Etude d’un système réversible climatisation/cycle Rankine organique

Etude d’un système réversible climatisation/cycle
Rankine organique

Les axes de réduction de la consommation du véhicule

Pour pouvoir comprendre les axes d’améliorations possibles il est tout d’abord nécessaire de regarder le bilan énergétique de la voiture. En gardant une approche simplifiée, l’énergie chimique due à la combustion se répartit en parts égales entre l’énergie utile à la traction, l’énergie dans le liquide de refroidissement moteur et l’énergie perdue dans les gaz d’échappement. En réalité cette règle n’est valable que sur une plage restreinte de fonctionnement du moteur et sur des points stabilisés. Le fonctionnement d’une voiture prévoit un régime de travail presque constamment transitoire et, pour cette raison, il est plus significatif d’analyser le bilan énergétique sur un cycle de conduite (Chiara and Canova, 2013). C’est pourquoi le diagramme Sankey de la Figure 3 est obtenu à partir de l’intégration des différents termes sur un cycle WLTC (Worlwide harmonized Light vehicles Test Cycles) : le cycle d’homologation pour mesurer les émissions du véhicule. Une autre possibilité est de définir des fourchettes de variations pour les différents termes prenant en compte les fortes variations liées aux transitoires comme dans (Stobart and Weerasinghe, 2010) ou (Holmberg, Andersson and Erdemir, 2012). Figure 3 : Diagramme Sankey typique de la distribution de l’énergie primaire dans une voiture pour un cycle WLTC Les axes d’amélioration de la consommation et par conséquent des émissions sont multiples car il est possible de travailler sur différentes pistes liées aux branches de la Figure 3. Il y a, en effet, des technologies qui peuvent toucher : le système de traction, le poids du véhicule, la récupération de chaleur, les systèmes auxiliaires, l’aérodynamique ou la résistance au roulage. La Figure 4 compare différentes technologies non seulement du point de vue de l’efficacité, mais aussi du coût. Il est clair que pour un constructeur une technologie n’est intéressante que si elle est rentable. Figure 4 : Amélioration de l’efficacité et des coûts en capital de différentes technologies pour les véhicules (Hill et al., 2012) Le diagramme de la Figure 3 est loin d’être représentatif de tous les cas de figure qui peuvent se produire lors de l’utilisation du véhicule. A titre d’exemple, il est possible de remarquer que la consommation des auxiliaires peut passer de 2,5% à 10% avec l’activation du système de climatisation (Johnson, 2010a). Le système de climatisation joue un rôle non négligeable sur la consommation d’une voiture dans les conditions de conduite réelle. Le travail de (Mansour et al., 2018) met en évidence la nécessité de prendre en compte la consommation des auxiliaires et notamment de la climatisation dans la norme WLTP (Worlwide harmonized Light vehicles Test Procedure). La consommation de la climatisation met en évidence des flux énergétiques qui ne sont pas pris en compte par le diagramme Sankey de la Figure 3 : les besoins thermiques de l’habitacle. Dans une voiture, il est nécessaire d’assurer, selon les conditions climatiques, le chauffage de l’habitacle, sa déshumidification ou son refroidissement. Le calcul de ces besoins pour un véhicule utilitaire de segment moyen a été récemment abordé par (Brèque and Nemer, 2017). Deux différentes courbes de besoins peuvent être tracées : une courbe pour le besoin en mode stabilisé et une courbe pour le mode convergence. Le mode stabilisé représente la puissance chaude ou froide nécessaire pour garder une situation de confort dans l’habitacle, tandis que le mode convergence représente la puissance chaude ou froide nécessaire pour obtenir une condition de confort. Dans le premier cas il s’agit d’un régime stabilisé, dans le deuxième d’un régime dynamique. 12 (a) (b) Figure 5 : Besoins thermiques de chauffage et climatisation en régime stabilisé (a) et convergence (b) (Brèque and Nemer, 2017) Dans un véhicule conventionnel le besoin de chauffage est assuré par le circuit de refroidissement moteur : une partie des rejets thermiques du moteur est ainsi récupérée. Le besoin de climatisation, comme il a été déjà évoqué, est assuré par le système de climatisation. La gestion thermique de la voiture joue un rôle important dans l’amélioration de la consommation. La récupération des rejets thermiques du moteur pour la conversion en énergie mécanique ou électrique est souvent mise au premier plan, mais il ne faut pas oublier la possibilité de récupérer ces rejets thermiques sous forme de chaleur comme dans (Vittorini, Di Battista and Cipollone, 2018) où les rejets thermiques des gaz d’échappement sont utilisés pour chauffer plus rapidement l’huile moteur. Une augmentation plus rapide de la température du liquide de refroidissement et par conséquent du bloc moteur et des huiles peut amener à des gains en consommation de 4% sur un cycle de conduite comme démontré par (Laboe and Canova, 2013).

