Mission STEREO
Présentation
STEREO (Solar TErrestrial RElationship Obsevatory) est la troisième mission du programme de la NASA 1 des sondes spatiales dédiées à l’étude des relations Soleil-Terre. Comme son nom l’indique, elle est plus spécifiquement conçue pour l’étude stéréoscopique multi-longueurs d’onde de l’activité solaire, et de ses conséquences sur l’environnement terrestre. A cet effet, elle est constituée de deux sondes nommées ’Ahead’ (A) et ’Behind’ (B), construites de manière quasi similaires, et embarquant quatre expériences scientifiques : SECCHI 2 , IMPACT 3 , PLASTIC 4 , et STEREO/Waves (S/Waves). Après un lancement réussi le 26 octobre 2006 depuis Cap Canaveral en Floride, les deux sondes ont été correctement placées sur leur orbite respective en utilisant l’assistance gravitationnelle de la lune. Les deux sondes occupent des orbites proches de 1 UA autour du Soleil. Cependant les sondes A et B sont respectivement, légèrement plus proche et plus éloignée du Soleil que la Terre. De cette manière la sonde A, plus rapide, précède la Terre sur son orbite, alors que la sonde B, plus lente, la suit. Et l’angle Terre-Soleil-sonde A/B augmente ainsi à raison de 22◦ par an. Cette configuration offre pour la première fois la possibilité de reconstituer la structure à 3 dimensions des phénomènes observés, ainsi que de suivre la progression dans l’héliosphère des manifestations éruptives (éjection de masse coronale, faisceaux de particules énergétiques.) En particulier, elle permet également d’étudier la directivité des sursauts radio solaires dans des conditions optimales.
Etude de la directivité des sursauts de type III sur S/Waves
L’étude présentée dans le chapitre 3 nous a permis de déterminer le diagramme d’émission moyen des types III en dessous de ∼ 1 MHz, à partir des observations radio des sondes Wind et Ulysse. Les résultats obtenus nous laissent raisonnablement penser que le décalage vers l’est devrait en tout logique tendre vers une valeur asymptotique proche de 0◦ lorsque la distance au Soleil diminue. De même, l’ouverture angulaire du diagramme devrait diminuer lorsque la distance au Soleil diminue.
L’utilisation conjointe des données radio des sondes STEREO, ainsi que de la sonde Wind nous offre à présent l’opportunité de vérifier ces variations hypothétiques à plus haute fréquence. Nous avons donc réalisé une première estimation du diagramme d’émission sur la gamme de fréquences [∼ 0.2 − 10 MHz] en appliquant la méthode décrite dans le chapitre 3.
Observations et analyse des données
Données radio
Les données radio utilisées sur STEREO sont fournies par le récepteur haute fréquence (HFR) de S/Waves qui opère sur une bande de fréquences de [0.125 − 16.025 MHz] comportant 319 canaux linéairement espacés. L’étalonnage effectué au préalable nous permet d’obtenir le flux total radio en W/m2/Hz reçu par les 3 antennes électriques de 6 m de longueur disposées en tétraèdre à l’arrière de chaque sonde (l’étalonnage en flux de ce récepteur est décrit en détail à l’annexe B).
Les deux récepteurs RAD1 et RAD2 de l’expérience Waves embarquée à bord de la sonde Wind couvrent, quant à eux, la gamme de fréquence [0.02 − 13.825 MHz]. En particulier, le récepteur hautes fréquences RAD2 balaye une liste de 256 canaux répartis sur la bande de fréquences [1.075 − 13.825 MHz], et communs au récepteur HFR.
Ces deux récepteurs sont correctement étalonnés.
Observations
La sélection des sursauts de type III couvre la période comprise entre janvier 2007 et avril 2008 qui correspond à la période de transition du Soleil du cycle solaire 23 au cycle solaire 24. L’activité solaire est minimale durant cette phase, et le nombre des sursauts solaires observé l’est également. Cependant paradoxalement, le faible nombre de régions actives observées en minimum d’activité est un avantage. Il facilite en effet l’identification des sites d’accélération des faisceaux d’électrons des types III, indispensable pour déterminer la trajectoire de la source radio (comme vu dans le chapitre 3). Ainsi, sur les ∼ 200 sursauts de type III observés simultanément par les sondes STEREO-A, STEREO-B, et Wind durant cette période, la quasi-totalité a pu être associée avec une région active visible sur le Soleil. Le traitement des données (soustraction du bruit, détermination des temps de début et de fin pour chaque fréquence, etc.) a ensuite été réalisé de la même manière que pour les données radio de Wind et Ulysse (voir chapitre 3) ; nous ne reviendrons pas sur ce point.
