Etude du titanate de baryum

Influence du dopage

La stratégie que nous avons employée pour modifier les propriétés optiques et la nature du semiconducteur est le dopage. Ainsi, l’influence du dopage du titanate de baryum par le fer et l’azote a été étudiée, tout comme pour le titanate de calcium. Nous nous sommes placés à un taux de dopage particulier : 3% atomique en fer, qui est suffisamment faible pour ne pas former une nouvelle phase au sein de l’électrode. Le dopage à l’azote est effectué après la calcination, à la même température et pendant la même durée que celle-ci mais sous ammoniac.

Dopage au fer

L’étude de l’influence du dopage de BaTiO3 débute par le dopage au fer. La même voie de synthèse que pour BaTiO3 « mésoporeux » non dopé a été utilisée, en ajoutant la quantité de fer nécessaire pour obtenir 3% de dopage atomique à partir d’une solution de fer dont la composition est indiquée au paragraphe 3.1. Les échantillons sont ensuite calcinés sous air à différentes températures.
Nous vérifions en premier lieu par diffraction des rayons X que nous avons bien synthétisé la pérovskite sous forme tétragonale [19], ainsi que la présence ou non d’une autre phase formée avec le dopage et l’éventuelle modification des pics de diffraction présents.
La comparaison des diffractogrammes du titanate de baryum sans dopage et dopé au fer révèle un décalage des pics caractéristiques de diffraction de BaTiO3 vers la droite. Cela signifie que la maille s’est rétrécie avec le dopage. Or, si le fer substitue le titane, la maille devrait s’agrandir car le rayon ionique de Fe3+ (0,65Å ) est supérieur à celui de Ti4+ (0,61Å) [20], tout en respectant le facteur de tolérance de Goldschmidt. Une explication possible peut être l’autocompensation comme celle envisagée dans le cas de CaTiO3, i.e. le fer se positionne sur les sites du titane et du baryum, selon l’équation :
D’après l’analyse dispersive en énergie, le rapport Ba/Ti est légèrement supérieur à 1, et le pourcentage atomique expérimental en fer est d’environ 3-4%.
On étudie ensuite les propriétés optiques des échantillons de BaTiO3 « mésoporeux » dopés au fer, calcinés à 600°C et 900°C, par des mesures d’absorbance en UV-visible, en comparaison avec BaTiO3 « mésoporeux » non dopé et calciné à 600°C (cf. figure 3.35).
Les mesures d’absorbance de BaTiO3 non dopé et dopé au fer à 600°C et 900°C, montrent premièrement que les échantillons dopés absorbent davantage dans le visible que l’échantillon non dopé. Cela s’explique par la transition du niveau 3d du fer vers la bande de conduction qui est de plus faible énergie que la largeur de la bande interdite. D’autre part, l’échantillon calciné à 900°C absorbe davantage dans le visible que celui calciné à 600°C. Cela peut être lié à une meilleure cristallinité ainsi qu’à la taille des cristallites. En effet, la taille des particules augmente avec la température de calcination, d’après l’allure des pics de diffraction du titanate de baryum, et il a déjà été démontré dans la littérature que la largeur de la bande interdite (Eg) diminue avec l’augmentation de la taille des cristallites [21], selon la loi :