Les solutions technologiques pour l’amélioration de l’énergie utile

Dans un but d’amélioration du système de traction, une des technologies présentes dans le graphique de la Figure 4 est la distribution variable qui permet la variation du calage (en anglais Variable Valve Timing VVT) et la durée d’ouverture des soupapes d’admission et d’échappement du moteur. Il s’agit d’une solution qui permet de réduire les pertes de pompage, ainsi que la consommation spécifique à charge partielle (Fontana and Galloni, 2009). Une autre possibilité est la réduction de la taille (downsizing en anglais) du moteur, voir par exemple (Carey et al., 2011), grâce au turbocharging : un concept qui prévoit de récupérer l’énergie des gaz d’échappement par une turbine connectée sur le même arbre avec un compresseur. Le compresseur permet d’envoyer de l’air comprimé à l’entrée du moteur permettant ainsi de diminuer le travail de pompage et d’augmenter la densité de puissance. La réduction du poids du véhicule grâce à l’utilisation de matériaux de fabrication plus légers est une solution viable mais une attention particulière doit être portée à l’analyse du cycle de vie. Les émissions produites lors de la production des matériaux pourraient réduire l’avantage lié à une moindre consommation du véhicule (Mayyas et al., 2018). 13 Une solution à faible coût consiste en l’amélioration de l’aérodynamique du véhicule. Cependant, ces dernières années, l’avantage lié à la réduction du coefficient de trainée est limitée par une augmentation de la surface frontale pour des questions de confort à l’intérieur du véhicule, comme expliqué par (Mayer and Wickern, 2011). Parfois le choix de l’amélioration de l’aérodynamique du véhicule peut engendrer une augmentation de la masse comme dans le cas des pneus. En effet une solution privilégiant l’aérodynamique comporterait une augmentation des surfaces, mais cela engendre une augmentation du poids que l’on peut éviter grâce au recours à des matériaux composites (DeMarco et al., 2017). La conception de pneus capables de réduire la consommation ne prévoit pas seulement des considérations sur l’aérodynamique ou sur le poids, mais également et principalement sur la résistance au roulage. La réduction de la résistance au roulage est par contre en conflit avec des caractéristiques très importantes du pneu comme la résistance à l’usure ou la prise, ce qui rend très compliqué un compromis avec les différentes caractéristiques opérationnelles (Aldhufairi and Olatunbosun, 2018). Dans le cas de la gestion thermique du moteur, la voie de réduction de la consommation la plus importante est celle de l’électrification des différents composants et la possibilité du recours à un contrôle plus poussé (Choukroun and Chanfreau, 2010) (Cortona and Onder, 2010). La même approche peut être appliquée aux systèmes auxiliaires et en premier lieu au système de climatisation. Dans le système de climatisation, le composant plus énergivore est le compresseur. (Lee et al., 2013) ont montré expérimentalement que la surconsommation liée à l’activation du système de climatisation est causée entre 77% et 89% par l’appel de couple du compresseur sur l’arbre moteur, le compresseur du système de climatisation étant mécaniquement relié au moteur avec un système courroie/poulie. Récemment (von Manstein, Limperich and Banakar, 2017) ont comparé, via une simulation, les performances d’un système de climatisation avec compresseur à entrainement mécanique avec un système avec compresseur électrique et ont montré une amélioration du COP jusqu’à 20% grâce à la solution électrique.

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Les rejets thermiques du moteur

