Etude du polymorphisme du récepteur Toll-like 4 dans le syndrome des anti-phospholipides

Syndrome des anti-phospholipides

Le syndrome des anti-phospholipides (SAPL) est une maladie auto-immune systémique définie par l’association de manifestations cliniques thrombotiques et/ou obstétricales récurrentes et la présence d’anticorps anti-phospholipides (aPL) persistants à plus de 12 semaines à titre significatif. La maladie peut être isolée (SAPL primaire) ou associée à une maladie auto-immune (SAPL secondaire). La présence isolée d’aPL en l’absence d’évènement thrombotique ou obstétrical ne permet pas de définir un SAPL. Nous le dénommerons dans notre travail le « SAPL biologique ». La prévalence du SAPL dans la population générale n’est pas connue. Les marqueurs biologiques anti-phospholipides sont retrouvés dans 20 % des cas d’accidents vasculaires cérébraux avant 50 ans et chez 24% des cas de thrombose veineuse. Les fausses couches répétées représentent 1% de la population générale, et des anti-phospholipides sont retrouvés dans 10 à 15% des bilans de fausses couches à répétition .
Critères diagnostiques : Les atteintes du SAPL ont été initialement décrites au cours du lupus érythémateux systématique. Puis en 1983, Hughes et Harris décrivent le syndrome des anti-cardiolipines, ou syndrome de Hughes, qui peut associer thromboses veineuses ou artérielles, fausses couches répétées, thrombopénie et évènements neurologiques en présence d’un anticoagulant lupique. Les critères préliminaires de classification du SAPL date de 1998 lors du 8ème symposium international sur les anticorps aPL à Sapporo et repose sur l’association d’au moins un critère clinique (thromboses vasculaires et/ou les épisodes obstétricaux) et d’au moins un critère biologique . Ces critères diagnostiques ont été révisés au congrès international de Sydney en 2006 . La persistance des marqueurs biologiques a été portée à 12 semaines au lieu de 6 semaines afin d’en améliorer la spécificité. Les anticorps anti B2Gp1 ont été ajoutés aux critères biologiques avec l’anticoagulant circulant lupique (LA) et les anticorps anti-cardiolipine (aCL). Et seuls les taux d’aPL supérieurs à 40 unités GPL ou MPL ou au 99e percentile seront pris en compte dans le diagnostic.

Evènements cliniques et anticorps anti-phospholipides

La présence d’anticoagulant circulant est associée au risque le plus thrombogène (OR 4,1 à 16,2 en fonction des études), suivi de l’anti-cardiolipine persistant à taux moyens ou élevés (OR de 2,6 à 3,2 en fonction des études).
L’association anticoagulant circulant, anti-cardiolipine et anti-B2Gp1, qui définit la triple positivité, est également associée à un risque thrombotique et cardiovasculaire plus élevé .
Les anti-cardiolipine persistants à taux moyens ou élevés, c’est à dire supérieur à 40 U ou supérieur au 99e percentile, sont particulièrement associés au risque thrombotique. L’isotype IgG présente un risque de thrombose plus élevé que l’isotype IgM . Les anti-PE semblent présenter un intérêt en cas de « SAPL séronégatif » .
Rodriguez-Garcia JL et al, proposaient de définir le « SAPL » séronégatif sur la présence d’un critère clinique majeur de SAPL, et au moins deux critères mineurs parmi : livedo reticularis, phénomène de Raynaud, migraines, troubles cognitifs, chorée, autre manifestation neurologique, présence d’anomalies de la substance blanche à l’IRM, valvulopathie mitrale ou aortique, des antécédents d’au moins 2 fausses couches spontanées avant 10 SA ou un taux de plaquettes inférieur à 100 000/mm3 . Le manque de standardisation limite l’usage des anti-PE et des études prospectives restent nécessaires pour analyser le risque thrombotique et obstétrical avec anti-PE comparés aux patients SAPL.
Les manifestations obstétricales ont également été étudiées. Les anticorps anti-phospholipides augmentent le risque de pré-éclampsie (RR 9,7 versus 5,9 sans Apl ) (OR à 2,9 dans une autre étude) . L’anticoagulant circulant est associé significativement aux fausses couches spontanées tardives (OR 7,8), ainsi que l’anti-cardiolipine (OR 3,6) . La triple positivité est aussi associée aux pertes fœtales (OR 4,1).