En traçant les courbes de Tauc pour une transition directe et indirecte (cf. figure 3.36), la valeur des largeurs de bandes interdites est obtenue en extrapolant la partie linéaire à (Ahν)n = 0 avec n = 1/2 ou 2 selon si la transition est indirecte ou directe. Les valeurs obtenues sont reportées dans le tableau 3.7. Nous constatons que :
o Comme dans le cas de CaTiO3, BaTiO3 possède deux gaps, un direct et un indirect.
o Le gap indirect est plus faible que le gap direct.
o Les deux band gaps diminuent avec la température de calcination, ce qui était prévisible d’après les courbes d’absorbance, cela a déjà été observé dans la littérature [22].
Enfin, la caractéristique courant-tension est tracée afin de connaître le photocourant généré par le titanate de baryum « mésoporeux » dopé et calciné à deux températures de calcination, 800°C et 900°C.
Le dopage aliovalent de Fe3+ pour substituer Ti4+ devrait induire un comportement de type p si la compensation est effectuée par des lacunes d’oxygène ou des trous. Or, comme on peut le voir sur la figure 3.37, la caractéristique courant-tension des échantillons de titanate de baryum dopé au fer présente un photocourant anodique nettement supérieur au photocourant cathodique. De plus, si on reprend une expression simplifiée du photocourant en fonction du potentiel dans le modèle de Gärtner Butler, lorsque le potentiel tend vers le potentiel de bandes plates, le photocourant tend vers 0. On peut donc estimer approximativement le potentiel de bandes plates à partir de la caractéristique couranttension.
D’après la figure 3.37, le potentiel de bandes plates devrait se situer vers -0,3V vs RHE. Il est négatif et connaissant la largeur de bande interdite, on en conclut que le semiconducteur est encore probablement de type n, ce qui explique que le photocourant soit meilleur aux potentiels anodiques que cathodiques.
Enfin, le photocourant augmente significativement avec la température de calcination. Celle-ci influe sur la cristallinité du matériau et en particulier sur la taille des cristallites. Ces deniers permettent de diminuer la largeur de bande interdite et ainsi plus de photons sont absorbés par l’échantillon calciné à 900°C que par celui calciné à 800°C.
Ainsi, le dopage au fer du titanate de baryum induit une diminution de la largeur de bande interdite, ce qui permet d’absorber des photons à de plus grandes longueurs d’onde.
De plus, contrairement à CaTiO3, la différence de surface spécifique lorsque la température de calcination augmente est largement compensée par l’augmentation de la taille des cristallites et de la diminution de la largeur de bande interdite induite.
Cependant, le comportement des électrodes semblent toujours caractéristique d’un semiconducteur de type n. En effet, le photocourant généré aux potentiels anodiques est nettement supérieur à celui généré aux potentiels cathodiques et le potentiel de bandes plates semble proche de -0,3V vs RHE, ce qui correspond au potentiel de bandes plates de BaTiO3 non dopé. Comme dans le cas de CaTiO3,une explication possible est l’autocompensation avec la substitution du titane ainsi que du baryum par le fer. Cette hypothèse permettrait également de justifier le décalage des pics de diffraction de BaTiO3 vers les grands angles après dopage au fer, synonyme d’une diminution de la maille.