Etant donné le poids de la chaleur fatale dans le bilan énergétique du moteur, la famille des technologies qui permettent la récupération de cette énergie est très importante. Toute étude de récupération de chaleur doit par contre commencer par une analyse des rejets thermiques disponibles. Les pertes thermiques du moteur sont gérées par deux différents systèmes : le système d’échappement et le système de refroidissement moteur. Le système d’échappement est un circuit ouvert qui permet l’évacuation des gaz de la combustion du moteur et, grâce à la présence de différents éléments, permet de réduire les émissions de polluants, de stabiliser la pression dans la chambre de combustion et de réduire le bruit. 14 Le système de refroidissement moteur, voir Figure 6, est un circuit fermé qui permet au moteur de travailler dans des conditions optimales et consiste en un circuit alimenté par une pompe entrainée par l’arbre moteur grâce à une poulie et une courroie. Le fluide de travail est souvent un mélange 50% eau 50% glycol. Le débit de ce mélange qui refroidit le moteur est ensuite envoyé au radiateur : l’échangeur qui permet d’évacuer la chaleur à l’ambiante. Au démarrage du moteur, il est très important qu’il puisse monter rapidement en température à son optimum, pour cela un circuit de by-pass est prévu pour le radiateur. La gestion du débit de by-pass est confiée au thermostat qui permet de contrôler la température du moteur grâce au mécanisme de fusion et de solidification d’une cire à l’intérieur. Cette dernière gère la fermeture et l’ouverture du circuit de by-pass et l’écoulement du fluide de refroidissement vers le moteur sur une plage spécifique de température de l’eau glycolée. Le circuit de refroidissement est également composé d’un circuit qui le connecte à l’aérotherme, un petit radiateur qui sert à chauffer l’habitacle. L’activation de ce circuit est souvent réglée par une vanne qui s’ouvre dès qu’une température minimale du liquide de refroidissement du moteur est atteinte. Figure 6 : Système refroidissement moteur Figure 7 : Distribution de la chaleur fatale du moteur selon différentes vitesses (Ringler et al., 2009) 15 La Figure 3 montre que, dans un cycle de conduite, 40% de l’énergie primaire est perdue dans les gaz d’échappement, tandis qu’environ 30% est perdue dans le liquide de refroidissement du moteur. La proportion de la quantité d’énergie rejetée par les deux systèmes peut fortement varier selon la vitesse du véhicule. Généralement, pour des faibles vitesses, la puissance rejetée par le système de refroidissement est plus importante que celle du système d’échappement. La Figure 7, provenant du travail de (Ringler et al., 2009), permet de quantifier l’énergie thermique disponible aux différentes sources selon la vitesse du véhicule. Il est intéressant de remarquer que la puissance thermique dans les gaz d’échappement devient plus importante que celle du liquide de refroidissement pour des vitesses supérieures à 55 mph (89 km/h). D’un point de vue exergétique, il est simple de démontrer que la récupération de la chaleur au niveau des gaz d’échappement est plus intéressante que celle au niveau du liquide de refroidissement, voir par exemple (Bourhis and Leduc, 2010), compte tenu des températures plus élevées des gaz en sortie moteur (300-600°C) par rapport au liquide de refroidissement 100-120°C (El Chammas, 2005). L’avantage exergétique des gaz en sortie moteur est bien mis en évidence par les cartographies de (Bou Nader et al., 2018) montrées dans les Figures 8 et 9.

Table des matières

Introduction
Chapitre I ReverCycle : un système multi-génération pour introduire la récupération de chaleur dans l’automobile
1 Introduction
1.1 Les axes de réduction de la consommation du véhicule
1.1.1 Les solutions technologiques pour l’amélioration de l’énergie utile
1.1.2 Les rejets thermiques du moteur.
1.1.3 Les systèmes de récupération de chaleur
1.1.4 Les systèmes multi-génération
1.1.5 Le concept de ReverCycle
1.2 Le système de climatisation du véhicule
1.2.1 Le cycle thermodynamique
1.2.2 Technologie des composants
1.2.3 Dimensionnement d’un système de climatisation embarqué
1.2.4 Temps d’activation du système de climatisation
1.3 Les cycles Rankine et Rankine Organique
1.3.1 Le cycle thermodynamique
1.3.2 Technologie des composants
1.3.3 Etude des architectures embarquées
1.3.4 Analyse complémentaire des architectures embarquées
1.4 Les cycles de réfrigération à éjecteur
1.4.1 Le cycle thermodynamique
1.4.2 Technologie des composants
1.4.3 Etude des architectures embarquées
1.4.4 Analyse complémentaire des architectures embarquées
1.5 ReverCycle
1.6 Conclusions
Chapitre II Détermination du gain en consommation du système ReverCycle : comparaison entre
l’application à un véhicule conventionnel et un véhicule hybride série
2 Introduction
2.1 Voiture conventionnelle
2.1.1 Modèle global de la voiture
2.1.2 Dimensionnement et gain en consommation de ReverCycle
2.2 Voiture hybride
2.2.1 Modèle global de la voiture
2.2.2 Dimensionnement de ReverCycle
2.2.3 Le gain en consommation de ReverCycle
2.3 Conclusions
Chapitre III La preuve de concept de ReverCycle
3 Introduction
3.1 Preuve de concept ReverCycle MAC/ORC
3.1.1 Description du banc d’essais
3.1.2 Résultats des essais
3.2 Preuve de concept ReverCycle ERC
3.2.1 Description du banc d’essais
3.2.2 Résultats des essais
3.3 Conclusions

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