Étude du mouvement de préhension

Ostéologie du membre supérieur

Nous rappelons ici l’organisation squelettique du membre supérieur et de la main.

La ceinture scapulaire

Le membre supérieur est rattaché au buste par l’intermédiaire de la ceinture scapulaire (Fig. II.2) qui se compose de la scapula et de la clavicule pour former l’articulation de l’épaule (Brizon & Castaing, 1988).
La scapula est un os plat de forme triangulaire situé au niveau postérieur du thorax. Elle s’articule au niveau distal avec la clavicule et la partie proximale de l’humérus. La scapula se compose de l’épine scapulaire, de l’acromion, de la cavité glénoïdale, les tubercules supra- et infra-glénoïdaux, de l’incisure scapulaire et du processus coracoïde.
La clavicule est un os allongé dont la forme globale est celle d’un « S » inversé qui ne présente qu’une épiphyse située au niveau de l’articulation sterno-claviculaire. Elle possède deux extrémités (dont l’épiphyse) et une excroissance, le tubercule deltoïdien, qui correspond à l’insertion du muscle deltoïde.

Le bras

Le bras est composé d’un seul os, l’humérus (Fig. II.2). Il s’agit d’un os long, pair et symétrique qui s’articule au niveau proximal avec la cavité glénoïdale de la scapula et au niveau distal avec les os de l’avant bras pour former l’articulation du coude. La partie proximale de l’humérus se compose de la tête humérale et du col huméral. La partie distale de l’humérus forme la palette humérale présentant ainsi des surfaces articulaires au niveau de la trochlée et du condyle.

L’avant-bras

L’avant-bras est formé par deux os, le radius et l’ulna qui sont reliés entre eux par une membrane interosseuse (Fig. II.2).
Le radius est un os long qui forme la partie externe de l’avant bras. Son extrémité distale est volumineuse et légèrement aplatie d´avant en arrière. Sa face externe se prolonge par l´apophyse styloïde radiale. Sa face inférieure présente deux surfaces articulaires: une surface externe pour le scaphoïde et une surface interne pour le semi-lunaire. Sa face interne présente une surface articulaire pour la tête de l’ulna.

La main

Le squelette osseux de la main se compose de 27 os rassemblés en trois groupes: le carpe (8 os), les métacarpes (au nombre de 5) et les phalanges (au nombre de 14) qui forment les arches de la paume et les doigts (Fig. II.3).

Le carpe

Le carpe est formé par 8 petits os courts disposés en deux rangées. Du côté ulnaire vers le côté radial, le Pisiforme, le Triquetrum (ou le Pyramidal), le Lunatum (ou le Naviculaire) et le Scaphoïde composent la rangée proximale alors que l’Hamatum (ou Os Crochu), le Capitatum (ou Grand Os), le Trapézoïde et le Trapèze composent la rangée distale.

Les métacarpes

Au nombre de cinq, les métacarpes sont des os longs qui constituent le squelette de la paume de la main. Ils sont numérotés de I à V à partir du métacarpe du pouce (doigt I). Le premier métacarpe est le plus court mais le plus volumineux. Le métacarpe de l’index est le plus long, puis la taille des trois derniers décroisse progressivement. Chaque métacarpe comporte trois parties: une base de forme cuboïde à son extrémité proximale, un corps de forme prismatique et une tête de forme sphérique à son extrémité distale.

Les phalanges

Formant les doigts de la main, on compte 14 phalanges réparties de la façon suivante : 5 phalanges proximales (P1), 4 phalanges moyennes ou phalangines (P2) pour les quatre derniers doigts et 5 phalanges distales ou phalangettes (P3). Leur taille relative décroît progressivement des phalanges proximales aux phalanges distales. Tout comme les métacarpes, les phalanges sont des os longs possédant chacun une base, un corps et une tête.

Les sésamoïdes

Les sésamoïdes sont de petits os circulaires ou ovales inconstants. Ils se situent principalement à l’articulation métacarpo-phalangienne du pouce et parfois au niveau des articulations interphalangiennes du pouce et métacarpo-phalangiennes des 2ème et 5ème doigts.