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Co-dopage au fer et à l’azote

Après le dopage au fer, nous allons à présent co-doper BaTiO3 avec du fer et de l’azote. En effet, le dopage au fer a permis de diminuer la largeur de bande interdite. Nous allons donc conserver cette propriété et tenter de changer le comportement du semiconducteur en substituant les atomes d’oxygène par des atomes d’azote.
Expérimentalement, les échantillons ont été synthétisés par voie sol-gel, couplée au dip-coating, puis calcinés à 800°C ou 900°C pour cristalliser le titanate de baryum. Ensuite, un traitement thermique à la même température et pendant la même durée que la calcination a été effectué sous ammoniac afin de doper les échantillons à l’azote.
Nous commençons par analyser les échantillons par diffraction des rayons X, afin deconnaitre l’influence du dopage à l’azote (cf. figure 3.38). Il n’y a pas de différences notables entre les diffractogrammes de titanate de baryum « mésoporeux » dopé au fer avant et après dopage à l’azote. Tous les pics de diffraction caractéristiques de BaTiO3 sont présents sur les diffractogrammes. Aucun décalage de pics n’est remarqué. Or, le rayon ionique de N3- est supérieur à celui de O2-, ainsi en s’insérant dans la maille, cette dernière devrait s’agrandir et un décalage vers les petits angles devraient être observé. L’analyse dispersive en énergie pourra nous permettre de déterminer si l’azote s’est bien inséré dans la structure.
A partir de la relation de Scherrer, nous avons calculé la taille moyenne des cristallites. Celle-ci varie de 14 nm pour BaTiO3 dopé au fer à 15 nm pour BaTiO3 dopé au fer et à l’azote après calcination à 800°C. Cette différence n’est pas vraiment significative. Il est difficile d’en tirer une tendance.
Voyons à présent l’influence du dopage à l’azote sur les propriétés optiques de BaTiO3 dopé au fer. Les spectres d’absorbance UV-visible de la figure 3.42 révèlent que l’absorbance a diminué pour λ < 320 nm après dopage à l’azote, mais est près de sept fois plus importante dans le domaine du visible. Sachant que les orbitale de l’azote sont plus hautes en énergie que celles de l’oxygène, la transition de la bande de valence vers la bande de conduction de BaTiO3 devrait diminuer en énergie avec le dopage à l’azote, c’est ce qui est observé ici.
Les courbes de Tauc sont tracées à partir des spectres d’absorbance précédents pour BaTiO3 dopé au fer et à l’azote (figure 3.43). Nous retrouvons tout d’abord deux band gaps, via l’extrapolation de la partie linéaire des courbes et leur intersection avec l’axe des abscisses. Le plus faible band gap est indirect et le plus grand est direct. La mesure du band gap direct est difficile à obtenir, mais il semble qu’il soit tout de même plus faible que pour BaTiO3 dopé au fer (qui était déjà plus faible que pour BaTiO3 non dopé).
Nous évaluons enfin les propriétés électrochimiques du titanate de baryum co-dopé au fer et à l’azote en traçant sa caractéristique courant–tension. Sur la figure 3.44, on voit immédiatement que l’allure générale de la courbe est sensiblement différente de celles obtenues pour BaTiO3 non dopé ou dopé seulement au fer. En effet, d’une part, le photocourant cathodique est bien plus important et même supérieur à 0V vs RHE (-6,6 μA/cm2) qu’à 1,23V vs RHE (5,5 μA/cm2). Ce qui laisse suggérer que la nature du semiconducteur a bien été modifiée.
Nous cherchons à présent à connaître réellement le potentiel de bandes plates ainsique la nature du semiconducteur, en traçant les courbes de Mott-Schottky (cf. figure 3.45).
Tout d’abord, la pente de la partie linéaire de la courbe de BaTiO3 dopé au fer et à l’azote est négative, ce qui indique que le semiconducteur est de type p. Nous sommes donc bien parvenus à changer la nature du semiconducteur grâce au dopage. En extrapolant la partie linéaire à 1/C2 = 0, on peut déterminer la valeur du potentiel de bandes plates à kT/q près. Pour le titanate de baryum non dopé, on avait obtenu un potentiel de bandes plates proche de -0,4V vs RHE, ce qui correspond bien à un semiconducteur de type n, avec le niveau de Fermi proche de la bande de conduction. A présent, le potentiel de bandes plates est d’environ 1,9V vs RHE pour BaTiO3 dopé au fer et àl’azote. Avec une largeur de bande interdite inférieure à 3 eV et sachant que la position de la bande de conduction n’a pas changé, on en conclut que la bande de valence est nettement plus haute en énergie qu’avant dopage.
De plus, la quantité de dopants calculée, à partir de la pente de la partie linéaire de la courbe, est d’environ 1010 cm-3. Cette valeur est relativement faible par rapport à celles rencontrées dans la littérature de l’ordre de 1018-1021 cm-3 [19].

Etude du titanate de strontium

La dernière partie de ce chapitre porte sur l’étude d’une dernière pérovskite : SrTiO3, choisie comme sujet d’étude, tout comme les deux précédentes pérovskites, d’après l’étude de Castelli. Nous allons aborder la synthèse du titanate de strontium car il s’est avéré que c’était la pérovskite la plus difficile à synthétiser par voie sol-gel. L’influence du dopage au fer, à l’azote et du co-dopage au fer et à l’azote seront abordées également dans cette partie.

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