Méthode
La méthode de détermination du diagramme d’émission présentée dans le chapitre 3 est également applicable aux observations réalisées conjointement par STEREO A et B, mais également par Wind. Celle-ci nécessite toutefois de réaliser un ajustement de courbe sur un nombre statistiquement significatif de points de mesure. L’utilisation des trois jeux de données radio va donc permettre de tenter de compenser la faible statistique (comparée au millier de sursauts observés sur Wind et Ulysse entre 1995 et 2005.) De plus le nombre important de canaux de fréquences disponibles va également être utilisé afin de diminuer les erreurs statistiques. Pour ce faire, on regroupe les canaux par intervalles de fréquence suffisamment larges pour atteindre un nombre de points statistiquement conséquent. La position des sources a également été estimée à partir d’un modèle moyen. On a toutefois ici utilisé un profil radial de densité tenant mieux compte de la décroissance 75 en ≈ r −6 mesurée à basse altitude dans la couronne (c.-à-d. r . 6R⊙ pour f & 1 MHz). Ce profil est défini par (Leblanc et al. 1998),
Résultats
Paramètres du diagramme
La figure (4.2) représente les valeurs obtenues pour les paramètres du diagramme en fonction de la fréquence après ajustement. La figure (4.2a) montre plus spécifiquement l’évolution du décalage ϕ0 résultant des observations réalisées par STEREO-A, STEREO-B, et Wind (losanges et courbe rouge). Pour comparaison, les croix noires et la courbe bleue présentent les valeurs de ϕ0 issues de l’étude réalisée en dessous de 1 MHz par Wind et Ulysse (chapitre 3). L’évolution suivie par la courbe rouge indique clairement un décalage vers l’est de l’axe du diagramme. Ce dernier s’écarte significativement de la direction du champ magnétique local (ϕ = 0 ◦ ) pour f . 2000 − 3000 kHz. Au dessus de ces fréquences, il s’aligne à peu près avec cette 76 Chapitre 4. Etude du spectre radio en dessous de 10 MHz même direction. D’un point de vue qualitatif, ces nouvelles observations sont donc en bon accord avec les résultats obtenus avec Wind et Ulysse. On constate cependant une différence de l’ordre de ∼ 10◦ entre les valeurs trouvées par les deux études. Nous reviendrons sur ce point à la section 4.4.
La figure (4.2b) montre l’évolution en fonction de la fréquence, de l’ouverture angulaire ∆ϕ2 du diagramme, calculée à l’aide de l’équation (3.12) à partir des valeurs de l’amplitude du cosinus a. Les losanges et la courbe rouge correspondent aux valeurs de ∆ϕ2 obtenues par ajustement avec les données STEREO-A, STEREO-B, et Wind. Les croix noires et la courbe bleue indiquent les valeurs de ∆ϕ2 issues de l’ajustement des données Wind et Ulysse (chapitre 3). On observe une légère diminution de l’ouverture du diagramme vers les hautes fréquences. De plus contrairement au paramètre ϕ0, l’évolution des valeurs prises par ∆ϕ2 concorde bien entre les deux études. Cette observation témoigne très probablement de la stabilité de l’ouverture du diagramme d’un sursaut à l’autre.
Ajustement des paramètres
Malgré les différences importantes entre les deux échantillons de données, nous avons cherché à estimer les variations en loi de puissance des paramètres du diagramme sur la gamme de fréquences [0.01 − 10 MHz]. Ces estimations vont nous permettre par la suite de calculer le spectre radio moyen pour l’ensemble des fréquences accessibles. Pour cela nous avons ajusté les paramètres ϕ0, ∆ϕ2, ainsi que l’angle solide Ω du rayonnement radio (déduit du diagramme à l’aide de l’équation (2.8) décrite à la section 2.2.1) avec des fonctions empiriques définies par,
Spectre d’émission radio à basse fréquence
Nous allons dans cette partie, nous intéresser au spectre d’émission radio sur la gamme de fréquence [0.01 − 10 MHz]. Nous possédons en effet un nombre de sursauts suffisamment important pour avoir effectuer une étude statistique significative.
De plus, nous pouvons à présent correctement soustraire les effets de distance et de directivité. Si la directivité des sursauts peut entraîner une variation d’intensité supérieure à 2 ordres de grandeur pour un sursaut observé depuis une direction éloignée de celle du maximum d’émission, on a toutefois pu constater qu’au final, cette propriété ne modifie pas significativement le spectre radio moyen : si l’on soustrait les effets de directivité, la puissance radio moyenne mesurée n’est réduite que d’un facteur 5 (moyenne sur l’ensemble des sursauts et pour toutes les fréquences). Ce résultat n’est toutefois pas surprenant aux vues des propriétés du diagramme obtenues. On notera également que l’amortissement des ondes radio par collision dans le plasma interplanétaire est faible (Evans et al. 1973). On peut donc raisonnablement considérer que l’énergie émise par la source se conserve le long de la trajectoire 5.