Arthrologie du membre supérieur

Le type d’articulation détermine les possibilités de mouvement de chaque segment les uns par rapport aux autres. Ainsi, les articulations du membre supérieur sont classées en fonction de la forme de leurs surfaces articulaires qui détermine leur nombre de degrés de liberté (ddl) (Kamina, 1990) (Fig. II.4). Ce sont des articulations de type « diarthroses » caractérisées par leur mobilité, la présence de surfaces articulaires, l’existence d’une capsule articulaire et d’une synoviale qui en tapisse la face interne : (Vanel, 1996):
Les diarthroses à 3 ddl sont les articulations sphéroïdes ou énarthroses. Elles autorisent lesmouvements dans les 3 plans anatomiques comme l’articulation scapulo-humérale. · Les diarthroses à 2 ddl sont de trois types : les articulations condyliennes dites également ovoïdes ou ellipsoïdes, comme l’articulation radio-carpienne ou les articulations métacarpo-phalangiennes, les articulations à emboîtement réciproque dites également articulations en selle comme l’articulation carpo métacarpienne du pouce et les arthrodies dites également planes ou à glissements comme l’articulation acromio-claviculaire. · Les diarthroses mobiles dans 1 plan (1ddl) sont de deux types : les trochoïdes dites également à pivot, comme les articulations radio-ulnaires proximales et distales, lestrochléennes dites également en charnière, comme l’articulation huméro-ulnaire.

L’épaule

L’épaule permet la jonction du tronc avec le membre supérieur au niveau du bras. Elle comporte plusieurs articulations qui concourent à en faire l’articulation « la plus mobile du corps humain » (Kapandji, 1982). L’épaule comporte trois articulations et deux plans de glissement (aussi appelées fausses articulations). L’articulation cleïdo-thoracique ou sternocosto- claviculaire est une articulation synoviale en selle qui permet donc deux axes de rotations (frontal, sagittal). L’articulation cleïdo-scapulaire ou acromio-claviculaire est une articulation de type arthrodie. Elle ne possède donc aucun axe de rotation bien qu’un faible degré de mouvement existe. Enfin, l’articulation omo-serrato-thoracique ou scapulo-thoracique, appelée syssarcose ou synarthrose, articule la scapula sur le grill costal par l’intermédiaire d’un double plan de glissement. Enfin, l’articulation scapulo-humérale ou gléno-humérale unit la tête humérale à la cavité glénoïde de la scapula. Il s’agit d’une articulation de type sphéroïde qui présente donc 3 ddl (Tabl. II.1) (Vanel, 1996). La participation des différentes articulations est de 50 % pour l’articulation scapulo-humérale 40 % pour l’acromio-claviculaire et 10 % pour la sterno-costoclaviculaire (Fick, 1910).

La main

La main permet une grande complexité de mouvement et ce, en particulier grâce à la disposition du pouce qui peut s’opposer à tous les autres doigts (Kapandji, 1982). Les articulations métacarpo-phalangiennes (MCP) sont des articulations de type ovoïde (2 ddl) qui unissent la tête des métacarpes avec la base des phalanges proximales de chaque doigts. Les articulations interphalangiennes sont des articulations trochléennes (1 ddl) qui unissent les phalanges proximales, moyennes et distales entre elles (une pour le pouce et deux pour lesautres doigts) (Tabl. II.2).

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Description des postures manuelles

Les diverses articulations de la main permettent une multitude de configurations articulaires qui forment les différentes postures manuelles. D’après Massion, ces dernières se caractérisent par la position relative des doigts les uns par rapport aux autres et sont étroitement liées au contexte de la tâche à effectuer (Massion, 1997).
A des fins médicales, cliniques ou industrielles, des auteurs ont établi des classifications afin de synthétiser les capacités de la main en termes de fonctionnalités (ou de tâches motrices) (MacKenzie & Iberall, 1994). D’une manière générale, ces classifications sont obtenues en ramenant l’ensemble des postures de la main à un nombre fini de prises-clé ou prototypiques.
En effet, il a été montré qu’il existe un faible nombre de postures manuelles pour saisir différents objet (Mason et al., 2001). Selon les études, les divers paramètres pris en compte dans l’évaluation de la saisie sont la forme de l’objet, la forme de la main, le type de saisie, les surfaces de contact, le nombre de doigts utilisés (Rezzoug, 2000; Bendahan, 2006; Carenzi, 2006) (Tabl. II.5).
Dans ces travaux, Schlesinger propose une taxonomie des postures manuelles afin d’évaluer l’efficacité de prothèses de la main des blessés de la première guerre mondiale (Schlesinger, 1919). Il définit ainsi six postures-clés à partir de la forme de l’objet (cylindrique, sphérique), des surfaces de contact (terminale, latérale et palmaire) et de la forme de la main (crochet) (Fig. II.5). Une approche alternative est développée par Slocum pour évaluer la perte fonctionnelle de l’utilisation de la main (Slocum & Pratt, 1946). Trois postures manuelles sont alors définies telles que la saisie où les doigts sont en opposition avec le pouce et la face palmaire de la main, l’opposition pulpaire du pouce et des doigts et la main en forme de crochet.

