du courant
IV.2.7. Calorimétrie différentielle à balayage (DSC)
IV.3. Méthodes de caractérisations structurales
IV.3.1 Appareillage de diffraction X
IV.3.1.1 La loi de Bragg
IV.3.2. Le microscope électronique à balayage (MEB)
IV.3.4. La Spectroscopie des Photoélectrons (XPS)
IV.3.4.1. Appareillage
IV.3.4.2. Principe
IV.4. Méthodes de caractérisations magnétiques
IV.4.1 Le magnétomètre à échantillon vibrant (VSM)
IV.4.2 Fluxmètre
Chapitre V : Résultats et discussions
V.1. Méthodologie de mesures
V.2. Transitions thermiques
V.3. Résultats de DSC
V.3.1. Analyse de la cinétique de cristallisation
V.4. Comparaison entre résistivité, PTA et DSC
V.5. Résultats de la diffraction des rayons X
V.6. Compositions de surface
V.7. Microstructures
V.8. Propriétés magnétiques

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