Prise en charge thérapeutique du SAPL

Prévention primaire : Les recommandations de 2011 recommandent une thromboprophylaxie en prévention primaire des situations à risque comme l’immobilisation, la chirurgie, et la grossesse . En présence d’anticorps anti-phospholipides sans expression clinique, les études sont peu nombreuses et n’ont pas mis en évidence de rôle protecteur significatif d’un traitement systématique par aspirine, même si une tendance existe .
En cas de lupus associé à des anticoagulants circulants et/ou des anticorps anti-cardiolipine persistants à taux significatifs, sans expression clinique de SAPL, les études sont en faveur d’un traitement préventif par aspirine , après évaluation des facteurs de risques cardiovasculaires et du risque hémorragique. L’action anti thrombotique de l’hydroxychloroquine a été rapportée chez des patients lupiques, mais aucun essai randomisé n’a prouvé son effet anti thrombotique et hypocholestérolémiant .
Prévention secondaire thrombotique : La prise en charge thérapeutique a pour but de prévenir les thromboses. En l’absence de traitement, le risque de récidive est important, certaines atteintes pouvant menacer le pronostic vital. Le traitement des manifestations thrombotiques du SAPL repose sur l’utilisation d’un traitement anticoagulant au long cours de type anti-vitamine K (AVK).

Généralités sur l’immunité innée

L’immunité repose sur les réponses immunitaires innées et adaptatives. L’immunité innée est caractérisée par une réponse moins spécifique mais plus rapide et transitoire. Les principaux acteurs de l’immunité innée sont les macrophages, les cellules NK, les cellules dendritiques, les polynucléaires neutrophiles, les cellules épithéliales et les protéines du complément. Sur ces cellules se trouvent les récepteurs « pattern recognition receptors » (PRR).
Les PRR reconnaissent des motifs moléculaires conservés communs à des groupes de pathogènes, ce sont les « pathogen associated molecular pattern » (PAMP). Parmi les PRR, on retrouve les « toll-like receptors » (TLR), les « nucleotide-binding oligomerization domain NOD » (NLR), les « Retinoic acide inductible gene-I-like RNA helicase » (RLR) et les lectines. Les PRR activent les cellules qui produisent des cytokines pro-inflammatoires, des chimiokines ou des molécules de co-stimulation, participant à la réponse inflammatoire. Cela augmente la capacité des cellules présentatrices d’antigènes, favorise le recrutement d’autres cellules de l’immunité innée et permet une réponse locale, avec les cellules NK via leurs perforines, les polynucléaires neutrophiles via leur réaction oxydative et les macrophages via leur phagocytose des PNN apoptotiques et leur production de cytokines.

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Stimulation de l’immunité adaptative