Description biomécanique du mouvement de préhension

Selon Woodworth, les mouvements intentionnels de préhension se composent d’une phase « d’approche » durant laquelle le membre supérieur est rapidement porté vers l’objet et d’une phase  » d’ajustement » qui permet la saisie avec précision (Woodworth, 1899). Depuis, ces phases ont été spécifiquement étudiées dans de nombreux travaux qui se sontbasés sur la cinématique du poignet pour mettre en évidence les caractéristiques du mouvement de préhension et ainsi mieux comprendre les processus mis en jeu par le Système Nerveux Central (SNC) dans la programmation et la réalisation du geste. Pour cela, des paramètres spatio-temporels comme l’amplitude et le temps d’apparition de la vitesse du poignet (Jeannerod, 1984; Bootsma et al., 1994; Wing et al., 1996; Zaal et al., 1998) ou de l’ouverture de la pince manuelle (Jeannerod, 1981; Bootsma et al., 1994; Zaal et al., 1998; Hu et al., 2005) ont été testés à travers différentes conditions de saisie. Ainsi, Jeannerod décrit le mouvement de préhension comme la coordination entre la phase de transport et la phase desaisie (Jeannerod, 1981).

Phase de transport

La phase de « transport » permet le déplacement balistique de la main en direction de l’objet à saisir. Elle est constituée d’une première composante rapide qui projette le membre vers l’objet et d’une composante lente qui permet des réajustements de trajectoire (Jeannerod, 1981; Morasso, 1981; Abend et al., 1982; Jeannerod, 1984; Hogan, 1985). Le profil de la vitesse tangentielle du poignet est dit en « cloche » avec des phases d’accélération et de décélération qui sont approximativement de même durée (Fig. II.8).

Phase de saisie

La composante de « saisie » se caractérise par l’ouverture et la fermeture des doigts afin de permettre un contact adéquat avec l’objet. L’amplitude maximale de la pince manuelle estcaractéristiquement supérieure et proportionnelle à la taille de l’objet à saisir (Jeannerod, 1981; Bootsma et al., 1994; Zaal et al., 1998; Hu et al., 2005). Le temps d’apparition de l’ouverture maximale de la pince constitue un invariant et se situe approximativement entre 70 et 80 % de la durée totale de mouvement, soit à environ 100-200 ms après l’occurrence du pic de vitesse(Jeannerod, 1984; Bootsma et al., 1994; Wing et al., 1996; Zaal et al., 1998) (Fig. II.8). De plus, l’extension des doigts et le début d’ouverture de la pince démarrent simultanément avec le début de la phase de transport (Arbib, 1981; Arbib et al., 1985; Gentilucci et al., 1991; Gentilucci et al., 1992).

Contrôle du mouvement de préhension

Relation entre les deux composantes

Plusieurs auteurs postulent pour l’existence de canaux visuo-moteurs qui contrôleraient les deux phases du mouvement de façon indépendante (Arbib, 1981; Jeannerod, 1981, 1984). Le premier canal serait impliqué dans la programmation des mouvements proximaux du bras (la « composante de transport »). Ce « canal de transport » dépendrait des propriétés extrinsèques de l’objet alors que le second serait responsable de la sélection du type de saisie en fonction de la taille, la forme et l’orientation de l’objet pour l’organisation de l’exécution des mouvements des doigts (la « composante de saisie »). Ce « canal de manipulation » dépendrait donc, quant à lui, des propriétés intrinsèques de l’objet. Ainsi, une modification des propriétés extrinsèquesde l’objet modifierait donc la phase de « transport » mais n’influencerait pas la saisie. Inversement, un changement des paramètres intrinsèques ne devrait pas affecter la phase de « transport » mais seulement la saisie. L’hypothèse des canaux visuo-moteurs impliqués dans le contrôle des phases du mouvement de préhension a été testée à travers différentes études qui font varier les propriétés intrinsèques et extrinsèques de l’objet (Jeannerod, 1984). Ainsi, si le mouvement implique deux voies indépendantes, un changement portant sur l’une des voies ne devrait pas affecter l’autre (Gentilucci et al., 1992; Castiello & Bennett, 1993; Chieffi & Gentilucci, 1993; Bootsma et al., 1994; Paulignan & Jeannerod, 1996; Kudoh et al., 1997; Zaal et al., 1998).

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