La reconnaissance du ligand par les TLR des cellules présentatrices d’antigènes leur permet une première réponse effectrice locale et de stimuler l’immunité adaptative. La maturation des cellules dendritiques est marquée par des modifications phénotypiques et fonctionnelles concomitantes de leur migration des tissus vers les organes lymphoïdes. Les cellules dendritiques matures permettent d’induire une réponse des lymphocytes T naïfs vis-à-vis d’un antigène soluble, elles font office « d’adjuvants naturels » .
La maturation augmente le nombre de molécules de complexe majeur d’histocompatibilité (CMH) de classe II membranaires, augmente l’expression de molécules de co-stimulation et produit des cytokines et chémokines telles que l’IL12, l’IFN, le TNF et d’autres interleukines IL1, IL6, IL10. Les cellules dendritiques myéloïdes de la peau et des organes et les cellules dendritiques plasmacytoïdes ne secrètent pas les mêmes cytokines. La migration vers les organes lymphoïdes est sous la dépendance de molécules chimiotactiques et de leur récepteur.
Une fois dans la zone T des organes lymphoïdes, l’activation des cellules T naïves nécessite un 1er signal qui correspond à la reconnaissance du complexe CMH/peptide par le récepteur TCR des lymphocytes T. Un second signal de co-stimulation est nécessaire pour former la « synapse immunologique » avec les CD80 et CD86 des cellules dendritiques et la molécule CD28 des lymphocytes T ; et CD40 des cellules dendritiques avec CD40L des lymphocytes T. L’activation du lymphocytes T renvoie des signaux d’activation aux cellules dendritiques et induit l’expression de molécules de co-stimulation et de cytokines comme l’IL12 et l’IFN qui permettent d’orienter la différenciation des lymphocytes T helper en TH1 ou TH2 et amplifier la réponse des lymphocytes cytotoxiques T CD8 .
Les TLR exprimés par les lymphocytes B agissent comme sur les cellules présentatrices d’antigène, en augmentant la sécrétion de cytokines . Les TLR vont également entrainer une augmentation de production des immunoglobulines, notamment les IgM . Ainsi, de par leurs fonctions multiples, les TLR sont fréquemment impliqués au cours des maladies auto-immunes.

Table des matières

I. RATIONNEL DE L’ETUDE 
II. INTRODUCTION 
1. SYNDROME DES ANTI-PHOSPHOLIPIDES 
1) Généralités
2) Critères diagnostiques
3) Expression clinique
4) Physiopathologie
a. Principaux mécanismes
b. Les anticorps anti-phospholipides
c. Les anticorps anti-cardiolipine
d. Les anticorps anti-β2GPI
e. Les anticorps anti-prothrombine
f. Les anticorps anti-phosphatidyléthanolamine
g. Activation cellulaire
h. Dysfonction endothéliale
i. Trouble de l’hémostase
5) Evènements cliniques et anticorps anti-phospholipides
6) Prise en charge thérapeutique du SAPL
a. Prévention primaire
b. Prévention secondaire thrombotique
c. Prévention secondaire obstétricale
2. RECEPTEURS TOLL-LIKE 
1) Généralités sur l’immunité innée
2) Définition et structure des TLR
3) Transduction du signal des TLR
4) Stimulation de l’immunité adaptative
5) Polymorphisme des TLR
6) TLR et maladies auto immunes
7) TLR4 et SAPL
III. PATIENTS ET METHODES 
1. PATIENTS 
1) Données cliniques
2) Données biologiques
2. TEMOINS 
3. ETUDE DU POLYMORPHISME DU TLR4 
1) Extraction d’ADN
2) Identification des polymorphismes
a) Polymorphismes rs4986790 et rs4986791 de TLR4
b) RT-PCR
4. ANALYSES STATISTIQUES 
IV. RESULTATS 
1. PATIENTS 
1) Inclusion
2) Données cliniques
3) Données biologiques
2. TEMOINS 
3. ETUDE DES POLYMORPHISMES RS4986790 ET RS498679 DU TLR4 
1) Déséquilibre de liaison complet pour les deux polymorphismes
2) Etude du polymorphisme du SNP rs4986790 du TLR4 chez les patients atteints de SAPL versus groupe témoin
3) Etude du polymorphisme rs4986790 du TLR4 des patients atteints de SAPL et des patients porteurs de « SAPL biologique »
4) Etude du polymorphisme du SNP rs4986790 du TLR4 selon le profil phénotypique des patients atteints de SAPL
5) Etude du polymorphisme du SNP rs4986790 du TLR4 chez les SAPL obstétricaux
6) Etude du polymorphisme du SNP rs4986790 du TLR4 chez les SAPL thrombotiques
7) Etude du polymorphisme du SNP rs4986790 du TLR4 et les profils biologiques des patients SAPL
V. DISCUSSION 
VI. CONCLUSION

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